Intervention de Stéphane Le Foll

Réunion du 14 avril 2014 à 21h30
Agriculture alimentation et forêt — Article 22

Stéphane Le Foll, ministre :

C’est quand même là un véritable sujet.

Premièrement, l’autorisation des molécules est décidée à l’échelle européenne ; elle est politique, avec toutes les conséquences que cela peut avoir. L’autorisation de mise sur le marché suppose une analyse de l’utilisation qu’on peut en faire dans tous les secteurs. À cet égard, j’ai indiqué qu’un insecticide peut avoir 300 ou 400 usages différents, ce qui nécessite 300 ou 400 autorisations de mise sur le marché différentes. Si vous multipliez cela par les 70 secteurs ou cultures ou groupes de cultures différents, vous avez la multiplicité des autorisations de mise sur le marché !

L’autorisation d’une molécule reste politique : après l’évaluation par l’Autorité européenne de sécurité des aliments, la décision politique est prise. La molécule est autorisée à l’échelle européenne.

Ensuite, il reste à savoir comment on la met sur le marché et, surtout, à décliner toutes les conditions d’utilisation. Certaines molécules sont utilisées avec des réflecteurs, par exemple, lorsque les jardiniers du dimanche utilisent tel ou tel produit. Toutes ces spécificités sont gérées par des techniciens. Cela ne devient pas un enjeu politique, ce n’est pas vrai ! L’enjeu se pose en termes d’utilisation.

Deuxièmement – c’est le point le plus important –, pour répondre à la question posée par Mme Blandin, une mission a été demandée et une évaluation a été faite. Cette mission comprenait cinq corps d’inspection représentant les cinq tutelles de l’ANSES : agriculture, Bercy, santé, travail, environnement.

Par les recommandations qui sont actuellement comprises dans l’avis du directeur général de l’ANSES, cette agence se comporte plus en conseiller du ministre, en l’aidant à préparer sa décision. Dans ce cadre, le rôle de l’ANSES se situe déjà dans la délivrance des autorisations.

Si le ministre prenait une décision contraire à un choix fait par l’ANSES et les scientifiques, vous seriez vous-mêmes les premiers à me mettre en garde contre la gravité de mon choix. Cette situation existe déjà dans les faits. Quand la DGAL renvoyait, en partie, la décision, on a parfois demandé des précisions, mais jamais on n’a jamais remis en cause les décisions de l’ANSES. Il faut donc assumer complètement cette situation, et ce de manière sereine.

Troisièmement, cinq recommandations ont été émises.

Il faut redéfinir les rôles, les compétences et les responsabilités de l’ensemble des ministères de tutelle, agriculture comprise. Il faut être capable de définir les grandes lignes, les grandes orientations. Ce sont des choix politiques. Il convient de définir l’ANSES comme une autorité compétente ; c’est tout le débat de ce soir. Il est nécessaire de réaliser une étude complémentaire pour la construction de la phytopharmacovigilance. Le cadre général de la phytopharmacovigilance est de la responsabilité politique. Il faut également maîtriser le système d’information et financer ces changements, essentiellement par voie fiscale ; on en revient à ce que disait Mme Blandin.

En termes d’ETP, la mission confiée aux cinq corps d’inspection arrive à la conclusion qu’il faut augmenter le nombre d’ETP pour assumer la charge de travail.

Je vais donc plaider auprès de Bercy que nous faisons là œuvre de simplification. Lorsque j’ai pris mes fonctions, la DGAL employait 2, 5 ETP sur ces questions. Il en faut pratiquement 20 à l’ANSES – vous voyez le rapport ! Parallèlement, la DGAL a des responsabilités qu’il importe de renforcer, en particulier sur les contrôles vétérinaires, un sujet évoqué quand on a parlé des abattoirs.

Il faut mettre les priorités là où l’État doit assumer ses missions et s’organiser pour aller jusqu’au terme de cette clarification : cette agence ne doit pas être remise en cause, à l’instar de ce qui existe déjà pour le médicament et les soins vétérinaires.

En même temps, je le dis ici, ce soir, au Sénat, il faut aussi en tirer les conclusions en termes de moyens et, surtout, de personnels. Toutes ces autorisations sont payées : c’est le plafond d’emplois qui interdit tout dépassement. Ce n’est pas un problème de dépenses budgétaires supplémentaires, puisque la mission a mis en évidence la capacité de financement, ce qui laisse une marge nécessaire de discussion. Il faut qu’on soit capable de la mettre raisonnablement en œuvre.

En tout cas, j’ai d’ores et déjà tiré les conséquences de cette situation, et je plaiderai pour qu’on fasse en sorte de donner à l’ANSES les moyens d’assumer ses missions.

En agissant ainsi, nous clarifierons les choses, sans nous cacher derrière des faux-semblants. Nous contribuerons ainsi à améliorer le fonctionnement de l’ensemble du dispositif.

Pour répondre à Pierre Camani, ce sera aussi un gage d’efficacité et de rapidité. On ne manquerait pas de venir demander au ministère de régler les problèmes si on ne se donnait pas les moyens de les régler rapidement. Telle est la proposition qui vous est faite. Ce n’est que cela ! Il n’y a pas ici de volonté de ne pas assumer une responsabilité politique.

La proposition du rapporteur permet, de toute façon, au ministre, au vu d’une situation, d’une actualité, de décider de refuser une AMM, et c’est très bien ! C’est parfaitement cohérent avec l’ensemble du dispositif.

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