L’amendement n° 134 a pour objet de permettre la transcription à l’état civil français des actes de naissance des enfants nés à l’étranger du fait d’une gestation pour autrui.
Comme vous le savez, mes chers collègues, notre groupe est dans sa quasi-totalité opposé à la gestation pour autrui, que nous assimilons à un commerce réduisant le corps de la femme à un objet. Je n’y reviendrai pas : nous sommes partagés sur cette question, mais une très large majorité se dessine parmi nous.
Adopter cet amendement nous placerait donc dans une situation difficile, puisque ce vote reviendrait à légaliser les conséquences d’une pratique que nous critiquons. Or nous ne la dénonçons pas pour les seules femmes françaises, mais bel et bien pour toutes les femmes, sans distinction d’origine.
Voter pour cet amendement constituerait donc une hypocrisie majeure, puisque nous tirerions les conséquences administratives d’une mesure que nous proscrivons, un peu comme si, appliquant des principes à notre pays, nous n’avions que faire de ces derniers une fois passées les frontières nationales.
Dans le même temps, ne pas voter cet amendement reviendrait à priver les enfants dont il est question ici de l’établissement d’une filiation au regard de notre droit national, les empêchant par là même d’accéder à la nationalité. Et nous ne pouvons naturellement pas nous satisfaire de l’explication selon laquelle, dans certains cas, ces enfants possèdent la nationalité de la mère porteuse.
À l’évidence, cette situation prive les enfants dont il est ici question d’un certain nombre de prérogatives associées à la nationalité, telles que le droit de vote ou la possibilité d’intégrer la fonction publique, entre autres.
Afin d’éviter cette difficulté, il serait naturellement souhaitable que les pays légalisant la pratique des mères porteuses la limitent à leurs seuls ressortissants, afin d’éviter que les enfants ne soient, en quelque sorte, les victimes d’un conflit de droit entre deux États. Toutefois, nous sommes loin de cette évolution, que nous appelons de nos vœux car elle limiterait par ailleurs le tourisme reproductif. Et les interrogations que tend à soulever cet amendement sont, quant à elles, plus concrètes.
Selon nous, les enfants qui, selon la législation de leur pays d’origine, n’ont pas d’autres parents que ceux qui ont contracté un contrat de gestation pour autrui ne peuvent être les victimes de cette situation.
Comme le rappelle l’article 3 de la Convention internationale des droits de l’enfant, « l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ». On ne saurait tolérer que notre droit prive les enfants concernés de la possibilité de bénéficier d’une filiation, ni qu’il méconnaisse l’article 8 de ce même texte, qui pose le principe du droit de l’enfant à voir respectée son identité.
Vous le voyez, mes chers collègues, notre conviction en la matière n’est pas forgée : j’ai surtout posé des questions. Aussi, le groupe CRC-SPG s’abstiendra, afin de ne pas faire obstacle à une disposition utile en droit mais dont nous contestons les fondements politiques, c’est-à-dire la volonté de légaliser la gestation pour autrui.