Intervention de Gérard Longuet

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 11 octobre 2011 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2012 — Mission défense - Audition de M. Gérard Longuet ministre de la défense et des anciens combattants

Gérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants :

En réponse à M. Didier Boulaud, je vous informe que la révision du Livre blanc sera précédée de la rédaction, sous l'autorité du secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), M. Francis Delon, d'un document actualisant l'analyse de la situation géostratégique actuelle. Cette révision n'est donc toujours pas engagée et elle interviendra au printemps 2012 au moment des élections présidentielle et législatives, ce qui constitue somme toute un calendrier tout à fait normal.

Bien que cet exercice ne relève pas de mon seul ministère mais du SGDSN, structure interministérielle rattachée au Premier ministre, j'exprimerai, lorsqu'on me le demandera, mon avis selon lequel le Parlement doit être très directement associé à ce travail. J'ai bien noté qu'il ressortait de l'expérience de M. Boulaud que la main des participants à la rédaction de ce Livre blanc avait, par le passé, été sans doute trop tenue, alors même qu'à mon sens, la transparence et l'appréhension des mêmes réalités par l'ensemble des parties prenantes constituent au contraire de puissants facteurs de cohésion.

Concernant le site de Balard, les négociations avec la ville de Paris se sont déroulées de façon très claire ; cette dernière a été associée au choix architectural et n'a jamais opposé quelque opposition que ce soit au projet retenu. La compatibilité de ce dernier avec le plan local d'urbanisme (PLU) actuel appelle une clarification sur deux points : la hauteur des trois cheminées destinées à la réfrigération du bâtiment et la réalisation -à la demande de la ville de Paris- d'un espace sous-terrain de stationnement des autobus. Aussi, afin de concilier le calendrier de la révision du PLU et les exigences de délais liées au fait que notre projet est réalisé en partenariat public privé (PPP), j'ai décidé d'engager, parallèlement à la procédure de demande d'un permis de construire de droit commun -suspendu à la révision du PLU-, une autre procédure spécifique aux grands projets d'intérêt national, la « déclaration de projet ».

Quant au coût, il est vrai qu'il peut sembler élevé dans la mesure où le propre des contrats de partenariat public privé est effectivement de porter sur le coût global actualisé de l'opération, qui inclut le coût des travaux, mais aussi les frais financiers pour toute la durée du contrat, soit 27 ans ainsi que les frais d'entretien et de mise en service, cet ensemble représentant généralement, environ trois fois le seul budget de construction. C'est le cas pour Balard puisque sur une redevance annuelle totale de 130 millions d'euros hors taxe- la compensation de la TVA résultant d'un accord avec le ministère du budget-, 45 millions d'euros seront consacrés à l'immobilier, 36 millions aux systèmes d'information et de communication pendant les cinq premières années -ce chiffre s'établissant ensuite à 25 millions-, 29 millions à la redevance de service destinée au fonctionnement quotidien du site -tels que la restauration des 9 000 agents, les services d'accueil, l'entretien du mobilier etc.-, 16 millions seront consacrés à la maintenance de bâtiments, 75 millions au gros entretien et aux réparations. Le fait que les deux tiers du montant total des redevances soient consacrés aux dépenses liées à la vie du bâtiment est une proportion que vous retrouvez dans les équipements dont vous assurez la gestion au sein de vos collectivités territoriales.

S'agissant de l'hôtel de la Marine, je ne suis pas décisionnaire puisque le président de la République a confié une mission de réflexion sur l'avenir de ce site à M. Valéry Giscard d'Estaing. Le plus probable est que l'on aboutira à une solution permettant de valoriser ce bâtiment en lui donnant toute sa place dans la véritable aventure à la fois culturelle et historique que constitue la promenade qui va du Centre Pompidou au Palais de Chaillot en passant par le Louvre et le musée d'Orsay.

Il me semble que le rez-de-chaussée pourrait devenir un lieu d'expositions ouvertes au public et que la galerie d'honneur située au premier étage devrait pouvoir accueillir des manifestations d'intérêt national ou international que les pouvoirs publics seraient amenés à organiser. Quant aux bureaux, ils ont vocation à être loués, pare exemple à des institutions voisines qui en ont exprimé le souhait, la Cour des comptes et le musée du Louvre. Cette location est la seule partie de l'opération qui soit génératrice de recettes, ce qui est la préoccupation directe de mon ministère. Mais encore faut-il que tout cela n'exige pas de travaux extrêmement coûteux de réaménagement.

A propos de votre question sur la place de la France dans l'OTAN, question éminemment politique, je tiens à souligner que la réintégration de notre pays lui a permis de jouer un rôle considérable à la fois vis-à-vis du conseil des ministres de l'organisation et de l'Union européenne lorsqu'il s'est agi de décider d'intervenir en Libye. Nous sommes désormais considérés pour ce que nous sommes véritablement : une grande puissance militaire qui a le courage de son indépendance politique. Certains de nos partenaires disposent d'une voix forte mais qui n'est pas aussi libre que la nôtre. D'autres à l'inverse ont une voix libre mais qui n'est pas toujours assez forte. La France, quant à elle, a pu faire porter dans la région sa voix, à la fois libre et forte.

J'ajoute que, sur le plan technique aussi, la coopération avec nos partenaires s'est bien déroulée. Un rapport établi conjointement avec les Britanniques sera rendu dans quelques semaines et il reviendra sur ces opérations avec leurs satisfactions et leurs déceptions.

S'agissant du quartier général d'opérations militaires (OHQ), vous avez raison de dire que le Royaume-Uni n'en veut pas. Mais, tout comme nous, les Britanniques souhaitent que les Européens puissent intervenir quand leurs intérêts sont en jeu, sans devoir obtenir le nihil obstat des Etats-Unis qui demeurent le premier contributeur de l'organisation et sans la coopération desquels toute opération est difficile. Il est donc nécessaire que les Britanniques évoluent sur la nécessité de travailler à des actions de planification dans un cadre plus large que la seule coopération bilatérale avec nous. D'ailleurs, je constate qu'à titre personnel mon homologue britannique a invité le ministre de la défense italien à l'accompagner en Libye afin d'obtenir le soutien de Rome dans la reconstruction du pays.

S'agissant enfin du coût de notre participation à l'OTAN, il sera de 78 millions d'euros par an, hors budget opérationnel, dont 49 millions consacrés aux dépenses de personnel et 30 millions de participation aux dépenses de fonctionnement et d'investissement de l'organisation, à l'issue de notre montée en puissance.

En réponse à M. Jacques Gautier, je confirme que le budget proposé pour 2012 est effectivement un budget maintenu et non augmenté.

Je confirme aussi notre commande portant sur onze Rafale est liée au fait que cet appareil n'a pas encore trouvé de marché à l'exportation. J'ajouterai toutefois qu'en Libye il a fait la démonstration de sa polyvalence, remplissant à la fois des missions de reconnaissance, de combat aérien et d'attaque au sol, là où d'autres armées avaient besoin d'un avion différent pour chacune de ses fonctions.

En ce qui concerne le coût de la rénovation des Mirages 2000-D, les options sont en cours d'analyse afin de nous permettre de prendre notre décision. Mais comme vous l'avez rappelé, l'objectif est un lancement de réalisation en 2013 pour une livraison à partir de 2018 ; notre objectif est de ne pas dépenser trop pour cette opération dont nous arrêterons le périmètre mi-2012.

Quant aux Casa, ils permettent effectivement de suppléer l'absence de l'A400 M à la plus grande satisfaction de nos parachutistes, ce qui constitue - soit dit en passant- un petit risque pour Airbus Military. Le projet A 400M demeure, à ce jour, confronté à deux difficultés. La première est en voie de résolution et concerne le moteur, du fait de la très grande vitesse de rotation des turbines de l'A400M, entre autres, grâce auxquelles cet appareil s'annonce comme un véritable bijou capable de performances encore jamais vues. La seconde difficulté concerne la négociation du contrat de soutien pour lesquels les prix envisagés par les industriels ne sont absolument pas raisonnables. Je voudrai leur redire que le fait d'être un industriel français ne justifie nullement de pouvoir prendre le ministère de la Défense pour une vache à lait. A ceci s'ajoute le fait qu'ils devraient faire preuve de davantage de vigilance quant au respect du calendrier, la France étant directement concernée par cette question puisque nous sommes le premier pays livré en A400 M, en 2013.

A propos des drones, j'ai effectivement fait jouer la préférence nationale et je n'en ai pas honte.

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