Intervention de Philippe Martin

Réunion du 25 février 2014 à 21h30
Transition énergétique — Adoption d'une proposition de résolution

Philippe Martin, ministre :

Notre décision est industrielle, économique et énergétique ; elle est à la fois rationnelle et responsable.

Elle est indispensable pour garantir dans la durée notre sécurité d’approvisionnement et pour éviter à nos successeurs de se trouver face à un mur d’investissements. En vérité, nous commettrions une faute en agissant différemment, car il serait irrationnel et irresponsable de laisser aux générations futures le fardeau de ces investissements.

De fait, la mise à jour de nos centrales, dont la plupart, vous le savez, ont été construites au cours de la même décennie, nécessitera des investissements extrêmement lourds, à supposer même que l’Autorité de sûreté nucléaire leur donne son aval.

En se tournant résolument vers l’avenir, en étalant dans le temps les investissements nécessaires et en choisissant d’encourager le recours à une part croissante d’énergies renouvelables, nous faisons le choix de la responsabilité économique et de la sécurité d’approvisionnement.

Du reste, monsieur Bizet, ce rééquilibrage n’est pas contradictoire avec la volonté du Gouvernement de maintenir l’excellence de la filière nucléaire, notamment en achevant l’EPR de Flamanville ou en soutenant nos industriels à l’exportation. Lorsque j’accompagne le Président de la République ou le Premier ministre à l’étranger, nous parlons parfois du nucléaire avec nos interlocuteurs, par exemple turcs ou britanniques. Or il arrive que ceux-ci voient dans l’excellence française en matière de démantèlement et de stockage des déchets un atout de nos entreprises. En effet, il est très important pour ces pays de savoir non seulement qu’une centrale sera construite et exploitée, mais aussi que les déchets seront stockés et le site démantelé dans de bonnes conditions.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cette stratégie s’inscrit dans une logique de progrès continu sur le plan de la sûreté nucléaire ; à cet égard, nos réacteurs ont tous subi les stress tests, en même temps que l’Autorité de sûreté nucléaire intégrait dans ses évaluations les enseignements de l’accident survenu à Fukushima.

Le rééquilibrage de notre mix électrique doit nous conduire à développer les énergies renouvelables, pour lesquelles nous avons pris du retard, du fait des politiques erratiques menées avant 2012.

Les énergies renouvelables thermiques, notamment, sont essentielles. Elles assureront, à terme, la part la plus élevée des énergies renouvelables dans le mix énergétique. Leur développement est par conséquent prioritaire.

Je l’ai dit et je le répète, les énergies renouvelables ont beaucoup souffert des soubresauts de la politique de soutien des gouvernements précédents. Depuis la fin de l’année 2013, la stabilisation menée par le gouvernement actuel a permis d’insuffler une reprise, que ce soit pour l’éolien ou le photovoltaïque. Savez-vous que, fin 2013, nous arrivions à retrouver un rythme d’installation équivalent à 1 000 mégawatts par an ? Il faut poursuivre le soutien à toutes ces filières renouvelables. Nous lancerons, à la fin du mois de mars, un appel d’offres pour les installations photovoltaïques de plus de 250 kilowatts, avec un objectif d’au moins 800 mégawatts installés à l’horizon 2017.

Puisque la question de la compétitivité de l’éolien et du photovoltaïque a été évoquée, et même si Ronan Dantec l’a excellemment expliqué, je redis comme lui que le photovoltaïque revient à un peu moins de 100 euros du mégawattheure. Ce pourrait être, en 2025, moins de 80 euros. Quant à l’éolien, son prix de revient est aujourd'hui de moins de 80 euros le mégawattheure ; et ce pourrait être moins de 70 euros. Comparativement, l’EPR, dont nous sommes heureux qu’il soit construit avec des entreprises françaises à Hinkley Point, au Royaume-Uni, produira une énergie estimée à 109 euros le mégawattheure. Soyons donc prudents lorsque nous évoquons la fameuse compétitivité différenciée de ces diverses sources d’énergie !

Pour ce qui concerne les nouvelles filières marines, nous avons lancé un second appel d’offres pour l’éolien offshore au début de l’année 2013 et, à l’automne dernier, un appel à manifestation d’intérêt pour des fermes-pilotes hydroliennes, à Cherbourg. Ce soutien correspond à un objectif clair : placer les industriels français, sur ces technologies, en position de leader aux niveaux européen et international.

Pour inscrire le développement des énergies renouvelables dans la durée, j’ai lancé deux consultations.

La première vise la nécessaire évolution des modalités de soutien aux énergies renouvelables. Un peu partout en Europe, y compris en Allemagne, se pose en effet la question d’un tel soutien et de l’intégration progressive des énergies renouvelables aux marchés. D’ailleurs, la Commission européenne s’intéresse beaucoup à la façon dont l’Allemagne a soutenu ces énergies, notamment en privilégiant les entreprises, aux dépens des ménages.

La seconde consultation porte sur l’autoconsommation, c'est-à-dire le fait de consommer soi-même l’énergie que l’on produit.

Il s’agit d’assurer la mise en place de bonnes résolutions et d’éviter toute décision hâtive, qui pourrait être préjudiciable à nos industriels dans la mise en œuvre de principes vertueux.

Le soutien aux énergies renouvelables passe aussi par la consolidation de leur cadre législatif et réglementaire, ainsi que par la simplification des procédures administratives.

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