Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 7 avril 2011 à 21h30
Bioéthique — Articles additionnels après l'article 22 quater

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Il faut éviter les polémiques sur ce sujet difficile.

Personnellement, j’ai participé au groupe de travail de Mme André et voté contre la légalisation de la GPA. Aujourd’hui, la majorité des membres du groupe CRC-SPG voteront contre les amendements identiques n° 2 rectifié quater et 75 rectifié.

Je voudrais essayer d’expliquer cette position en m’appuyant sur des raisons qui me paraissent objectives.

Nul ne nie la souffrance des couples qui ne peuvent satisfaire leur désir d’enfant. J’ai néanmoins toujours considéré qu’il n’existait pas de droit à l’enfant à tout prix.

Contrairement à la procréation médicalement assistée, la gestation pour autrui fait intervenir plusieurs acteurs : le couple demandeur, la femme qui assumera la grossesse, ses enfants, voire son conjoint ou concubin, et enfin l’enfant à naître.

L’argument principal des auteurs des amendements est que, quoi que l’on pense de la gestation pour autrui, elle se pratique dans d’autres pays et qu’il convient donc de la légaliser et de l’encadrer en France.

Toutefois, compte tenu du faible nombre de femmes susceptibles de porter un enfant pour autrui, je pense que la légalisation de cette pratique dans notre pays n’empêchera pas le recours, dans des conditions diverses, à des mères porteuses vivant à l’étranger.

En effet, je ne crois pas que beaucoup de femmes de ce pays se déclarent prêtes à s’engager dans une telle démarche, sauf à accepter que la mère porteuse puisse être apparentée à l’un des membres du couple demandeur… On entend dire que des mères pourraient porter un enfant pour leur fille : imaginez l’imbroglio familial que créerait une telle situation ! Ce serait revenir à d’anciennes pratiques, où par exemple une sœur portait un enfant pour sa sœur et que couvraient des secrets de famille.

Par conséquent, j’estime que très peu de femmes accepteront de porter un enfant pour un couple demandeur en étant simplement défrayées. On n’empêchera pas que, dans la majorité des cas, un contrat marchand ne soit établi entre les deux parties, la femme qui assumera la grossesse y trouvant un intérêt économique. Au sein du groupe de travail auquel j’ai participé, certains ont établi un parallèle entre les mères porteuses et les nourrices d’antan, mais cette référence ne me semble guère encourageante…

La femme porteuse signera donc un contrat stipulant qu’elle remettra l’enfant au couple demandeur au terme de la grossesse. Une telle situation me semble compliquée à vivre, et j’estime qu’il serait bien imprudent de permettre que l’on s’engage dans cette voie. Aux États-Unis ou en Ukraine, il est manifeste que les femmes porteuses ne signent de tels contrats marchands que poussées par des nécessités économiques.

Enfin, quelle idée des enfants déjà nés se feront-ils de leur mère si elle accepte d’assumer une grossesse pour une autre femme ? Ne se demanderont-ils pas pourquoi elle donne à quelqu’un d’autre un enfant qui pourra leur apparaître comme leur frère ou leur sœur ?

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