Intervention de George Pau-Langevin

Réunion du 15 avril 2014 à 9h30
Questions orales — Suicides sur le territoire du parc amazonien de guyane

George Pau-Langevin, ministre des outre-mer :

Madame la sénatrice, vous soulevez une question difficile sur laquelle le Gouvernement, et notamment le ministère des outre-mer, s’est déjà penché.

Le suicide est toujours un drame individuel difficile à analyser. Dans la région du fleuve, nous avons malheureusement également déploré le suicide d’enseignants métropolitains. Ce sujet grave ne concerne donc pas uniquement les communautés amérindiennes.

Néanmoins, ce type de problème survient plus fréquemment dans ces régions, ce qui sollicite notre responsabilité. Ces territoires, qui sont d’ailleurs magnifiques, accueillent des hommes et des femmes dont la culture, le vécu et les traditions sont différents de ceux de la majorité des Français.

Nous devons faire entrer ces populations dans la modernité, pour leur permettre d’appréhender un certain nombre d’exigences de la vie moderne, tout en respectant leur mode de vie.

Chaque citoyen de notre pays a le droit d’avoir une place correspondant à ses attentes ; aujourd’hui, nous constatons que les Amérindiens s’inscrivent aussi dans une démarche de modernité.

À cet égard, je me réjouis que, pour la première fois, une femme amérindienne, Mme Cornélie Sellali Bois-Blanc, ait été élue maire à Iracoubo et que des bureaux de vote aient ouvert dans les villages amérindiens du Haut-Maroni et de Taluen.

Il est vrai que nous devons faire face à une forme de désarroi de la population amérindienne, ce qui nous amène à agir dans divers domaines.

Dans le domaine de l’éducation, qui m’est familier en raison de mes attributions antérieures, la question est de savoir comment rendre l’éducation accessible à tous, notamment aux jeunes qui vivent dans des villages particulièrement éloignés et qui ont des racines culturelles différentes.

Vous le savez, nous avons créé des écoles de proximité de façon à éviter que de très jeunes enfants n’aient à faire de longs trajets en pirogue pour rejoindre un établissement scolaire. Nous espérons que, de la sorte, ils seront moins dépaysés pour aborder les apprentissages, à tout le moins au niveau de l’école maternelle.

Nous avons aussi des intervenants en langue maternelle pour accueillir les enfants, lesquels ne parlent le plus souvent pas du tout le français, pour les familiariser à l’école dans leur langue maternelle et leur environnement avant de commencer l’apprentissage de la langue française. Ainsi, l’accès à l’école sera moins traumatisant pour eux.

Nous avons aussi reconnu, dans la loi du 8 juillet 2013, la place des langues vernaculaires, notamment amérindiennes ou créoles, dans l’enseignement. C’est également une manière de rendre moins traumatisant pour un enfant le passage de la vie dans son village à la vie à l’école.

Par ailleurs, un ensemble de dispositions ont été prises pour lutter contre le mal-être des populations amérindiennes. Vous avez évoqué le plan préfectoral de lutte contre le suicide du 21 janvier 2011, qui porte notamment sur les questions de santé et d’addiction.

Le secteur associatif est également très mobilisé. Vous avez évoqué l’ADER, qui travaille sur un programme global de prévention communautaire du suicide dans le Haut-Maroni. Nous avons aussi essayé de prendre en compte les problèmes d’addiction, notamment à l’alcool, qui fragilisent ces populations.

Sur la question de l’isolement, de nombreux efforts sont faits pour aider notamment les jeunes Amérindiens qui sont pris entre deux mondes – leur monde traditionnel et celui de l’école.

Il convient enfin de garantir la continuité territoriale. Sur ce point, de nombreuses mesures ont été prises.

Enfin, vous avez évoqué, madame la sénatrice, la question de la convention n° 169 de l’Organisation internationale du travail relative aux peuples indigènes et tribaux. Cette question soulève une difficulté à laquelle nous nous heurtons également dans de nombreux autres domaines. La Constitution garantit l’égalité et l’unicité du peuple français. Par conséquent, il est très difficile de donner des droits spécifiques à une partie de ce peuple, notamment aux peuples autochtones. Pour autant, cela ne nous dispense pas d’essayer de faire en sorte que les pratiques et les savoirs locaux de ces populations qui vivent sur le fleuve puissent être pris en compte.

Madame la sénatrice, la tâche est difficile, mais je suis certaine que nous vous trouverons à nos côtés pour essayer d’avancer dans l’intérêt des peuples autochtones.

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