Intervention de Manuel Valls

Réunion du 9 avril 2014 à 16h30
Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Manuel Valls :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, laissez-moi vous dire le plaisir qui est le mien d’être devant vous aujourd'hui pour poursuivre le débat entamé hier à l'Assemblée nationale et ici même, avec l’intervention de Laurent Fabius.

Hier, lors de ma déclaration de politique générale, j’ai dit la nécessité de vérité et d’efficacité de l’action publique, afin de redonner confiance à nos compatriotes. Nous devons aller à l’essentiel de leurs préoccupations – vous les connaissez, elles se sont exprimées avec force à l’occasion du scrutin municipal, et le Président de la République a souhaité se saisir de ce message –, à savoir le chômage, la vie chère, la feuille d’impôt, pour y apporter des solutions concrètes. Et c’est cette mission que m’a confiée le chef de l’État.

Aller à l’essentiel, c’est vous parler, aujourd’hui, de trois sujets majeurs pour notre pays.

Il s’agit, d’abord, du renforcement de notre économie, de nos entreprises, pour favoriser la croissance et créer de l’emploi. Sans croissance économique, sans renforcement de la compétitivité de toutes nos entreprises, quelle que soit leur taille, rien n’est possible. Nous devons, avec pragmatisme, en mobilisant les énergies, en rassemblant l’ensemble des partenaires sociaux, lutter contre le chômage de masse qui ronge notre société.

C’est le but du pacte de responsabilité et de solidarité, présenté par le Président de la République il y a déjà quelques mois, qu’il s’agit à présent de mettre en œuvre.

Je veux ensuite vous parler de nos territoires – de nos communes, de nos départements, de nos régions –, de leur importance pour le redressement de notre pays, mais aussi de la façon dont ils doivent évoluer. Cette question, souvent évoquée et discutée, mais jamais vraiment abordée – dans le sens de mise en œuvre –, je veux m’y atteler, dans le dialogue avec les élus, avec les citoyens bien sûr, animé de la volonté d’avancer.

Enfin, alors que s’ouvre une nouvelle étape du quinquennat, je veux revenir devant vous sur la manière dont le Gouvernement entend aborder le travail parlementaire qui est devant nous.

Hier, j’ai longuement évoqué les difficultés de notre pays. Ces difficultés, vous les connaissez ; vous les rencontrez chaque jour dans nos territoires.

Les souffrances, les doutes, je les ai vus lorsque j’étais maire d’Évry, lorsque j’étais ministre de l’intérieur, c’est-à-dire aussi en charge de l’organisation de notre État, de sa présence sur le territoire.

J’ai d’abord vu la violence qui, sur fond de crise économique et sociale, frappe nos villes, nos quartiers.

Mais cette violence, que nous avons souvent évoquée ici au cours des vingt-deux derniers mois, est mouvante. Elle prend de nouvelles formes. Elle se déplace et touche des territoires jusqu’alors épargnés. Nos villages, nos petites villes, nos villes moyennes n’éprouvent plus ce sentiment de quiétude qui faisait que l’on pouvait laisser la porte ouverte en partant.

Il faut prévenir les peurs de nos concitoyens qui vivent dans les territoires ruraux. La ruralité, nos campagnes, c’est l’histoire longue de notre pays, mais c’est aussi – je l’ai dit hier – une part importante de notre modernité. C'est un atout tant sur le plan de l’identité que sur les plans culturel et économique.

Je pense à nos agriculteurs qui ont une importance capitale pour notre économie, pour la préservation de notre environnement, de notre cadre de vie. Ils doutent parfois de l’attention des pouvoirs publics à leur égard. Je veux le redire ici, le Gouvernement est totalement engagé à leurs côtés. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous examinerez d’ailleurs à partir de ce soir le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

Il y a encore ces territoires qui, face à la marche brutale du monde, subissent la désindustrialisation, ces usines qui ferment, ces ouvriers, ces salariés, ces cadres qui perdent leur emploi, et donc toutes ces familles qui se retrouvent dans l’inquiétude du lendemain. Il y a aussi ces parents qui voient partir leurs enfants vers les grandes villes, mais aussi vers l’étranger, parce que ces derniers pensent que leur avenir n’est plus ici.

Je connais comme vous, mesdames, messieurs les sénateurs, les souffrances de ces territoires, de tous les territoires. Je pense aussi aux outre-mer. La vie chère, le chômage, le problème du logement, la violence, le trafic de drogue y frappent davantage encore nos compatriotes, et en particulier la jeunesse.

Depuis dix ans, la France a perdu de sa compétitivité et de son attractivité économique. Dans un monde où la compétition internationale est de plus en plus dure, nos entreprises ont vu disparaître des parts de marché.

Sur le plan diplomatique, la France est une grande puissance. Sa voix est entendue ; nos armées sont parmi les rares qui peuvent intervenir dans le monde – et nous savons quel est l’engagement de nos soldats aujourd'hui encore au Mali ou en Centrafrique ; la France est membre du Conseil de sécurité des Nations unies.

Mais, pour peser dans le monde d’aujourd'hui, il faut aussi être une grande puissance économique et industrielle. Si nous voulons demeurer une grande puissance, nous devons donc soutenir notre tissu économique, toutes nos entreprises, nos TPE, nos PME, nos PMI, nos grands groupes, et ce pour produire plus en France, pour innover : produire plus, mais aussi produire mieux.

Nous devons encourager nos jeunes pousses. La prise de risque, l’audace, l’ambition doivent être mieux récompensées, et la liberté de créer et d’entreprendre encouragée. Ces femmes et ces hommes qui travaillent dur et contribuent au redressement de la France doivent trouver un cadre plus simple, plus lisible, pour encourager la création de richesse.

Le Président de la République m’a confié, ainsi qu’au Gouvernement, la charge de donner corps au pacte de responsabilité. La démarche est claire : l’engagement de tous pour l’emploi, pour l’investissement et pour la compétitivité de notre économie.

Beaucoup a déjà été fait. Des réformes courageuses ont été entreprises par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, à qui je veux, de nouveau, devant vous, rendre hommage. Et les premiers résultats sont là. Je pense notamment à cette question fondamentale pour notre pays qu’est l’insertion des jeunes dans la vie active.

Mais nous devons faire plus.

J’ai évoqué hier trois décisions qui fondent désormais le pacte de responsabilité. Je travaillerai en étroite association avec le Parlement et les partenaires sociaux pour les mettre en œuvre.

Le premier pilier du pacte concerne la baisse du coût du travail, qui sera diminué de 10 milliards d’euros supplémentaires, venant s’ajouter aux 20 milliards d’euros de l’actuel crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ou CICE.

C’est un facteur primordial de la compétitivité de nos entreprises. Cette décision s’appliquera notamment sur les salaires les plus faibles afin que, à partir du 1er janvier 2015, l’employeur d’un salarié touchant le SMIC ne verse plus aucune cotisation patronale à l’URSSAF.

La deuxième décision a trait à la fiscalité des entreprises. Nous allons agir sur deux impôts.

D’une part, la C3S, ou contribution sociale de solidarité des sociétés, sera progressivement supprimée en trois ans. Dès 2015, deux tiers des entreprises concernées, soit 200 000 d’entre elles, ne la paieront plus.

En 2016, la surtaxe temporaire d’impôt sur les sociétés, créée par la majorité précédente, sera définitivement supprimée et, d’ici à 2020, le taux de l’impôt sur les sociétés sera diminué, pour atteindre 28 %, ce qui nous rapprochera de nos partenaires européens.

Dans le cadre des lois de finances, nous proposerons également la suppression de petites taxes à faible rendement.

Enfin, je souhaite évoquer devant vous une dernière décision : les salariés modestes bénéficieront, dès 2015, d’une augmentation de salaire net s’élevant à 500 euros par an pour ceux qui perçoivent le SMIC, par une baisse de leurs cotisations salariales. Nous savons ce que représente une telle somme dans le budget d’une famille :…

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