La proposition de résolution européenne de notre collègue Richard Yung appelle l'attention sur cet exercice et souligne, à juste titre, qu'il ne sera gage de crédibilité pour la zone euro que si une réponse forte et coordonnée est apportée à la publication des résultats et aux difficultés qui se feraient jour. En ce sens, il est important que la résolution demande, aux alinéas 16 et 17, que soit finalisé l'instrument de recapitalisation directe par le MES des établissements en difficulté. Le principe de cet outil a été maintes fois affirmé par les conseils européens et les conseils Ecofin successifs, et il est nécessaire, pour amortir le résultat de cet exercice, en attendant la mise en place complète du mécanisme de résolution unique. Le sous-directeur du Trésor, Corso Bavagnoli, a, me semble-t-il, indiqué que l'objectif était de parvenir à un accord sur cet instrument d'ici au mois de mars.
Le mécanisme de résolution unique (MRU), deuxième volet de l'union bancaire, doit comprendre une procédure décisionnelle efficace et garantir une responsabilité politique des décisions prises.
La mise en place d'un MRU est le corollaire nécessaire de celle du superviseur unique, afin d'assurer l'articulation entre l'identification des difficultés d'un établissement par le superviseur d'une part, et le lancement d'une procédure de restructuration, d'autre part.
La Commission a présenté une proposition de règlement pour le MRU en juillet 2013, avant même que le MSU ait été formellement adopté. Le Conseil est parvenu à un accord sur cette proposition le 19 décembre dernier. Les négociations sont actuellement en cours entre le Conseil, la Commission et le Parlement européen.
Le MRU transpose, pour la zone euro, le mécanisme de résolution qui a été harmonisé pour tous les États membres de l'Union par la directive sur le redressement et la résolution des banques dite « BRRD ». Il n'innove donc pas dans la palette des outils de résolution dont disposera l'autorité de résolution : plans de redressement des établissements a priori, établissements-relais, transferts d'actifs, cession ou fermeture d'activités, conversion de certaines créances en capital, etc. L'outil le plus décisif sera, à coup sûr, le renflouement interne, c'est-à-dire la recapitalisation par les créanciers, dont les conséquences sur le refinancement des banques devront être précisément évaluées, sachant que ces créances, plus risquées, seront pour elles plus onéreuses.
La procédure de prise de décision reste un point très débattu : qui aura la faculté d'« appuyer sur le bouton » de la résolution et d'engager le démantèlement d'une banque, avec les conséquences économiques et sociales que cela implique ? La Commission souhaiterait être cette autorité, mais on peut craindre qu'elle ne fasse primer des considérations techniques ou juridiques, alors que le Conseil pourrait trouver un équilibre entre l'appréciation de la viabilité d'un établissement et les considérations politiques, européennes et nationales. Comme l'a dit, je crois, Richard Yung hier : il n'est pas anormal que, tant que les États font fonction de filet de sécurité, ils conservent un pouvoir de décision sur la résolution.
Le système de décision proposé par le compromis du Conseil du 19 décembre 2013, faisant appel à quatre instances, toutes collégiales de surcroît - conseil de résolution unique en session plénière, conseil de résolution unique en session exécutive, Commission, Conseil - est complexe et propice aux blocages institutionnels : lorsque des difficultés sont déclarées, les marchés n'attendent pas pour mettre à mort un établissement. Il est donc nécessaire de prévoir une simplification du processus de décision, voire une procédure d'urgence. C'est l'objet des alinéas 30 et 31 de la proposition de résolution.
Le financement de la résolution doit passer par un fonds de résolution solide et rapidement mutualisé et par un filet de sécurité financier efficace.
C'est l'un des principaux objectifs d'une procédure de résolution que de trouver un financement pour absorber les pertes, afin d'éviter que les difficultés de l'établissement ne se transmettent à ses contreparties non remboursées, créant une crise potentiellement systémique.
Ce financement devra, à l'avenir, être essentiellement privé : d'abord les actionnaires, puis les créanciers, enfin un fonds de résolution alimenté par les banques.
Le premier enjeu réside dans les modalités de constitution de ce fonds, qui doit atteindre, en dix ans, 55 milliards d'euros. Il ne s'agit pas, à travers les règles de calcul, de protéger nos banques nationales par rapport aux banques des autres États membres, mais de faire en sorte que les contributions soient adaptées aux caractéristiques du bilan des établissements et tiennent notamment compte du risque de leurs activités. C'est pourquoi la proposition de résolution demande, à juste titre, l'application du critère des actifs pondérés par les risques, à côté de celui de la taille des établissements. Il s'agit de trouver un bon compromis entre logique de solidarité, inhérente à l'Union bancaire, et dimension assurantielle, responsabilisant les parties prenantes.
Le second enjeu réside dans la vitesse à laquelle les compartiments nationaux, alimentés par les secteurs bancaires nationaux, seront mutualisés dans un fonds unique européen. Si un délai semble justifié pour éviter que la totalité des contributions au fonds dans les premières années soit absorbée par le financement d'une ou plusieurs procédures de résolution dans quelques États membres au secteur bancaire fragile, il n'en demeure pas moins que le rythme de mutualisation de 10 % par an que projette le Conseil réduit considérablement le principe de solidarité : ne pourraient au départ être utilisées que des ressources très limitées - seulement 550 millions d'euros pour toute la zone euro la première année.
C'est pourquoi nous pouvons, je crois, être favorable à la solution de compromis consistant à réduire à cinq ans le délai de mutualisation des compartiments nationaux. C'est le sens de l'alinéa 41 de la proposition de résolution. Au terme de ces cinq ans, le montant-cible du fonds - 55 milliards d'euros - n'aura pas encore été atteint, mais les contributions annuelles des banques seront versées directement au fonds unique, sans transiter par des compartiments nationaux.
Enfin, pour assurer la crédibilité du mécanisme, il est nécessaire de mettre en place une forme de garantie publique en dernier ressort. Le Conseil souhaite que ce filet de sécurité permette de faciliter le recours du fonds de résolution à l'emprunt : ce pourrait être une garantie du MES, ou une garantie conjointe des États participants sur les émissions du fonds de résolution.
En attendant et pour la durée de la période de mutualisation, un filet de sécurité doit être en place : il ne peut s'agir que du MES, doté d'une capacité de recapitalisation directe des établissements.
Ainsi, le risque bancaire ne pourrait plus créer de risque souverain puisqu'à aucun moment la défaillance d'un établissement ne pourrait peser directement sur le budget d'un État membre. Cela ne signifie pas que le soutien public national soit complètement exclu : des garanties publiques, notamment lorsque la banque en difficulté peut être redressée, pourraient continuer d'être accordées. Mais les recapitalisations publiques de banques vouées sans cela à disparaître, telles nous les avons connues, ne devraient plus être possibles.
Je ne propose pas d'amendement à cette proposition de résolution européenne qui traite, de façon précise, l'ensemble des enjeux-clés du mécanisme et va même au-delà en rappelant certains aspects souvent occultés, comme l'exigence d'une régulation des infrastructures de marché et les conséquences du renflouement interne. Sur l'ensemble des questions, elle apporte des réponses qui vont dans le sens d'un dispositif crédible, ambitieux et équilibré.