Intervention de Agnès Buzyn

Commission des affaires sociales — Réunion du 9 avril 2014 : 1ère réunion
Mise en oeuvre du plan cancer — Audition de Mme Agnès Buzyn présidente de l'institut national du cancer inca

Agnès Buzyn, présidente de l'Institut national du cancer (INCa) :

S'agissant des inégalités territoriales, plusieurs orientations ont été prises pour permettre la mise en oeuvre de mesures de santé publique au plus près du territoire. Les ARS assurent un suivi des délais d'accès à l'IRM par exemple ; un suivi est également assuré par les centres régionaux de cancérologie.

En ce qui concerne le financement des projets libres de recherche en cancérologie, deux voies existent : la première passe par l'INCa, la deuxième par les associations caritatives, selon les mêmes modalités de sélection dans les deux cas. Les financements consacrés aux projets de recherche sont stables à l'horizon de ce plan.

Certes, notre système de santé est inégalitaire. Cependant, ce n'est ni l'objectif ni le rôle du Plan cancer que de régler les délicates questions des restes à charge ou des dépassements d'honoraires. Si nous travaillons sur les moments-clés auxquels sont associés une perte de chance, nous ne pouvons apporter de solution globale aux inégalités d'accès aux soins. Nos relais de communication et d'information, qui diffèrent en fonction des sujets, permettent de réduire les inégalités. L'information sur le dépistage organisé du cancer du sein fait ainsi l'objet d'une très large diffusion à travers tous nos réseaux, notamment à travers les relais de la ville, et dans sept langues différentes. Il s'agit sans doute de l'un des dépistages les moins inégalitaires : même les femmes les plus précaires en ont connaissance.

S'agissant du vaccin contre le cancer du col de l'utérus, une AMM européenne vient de paraître qui autorise le passage de 3 à 2 injections. En ce qui concerne la réalisation de frottis de dépistage, deux problèmes doivent être distingués. Un problème d'accès, tout d'abord, que la possibilité de faire réaliser cet examen par les médecins généralistes - ce qui nécessite une formation - ou par les sages-femmes doit permettre en partie de régler. Un problème de recours excessif à cet examen ensuite : alors qu'il est recommandé de l'effectuer tous les trois ans, certaines femmes, encouragées par leur gynécologue, le font tous les ans, occasionnant ainsi une dépense qui pourrait être mieux utilisée ailleurs.

Sur le lien entre usage de drogues et cancers, des recherches sont actuellement en cours. Le cannabis semble être particulièrement concerné dans la mesure où il est utilisé en mélange avec du tabac.

Sur l'alcool, en dehors des facteurs individuels de risques que l'on ne sait pas encore mesurer, nous communiquons sur une moyenne de risque globale : le risque de cancer augmente de 10 % à 20 % à partir d'une consommation de 5 grammes par jour, soit un demi-verre d'alcool. La synergie tabac-alcool est particulièrement porteuse de risque puisqu'elle multiplie celui-ci par 35. L'alcool est responsable de 10 % à 15 % des cancers observés en France, le tabac à hauteur de 10 %, tout comme la nutrition.

S'agissant du rôle du stress, une récente étude de l'Inserm n'a pas produit de conclusion sur un quelconque lien entre stress aigu et cancer.

Les indicateurs de qualité associés aux établissements sont bien sûr pondérés en fonction des facteurs de risque spécifiques. Nous sommes attentifs à ce qu'ils n'effectuent pas de tri entre les patients.

La lutte contre le cancer passe aussi par la lutte contre l'image négative associée à la maladie : nous avons fait une grande campagne en ce sens il y a deux ans, afin de rappeler qu'un malade sur deux guérit et que le dépistage précoce augmente les chances de guérison. Nous pensons que les médecins généralistes ont un grand rôle à jouer dans la diffusion du dépistage.

L'éducation à la santé rencontre en effet l'écueil de la culpabilisation du public. Pour autant, ces messages ne doivent-ils pas être diffusés et ne faut-il pas au moins essayer de transmettre l'information ? Il s'agit d'une question sensible. Du reste, ces campagnes sont gérées par l'Inpes et non par l'INCa.

Beaucoup de recherches restent à mener sur les liens entre cancer et éléments toxiques contenus dans l'alimentation. Bien souvent, les progrès réalisés dans la recherche sur les facteurs de risque résultent des études menées sur les professions exposées : lorsqu'un excès de risque associé à une profession est détecté, on peut ensuite en déduire les seuils acceptables pour la population générale. C'est ainsi que l'on a détecté les risques associés aux pesticides.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion