La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
La parole est à M. Philippe Kaltenbach, auteur de la question n° 684, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le ministre, je veux tout d’abord vous féliciter de votre récente nomination à la tête du beau ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche ; je sais que vous avez des projets pour la jeunesse de notre pays.
Je souhaite attirer votre attention sur les fermetures, effectives ou programmées, de plusieurs centres d’information et d’orientation des Hauts-de-Seine. Celles-ci sont déjà effectives à Courbevoie, à Nanterre, à Meudon et à Asnières-sur-Seine, programmées pour 2014 à Châtenay-Malabry et à Sceaux et pour 2015 à Clamart. Le département des Hauts-de-Seine, qui comptait encore récemment treize centres d’information et d’orientation, n’en dénombrera bientôt plus que six. Pourtant, 100 000 collégiens et lycéens y sont scolarisés, si l’on considère uniquement l’enseignement public.
La fermeture de ces centres intervient à la suite de la décision du conseil général des Hauts-de-Seine de cesser ses financements, qui permettaient la prise en charge des loyers et d’une partie des frais de fonctionnement.
Nous pourrions débattre des priorités budgétaires du conseil général des Hauts-de-Seine, qui a déjà dilapidé – c’est un exemple parmi d’autres – plus de 250 millions d’euros depuis vingt ans pour une université privée – la « fac Pasqua » –, mais nous ne sommes pas dans le bon hémicycle pour ce faire.
L’arrêt de ces financements ne va pas sans poser de très nombreuses difficultés aux familles alto-séquanaises, qui ne disposeront plus d’un service public de proximité pour bénéficier de conseils en matière d’orientation. Si les réformes territoriales engagées par le Gouvernement et sa majorité parlementaire prévoient de confier prochainement l’orientation aux conseils régionaux, il convient de garantir jusque-là, et même au-delà, la qualité du service rendu aux élèves ainsi qu’à leurs parents.
Vous comme moi savons qu’un des motifs conduisant encore trop d’élèves à sortir du système scolaire sans qualification est leur difficulté à cerner leurs centres d’intérêt et à trouver une orientation adaptée. Les besoins dans ce domaine demeurent très importants. La preuve en est l’expansion des structures privées, qui conseillent parents et enfants en matière d’orientation. Si nous ne sommes plus en mesure d’offrir à toutes et tous les mêmes chances de succès, nous risquons d’affaiblir l’égalité républicaine.
Monsieur le ministre, dans l’attente de la mise en œuvre des prochaines lois de décentralisation, quelles actions seront entreprises par le rectorat dans les Hauts-de-Seine pour permettre une information suffisante des élèves et œuvrer ainsi à la pleine réussite de leur parcours scolaire ?
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est bien évidemment le devoir de l’école de donner à nos enfants la possibilité de choisir la formation qu’ils souhaitent suivre et de les préparer au mieux à l’emploi répondant à leurs aspirations.
Partageant le souci qui est le vôtre de préserver la qualité de l’orientation, je veux tout d’abord vous assurer que les centres d’information et d’orientation constituent des dispositifs essentiels pour l’information et l’orientation de tous les publics et qu’il n’est absolument pas question de les transférer aux collectivités locales. Le travail effectué au quotidien dans ces centres par les conseillers d’orientation est particulièrement remarquable, extrêmement important pour les jeunes, et je profite de l’occasion qui m’est donnée pour les en remercier.
Nous devons renforcer l’orientation de nos élèves, pour que celle-ci résulte d’un choix réfléchi et assumé. C’est le sens de la mise en œuvre du nouveau « parcours individuel d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel », qui a été instauré par la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. À cet égard, je veux saluer mon prédécesseur, Vincent Peillon, qui a porté cette réforme.
S’agissant plus particulièrement des centres d’information et d’orientation des Hauts-de-Seine, l’académie de Versailles étudie actuellement avec le conseil général la possibilité d’ouvrir de nouvelles structures d’orientation dans des emplacements plus opportuns, par exemple à Nanterre. Il s’agit donc de revoir la carte départementale pour proposer aux différents publics des accueils dans des lieux stratégiques et des locaux mieux adaptés. De plus, l’accompagnement de qualité dispensé dans les établissements scolaires du second degré et dans les universités sera renforcé.
Cette nouvelle répartition des CIO s’inscrit dans le cadre de la reconstruction d’un service public de l’orientation, plus complet et plus performant. En effet, comme nous l’ont montré les récentes réussites en matière de lutte contre le décrochage scolaire, la possibilité pour notre école de travailler avec d’autres structures, au sein d’un réseau, conduit à des résultats concrets. C’est pourquoi il paraît nécessaire de refonder le service de l’orientation, en l’associant étroitement à l’ensemble des acteurs de terrain concernés, tels les missions locales, Pôle emploi, les collectivités territoriales ou les différentes organisations professionnelles. C’est aussi une manière pour nous de promouvoir une école de la bienveillance.
C’est parce que le Gouvernement veut une école donnant à chaque élève le soutien et l’écoute nécessaires à la construction de son avenir qu’il soutiendra le maintien des CIO, avec une nouvelle organisation plus complète et plus performante.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Je note avec satisfaction que vous êtes attaché aux CIO et au travail remarquable effectué par leurs agents.
J’ai bien compris qu’une nouvelle carte était à l’étude dans les Hauts-de-Seine. Nous veillerons particulièrement à ce que celle-ci prenne bien en compte les élèves et leurs familles, en assurant une facilité d’accès à ce service public et une proximité du service offert aux usagers.
En effet, je l’ai dit, des officines privées de plus en plus nombreuses proposent des services d’orientation payants, dont le coût, parfois important, ne peut être supporté par toutes les familles. Si nous voulons l’égalité républicaine, il faut assurer un service public de qualité, gratuit, pour tous les élèves et toutes les familles. C’est le travail mené par les CIO depuis maintenant très longtemps. Nous souhaitons qu’il soit pérennisé et que, dans chaque département, le nombre de centres soit suffisant pour assurer un service de proximité.
Je serai également attentif au partenariat que vous appelez de vos vœux, monsieur le ministre. L’orientation est en effet un sujet important pour les jeunes comme pour notre pays, et il faut que tous les partenaires soient autour de la table. En attendant la nouvelle organisation, qui aura pour objectif, j’en suis certain, d’assurer une bonne qualité de service, je tiens encore une fois à vous remercier, monsieur le ministre, de votre défense des centres d’information et d’orientation.
La parole est à M. Yves Rome, auteur de la question n° 688, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le ministre, tout en vous félicitant de votre arrivée à la tête du grand ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, je viens aujourd'hui vous suggérer un approfondissement des lois de décentralisation.
La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a prévu le transfert des personnels techniciens, ouvriers et de service, plus communément appelés TOS, des collèges et lycées aux collectivités locales, qui en assurent aujourd'hui la gestion. Ces personnels, devenus lors de la réforme adjoints techniques territoriaux des établissements d’enseignement, ou ATTEE, ont massivement choisi d’intégrer la fonction publique territoriale, nourrissant dès lors de grands espoirs quant à leurs conditions de travail et à la reconnaissance qui leur est due.
Or j’ai pu constater les difficultés posées par la double tutelle des ATTEE dans les collèges de l’Oise, difficultés que ces agents déplorent massivement. Ils me l’ont fait savoir, parfois même bruyamment.
Les personnels ATTEE subissent avant tout les effets négatifs de leur transfert incomplet à la collectivité départementale. En effet, si le conseil général est chargé du recrutement et de la gestion de la paie, l’autorité fonctionnelle est toujours celle du principal de l’établissement scolaire et de son gestionnaire, qui dépendent, quant à eux, du ministère de l’éducation nationale.
Au regard des faits observés dans les collèges et relayés par les agents, la persistance d’une double tutelle, par l’État et le département, ne va pas sans poser de nombreuses difficultés en termes de gestion des ressources humaines. Les relations de travail sont parfois complexes avec les cadres de l’éducation nationale. Les personnels ATTEE rapportent des tensions quotidiennes, une incertitude notoire dans leurs relations de travail, voire des dommages psychologiques. Vous en conviendrez, cela nuit fortement, d’une part, à l’efficacité du travail de ces agents, qui est pourtant une source de fierté pour eux, et, d’autre part, aux politiques publiques tournées vers les collèges en général, menées par les collectivités territoriales.
Monsieur le ministre, il est par conséquent urgent d’envisager, dans des délais rapprochés, l’unicité de la tutelle, qui doit être dorénavant effectivement et uniquement celle de la collectivité de rattachement, le département ou la région.
Au vu de ces éléments, le transfert de la tutelle des personnels de gestion des établissements concernés du ministère vers la collectivité me semble relever d’une impérieuse nécessité. J’ai d’ailleurs la certitude, au regard du contexte et des difficultés pesant sur les finances publiques de l’État, qu’il serait impossible à ce dernier de reprendre dans ses effectifs la totalité des personnels ATTEE transférés aux collectivités territoriales.
Envisagez-vous, monsieur le ministre, une réforme plus profonde du statut des personnels ATTEE au profit d’une autorité unique de tutelle détenue par les collectivités, lesquelles, souvent innovantes et pionnières, s’investissent pleinement dans leur mission, à vos côtés, auprès des collèges et lycées ?
Monsieur le sénateur Yves Rome, vous proposez d’approfondir les lois de décentralisation. En cet instant, il ne m’appartient pas de me prononcer sur ce que pourra être, au-delà des annonces faites par le Premier ministre au cours de sa déclaration de politique générale quant à une nouvelle organisation des territoires, le destin des ATTEE.
La loi du 13 août 2004 a élargi le champ des compétences des départements et des régions en leur transférant des missions d’accueil, de restauration, d’hébergement et d’entretien général et technique, ainsi que la gestion des personnels techniciens, ouvriers et de services, les TOS, devenus agents techniques territoriaux des établissements d’enseignement, ou ATTEE, qui exercent des fonctions absolument indispensables dans les collèges et lycées.
Le code de l’éducation leur reconnaît un rôle éducatif en liaison avec les autres personnels de l’établissement. C’est à ce titre qu’une double tutelle s’exerce, qu’il nous semble indispensable de maintenir.
Vous pouvez comprendre, monsieur le sénateur, qu’il n’est pas envisageable à ce stade que ces personnels soient rattachés fonctionnellement à une autre autorité que celle du chef d’établissement, désigné par la loi comme responsable de l’organisation et du fonctionnement de l’établissement public local d’enseignement, l’EPLE. Et je n’oublie bien sûr pas l’adjoint gestionnaire, qui seconde le chef d’établissement et qui est membre, je le rappelle, de l’équipe de direction de l’établissement.
Je tiens également à préciser que la mission de gestionnaire est essentielle au bon fonctionnement des établissements scolaires et au développement de projets d’établissement de qualité. Le ministère de l’éducation nationale a d’ailleurs régulièrement valorisé cette fonction.
Pour toutes ces raisons, il n’est pas prévu de modifier cet équilibre et de scinder l’équipe de direction en rattachant l’adjoint gestionnaire à la collectivité territoriale.
Le code de l’éducation prévoit par ailleurs la conclusion d’une convention entre l’établissement public local de l’enseignement et la collectivité territoriale à laquelle il est rattaché, afin de préciser les modalités d’exercice de leurs compétences respectives.
Je ne nie pas les difficultés que vous avez soulignées, notamment les revendications que peuvent exprimer les personnels, revendications liées à la confusion née de cette double tutelle. Mais nous considérons aujourd’hui que cette convention peut être l’occasion de résoudre de façon formelle et, si possible, durable les éventuelles difficultés résultant du double rattachement des agents techniques territoriaux à la collectivité territoriale, d’une part, et à leur établissement, d’autre part. Cette convention permettrait, par exemple, l’institutionnalisation d’échanges sur les règles de management et de gestion des personnels en vigueur chez chacun d’entre eux. Ce type de conventions est prévu pour résoudre ces difficultés. Il faut que l’ensemble des acteurs s’en saisissent de façon que les confusions, difficultés auxquelles vous avez fait allusion soient résolues.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, nous agissons pour permettre à chacune et à chacun de s’investir dans les meilleures conditions possible au service de notre école et de la réussite des élèves, bien conscients que nous avons besoin de tous les acteurs, notamment des agents techniques, pour mener à bien cette tâche colossale.
Monsieur le ministre, vous comprendrez aisément que je ne puisse partager la totalité de vos analyses dans la mesure où, en notre République, un principe simple, qu’il ne faut jamais oublier, s’applique : qui paie commande. Or le fonctionnement de l’ensemble des établissements, collèges et lycées est totalement ou très majoritairement assumé par les collectivités départementales.
La proposition qui vous est faite vise non pas à nuire à la qualité pédagogique, mais bien au contraire à améliorer cette dernière par le rattachement des personnels de gestion à l’autorité départementale, qui pourrait par convention, comme vous l’avez souligné, assurer un bon fonctionnement des établissements scolaires.
Je pourrais aller au-delà, monsieur le ministre, puisque ma question ne retient que peu votre attention, en vous indiquant qu’il serait également souhaitable, en vue d’un approfondissement de la décentralisation, que la collectivité départementale, sur un même territoire, puisse gérer les lycées, comme elle le fait déjà pour les collèges. Voilà une autre piste à laquelle je vous invite à réfléchir.
La parole est à M. Michel Le Scouarnec, auteur de la question n° 683, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
Monsieur le ministre, le permis de conduire constitue un enjeu majeur en termes de mobilité, d’insertion sociale et professionnelle pour tous nos concitoyens.
Ce postulat posé, il est nécessaire de rappeler quelques chiffres : on compte aujourd’hui plus d’un million de places disponibles pour au moins deux millions de candidats en attente, voire bien plus, certains syndicats parlant de trois ou quatre millions.
Cet écart déjà extrêmement important n’a été que renforcé par le schéma d’emplois inscrit au projet de loi de finances pour 2014, qui programme pourtant, sur l’ensemble de la France, une diminution des effectifs des inspecteurs et délégués du permis de conduire à hauteur de 35 équivalents temps plein, après une perte déjà constatée de 40 postes ces deux dernières années.
Il y a donc un double problème.
Le premier est celui du délai, puisqu’il faut attendre de quatre à six mois pour un premier passage, et parfois un an, voire quelquefois plus pour certains, notamment en Bretagne.
Le second problème est financier : ce délai oblige les candidats à prendre de nombreuses heures de cours dans l’attente d’un créneau, afin de rester au niveau. Cette contrainte pèse sur le budget des ménages, des personnes les plus modestes et en particulier des jeunes, souvent obligés de s’endetter alors qu’un quart d’entre eux restent à la porte du premier emploi assez longtemps. Quand j’ai passé le permis de conduire en 1968, le délai d’attente était déjà de cinq mois : il fallait prendre des leçons supplémentaires, ce qui coûtait déjà cher. Dans le Morbihan, le coût d’un permis de conduire serait au-dessus de la moyenne nationale tant les places sont rares et les délais importants.
Il existe aussi une contradiction avec la mise en place, au mois de septembre 2013, d’un groupe de travail ayant pour ambition la réduction des délais de présentation. Cette baisse annoncée des effectifs contredit totalement cet objectif puisque ces postes perdus préfigurent une fragilisation d’un système qu’il conviendrait a contrario d’optimiser par un recrutement adéquat.
Aujourd’hui, l’essentiel du temps de travail des agents du Morbihan est consacré aux examens, au détriment de leur autre mission : le suivi des conditions d’apprentissage.
Ce service public demeure plus que jamais un gage d’égalité et de cohésion sociale grâce, notamment, au maillage territorial des nombreux centres d’examen du permis de conduire.
La baisse du nombre d’inspecteurs aurait inévitablement pour corollaire la fermeture de certains centres. Les propositions structurelles du groupe de travail du Centre national de la sécurité routière, le CNSR, le prévoient d’ailleurs déjà. Alors que l’État envisage un permis moins cher, ce qui est positif, il en résulterait un coût supplémentaire pour les usagers : dans le Morbihan, les candidats seraient contraints d’effectuer plusieurs dizaines de kilomètres en moyenne pour passer leur examen.
Tous les citoyens pâtissent de cette baisse de qualité du service public des examens du permis de conduire. Et que dire de l’éducation à la sécurité routière, les effets positifs de l’accumulation de radars restant encore à démontrer ?
Monsieur le ministre, avez-vous l’intention d’engager une démocratisation la plus large possible du permis de conduire et de consolider les moyens d’apprentissage en pérennisant les conditions de travail des inspecteurs ?
Cette question intéresse des millions de jeunes et leur famille. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre.
Monsieur Le Scouarnec, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser M. le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, qui est retenu place Beauvau.
Vous avez souhaité interroger M. Cazeneuve sur la situation des centres d’examen du permis de conduire en Bretagne, plus particulièrement dans votre cher département du Morbihan, également cher à mon cœur.
Avant d’en venir plus précisément à la situation bretonne et morbihannaise, je voudrais faire un commentaire sur le permis de conduire.
Je rappelle que, dans le cadre de la loi relative à la consommation, une disposition extrêmement importante a été adoptée sur le permis de conduire qui prévoit désormais l’interdiction pour les écoles de conduite d’exiger des frais de transfert ou de restitution quand un apprenti conducteur veut changer d’école de conduite. Jusqu’à présent, il pouvait dans ce cas se voir facturer de 50 à 200 euros de frais de transfert ou de frais de restitution. Désormais, ces frais seront illégaux.
Cette loi, que la majorité a votée, qui a même reçu des suffrages au-delà de la majorité et, plus généralement, au-delà des travées de gauche, a été promulguée et elle s’appliquera. C’est un point important lorsqu’on sait le coût du permis de conduire – vous l’avez à juste titre souligné – et combien sa détention est essentielle à la mobilité, notamment pour obtenir, voire conserver un emploi. Il est indispensable de jouer sur les tarifs, et l’interdiction des frais de restitution et de transfert permettra une économie pouvant aller jusqu’à 200 euros sur le prix moyen des leçons nécessaires au passage du permis de conduire.
Revenant maintenant sur la question que vous avez posée au ministre de l’intérieur, je souligne que le délai de passage à l’épreuve pratique de l’examen du permis de conduire ainsi que celui entre deux présentations dépendent de plusieurs facteurs : le taux de réussite des établissements d’enseignement de la conduite, le nombre de candidats présentés pour la première fois par l’école de conduite et le nombre d’inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière.
Chaque établissement se voit attribuer des places en fonction de son activité, et choisit les candidats qu’il présente. Les délais d’attente des candidats découlent de cette décision.
Par ailleurs, cette méthode d’attribution est complétée par plusieurs dispositifs – système d’entraide national appelé « réserve nationale » favorisant des renforts d’inspecteurs, mise en place d’examens supplémentaires en soirée ou le samedi – permettant d’augmenter l’offre d’examens au niveau départemental.
Malgré ces mesures, le délai moyen d’attente entre deux présentations reste d’environ 98 jours au niveau national. Dans le département du Morbihan, il est inférieur à la moyenne nationale, soit 88 jours, tandis qu’en Bretagne, il est de 104 jours. Mais un délai de 88 jours, même s’il est inférieur à la moyenne nationale, reste, reconnaissons-le, tout de même important.
Cette situation a été prise en compte par la délégation à la sécurité et à la circulation routières, la DSCR, qui s’est efforcée de venir en aide à la région Bretagne via le système de la réserve nationale. Ainsi, au cours des douze derniers mois, la Bretagne a bénéficié d’environ 26 jours par mois au titre de la réserve nationale, ce qui a permis de raccourcir les délais entre deux présentations dans cette région.
En outre, Manuel Valls, quand il était ministre de l’intérieur, avait demandé à la présidente de la commission « jeunes et éducation routière » du Centre national de la sécurité routière de mener, à partir de l’automne 2013, une large concertation sur ce sujet auprès de tous les interlocuteurs concernés et de proposer un plan d’actions.
Une série de mesures dites « d’urgence » a été présentée et immédiatement mise en œuvre à la fin de 2013. Ces mesures sont destinées principalement à permettre la création d’une offre de places supplémentaires : recrutement en 2014 de 25 inspecteurs supplémentaires, octroi d’une enveloppe de 60 000 examens supplémentaires en 2014, système de renforts afin de compenser les inégalités territoriales.
Ces mesures doivent également permettre un meilleur fonctionnement du dispositif, la relance de la démarche d’harmonisation des pratiques d’évaluation des inspecteurs en examen B, la promotion des différentes formes de conduite accompagnée, l’amélioration de l’information et de la concertation au sein des instances nationale et départementales dédiées à l’attribution des places d’examen.
Les préconisations du groupe de travail concernant les mesures structurelles vont être remises à M. Bernard Cazeneuve dans les prochains jours. Au regard des enjeux pour notre jeunesse, M. le ministre de l’intérieur sera particulièrement attentif à cette question et mettra rapidement en œuvre les réponses qui sont nécessaires et que nous souhaitons durables.
Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir rappelé la mesure positive de la loi de consommation relative aux frais de transfert d’une école à une autre. Néanmoins, par rapport à la diminution du nombre d’inspecteurs, des progrès restent à faire.
Le délai que vous avez indiqué pour le Morbihan est moins important que je ne le croyais. Il me semblait que ce délai était supérieur à la moyenne nationale, donc bien plus long. Selon vous, il n’en serait rien, ce serait même le contraire. Apparemment, je n’ai pas les bons chiffres.
La question du recours à l’emploi des inspecteurs retraités se pose aussi. Cette mesure a été d’autant plus critiquée que le chômage de masse explose depuis plusieurs années – cela ne date en effet pas d’hier – et que des personnes non retraitées pourraient occuper ces emplois d’inspecteurs. D’une manière générale, nous sommes favorables au renforcement du nombre d’inspecteurs afin que ce service public remplisse pleinement, en plus des examens du permis de conduire, ses missions de suivi en matière de sécurité routière.
L’austérité fragilise depuis plusieurs années les services publics – on l’a déjà vu à propos du CIO tout à l’heure –, et partant notre société ; il faut donc la combattre.
La parole est à Mme Aline Archimbaud, auteur de la question n° 687, adressée à Mme la ministre des outre-mer.
Madame la ministre des outre-mer, lorsque l’on évoque les problématiques liées au parc amazonien de Guyane, on pense surtout aux difficultés d’éradication de l’orpaillage clandestin.
Mais un autre drame touche ce territoire, aux conséquences humaines aussi préoccupantes : en quatre ans, il y a eu douze suicides sur le Haut-Maroni, soit une moyenne de dix tentatives et de trois suicides par an, pour une population d’à peine 1 000 habitants.
Si le taux de prévalence du suicide en métropole était le même que sur ce territoire, il y aurait en France 300 000 suicides par an, soit l’équivalent de la population guyanaise tout entière.
Ce n’est pas un hasard si les peuples autochtones, qu’ils soient du Canada, des États-Unis, d’Australie ou de Guyane, font partie des populations les plus exposées au risque suicidaire. En Guyane par exemple, les villageois du Maroni et de l’Oyapock doivent faire face à des conditions de vie considérablement dégradées. Ils vivent selon un mode ancestral de droit coutumier, que la France n’a jamais voulu reconnaître : elle a ainsi refusé systématiquement de ratifier la convention n° 169 de l’Organisation internationale du travail qui reconnaît le droit des peuples indigènes et tribaux.
Le territoire du parc national de Guyane a été habité et cultivé depuis des millénaires par les premiers habitants de ce territoire : les peuples autochtones du plateau des Guyanes, qui n’ont pas attendu la création du parc pour préserver et valoriser la biodiversité exceptionnelle qui y règne.
Ils sont la valeur ajoutée et les meilleurs connaisseurs de ce territoire ; ils ont su tirer profit de ses richesses en respectant profondément son patrimoine.
Madame la ministre, comment répondre aux aspirations quotidiennes de ces personnes, à leur bien-être, à leurs besoins essentiels, au respect de leur mode de vie, de leur culture et de leurs connaissances ancestrales ?
Pour lutter efficacement contre ce fléau, quand l’école élémentaire et le collège seront-ils enfin adaptés à la culture amérindienne, les aides à la mobilité développées, la présence des services publics renforcée et la prise en charge des addictions ainsi que les équipes mobiles de psychiatrie intensifiées ?
Quand la convention n° 169 de l’Organisation internationale du travail, qui reconnaît le droit des peuples indigènes et tribaux, sera-t-elle ratifiée ?
Enfin, comment garantir la poursuite du programme contre les suicides mené par l’association ADER sur le Haut-Maroni, et éventuellement lancer un programme similaire sur le Haut-Oyapok ?
Madame la sénatrice, vous soulevez une question difficile sur laquelle le Gouvernement, et notamment le ministère des outre-mer, s’est déjà penché.
Le suicide est toujours un drame individuel difficile à analyser. Dans la région du fleuve, nous avons malheureusement également déploré le suicide d’enseignants métropolitains. Ce sujet grave ne concerne donc pas uniquement les communautés amérindiennes.
Néanmoins, ce type de problème survient plus fréquemment dans ces régions, ce qui sollicite notre responsabilité. Ces territoires, qui sont d’ailleurs magnifiques, accueillent des hommes et des femmes dont la culture, le vécu et les traditions sont différents de ceux de la majorité des Français.
Nous devons faire entrer ces populations dans la modernité, pour leur permettre d’appréhender un certain nombre d’exigences de la vie moderne, tout en respectant leur mode de vie.
Chaque citoyen de notre pays a le droit d’avoir une place correspondant à ses attentes ; aujourd’hui, nous constatons que les Amérindiens s’inscrivent aussi dans une démarche de modernité.
À cet égard, je me réjouis que, pour la première fois, une femme amérindienne, Mme Cornélie Sellali Bois-Blanc, ait été élue maire à Iracoubo et que des bureaux de vote aient ouvert dans les villages amérindiens du Haut-Maroni et de Taluen.
Il est vrai que nous devons faire face à une forme de désarroi de la population amérindienne, ce qui nous amène à agir dans divers domaines.
Dans le domaine de l’éducation, qui m’est familier en raison de mes attributions antérieures, la question est de savoir comment rendre l’éducation accessible à tous, notamment aux jeunes qui vivent dans des villages particulièrement éloignés et qui ont des racines culturelles différentes.
Vous le savez, nous avons créé des écoles de proximité de façon à éviter que de très jeunes enfants n’aient à faire de longs trajets en pirogue pour rejoindre un établissement scolaire. Nous espérons que, de la sorte, ils seront moins dépaysés pour aborder les apprentissages, à tout le moins au niveau de l’école maternelle.
Nous avons aussi des intervenants en langue maternelle pour accueillir les enfants, lesquels ne parlent le plus souvent pas du tout le français, pour les familiariser à l’école dans leur langue maternelle et leur environnement avant de commencer l’apprentissage de la langue française. Ainsi, l’accès à l’école sera moins traumatisant pour eux.
Nous avons aussi reconnu, dans la loi du 8 juillet 2013, la place des langues vernaculaires, notamment amérindiennes ou créoles, dans l’enseignement. C’est également une manière de rendre moins traumatisant pour un enfant le passage de la vie dans son village à la vie à l’école.
Par ailleurs, un ensemble de dispositions ont été prises pour lutter contre le mal-être des populations amérindiennes. Vous avez évoqué le plan préfectoral de lutte contre le suicide du 21 janvier 2011, qui porte notamment sur les questions de santé et d’addiction.
Le secteur associatif est également très mobilisé. Vous avez évoqué l’ADER, qui travaille sur un programme global de prévention communautaire du suicide dans le Haut-Maroni. Nous avons aussi essayé de prendre en compte les problèmes d’addiction, notamment à l’alcool, qui fragilisent ces populations.
Sur la question de l’isolement, de nombreux efforts sont faits pour aider notamment les jeunes Amérindiens qui sont pris entre deux mondes – leur monde traditionnel et celui de l’école.
Il convient enfin de garantir la continuité territoriale. Sur ce point, de nombreuses mesures ont été prises.
Enfin, vous avez évoqué, madame la sénatrice, la question de la convention n° 169 de l’Organisation internationale du travail relative aux peuples indigènes et tribaux. Cette question soulève une difficulté à laquelle nous nous heurtons également dans de nombreux autres domaines. La Constitution garantit l’égalité et l’unicité du peuple français. Par conséquent, il est très difficile de donner des droits spécifiques à une partie de ce peuple, notamment aux peuples autochtones. Pour autant, cela ne nous dispense pas d’essayer de faire en sorte que les pratiques et les savoirs locaux de ces populations qui vivent sur le fleuve puissent être pris en compte.
Madame la sénatrice, la tâche est difficile, mais je suis certaine que nous vous trouverons à nos côtés pour essayer d’avancer dans l’intérêt des peuples autochtones.
Madame la ministre, je vous remercie d’avoir répondu de façon précise aux questions que je vous ai posées.
En effet, le sujet est grave et difficile, comme vous l’avez reconnu. Je suis tout à fait disposée à voir avec vous comment travailler ensemble pour avancer.
Quant à la ratification de la convention n° 169, il faut se pencher de plus près sur la question pour essayer de trouver une solution positive.
La parole est à M. Michel Houel, auteur de la question n° 695, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
.Ma question, qui s’adressait à M. Bernard Cazeneuve – et je vous remercie par avance, madame la ministre, de répondre à la place de votre collègue ministre de l’intérieur – porte sur les conséquences sur la profession de photographe du décret du 18 décembre 2013 relatif à la durée de validité de la carte nationale d’identité.
Le 1er janvier 2014, la durée de validité de la carte nationale d’identité est passée de dix à quinze ans. Cette mesure participe, certes, à la baisse des dépenses publiques, mais entraîne des effets catastrophiques pour les professionnels de la photographie.
L’Association pour la promotion de l’image, l’API, estime le nombre de cartes nationales d’identité concernées à 5, 8 millions, soit autant de photographies qui ne seront pas réalisées et, en conséquence, une perte de chiffre d’affaires annuel de l’ordre de 40 millions d’euros.
Ainsi, Photomaton va perdre plus de 20 % de son chiffre d’affaires. Cela signifie la fermeture d’unités en France, avec des effets induits importants sur toute la filière d’exploitation des cabines, qu’il s’agisse des entreprises de logistique, de réparation, voire de tôlerie.
Au total, ce sont 9 000 emplois et 4 000 magasins de photographes qui sont condamnés par cette décision. Cela représente autant de commerces qui disparaîtront dans nos communes.
Je vous demande donc d’engager rapidement un dialogue constructif avec les professionnels pour trouver une solution acceptable pour tous. Le but est de soutenir une économie photographique, lourdement pénalisée, qui pourrait disparaître, et de tenter de sauver des emplois.
C’est un maire d’une commune de 5 000 habitants qui a encore la chance d’avoir un photographe qui vous parle ! Je m’étais d’ailleurs déjà battu ici même contre la décision de faire réaliser les photographies des passeports par nos collectivités, alors qu’il y a des professionnels dont c'est le métier. Aujourd'hui, ma question s’inscrit dans la continuité de cette précédente intervention.
Monsieur le sénateur, vous attirez l’attention de Bernard Cazeneuve sur une conséquence inattendue de la modification législative qui a étendu de dix ans à quinze ans la durée de validité des cartes nationales d’identité.
Dans un premier temps, nous étions surtout attentifs au fait que cette mesure devait simplifier la vie des citoyens.
À titre personnel, j’avais trouvé un inconvénient à la modification : les règles à respecter – ne pas sourire, ne pas porter de bijoux voyants – ne rendent en effet pas les photographies destinées aux papiers d’identité très avantageuses !
Mais, monsieur le sénateur, vous avez évoqué une question beaucoup plus difficile : l’incidence sur l’activité de la filière photographique de l’allongement de la durée de validité des cartes d’identité.
Il faudra regarder cela de plus près, car cette décision a sans aucun doute des conséquences sur l’activité des photographes et de la société Photomaton.
Permettez-moi toutefois de faire remarquer que la situation des professionnels de la photographie a déjà été prise en considération dans la gestion de la délivrance des passeports, puisque, à ma connaissance, les appareils photographiques intégrés au dispositif de recueil ont été désactivés. Cette mesure a permis aux photographes de continuer leur activité.
Pour l’instant, il n’est pas prévu de suspendre la décision relative aux cartes d’identité. Cette mesure constitue une simplification pour les usagers, et la situation de ces derniers doit être prise en compte. Il y aura lieu de travailler avec les filières sur les évolutions nécessaires de la profession. Cette dernière supporte également, me semble-t-il, l’incidence du développement des téléphones portables, qui permettent de prendre des photos à tout moment.
Monsieur le sénateur, je suis désolée de ne pas pouvoir vous apporter une réponse plus satisfaisante à vos yeux. Le dialogue entre les professionnels et les ministres responsables du social et de l’industrie doit à mon avis s’imposer.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Bien sûr, elle ne me satisfait pas complètement, mais je la comprends parfaitement.
En quinze ans, le visage change. Regarder la photographie de sa carte d’identité sera une façon comme une autre de ne pas vieillir ! §
Mes chers collègues, dans l’attente de l’arrivée de M. Cuvillier, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix heures dix, est reprise à dix heures quinze.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac, auteur de la question n° 724, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Monsieur le ministre, en 2013, le département des Pyrénées-Atlantiques a connu 4 jours de vigilance rouge pour avalanches et inondations, 20 jours de vigilance orange pour inondations, avalanches, fortes pluies, vents, orages et neige et 228 jours de vigilance jaune pour les mêmes phénomènes.
Nous savons que les objectifs de réduction des dépenses publiques et de modernisation de l’action publique que s’est fixés le Gouvernement sont courageux, mais toute vision globale manque de substrat sans une approche plus précise des cas particuliers qui la constituent.
Alors que la révision générale des politiques publiques engagée par l’ancienne majorité a prévu, de 2012 à 2017, la fermeture de 55 des 108 centres de Météo-France qui existent sur le territoire français, celui de Pau-Uzein semble condamné à l’horizon 2016.
Monsieur le ministre, ce cas particulier me semble devoir être observé avec davantage d’attention. Je vais m’en expliquer.
Tout d’abord, l’aéroport international de Pau-Pyrénées, qui a accueilli 600 000 voyageurs en 2012, est équipé pour l’atterrissage tout temps. Sa fiabilité est évidemment renforcée par la présence du centre météorologique.
En outre, comme vous le savez, il existe une forte activité militaire sur la plate-forme aéroportuaire paloise. Les unités militaires, notamment celles du 5e régiment d’hélicoptères de combat et de l’école des troupes aéroportées, ont besoin d’informations météorologiques précises, que seul le centre de météo de Pau peut leur délivrer.
Par ailleurs, le maintien du centre météorologique est une nécessité compte tenu des prévisions précises dont a besoin le site SEVESO de Lacq, site industriel très important que vous connaissez.
Le centre météorologique de Pau-Uzein trouve également son utilité en raison du caractère agricole du département, qui exige une bonne anticipation des évolutions du temps.
Enfin, dans notre département en partie montagneux, le centre départemental de météorologie est un maillon indispensable pour les secours en montagne et pour l’évaluation des risques d’avalanche, qui sont nombreux. Il l’est aussi pour les routes internationales, lesquelles desservent notamment l’usine Toyal Europe, située en haute montagne, ainsi que le territoire d’Aragon, en Espagne.
Monsieur le ministre, à Pau, Météo-France commença à enregistrer et à conserver ses premières données dès 1921, et le centre de Pau-Uzein fut créé en 1945. Autrement dit, Météo-France a plus de cent ans d’histoire commune avec le département !
Aujourd’hui, le centre est composé de sept agents, qui remplissent un grand nombre de missions, toutes plus importantes les unes que les autres, parmi lesquelles on trouve, en premier lieu, celle, bien connue, de l’observation du temps. Pour cela, il bénéficie d’un réseau climatologique local basé sur dix stations automatiques et quarante observateurs bénévoles.
La deuxième mission fondamentale du centre est le service public de la sauvegarde des personnes et des biens. Lors d’épisodes météorologiques importants, Météo-France met ses compétences au service de la préfecture et de la protection civile quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
Le centre participe également aux rapports d’expertise pour les déclarations de catastrophe naturelle, ce qui demande une connaissance de la géographie locale extrêmement poussée, ainsi qu’à la confection des bulletins d’appui pour les écobuages, qui constituent une spécificité du département.
Enfin, il collecte et exploite les données permettant une meilleure connaissance du climat local.
Face à l’étendue de ces missions, remplies par des agents opérationnels tous les jours, de six heures à vingt et une heures, des questions évidentes se posent.
La première question tient à l’efficience de la réorganisation territoriale de Météo-France dans le cas où le centre de Pau-Uzein viendrait à disparaître. En effet, il semblerait que la répartition des missions entre les centres de Biarritz et de Bordeaux ne soit pas encore tout à fait établie. Il serait même question de transmettre la partie relative à la montagne au centre de Tarbes, dans les Hautes-Pyrénées.
Au regard de ces quelques éléments, on comprend bien les inquiétudes qui montent, ici ou là, dans cette partie du département des Pyrénées-Atlantiques, quant à la qualité des services. Nous entendons parfaitement que les outils utilisés sont de plus en plus performants. Il n’empêche, nous avons des doutes sur l’efficacité du service rendu aux utilisateurs et aux collectivités locales : il est difficile de croire que des outils, aussi performants soient-ils, puissent produire un rendu aussi précis et efficace qu’une équipe de sept agents, tous béarnais ou pyrénéens, travaillant sur ce territoire de façon continue depuis des années et ayant une connaissance poussée du terrain.
La seconde question qui reste en suspens, et qui est sans doute la plus importante, est celle de la situation des agents, lesquels pourraient se voir contraints à une mobilité. Monsieur le ministre, leur situation doit être clarifiée le plus rapidement possible !
Tous ces éléments nous conduisent à nous interroger sur la pertinence de la fermeture du centre de Météo-France de Pau-Uzein, en particulier si l’on considère le contexte actuel du département des Pyrénées-Atlantiques, qui, comme de nombreux départements de la façade atlantique, se relève doucement des épisodes climatiques particulièrement violents de l’été et de l’hiver derniers.
Pouvons-nous être certains que, sans le centre de Pau-Uzein, ces derniers mois, les informations auraient été transmises aux autorités compétentes avec la même rapidité et la même qualité ? En aucun cas ! Je crois même que, ces derniers temps, des vies humaines ont pu être sauvées grâce aux agents de ce centre, ce dont je les remercie.
Aussi, monsieur le ministre, je vous prie de bien vouloir m’indiquer l’état d’avancement réel de cette fermeture et, le cas échéant, les moyens qui seront mis en œuvre en vue du maintien en tous points de la qualité du service.
Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Ségolène Royal qui, empêchée, m’a demandé de répondre à votre question.
Météo-France joue un rôle-clé dans la prévision des événements climatiques et dans notre politique de prévention des risques. C’est un service public utile aux territoires, à leur économie et à l’ensemble des professions dont l’activité est dépendante des aléas climatiques. Mme Ségolène Royal est très attachée à la qualité de ses missions.
Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie entend l’inquiétude dont vous vous faites le relais : l’inquiétude légitime des personnels quant à leur avenir, la fermeture du centre météorologique de Pau, envisagée à l’horizon 2016, s’inscrivant dans le cadre d’une réorganisation du réseau de l’établissement public.
Toutefois, à la fin de cette même année 2016, l’établissement conservera 55 implantations territoriales et un réseau qui restera le plus dense d’Europe. La précision dans la prévision météorologique sera maintenue, grâce à d’importants progrès techniques en matière de prévision numérique, de systèmes d’observation météorologique et de technologies de communication.
Dans ce contexte, il n’est plus nécessaire de maintenir un centre météorologique dans chaque département : le maintien d’un centre compétent pour deux ou trois départements semble davantage approprié. En effet, un tel périmètre de responsabilité permet une connaissance fine des spécificités locales, tout en donnant aux centres météorologiques une taille pertinente, avec un encadrement renforcé et une expertise de qualité. Comme dans les autres régions, cette nouvelle organisation garantira une réponse rapide des cellules de crise mises en place auprès des préfets.
Au demeurant, les prévisions de Météo-France s’inscrivent, depuis de nombreuses années, dans un système national, piloté à Toulouse, le cadrage établi à partir de divers modèles numériques étant ensuite décliné et affiné progressivement à des échelons interrégional, régional et local.
Les fonctions exercées par le centre départemental de Pau seront reprises par le centre de Bordeaux, qui assure une permanence de service vingt-quatre heures sur vingt-quatre et s’appuiera, par ailleurs, sur le centre météorologique de Biarritz.
L’établissement a prévu, en concertation avec les organisations syndicales représentatives, un accompagnement individuel des agents concernés par une mobilité géographique ou professionnelle à l’occasion de cette réorganisation, pour définir une évolution de carrière correspondant à leurs attentes.
Les missions de service public continueront d’être remplies avec la même exigence qu’aujourd’hui, tout comme les prestations commerciales, au rang desquelles figurent les bulletins d’information que vous avez mentionnés. Le département des Pyrénées-Atlantiques continuera à bénéficier de prévisions météorologiques tenant compte de ses spécificités et des services d’appui et d’expertise nécessaires pour la gestion des événements météorologiques dangereux.
Madame la sénatrice, cette réorganisation met à profit les avancées techniques les plus pointues dans le domaine de la météorologie, pour maintenir un service de qualité en direction des acteurs locaux, tout en contribuant à l’optimisation des ressources que l’État alloue à Météo-France.
Monsieur le ministre, vous le comprendrez, cette réponse ne peut évidemment pas me satisfaire.
Je tiens à souligner de nouveau l’importance du centre de Météo-France de Pau-Uzein pour l’ensemble du département des Pyrénées-Atlantiques. J’ai bien écouté votre réponse, mais je me dois de relayer, dans cet hémicycle, les inquiétudes qu’y suscite l’annonce de sa fermeture.
Il ne faut pas oublier que, comme toute la façade atlantique, les Pyrénées-Atlantiques se relèvent doucement des intempéries particulièrement violentes que le littoral a connues cet hiver. Monsieur le ministre, vous le savez bien, et je vous remercie d'ailleurs de vous être récemment déplacé à Anglet.
Or, c’est pendant cette convalescence que l’on annonce la fermeture d’un des acteurs majeurs de la protection des personnes lors de ces événements ! Cela soulève des interrogations. Au plus fort des intempéries, le centre de Pau-Uzein faisait un point toutes les deux heures avec la préfecture, le service des crues, les pompiers. À ce moment, croyez-moi, il était précieux d’avoir des femmes et des hommes au plus près du terrain, connaissant le moindre cours d’eau ! Et que dire des écobuages, pratiqués dans le département et si importants pour les terres agricoles ? C’est encore le centre de Météo-France de Pau-Uzein qui établit le bulletin météo d’appui pour la préfecture !
Monsieur le ministre, je vous assure que tout cela a un sens pour la population, et il me semble que le signal que l’on va envoyer, celui du retrait d’un nouveau service public de proximité, n’est pas le bon.
C’est tout de même à cent ans d’histoire commune entre Météo-France et les Pyrénées-Atlantiques que l’on s’apprête à mettre un terme. Ce n’est pas rien !
J’entends que les économies sont absolument nécessaires pour le redressement de notre pays, et vous savez que vous pouvez compter sur le groupe socialiste du Sénat pour vous aider dans cette tâche difficile. Toutefois, il est aussi de notre devoir de parlementaires de vous alerter lorsqu’il est procédé à certaines coupes budgétaires de manière aveugle. Il y va également de la légitimité des parlementaires, notamment des sénateurs, sur ces questions qui ont une incidence directe sur nos départements !
La parole est à Mme Marie-Françoise Gaouyer, auteur de la question n° 690, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Monsieur le secrétaire d’État, ma question concerne les établissements publics territoriaux de bassin, les EPTB, reconnus depuis la loi de juillet 2003 comme les acteurs de référence en matière de politique de l’eau à l’échelle d’un bassin versant ou d’un sous-bassin.
Depuis dix ans, ces établissements ont acquis une expérience et un savoir-faire irremplaçables. Au-delà de leur rôle essentiel dans la prévention des inondations, la préservation des zones humides et la gestion équilibrée de la ressource eau, qui constituent leur cœur de compétence, les EPTB ont apporté une contribution décisive à notre connaissance de ces espaces et à leur valorisation auprès du public.
À titre d’exemple, l’EPTB de la Bresle mène des actions aux échelles adaptées, à la demande des collectivités ou même des agriculteurs : engagement des travaux de restauration de la continuité écologique, avec des résultats concluants en termes de remontée des poissons migrateurs ; lancement d’une étude pour lutter contre les érosions et les ruissellements sur un sous-bassin ; animation, avant sa validation, du schéma d’aménagement et de gestion des eaux…
Monsieur le ministre, en intégrant les EPTB aux dispositifs de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, la MAPAM, au titre de la gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations, la Gémapi, compétence désormais dévolue aux établissements publics de coopération intercommunale – les EPCI – à fiscalité propre, avec possibilité de délégation vers un EPTB, vous avez reconnu cette expérience ainsi que la pertinence de la gestion par bassin versant, seule à même d’apporter la cohérence indispensable pour des espaces qui ne connaissent pas nos frontières administratives.
Toutefois, le transfert ou la délégation de cette compétence restent volontaires, ce qui fragilise les EPTB actuels. De plus, ceux-ci n’ont été que partiellement intégrés puisque la version actuelle de la loi ne fait référence qu’aux syndicats mixtes, qui ne sont qu’une forme d’organisation administrative de ces établissements. En effet, parmi les trente-six EPTB, dix sont des institutions interdépartementales.
Cette décision d’écarter un quart des établissements est étonnante et préjudiciable. Tout d’abord, elle crée des ambiguïtés localement : certains EPCI vont devoir prendre en charge la Gémapi, sans expérience et avec peu de moyens, alors même qu’un EPTB interdépartemental assurait jusqu’alors cette compétence avec succès. Or il est impossible pour les EPCI de donner délégation à un tel EPTB pour assurer cette compétence ! Faudra-t-il que l’EPTB disparaisse et que les EPCI reprennent le travail à zéro ? Faudra-t-il que l’EPTB change de forme et devienne un syndicat mixte ?
Cette seconde solution n’est pas intrinsèquement mauvaise, mais elle comporte des risques. Détruire une institution pour recréer un syndicat mixte serait long, juridiquement complexe et politiquement périlleux. En particulier, le désengagement de certains départements, au regard notamment des contraintes budgétaires qu’ils connaissent, est à craindre. Vous le voyez, cette solution, si souhaitable soit-elle, recèle des fragilités à tous les étages !
Monsieur le ministre, quel avenir le ministère du développement durable réserve-t-il aux EPTB interdépartementaux ? L’État est-il prêt à les accompagner activement dans la transition que vous semblez appeler de vos vœux ? Enfin, comment envisagez-vous de renforcer sur tout le territoire national la logique globale de gestion par bassin versant, seule à même d’assurer les solidarités entre collectivités ?
Madame la sénatrice, je vais vous faire connaître la réponse de Mme Ségolène Royal.
La politique de gestion des milieux aquatiques et de prévention des risques d’inondations et de submersion nécessite la structuration d'une maîtrise d'ouvrage territoriale en charge de la gestion permanente des ouvrages hydrauliques, la maîtrise de l'urbanisation des zones exposées, la gestion intégrée des cours d'eau et une sensibilisation des élus et de la population.
Ces compétences étaient jusqu'alors facultatives et partagées entre tous les niveaux de collectivités. La loi MAPAM, la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, a donc attribué aux communes une compétence ciblée et obligatoire relative à la gestion des milieux aquatiques et à la prévention des inondations. Toutefois, ces compétences pourront être exercées, en lieu et place des communes, par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ou être déléguées ou encore être transférées si les communes adhèrent à des groupements de collectivités.
La loi distingue désormais trois échelles cohérentes pour la gestion des milieux aquatiques : le bloc communal, assurant un lien étroit et pérenne entre la politique d'aménagement et les missions relatives à la gestion du milieu aquatique et la prévention des risques d'inondation ; l'établissement public d'aménagement et de gestion de l'eau – l’EPAGE – en charge de la maîtrise d'ouvrage locale et de l'animation territoriale dans le domaine de l'eau à l'échelle du bassin versant de cours d'eau ; l'établissement public territorial de bassin – l’EPTB –, en charge de missions de coordination et de maîtrise d'ouvrage de projets d'intérêt commun à l'échelle du groupement de bassins versants.
Lors du vote de la loi MAPAM, le législateur a décidé que les institutions interdépartementales ne pourraient plus être reconnues comme EPTB. Ces groupements, essentiels pour la mise en œuvre de la politique de l'eau, devront donc évoluer en syndicats mixtes. L'introduction d'une période transitoire pour leur permettre de le faire dans de bonnes conditions pourrait cependant être opportune. Un amendement du Gouvernement a été adopté en ce sens par le Sénat ces derniers jours dans le cadre du projet de loi d'avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
Plus largement, pour encourager le regroupement des collectivités à des échelles cohérentes sur le plan hydrographique, ne pas déstabiliser les structures existantes et garantir la solidarité territoriale, les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux doivent identifier dès 2015 les bassins, les sous-bassins ou les groupements de sous-bassins hydrographiques qui justifient la création ou la modification du périmètre des EPTB et des EPAGE.
Cette réforme entrera en vigueur le 1er janvier 2016. Le Comité national de l'eau et la Commission mixte inondation se sont réunis le 2 avril dernier pour examiner ses modalités de mise en œuvre avec les représentants de tous les partenaires concernés. Une mission d'appui sera constituée dans chaque bassin, sous l'autorité du préfet coordonnateur de bassin, pour accompagner la réforme.
Par ailleurs, les structures assurant des missions de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, à la date de publication de la loi MAPAM, continuent à exercer les compétences qui s'y rattachent jusqu'au transfert de celles-ci aux EPCI à fiscalité propre et, au plus tard, jusqu'au 1er janvier 2018.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État, et je vous prie de faire savoir à Mme Royal que nous serions ravis de la recevoir.
Sur la Bresle, qui est un fleuve très riche en poisson, notamment en saumon, la gestion diffère d’un versant à l’autre, d’un département à l’autre, voire d’une région à l’autre. C'est de là que surviennent les problèmes. Il faut en outre savoir qu’une communauté de communes interrégionale est impliquée.
La parole est à Mme Delphine Bataille, auteur de la question n° 728, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Le 28 janvier dernier, une délégation conduite par M. Gérard Dupagny, président de l'association À fond de train, a été reçue par la direction Intercités de la SNCF à propos de la suppression, les week-ends et les jours fériés, de l'arrêt, sur la ligne Paris-Maubeuge, de l'Intercités dit « train Matisse » à la gare du Cateau-Cambrésis. Cette ville, qui accueille le musée départemental Matisse, dont la notoriété et la renommée internationale ne sont plus à démontrer, reçoit régulièrement des dizaines de milliers de visiteurs français, européens et du monde entier.
L'incompréhension quant à cette décision de suppression règne donc sur le territoire du Cambrésis et même, au-delà, dans l’ensemble du département du Nord – département que vous connaissez bien, monsieur le secrétaire d’État. C'est une surprise d'autant plus désagréable que cet arrêt avait déjà été préservé de haute lutte. En effet, alors qu'il était menacé de suppression en 2011, les collectivités concernées avaient réussi à convaincre les interlocuteurs nationaux de le maintenir et avaient engagé, dans le cadre des fonds territoriaux, des crédits à hauteur de 75 000 euros pour réaliser les travaux nécessaires à son maintien en gare du Cateau-Cambrésis.
Ces collectivités, qui se sont fortement mobilisées et impliquées dans un champ qui n'est pas le leur, s'interrogent légitimement aujourd'hui sur la politique d'aménagement du territoire conduite par la SNCF.
Cette décision de suppression, qui n’a fait l’objet d’aucune concertation, est en parfaite contradiction avec la volonté politique manifestée par les acteurs locaux en matière d'aménagement du territoire et de développement culturel et touristique.
Le département et la communauté de communes du Caudrésis-Catésis ont notamment engagé une étude afin d'adapter le potentiel de ce site à la réalité du territoire et de répondre à la demande croissante d'infrastructures d'accueil.
Aussi, monsieur le secrétaire d’État, dans un courrier signé par le M. le président du conseil général du Nord, les élus locaux et leurs partenaires vous ont-ils saisi, de la même manière qu’ils ont saisi M. le président de la SNCF, pour vous alerter sur la mobilisation unanime de tous les citoyens contre la suppression de cet arrêt les week-ends et les jours fériés.
L'accès au musée départemental Matisse reste essentiel pour tous les usagers, pour l'ensemble des acteurs locaux, pour le développement du territoire et pour tous les publics, quel que soit leur lieu de résidence. C'est l'avenir du territoire dans son potentiel économique et dans son développement qui est en jeu, et les craintes exprimées sont augmentées par les annonces concernant les liaisons Intercités entre Maubeuge ou Cambrai et la capitale. C'est pourquoi je vous demande d’entendre cette détermination et de bien vouloir me préciser si vous êtes en mesure d’apporter des garanties pour le maintien de l’arrêt de l’Intercités à la gare du Cateau-Cambrésis.
Madame la sénatrice, chère Delphine Bataille, vous appelez mon attention sur une question à laquelle je suis sensible – comme je le suis à toute question relative au domaine de compétence qui m'a été à nouveau confié –, celle de la présentation faite par la SNCF du projet de service ferroviaire pour l'année 2015 concernant la desserte de la gare du Cateau-Cambrésis sur la ligne reliant Paris, Saint-Quentin, Maubeuge et Cambrai.
Je tiens avant toute chose à vous assurer de l'attachement du Gouvernement à cette ligne de TET – trains d'équilibre du territoire –, pour laquelle l'État est l’autorité organisatrice depuis la signature, le 13 décembre 2010, de la convention d'exploitation.
Ce projet de service ferroviaire pour l'année 2015, que vous mentionnez dans votre question, est le premier projet rendu par la SNCF dans le cadre des négociations visant à établir une nouvelle convention d'exploitation dont elle sera signataire. C'est donc, en quelque sorte, un préalable aux négociations et à la concertation que vous appelez de vos vœux.
La SNCF, à l'appui du constat d'une faible fréquentation des TET depuis la ville du Cateau-Cambrésis, a ainsi évoqué dans son premier projet la possibilité d'une suspension de la desserte de fin de semaine. Cette proposition ne préjuge pas le service qui sera effectivement conventionné entre l'État et son exploitant. Les négociations vont se poursuivre au cours des prochains mois pour garantir la continuité du service public ferroviaire au-delà de la fin de l’année 2014 dans le contexte de contrainte budgétaire que vous connaissez.
À la suite du courrier que j’ai reçu, j'ai sensibilisé M. le président de la SNCF sur l'importance que représente l'arrêt au Cateau-Cambrésis pour votre ville et le développement du superbe musée Matisse.
Je prends note de votre attachement, ainsi que de celui des élus locaux – attachement de longue date, vous l’avez indiqué –, au maintien de cet arrêt. Aujourd'hui, sachez qu’aucune décision n'a été prise. Lors de la négociation de la future convention relative aux TET, je demanderai donc à mes services de mettre en avant l'importance de cet arrêt pour le développement de votre territoire et du musée Matisse. Il s'agit d’un attrait touristique particulièrement prisé, dont nous devons tenir compte.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État, et je me réjouis de l’attachement que le Gouvernement manifeste au maintien des lignes de trains d’équilibre du territoire, qui sont importants, notamment dans les secteurs ruraux.
Vous l'avez dit, il ne s'agit que d’un préalable aux négociations. Nous fondons d’ailleurs beaucoup d’espoirs sur ces discussions. Il y a là un véritable enjeu pour la qualité du service public ferroviaire.
Je profite de l’occasion pour préciser que la question des liaisons Intercités de Maubeuge et Cambrai vers Paris suscite toujours de nombreuses inquiétudes. Celles-ci seront aussi l’objet des négociations à venir. Dans le cadre de son projet pour 2015, la SCNF devra impérativement revoir sa copie.
Le territoire du sud du département du Nord cumule des difficultés sociales et économiques importantes, auxquelles s'ajoutent des interrogations sur l’avenir des sites industriels, notamment dans le secteur automobile et agroalimentaire. N’oublions pas non plus que nous avons vécu la disparition de la base aérienne 103 décidée par le gouvernement Sarkozy, qui a entraîné la suppression de 1 500 emplois, ou que nous attendons la réalisation des annonces concernant le canal Seine-Nord. Et je pourrais multiplier les exemples !
De nombreux citoyens qui n’ont pas accès à la mobilité pâtissent de surcroît d’un accès difficile aux services publics, ce qui les oblige à un véritable parcours du combattant dans ce secteur rural. Ces mauvaises nouvelles pour l’usager du rail viennent donc plomber un territoire déjà en grande difficulté. Les collectivités territoriales font pourtant beaucoup d’efforts pour le désenclaver et le développer.
Les futurs horaires des liaisons vers la capitale annoncés par la SNCF sont catastrophiques, notamment pour Cambrai, qui ne dispose que d’un unique modeste aller-retour vers Paris. Le train serait ainsi avancé, le matin, de 6h23 à 5h40 et le retour reculé de 17h37 à 18h19, ce qui augmente l’amplitude horaire de quatre-vingt-dix minutes, soit au total plus de quinze heures chaque jour.
Cette perspective non concertée, mais pour laquelle j’espère que les négociations seront fructueuses, est inacceptable en l’état pour les usagers concernés. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, d’entendre cette détermination, parce que, aux côtés des usagers et de l’association À fond de train, les élus pourraient bien devenir le pire cauchemar de la SNCF en restant les meilleurs amis des voyageurs du rail.
La parole est à M. François Grosdidier, auteur de la question n° 640, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Dans la panique des manifestations bretonnes, le Gouvernement a suspendu sine die la mise en œuvre de l'écotaxe. La première déclaration de Mme Royal aura été de la condamner à l’emporte-pièce. Cette mesure, issue du Grenelle de l'environnement, avait pourtant été adoptée dans le consensus le plus large.
Elle est plus indispensable que jamais. Le dernier rapport du GIEC, le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, devrait nous inciter à mettre le turbo. Or vous restez au point mort. Avouez que c'est absurde, car il n'y a que des perdants : l'environnement, les finances publiques, l'emploi, en Bretagne comme en Lorraine ou ailleurs.
La Bretagne subit les inconvénients de l'élevage intensif – la pollution de l'eau, les algues vertes, … Ce n'est bon ni pour la santé des Bretons ni pour le tourisme – et elle perd les avantages de la valeur ajoutée de la filière agroalimentaire : l'abattage, la découpe, la transformation, le conditionnement, …
Vous avez tiré de la fermeture de GAD une conclusion inverse de celle qui s'imposait. Les animaux produits en Bretagne par l'élevage intensif sont acheminés par camion, dans d'inévitables conditions de souffrance animale, en Allemagne et en Pologne pour y être abattus. Ensuite, leurs carcasses sont souvent transportées en Italie ou en Espagne, avant de revenir dans nos hypermarchés. Ce faisant, les camions contournent soigneusement l'Allemagne et la Suisse, qui, elles, taxent la pollution, et non pas le travail. Ces camions abîment les routes françaises et polluent notre air, après avoir fait, bien souvent, le plein de carburant avant la frontière.
En stoppant l'écotaxe, vous encouragez ce phénomène absurde et vous bloquez le financement de tous les projets alternatifs de transports en site propre ou de multimodalité.
Vous privez la France de 1 milliard d'euros par an de recettes d'investissement pour les grandes infrastructures de transport.
Vous privez les départements de plusieurs centaines de millions d'euros pour l'entretien des routes départementales.
Vous condamnez l'État à rembourser à Ecomouv’ les investissements gâchés et les redevances perdues.
Ecomouv’ sera indemnisée, mais qu'en sera-t-il de la Lorraine qui, tout en continuant à subir le transit, se voit ainsi privée des centaines d'emplois promis après les restructurations militaires ? La métropole messine a été la plus lourdement frappée de France par cette restructuration – 5 000 emplois, à comparer aux 1 500 emplois qui viennent d’être évoqués dans le Cambrésis –, qui devait notamment être compensée par l'implantation de 130 douaniers et de 250 salariés d'Ecomouv’.
Vous n’aviez rien trouvé à redire à ce dispositif avec Ecomouv’ avant les manifestations des Bonnets rouges. Vous l’avez remis en cause après, pour trouver un bouc émissaire et justifier la volte-face sur l’écotaxe par de faux prétextes.
Le Gouvernement n’a jamais répondu au président de Metz Métropole ou au maire de Metz, pourtant de vos amis, sur cette question.
Chaque jour qui passe coûte de l’argent à l’État.
Chaque jour qui passe angoisse les salariés en CDI à Ecomouv’ aujourd'hui au chômage partiel, accroît le désespoir des CDD non renouvelés et des chômeurs en fin de droit formés de longs mois dans la perspective d’un emploi qui s’évanouit.
Monsieur le secrétaire d’État, j’attends des réponses précises sur la façon dont le Gouvernement répondra au défi écologique de la pollution de l’air et du réchauffement climatique, à la question du financement des infrastructures de transports, à celle de sa responsabilité juridique et financière envers Ecomouv’. Surtout, comment le Gouvernement répondra-t-il à l’enjeu économique du développement des circuits courts, de la relocalisation des activités agroalimentaires en Bretagne et dans les autres régions rurales, ainsi que de la revitalisation économique de la Lorraine ?
Le principe de l’écotaxe poids lourds a été voté à la quasi-unanimité dans la loi dite Grenelle 1 et sa création, dans la loi de finances pour 2009, a fait l’objet d’un large consensus parlementaire.
La pertinence de cette écotaxe ne faisait alors aucun doute : écologique, elle devait servir non seulement au développement et à l’entretien de nos infrastructures de transport, mais aussi, comme vous l’indiquez, monsieur le sénateur, à faire payer la traversée de nos territoires et donc l’usure de nos infrastructures par les poids lourds étrangers. Le principe faisait consensus ; la mise en place, moins. La Haute Assemblée a d'ailleurs créé une commission d’enquête sur le contrat liant l’État à la société Ecomouv’.
Le choix de recourir au partenariat public-privé pour collecter la taxe a été fait par le précédent gouvernement, par un contrat signé en 2011 avec Ecomouv’. Un décret a été publié le jour même du deuxième tour de l’élection présidentielle, le 6 mai 2012 – c’est dire que la précipitation n’a peut-être pas été de nature à stabiliser les choses ! –, afin de répercuter la taxe sur les clients des transporteurs, mais sans concertation.
Qu’ai-je fait depuis mon arrivée ? J’ai récupéré cet héritage, qui engage désormais l’État, et fait en sorte de l’aménager pour parvenir à mettre en place le dispositif de l’écotaxe. Autrement dit, il a fallu finaliser le dispositif technique, se concerter avec les transporteurs pour simplifier les modalités de répercussion. Je ne reviendrai par sur les détails, mais ils sont particulièrement importants : 40 000 entreprises en dépendent, soit 400 000 emplois dans le transport routier de marchandise. Les transporteurs étaient en effet particulièrement hostiles au décret du précédent gouvernement.
L’écotaxe permettrait d’assurer un financement pérenne de nos infrastructures de transport en faisant payer les usagers de la route plutôt que les contribuables. Il est important de le rappeler. Néanmoins, sa mise en œuvre a soulevé des inquiétudes, des interrogations et même des manifestations. Des difficultés d’application sont apparues. C’est la raison pour laquelle, le 29 octobre dernier, le Premier ministre a décidé de suspendre sa mise en œuvre pour donner le temps nécessaire au dialogue. C’est également le temps nécessaire à la « remise à plat » évoquée par Mme la ministre de l’écologie. Une mission d’information parlementaire présidée par M. Jean-Paul Chanteguet travaille à des propositions de manière à corriger le dispositif.
Concernant les relations de l’État avec Ecomouv’, un contrat a été signé ; l’État doit donc respecter des engagements. L’État, soucieux de ses intérêts, a également entamé des discussions avec Ecomouv’ pour différer le paiement des loyers pendant la période de suspension du dispositif, tant que l’avenir de l’écotaxe n’aura pas été décidé.
S’agissant des personnels mosellans, le Gouvernement y est très attentif. La grande majorité des personnes embauchées pour la mise en place de l’écotaxe l’ont été en CDI et leur emploi n’est pas menacé à ce stade, même si des mesures de chômage partiel ont dû être envisagées par la société Ecomouv’ et si des CDD n’ont pas été renouvelés.
Le rapport du député Jean-Paul Chanteguet, qui doit être remis dans les jours qui viennent, doit comporter des préconisations. J’ai rappelé, au début de mon intervention, que l’écotaxe était issue d’une loi votée dans un large consensus parlementaire. Face aux difficultés, il est important que la souveraineté parlementaire mette en œuvre les conditions d’acceptabilité et d’efficacité de cette mesure, afin que l’enjeu environnemental puisse s’appliquer dans les transports.
Je suis heureux que le sujet puisse revenir au Parlement. Je voudrais néanmoins faire remarquer que c’est sans concertation avec le Parlement que le Gouvernement a décidé de suspendre la mise en œuvre de la loi…
Je ne crois pas que l’on puisse parler de précipitation dans la mise en œuvre de cette loi, même si le décret a été pris le jour du deuxième tour de l’élection présidentielle, les reproches qui ont été formulés portant au contraire sur les retards accumulés dans ce dossier, essentiellement en raison de difficultés techniques.
Par ailleurs, je tiens à le mentionner, si cette mesure a été rejetée après avoir fait l’objet d’un consensus, c’est peut-être lié au trop-plein fiscal des deux premières années du quinquennat. Comme pour la TVA sociale, que vous avez défaite avant de la réintroduire, il aurait été plus judicieux d’alléger la fiscalité sur les transporteurs français plutôt que de renoncer à l’écotaxe, également acquittée par les transporteurs étrangers.
La parole est à M. Robert Tropeano, auteur de la question n° 681, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Ma question porte sur l’avenir de la ligne Béziers-Millau, menacée de disparition dans les dix ans à venir, comme le révèle la Fédération nationale des associations d’usagers des transports. En deux ans, une baisse de 50 % des TER a déjà été enregistrée sur la ligne Béziers-Neussargues. La suppression programmée de vingt-huit trains hebdomadaires remplacés par des bus, au moment même où le conseil régional de Languedoc-Roussillon lance le tarif à 1 euro sur la ligne entre Béziers et Ceilhes, paraît contradictoire et interroge sur la volonté des autorités.
La pertinence de la ligne Aubrac n’est pourtant plus à démontrer, renommée pour la beauté des paysages et des constructions architecturales qui jalonnent le trajet, dans une nature réputée accidentée qui ne permettra pas aux bus de prendre le relais des trains lors des grands froids hivernaux.
Une autre question se pose au sujet du fonctionnement rail-route. Il semble que cette option n’ait pas été étudiée comme elle aurait dû l’être, alors que les transporteurs se sont déclarés intéressés par un embranchement rail-route à Saint-Rome pour l’acheminement du fret. Voilà qui correspondrait en outre aux objectifs du Gouvernement, qui doit mettre en place la transition énergétique, le train étant un mode de transport respectueux de l’environnement.
Monsieur le secrétaire d’État, comptez-vous œuvrer pour que la ligne Aubrac, qui bénéficie d’une convention de financement entre l’État et la SNCF, soit préservée ? Voilà qui serait conforme aux engagements de l’État et à ceux du Président de la République, qui donnait la priorité à la rénovation des réseaux existants afin d’améliorer les conditions de déplacement du quotidien et de réduire la fracture territoriale.
Monsieur le sénateur, je sais combien vous êtes sensible, comme bon nombre d’élus locaux, au devenir de la ligne Aubrac. Je vous confirme que le Gouvernement honorera sa promesse. Comme les orientations de la politique ferroviaire en témoignent, les transports du quotidien doivent être une priorité, parce qu’ils répondent à la fois aux attentes des territoires et au souci de nos concitoyens.
Ainsi, Réseau ferré de France mobilise sur cette ligne une enveloppe moyenne de 11 millions d'euros par an pour assurer des opérations de maintenance, ainsi que 3 millions à 4 millions d'euros par an pour des travaux sur les ouvrages d’art, nombreux sur cette ligne. La réalisation de ces travaux nécessite d’ailleurs des périodes d’interruption du trafic perturbantes.
Au sujet des dessertes de TER assurées entre Béziers et Neussargues, je suis trop respectueux de la répartition des compétences entre les collectivités territoriales et l’État pour répondre en lieu et place de la région. Je sais néanmoins que cette dernière est très active en matière de politique grand public du transport ferroviaire et en ce qui concerne les services régionaux de voyageurs.
Je peux en revanche vous affirmer que l’État est déterminé, je m’y suis personnellement engagé, à assurer la pérennité de la ligne ferroviaire qu’est l’Aubrac, tout particulièrement s’agissant de son périmètre Clermont-Ferrand-Béziers. Nous avons d’ailleurs pu montrer concrètement notre implication au cours de l’année passée. Malgré des contraintes avérées de disponibilité du matériel roulant, l’État a souhaité, avec la SNCF, intégrer cette desserte à la prolongation de la convention relative à l’exploitation des trains d’équilibre du territoire, en vigueur depuis le 1er janvier 2014. De même, et à la demande de l’État, la SNCF a trouvé une solution en termes de matériel roulant, alors même que le matériel habituellement utilisé sur cette ligne n’était plus disponible.
Diverses solutions ont donc pu être envisagées en matière de matériel roulant afin d’assurer la circulation de ce train national, qui contribue également fortement, soulignons-le, à la desserte locale.
Par ailleurs, je suis attentif à ce que toutes les potentialités de complémentarité entre la route et le fer soient pleinement utilisées dans une politique d’amélioration multimodale de la compétitivité des transports. Dans cette optique, la création d’installations de services permettant le transbordement d’un mode à l’autre et de plateformes de transport combiné est l’une des nombreuses mesures étudiées dans le cadre de la conférence périodique pour le fret ferroviaire, que j’ai installée en septembre 2013 avec l’ensemble des acteurs du secteur pour identifier toutes les actions concrètes et pragmatiques permettant de redynamiser et d’améliorer le transport de marchandises par voie ferrée. C’est d'ailleurs la première fois depuis de longues années que le fret regagne quelques parts de marché. Ce n’est certes qu’un frémissement largement insuffisant, mais nous sommes pleinement mobilisés autour de cet enjeu.
Par conséquent, l’opportunité d’implanter un embranchement rail-route à l’endroit que vous indiquez sera examinée avec beaucoup d’attention. Je l’ai notée, et j’y ferai référence lors de la prochaine conférence périodique pour le fret ferroviaire. Nous verrons comment il est possible de répondre aux attentes des acteurs économiques qui ont manifesté tout leur intérêt pour cet investissement.
La ligne Aubrac est effectivement menacée de disparition depuis vingt ans et, depuis lors, les élus, les usagers et les cheminots se mobilisent sans faillir pour sauvegarder cette ligne qui appartient à notre patrimoine et qui a démontré, comme vous l’avez souligné, monsieur le secrétaire d’État, son utilité.
Je n’oublie pas non plus que toutes les régions que traverse la ligne Aubrac ont manifesté leur souhait de la maintenir et de la moderniser. Voilà un large consensus qui doit être entendu, d’autant que la mobilisation et la détermination des usagers et des élus sont de plus en plus fortes.
Quoi qu’il en soit, je ne manquerai pas de transmettre votre réponse, qui me satisfait pleinement, au président de la région Languedoc-Roussillon ainsi qu’aux usagers et aux cheminots.
La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 656, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur les engagements de la France à convertir la dette tunisienne détenue par notre pays en projets de développement, afin de contribuer réellement à la reconstruction du pays.
Selon les chiffres de la Banque centrale tunisienne extraits de son rapport annuel intitulé Dette extérieure de la Tunisie en 2012, la dette extérieure de la Tunisie s’élevait à 20, 2 milliards d’euros en 2011, soit 44 % de son produit intérieur brut, pour 19, 9 milliards d’euros en 2010.
Selon les estimations du gouvernement tunisien, la dette extérieure de la Tunisie devrait continuer de s’accroître jusqu’à 45, 3 % de son PIB en 2013, puis à 49, 5 % de son PIB à la fin de cette année. Or, d’après la Banque mondiale, plus de 15 milliards d’euros ont été empruntés par la Tunisie depuis 1970, dont plus de la moitié sous la présidence de Ben Ali.
Compte tenu des intérêts versés de 1970 à 2009, la Tunisie a déjà remboursé à ses créanciers 2, 47 milliards d’euros de plus que le capital prêté. Le remboursement de cette dette représente, chaque année, six fois le budget de la santé, trois fois celui de l’éducation et six fois celui du développement régional.
De fait, près de 80 % des nouveaux crédits contractés depuis la chute du régime Ben Ali ont été affectés au remboursement de cette dette. La situation ne devrait pas s’améliorer avec le prêt de 250 millions d’euros supplémentaires sur quinze ans qui devrait être octroyé demain par l’Union européenne, notamment pour soutenir l’effort d’assainissement budgétaire et la stabilisation extérieure du pays, dans le cadre du programme du FMI. Or, nous le savons tous, le Fonds monétaire international impose des mesures de restriction budgétaire, de recapitalisation de banques publiques en vue de les privatiser, de précarisation du marché du travail, de coupes des dépenses sociales, ainsi que l’arrêt progressif de toute subvention aux produits alimentaires et sources d’énergie, ce qui va encore aggraver l’impasse économique et sociale actuelle de ce pays. Ces dispositions vont ajouter à la crise économique un risque de grave crise sociale.
La France, deuxième créancier de la Tunisie après la Banque européenne d’investissement, a une responsabilité particulière dans ce dossier. L’encours de la dette avec la France s’est d’ailleurs accru de 12, 5 % entre 2010 et 2011. La part de notre pays s’établit aujourd’hui à 13, 4 % de la dette totale tunisienne. Or des annonces ont été faites au plus haut niveau de l’État français : le 17 juillet 2012, à Paris, les Présidents français et tunisien ont assuré, conjointement, travailler à convertir la dette tunisienne détenue par la France en projets de développement et, le 5 juillet 2013, lors de son déplacement en Tunisie, le Président de la République a fait part de son intention de convertir une partie de la dette tunisienne en investissements. Toutefois, en novembre 2013, si le Gouvernement a bien annoncé que le montant des annulations de dettes par la France en direction des pays pauvres très endettés allait tripler entre 2013 et 2014, la Tunisie n’a pas été citée comme pays prioritaire.
Le Parlement européen lui-même, dans sa résolution du 10 mai 2012, a jugé « odieuse » la dette publique extérieure des pays d’Afrique du Nord et du Proche-Orient, sachant qu’elle a été accumulée par les régimes dictatoriaux, par le biais principalement de l’enrichissement personnel des élites politiques et économiques et de l’achat d’armes, utilisées souvent contre leurs propres populations, et demandé un réexamen de cette dette.
Au vu des annonces effectuées par les autorités françaises sur cette question, je souhaiterais connaître les mesures que le Gouvernement compte mettre en œuvre pour honorer les engagements pris auprès des autorités tunisiennes.
Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Michel Sapin.
Le soutien à la Tunisie en transition est l’une des priorités de la France. Lors du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement du 31 juillet 2013, le Gouvernement a présenté les priorités de la politique française de développement et de solidarité internationale et redéfini les priorités géographiques de cette politique, notamment en direction du sud et de l’est de la Méditerranée, dont la Tunisie fait partie.
Les engagements exceptionnels pris le par le Président de la République, François Hollande, lors de sa visite en Tunisie – vous l’avez rappelé – en juillet 2013 en témoignent. Le Président de la République avait en effet annoncé un soutien financier exceptionnel de 500 millions d’euros. Ces engagements ont été confirmés par le chef de l’État lors de sa visite en Tunisie début février 2014, à l’occasion de l’adoption de la nouvelle constitution tunisienne.
Ce soutien se décline principalement sous deux formes : d’une part, un appui de l’Agence française de développement, l’AFD, à hauteur de 150 millions d’euros et, d’autre part, une aide-projet liée du Trésor français à hauteur d’environ 350 millions d’euros pour trois projets structurants. Ces prêts, à travers le programme Réserve pays émergents, et dons, en provenance du Fonds d’aide au secteur privé, le FASEP, devraient permettre de financer des projets réalisés par des entreprises françaises au bénéfice du développement économique de la Tunisie.
En complément de cet effort exceptionnel, le Président de la République a par ailleurs fait part – ce qui vous intéressera plus particulièrement, monsieur le sénateur – de la disponibilité de la France à mettre en œuvre une conversion de dette en investissements pour des projets de développement mutuellement bénéfiques sur un panier de créances de 60 millions d’euros.
Ce mécanisme présente plusieurs avantages pour la Tunisie : il permet à la fois d’alléger la dette du pays et d’encourager les investissements étrangers. La conversion de dette aura donc un impact significatif non seulement en matière d’allégement du service de la dette, mais aussi et surtout en matière de développement économique et social par l’appui aux investissements étrangers et à la création d’emplois.
La mise en œuvre de ce mécanisme nécessite au préalable la conclusion d’un accord bilatéral entre la France et la Tunisie qui assurera la fluidité des relations entre nos deux pays et permettra de définir conjointement les secteurs d’investissement susceptibles de bénéficier de ce mécanisme de conversion.
Les choses avancent. L’adoption de la Constitution le 24 janvier dernier, ainsi que la composition du nouveau gouvernement de transition dirigé par M. Mehdi Jomâa ont permis de reprendre les discussions avec la partie tunisienne sur les différentes annonces du Président de la République. Une mission conjointe du ministère, de la Direction générale du Trésor et de l’AFD s’est d’ailleurs rendue sur place en mars dernier pour assurer le suivi de ces engagements et reprendre les discussions techniques en vue de mettre en œuvre le mécanisme de conversion de dette. Les discussions se poursuivent.
Pour autant, s’agissant de la dette tunisienne en général et de celle souscrite auprès de la France en particulier, il convient de souligner qu’elle n’a pas servi à l’acquisition de matériels militaires – équipements qui font d’ailleurs défaut aujourd’hui à la Tunisie dans son effort de sécurisation de ses frontières et de lutte contre le terrorisme. D’autre part, les prêts français accordés via l’AFD ont toujours porté sur des projets directement utiles aux populations, qu’il s’agisse notamment d’amélioration des réseaux d’eau et d’assainissement ou de dispositifs de formation professionnelle.
Enfin, je tiens à rappeler que le soutien de la France à la Tunisie ne s’exerce pas uniquement sur le plan bilatéral et en termes d’aides financières ; il se déploie aussi sur les plans communautaire et multilatéral, dans le cadre des institutions financières internationales. Au sein de l’Union européenne en particulier, tant auprès de la Commission européenne que du Parlement, la France s’est faite avec succès la plus ardente avocate d’un relèvement de la nouvelle assistance macro-financière de 250 millions à 300 millions d’euros. Au sein du FMI, la France a par ailleurs plaidé pour plus de flexibilité dans la mise en œuvre de ses conditionnalités, ce qui a permis de débloquer, fin janvier 2014, la tranche de 500 millions de dollars américains.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre engagement sur ce dossier.
Je vous remercie de la précision de votre réponse, madame la secrétaire d’État, qui me satisfait dans son esprit et ses orientations.
Cela étant, je m’interroge sur la force des moyens mis en œuvre : vous annoncez un nouvel appui de l’AFD sous la forme de nouveaux prêts, voire de dons, pour un montant de 350 millions d’euros, mais vous ne parlez de possibilités de reconversion de la dette que pour un montant de 60 millions d’euros. Vous avouerez que cela peut paraître encore un petit peu faible.
L’importance de la dette tunisienne est un enjeu majeur pour la reconstruction de ce pays. Si elle n’a pas été uniquement contractée auprès de la France, elle l’a en tout cas été pour de très mauvais objectifs. Il est de notre devoir d’aider le peuple tunisien dans ses efforts de redressement.
Le 28 mars dernier, des forces démocratiques et progressistes tunisiennes ont lancé un appel pour demander l’annulation de la dette et s’opposer au prochain prêt de l’Union européenne à la Tunisie. Ces associations politiques et citoyennes demandent que le budget de leur nation soit utilisé pour « la création d’emplois pour les centaines de milliers de chômeurs, mettre fin à la dégradation dangereuse du pouvoir d’achat de l’ensemble du peuple tunisien, l’amélioration de l’état de la santé publique, combattre toutes les formes de pollution de l’environnement, financer la réforme du secteur de l’enseignement public qui tombe en ruine, porter secours aux populations des quartiers populaires et des régions de l’intérieur, surtout en mettant en œuvre un plan national de lutte contre l’extrême pauvreté ».
Je pense que la France s’honorerait à poursuivre, voire à amplifier ses efforts en la matière.
La parole est à M. Michel Boutant, auteur de la question n° 670, adressée à M. le ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique.
Madame la secrétaire d’État, je voudrais appeler l’attention de votre collègue, le ministre du redressement productif, sur les difficultés rencontrées par la filière papier recyclé en France, plus particulièrement en Charente.
Les papeteries locales, en raison d’un coût trop élevé, sont de moins en moins en mesure d’acheter les vieux papiers recyclables, qui constituent pourtant la matière première de leur industrie. Alors qu’il y a encore dix ans le coût fluctuait autour de 44 euros la tonne, il atteint aujourd’hui 110 euros, sans compter les frais liés au transport. L’une des papeteries du département de la Charente estime ainsi avoir besoin chaque mois de 7 500 tonnes de papier recyclé. Les conséquences pour la trésorerie sont donc loin d’être négligeables : un rapide calcul montre que cela représente, pour cette entreprise, près de 6 millions d’euros de dépenses supplémentaires sur un an.
Les grands groupes de récupération, français ou étrangers, se soucient moins du prix et achètent en masse. Sur les sept millions de tonnes de vieux papiers collectées chaque année dans notre pays, environ trois sont expédiées à l’étranger. Il est tout à fait regrettable qu’une collecte financée avec l’argent du contribuable, à travers notamment la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, profite en définitive à l’économie chinoise ou espagnole. Les syndicats de récupération du papier admettent eux-mêmes revendre la plus grande partie de leur collecte en dehors du département, les règles des marchés publics ne leur permettant pas d’instaurer une préférence locale.
La fermeture récente d’une papeterie concentrant son activité sur le recyclage du papier, à Magnac-sur-Touvre, dans la banlieue d’Angoulême, a profondément traumatisé un département attaché à une filière papier vieille de plusieurs siècles et reconnue pour sa qualité. Il me semble donc nécessaire de tout mettre en œuvre pour sauvegarder et développer l’activité de notre industrie dans ce département comme dans le reste du pays.
Aussi, je vous demande de bien vouloir préciser de quelle manière l’État serait susceptible d’intervenir afin d’assurer l’avenir des filières papier locales.
Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence d’Arnaud Montebourg, dont vous connaissez l’engagement en faveur de la politique des filières de notre pays. Il m’a transmis des éléments de réponse à vos pertinentes interrogations.
Nous entendons les traumatismes que vous décrivez. Comme vous le savez, le député Serge Bardy est chargé d’une mission sur la collecte et la valorisation des vieux papiers au bénéfice de l’industrie française et particulièrement des papeteries de proximité. Le ministère du redressement productif a souhaité mettre en place une mission en réponse aux cas individuels tels que celui que vous venez d’évoquer. Cette mission permettra d’établir un panorama objectif de la situation et de mettre en place un plan d’action nécessaire. Il m’est d’ores et déjà possible de vous livrer quelques-unes de ses pistes de réflexion.
Tout d’abord, dans le champ de la récupération et du recyclage des matériaux, particulièrement ceux couverts par les responsabilités élargies du producteur, nous sommes et serons plus encore à l’avenir tenus à un respect strict du principe de proximité dans la valorisation, même si chaque matière, de par sa spécificité dans la valorisation et son degré de rareté, possède une échelle pertinente de valorisation industrielle qui lui est propre. Nous devons être attentifs à l’impact économique sur le territoire français.
Ensuite, le secteur de la papeterie est confronté, vous le savez, à des évolutions mondiales très importantes : d’une part, les coûts sont soumis à une pression vers le bas s’exerçant sur tous les segments du secteur papier, aussi bien au sein de la zone euro que sur le marché mondial ; d’autre part, les changements de pratique de nos concitoyens en faveur du numérique, secteur dont j’ai la charge, provoquent inévitablement de grandes transformations dans le secteur économique du papier. Cela ne signifie pas qu’il n’y aura plus de filière papetière, mais que les produits fabriqués à partir de pulpe sont inéluctablement appelés à se transformer et à se diversifier.
Cette transition numérique de l’industrie, que nous nous employons quotidiennement à soutenir au ministère du redressement productif, il faut l’orienter pour qu’elle soit compatible avec un temps d’adaptation sociale et territoriale nécessaire ; nous y sommes très attachés.
Voilà les éléments que je suis en mesure de vous fournir à ce stade, monsieur le sénateur, avant les conclusions qui seront rendues par votre collègue député, conclusions que vous attendrez, j’imagine, avec le même espoir qu’Arnaud Montebourg et moi-même.
La parole est à M. Jean Louis Masson, auteur de la question n° 739, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Ma question s’adressait à M. le ministre de l’intérieur ; je suis donc un peu surpris de voir que sera la secrétaire d’État chargée du numérique qui va me répondre. Avec le gouvernement qui vient d’être nommé, c’est l’incohérence la plus totale dans la gestion des rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Je tiens à déplorer – je ferai un rappel au règlement sur ce point tout à l’heure – certaines situations de plus en plus déplaisantes, qui ne témoignent pas du respect que devrait avoir l’un vis-à-vis de l’autre.
Si je pose cette question orale, laquelle, je le rappelle, s’adressait à M. le ministre de l’intérieur, c’est parce que je n’ai pas obtenu de réponse à mes questions écrites précédentes. Il est absolument invraisemblable que des questions concernant les élections municipales n’aient pas trouvé de réponse avant la tenue de ce scrutin ! Quelle est l’utilité d’y répondre après ? Il y a quelques semaines, j’avais d’ailleurs déjà posé une question orale pour souligner le problème, à laquelle je n’ai pas non plus obtenu de réponse.
Je vous signale, madame le secrétaire d’État, que j’avais également rédigé une question écrite, qui porte le numéro 10062, concernant les incompatibilités. J’ai harcelé le cabinet du ministre de l’intérieur pour obtenir une réponse. Elle m’est parvenue fin février, sous la forme d’un courriel envoyé par le collaborateur parlementaire du ministre. J’en ai donc la preuve ! Cette réponse devait prétendument être transmise au Journal officiel pour publication, mais il n’en a rien été. En effet, le cabinet m’a finalement indiqué avoir changé d’avis à cause d’une intervention des syndicats de policiers : il préférait désormais ne pas répondre à cette question ! Est-ce digne du Gouvernement que de prétendre d’abord que la réponse est prête, puis d’arranger les bidons pour ne pas y répondre ? Vivons-nous dans une République bananière ?
C’est la moindre des choses de répondre à une question posée par un membre du Parlement ; c’est la moindre des choses de ne pas planquer la réponse alors même qu’elle est prête, tout cela parce qu’on se rend compte qu’elle pourrait peut-être poser problème. C’est d’autant plus scandaleux qu’elle portait non pas sur un problème politique, mais sur une difficulté d’application juridique. Elle visait seulement à savoir l’interprétation à donner à un point de droit.
J’ai dû sélectionner une question parmi toutes celles qui n’ont pas eu de réponse afin que vous puissiez réagir ce matin, madame le secrétaire d’État, vous qui représentez certainement avec pertinence le ministre de l’intérieur, dont je regrette très vivement l’absence.
Maintenant que les élections municipales sont passées, puis-je espérer obtenir une réponse à ma question écrite n° 10062 ou bien dois-je poser une question orale, une de plus, pour pallier les carences d’un gouvernement incapable de répondre correctement ? Je le répète, ce n’est pas une question politique ; je ne suis ni de droite ni de gauche ! Je demande simplement au Gouvernement de faire son boulot, tout comme les parlementaires doivent faire le leur. Le gouvernement précédent n’a pas fait son travail et, en n’envoyant pas au Sénat le ministre de l’intérieur ce matin, l’actuel ne fait pas non plus le sien.
Ma question porte sur les incompatibilités : pourquoi les préfets soulèvent-ils soudainement l’incompatibilité de certains dossiers et font-ils le mort sur d’autres ? De deux choses l’une : soit on engage des recours quand on estime qu’il y a incompatibilité, soit on ne le fait pas ! En tout état de cause, les choix faits par les préfets devraient être un peu plus cohérents. Quelque chose ne tourne pas rond dans la République !
Vous avez eu le détail de ma question écrite, et j’espère que vous saurez lire correctement la réponse qu’on vous a préparée. Ce que je demande, c’est une véritable clarification du rôle du préfet, notamment en matière d’incompatibilités, car on ne sait absolument plus où on en est.
Monsieur le sénateur, je suis la – et non pas le – secrétaire d’État chargée du numérique, et je suis ici pour représenter le Gouvernement de la République. C’est donc au nom de M. le ministre de l’intérieur que je vais vous répondre.
Vous avez raison, votre question n’est pas de nature politique, elle est d’ordre juridique. C’est donc une réponse toute juridique que je vais vous apporter.
Les conditions d’enregistrement des candidatures des listes à l’élection municipale sont prévues par l’article L. 265 du code électoral. Vous le connaissez certainement, monsieur le sénateur, mais permettez-moi d’en rappeler le contenu : « Récépissé ne peut être délivré que si les conditions énumérées au présent article sont remplies et si les documents officiels visés au quatrième alinéa établissent que les candidats satisfont aux conditions d’éligibilité posées par les deux premiers alinéas de l’article L. 228. »
Le législateur n’impose donc pas au préfet de contrôler, lors du dépôt de candidature, le respect de règles non visées par l’article L. 265 dudit code, telles que celles prévues aux articles L. 230 concernant l’inéligibilité des majeurs sous tutelle ou curatelle, L. 231 relatif à l’inéligibilité fonctionnelle ou L. 273-9 portant sur la composition de la liste communautaire. C’est pourquoi le préfet est invité, lors du dépôt de candidature, dans le cas où des irrégularités manifestes lui apparaissent, à en avertir les candidats et à les inciter à modifier leur candidature, en insistant notamment sur les risques d’annulation de l’élection s’ils maintiennent leur candidature en l’état.
Lorsqu’un cas d’inéligibilité est connu de leurs services, les préfets sont tenus de déférer l’élection au juge électoral. Dans le cadre d’un contentieux électoral, le juge administratif peut sanctionner le non-respect des règles d’inéligibilité fonctionnelle.
Pour ce qui concerne les incompatibilités, l’article L. 237 du code électoral prévoit l’incompatibilité de certaines fonctions avec le mandat de conseiller municipal. Cette incompatibilité n’empêche pas la personne occupant une telle activité de se présenter au mandat de conseiller municipal. Toutefois, dans le cas où cette personne est élue, elle devra, dans un délai de dix jours, faire cesser l’incompatibilité, soit en démissionnant de son mandat de conseiller municipal, soit en mettant fin à la fonction incompatible.
L’article L. 237 du code électoral précise que, à défaut de déclaration adressée dans ce délai à son supérieur hiérarchique, la personne concernée est réputée avoir opté pour la conservation de son emploi. Selon la jurisprudence, cette personne ne peut donc plus, à compter de la date d’échéance de cette option, exercer son mandat de conseiller municipal. La perte du mandat étant automatique, le préfet n’a pas à déclarer l’intéressé démissionnaire d’office. Toutefois, l’arrêté du préfet qui prononcerait la démission d’office est sans autre effet juridique que de constater un état de droit existant.
Enfin, toute délibération du conseil municipal prise au cours de séances auxquelles des personnes étrangères, tel qu’un conseiller municipal ayant perdu son mandat, ont pris une part active, est entachée d’illégalité.
Voilà, monsieur le sénateur, la réponse juridique que nous pouvions faire à votre question.
Madame le ou la secrétaire d’État – c’est comme vous voulez, après tout, je ne suis pas contrariant –, c’est bien sympathique d’indiquer que l’intéressé n’est plus conseiller municipal car il est considéré comme démissionnaire d’office ; si personne ne fait rien, il peut continuer à siéger éternellement !
Le préfet doit faire respecter la loi. C’est très gentil d’avancer que le préfet n’a rien à faire, que la personne n’est plus censée participer aux réunions du conseil municipal, mais que se passe-t-il si elle continue de le faire ? Les préfets et les sous-préfets doivent bien servir à quelque chose. Dans certains arrondissements, les sous-préfets n’ont pas grand-chose à faire ; cela pourrait les occuper de vérifier que les conseils municipaux n’accueillent pas dans leurs réunions des personnes qui ne devraient pas y siéger.
Par ailleurs, madame le ou la secrétaire d’État, je voudrais insister : ce serait vraiment bien que le ministre de l’intérieur réponde à ma question écrite n° 10062, qui porte sur les incompatibilités. S’il a des problèmes pour ce faire, je peux lui communiquer la réponse qui avait été préparée par son prédécesseur et que son cabinet m’avait envoyée. Ainsi, il pourra peut-être la publier au Journal officiel !
Mes chers collègues, en attendant l’arrivée de M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à onze heures vingt-cinq, est reprise à onze heures trente.
La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 643, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement l'international.
Ma question s’adressait à M. le ministre des affaires étrangères et du développement l'international, mais puisque c’est M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes qui va me répondre, je profite de l’occasion pour le féliciter de sa nomination dans les nouvelles fonctions qui sont les siennes.
Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur la mise à disposition de fonctionnaires nationaux au sein du Conseil de l’Europe, dont je suis membre, par un certain nombre de pays. Les États membres qui ont recours à cette pratique prennent de plus en plus de poids au sein même de l’institution – c’est le cas notamment de la Russie –, tandis que d’autres, comme la France, qui font peu, voire ne font pas appel à leurs fonctionnaires nationaux, perdent de leur influence et de leur rayonnement.
J’aimerais donc connaître la stratégie du Gouvernement pour conserver le rôle moteur de notre pays au sein du Conseil de l’Europe. La France envisage-t-elle de mettre également à disposition de cette institution des fonctionnaires nationaux pour y peser davantage ?
Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre accueil pour ma première intervention devant le Sénat.
La France est, comme vous-même, je le sais, très attachée au Conseil de l’Europe, ainsi qu’aux valeurs qu’il défend. Notre pays a été l’un des premiers membres de l’organisation et il a de plus l’honneur d’accueillir son siège, à Strasbourg.
Cet attachement français se traduit également par un soutien financier important à l’organisation – 38 millions d’euros de contribution sur un budget total de 403 millions pour l’année 2014, soit la contribution la plus importante des quarante-sept États membres – et une participation active à un nombre significatif de ses programmes. En effet, les missions du Conseil sont considérées par la France comme essentielles à la promotion et à la défense de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’homme sur le continent européen.
Le taux de représentation de la France au sein de cette institution est de 40 %, soit 920 Français sur 2 276 agents, et plus de 21 % des Français employés occupent un poste d’administrateur. La France est ainsi le pays le mieux représenté au sein de l’administration du Conseil de l’Europe.
Avec 321 consultants sur les 2 862 que l’organisation a recrutés, notre pays arrive en deuxième position, derrière le Royaume-Uni, 449, et loin devant l’Allemagne, 133.
En outre, et vous y avez fait référence, la France a, comme les autres États membres, la possibilité de mettre à disposition du Conseil de l’Europe des fonctionnaires, afin que ceux-ci apportent leur expérience professionnelle et favorisent l’usage de notre langue et la diffusion de nos valeurs.
Certains ministères, comme celui de la justice, ont eu recours à cette formule et ont mis des fonctionnaires à disposition du Conseil de l’Europe. Ce n’est en revanche pas le cas du ministère des affaires étrangères et du développement international. La France étant déjà bien représentée au sein du Conseil de l’Europe, les agents mis à disposition d’organisations internationales sont concentrés sur d’autres organisations où la représentation de la France est moins favorable.
Le ministère des affaires étrangères et du développement international continuera donc naturellement de porter une attention particulière à la promotion de la présence française au sein du Conseil de l’Europe, en favorisant et en accompagnant notamment les candidatures internes et externes de nos compatriotes à des postes jugés stratégiques.
J’avais indiqué à la secrétaire d’État qui m’a répondu mon intention de faire un rappel au règlement pour mettre un certain nombre de choses au point.
Monsieur le secrétaire d’État, votre attitude lors de votre arrivée dans l’hémicycle m’a renforcé dans ma volonté d’intervenir. Je considère en effet que le Gouvernement fait preuve d’une désinvolture tout à fait inadmissible dans ses relations avec le Parlement. Votre retard, qui nous a obligés à suspendre la séance pour attendre votre arrivée, en est un bon exemple : le Gouvernement n’a pas la courtoisie qu’il devrait avoir à l’égard du Parlement, en particulier du Sénat.
Je trouve également invraisemblable qu’une secrétaire d’État chargée du numérique réponde à une question adressée au ministre de l’intérieur.
Mon rappel au règlement s’inscrit dans la même logique.
Lors de son entrée en fonctions, l’actuel gouvernement ne comprenait aucun ministre chargé des relations avec le Parlement. Résultat : pendant huit jours, les services du Sénat et de l’Assemblée nationale ne savaient plus à qui s’adresser, et les sénateurs comme les députés ont été dans l’impossibilité de poser leurs questions écrites. C’est ainsi qu’aucune question écrite de sénateur ne figure au Journal officiel du 3 avril. C’est donc bien une carence gouvernementale qui a mis les parlementaires dans l’impossibilité d’exercer correctement leur mandat. Des dispositions auraient pu être prises, me semble-t-il, lors du changement de gouvernement pour s’assurer qu’il n’y aurait pas de discontinuité.
Toujours à propos des relations entre le Gouvernement et le Parlement, les changements continuels d’ordre du jour deviennent indécents. Je pense notamment au projet de loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, dont l’examen a été déplacé deux fois en quinze jours dans le calendrier parlementaire. Et, samedi dernier, l’agenda a une nouvelle fois été modifié ! C’est tout à fait incorrect ! On annonce un premier changement aux parlementaires, qui doivent alors adapter leur agenda en conséquence, puis, une fois qu’ils l’ont fait, on leur annonce un nouveau changement.
Monsieur le secrétaire d’État, il serait tout de même souhaitable que le Gouvernement traite le Parlement avec un peu plus d’égards.
Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.
Je précise que M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes nous avait fait connaître son heure d’arrivée et qu’il était même en avance par rapport à l’horaire annoncé.
La parole est à M. Hervé Marseille, auteur de la question n° 675, adressée à M. le Premier ministre.
Mon collègue Masson vient de souligner que certaines questions n’avaient pas pu être posées. Pour ma part, je vais insister sur les réponses qui n’ont pas été apportées aux questions posées.
Voilà près d’un an, j’avais adressé au Premier ministre d’alors une question écrite sur la pénalisation de la négation des génocides. Ayant procédé à une relance et n’ayant toujours pas obtenu de réponse, il me faut aujourd'hui transformer ma question écrite en question orale pour espérer obtenir enfin une réponse. Je ne puis que regretter à mon tour un tel manque de considération à l’égard des parlementaires.
Les promesses datent du mois d’avril 2012 ; depuis lors, rien ! Des promesses ont encore été formulées lors de la visite officielle du chef de l’État en Turquie au mois de janvier dernier ; depuis lors, toujours rien ! Le Président de la République s’exprimait à cette occasion de la manière suivante : « Le travail de mémoire est toujours douloureux, mais il doit être fait. Ce que nous avons à mener […], c’est la réconciliation à travers la recherche de ce qui s’est produit et la reconnaissance de ce qui s’est fait. »
Deux ans après les faits, je me permets de rappeler quelques éléments.
Le 24 avril 2012, M. François Hollande, candidat à la présidence de la République, s’exprimait devant la statue de Komitas à l’occasion de la quatre-vingt-dix-septième commémoration du génocide arménien. À cette occasion, et après avoir rappelé les conditions de la censure par le Conseil constitutionnel de la proposition de loi adoptée par le Sénat le 23 janvier 2012, il s’était engagé à prendre « une initiative au lendemain de l’élection présidentielle ». Il garantissait qu’il tiendrait bon en dépit des pressions et qu’il finirait par obtenir la pénalisation de la négation des génocides, en particulier du génocide arménien.
Les attentes sont nombreuses, et elles sont fondées. Malheureusement, l’attente est bien longue !
Lui président, il s’engageait à être présent chaque 24 avril pour « participer à l’hommage et pour partager le combat de la recherche de la vérité et de la justice ». Or, le 24 avril 2013, il n’a pas été en mesure de tenir son engagement, étant absent lors de la quatre-vingt-dix-huitième commémoration du génocide arménien.
Aujourd’hui, après quasiment deux ans, aucun projet de loi tendant à pénaliser la négation des génocides n’a été présenté.
Au mois de janvier dernier, à l’occasion d’une conférence de presse conjointe avec M. Abdullah Gül, Président de la République de Turquie, le Président français s’engageait de nouveau à la présentation par son gouvernement d’un projet de loi pour transposer en droit interne la décision-cadre européenne de 2008 prévoyant la pénalisation de l’apologie, la négation et la banalisation grossière publique des crimes de génocide, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre.
J’observe que le Président de la République n’a pas précisé le calendrier. Au demeurant, cette démarche repose sur le même fondement que la proposition de loi qui avait été déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale par notre collègue députée Valérie Boyer.
Nous approchons du 24 avril, date à laquelle de nombreux élus vont se retrouver avec les représentants de la communauté arménienne dans les cérémonies de commémoration de ce triste anniversaire, dont le retentissement sera d’autant plus fort que nous approchons de 2015, année du centenaire du génocide.
Par conséquent, j’aimerais savoir, d’une part, pourquoi ma question est restée sans réponse – c’est un manque de considération à l’égard non seulement du travail des parlementaires, mais également des attentes de la communauté arménienne – et, d’autre part, à quelle date sera déposé le projet de loi promis par le Président de la République.
Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur la pénalisation de la négation du génocide arménien. Je suis là pour vous répondre.
L’engagement du Président de la République est clair : toutes les victimes ont le droit à la protection de leur mémoire. Les négationnistes doivent être combattus, et leurs propos et actions doivent être sanctionnés.
Je crois que nul ne peut douter de la plus totale détermination du Gouvernement et du Président de la République à lutter avec la plus grande fermeté dans ce domaine.
Notre responsabilité est de choisir des voies juridiques qui respectent les principes fixés par notre Constitution et par le droit européen. Le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel ont déterminé à cet égard un cadre particulièrement strict.
Perdre de vue cette exigence serait prendre le risque de faire naître de nouvelles contestations et d’ouvrir de nouveaux espaces aux tentations négationnistes. Il n’en est pas question. C’est pourquoi je puis vous assurer que le Gouvernement est déterminé à poursuivre le travail nécessaire pour mobiliser toutes les ressources de notre droit et les procédures offertes par le droit européen à cette fin.
Comme vous le savez sûrement, la Cour européenne des droits de l’homme a rendu récemment un arrêt qui constitue un élément nouveau dans ce dossier complexe. Nous en évaluons la portée et les conséquences. Nous n’entendons pas, en effet, nous placer en contravention avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Ce principe, vous en conviendrez, ne peut pas être mis en cause.
Au-delà, nous avons la conviction que chaque commémoration doit être l’occasion de faire progresser le travail de mémoire, d’avancer dans la réconciliation et de refermer les plaies du passé. C’est la raison pour laquelle le Président de la République, alors en déplacement officiel en Chine, a tenu à se faire représenter par le ministre de l’éducation nationale lors des cérémonies du 24 avril 2013.
Nous poursuivons le travail, en lien avec les associations représentant les Arméniens de France, en vue de la commémoration du centenaire du génocide arménien. « Participer à l’hommage et partager le combat de la recherche de la vérité et de la justice », telle reste bien la volonté du Président de la République et du Gouvernement.
Je remercie M. le secrétaire d’État de sa réponse, mais je ne suis pas plus avancé qu’avant de poser ma question.
Je me réjouis de la détermination – c’est bien le moindre – du Président de la République et d’apprendre que le Gouvernement est au travail. Je rappelle qu’il s’agissait d’une promesse. Je rappelle également qu’il y a eu un texte. Tous les éléments sont donc bien connus depuis deux ans.
Encore une fois, j’espère que nous saurons bientôt quand le Gouvernement déposera un projet de loi allant dans le sens souhaité par tous les Arméniens de France.
Mes chers collègues, en attendant l’arrivée de Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à onze heures cinquante-cinq.
La parole est à M. Henri Tandonnet, auteur de la question n° 642, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite appeler votre attention sur la contractualisation dans le secteur des fruits et légumes.
Dans le cadre du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt que nous examinons actuellement au Sénat, le Gouvernement est revenu à l’article 7 sur la contractualisation qui a été mise en place dans le domaine laitier et dans celui des fruits et légumes par la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche.
Si un rapport sur la contractualisation dans le secteur laitier a été publié en juillet 2012, tel n’a pas été le cas concernant le secteur des fruits et légumes. Or il serait important de disposer d’informations sur le taux de contrats proposés par les acheteurs et sur ceux qui sont signés par les producteurs ainsi que sur ce que les contrats ont apporté, ou peuvent apporter, pour garantir l’équilibre de la négociation entre les agriculteurs et leurs différents acheteurs. De même, il serait essentiel de présenter les principales difficultés rencontrées par les acteurs économiques dans l’application du dispositif et, le cas échéant, les solutions mises en œuvre pour les régler.
Dans le secteur des fruits et légumes, deux décrets d’application ont été publiés, l’un en 2010, l’autre en 2011. Deux cas de figure existent donc aujourd’hui pour les acheteurs en fruits et légumes, en fonction de l’endroit où les achats sont effectués.
D’abord, dans le cadre des relations commerciales avec les producteurs situés sur les carreaux de producteurs des marchés de gros, un amendement essentiel, visant à reconnaître à nouveau les spécificités de ce mode de commercialisation, a été adopté au cours de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
Ensuite, dans le cadre des relations commerciales avec les producteurs qui vendent leur production sur l’exploitation, les acheteurs doivent proposer aux producteurs des contrats contenant une série de clauses obligatoires et d’une durée minimale de trois ans. L’absence de proposition est sanctionnée par une amende de 75 000 euros. Cependant, un nombre important de producteurs qui se voient proposer ces contrats les refusent systématiquement.
Je souhaite donc connaître les intentions du Gouvernement pour répondre aux difficultés des ventes de production sur les exploitations agricoles. Je vous demande également, madame la secrétaire d’État, de bien vouloir effectuer un bilan de l’application de la contractualisation dans le secteur des fruits et légumes.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’agriculture, qui répond en ce moment même à des questions orales à l’Assemblée nationale. Étant une élue du sud de la France, où la question que vous soulevez se pose de manière aiguë, j’y suis particulièrement sensible.
Dans le secteur des fruits et légumes comme dans le secteur laitier, le recours au décret pour rendre obligatoire la contractualisation est justifié à la fois par l’absence d’un accord interprofessionnel et par les crises successives qui ont affecté le secteur. Toutefois, aucun contrat ne semble avoir été conclu, même si les propositions écrites de contrats formels selon le cadre fixé par le décret ont été faites par des acheteurs. C’est bien la preuve que, malgré les ajustements opérés par les décrets publiés en 2011 et 2012, le dispositif instauré en 2010 n’est pas adapté au secteur des fruits et légumes. La principale difficulté est la durée minimale de trois ans pour les contrats, cette durée étant peu compatible avec la saisonnalité et les modalités de production et de commercialisation de la majorité des fruits et légumes frais.
L’article 7 du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, actuellement en discussion au Sénat, prévoit de nouvelles dispositions afin de promouvoir une contractualisation plus adaptée. Le projet de loi apporte davantage de souplesse en matière de durée des contrats : la durée minimale pourra être ajustée aux différents modes de commercialisation.
Les interprofessions restent au cœur du dispositif de la contractualisation : l’interprofession des fruits et légumes frais, l’INTERFEL, pourra entamer de nouvelles discussions sur l’opportunité de conclure un accord interprofessionnel, comme cela a été le cas dans le secteur ovin. Cet accord pourra fixer une durée minimale de contrat adaptée, en tenant compte de la diversité des productions et des modes de commercialisation, dans le respect du nouveau cadre réglementaire de l’Union européenne, auquel nous sommes tenus. Une fois étendu ou homologué par les pouvoirs publics, cet accord suspendra l’application du décret.
Le ministre de l’agriculture reste bien évidemment à votre entière disposition pour échanger plus avant avec vous sur ce sujet si vous le souhaitez.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse et je vous souhaite la bienvenue dans cet hémicycle.
Les Pyrénées-Orientales, dont je sais que vous êtes originaire, et le Lot-et-Garonne sont deux départements très impliqués dans la production de fruits et légumes. Dans le cadre du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, nous avons obtenu que la commission retienne un amendement relatif au problème de la vente sur les carreaux dans les marchés d’intérêt national ; j’espère que cet amendement sera également retenu dans la version finale du texte. Le marché des fruits et légumes est très volatil. Il est donc très difficile à contractualiser sur le long terme. J’espère que l’INTERFEL apportera des solutions, avec le concours du ministère de l’agriculture.
La parole est à M. Michel Teston, auteur de la question n° 639, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Madame la secrétaire d'État, permettez-moi à mon tour de vous féliciter de votre nomination.
L’organisation commune de marché, l’OCM, vitivinicole, entrée en vigueur le 1er juillet 2008, permet l’enrichissement des vins par addition de saccharose – c’est la chaptalisation –, de moût concentré, dit MC, ou de moût concentré rectifié, dit MCR, ou encore par des techniques soustractives. La chaptalisation est toutefois soumise à des restrictions géographiques : elle est interdite dans le sud de la France, en Italie, en Espagne et au Portugal. Elle peut cependant être autorisée exceptionnellement, à titre dérogatoire, par l’État membre lorsque les conditions climatiques sont reconnues comme défavorables.
Pour le sud de la France, ces restrictions géographiques sont définies sur la base du ressort des cours d’appel. Les dispositions nationales en matière d’enrichissement ont été modifiées par le décret n° 2012-655 du 4 mai 2012 et l’arrêté du 24 juillet 2012. Depuis la récolte 2012, les autorisations d’enrichissement sont délivrées par les préfets de région. Pour la récolte 2013, le département de l’Ardèche, qui dépend de la cour d’appel de Nîmes, a été le seul département de la région Rhône-Alpes dans lequel la chaptalisation a été interdite.
Je m’interroge donc sur la cohérence des modalités d’application par la France de la réglementation européenne.
D’une part, ces modalités d’application donnent lieu à des distorsions de concurrence entre les zones de production : le périmètre d’autorisation ne pouvant être restreint à une aire géographique AOP ou IGP, les producteurs ardéchois d’AOC côtes-du-Rhône n’ont pas été autorisés cette année à enrichir leurs vins par addition de saccharose, alors que les producteurs d’AOC côtes-du-Rhône voisins – drômois, ligériens ou rhodaniens – ont pu le faire.
D’autre part, pour les départements dans lesquels la chaptalisation est interdite, ces modalités d’application engendrent des coûts supplémentaires importants : non seulement l’enrichissement par ajout de MC ou de MCR est beaucoup plus coûteux, mais, en outre, l’aide octroyée à titre transitoire pour compenser cette différence de coût a été supprimée le 31 juillet 2012. L’union des coopératives viticoles ardéchoises indique que, pour la récolte 2013, le coût de l’enrichissement par ajout de MC ou de MCR s’est élevé à 500 000 euros ; c’est un coût près de trois fois supérieur à celui d’un enrichissement par addition de saccharose.
Je souhaiterais donc, madame la secrétaire d'État, que vous m’indiquiez s’il est envisageable de modifier les modalités d’application par la France des règles européennes en matière d’autorisation de l’enrichissement des vins, notamment s'agissant du zonage, afin de supprimer les différences de coût entre viticulteurs voisins produisant sous la même appellation.
Monsieur le sénateur, je vous prie bien vouloir excuser l’absence de Stéphane Le Foll, qui m’a chargée de vous répondre. Je vous remercie de votre question, qui m’intéresse tout particulièrement en tant qu’élue des Pyrénées-Orientales.
Votre beau département produit lui aussi du vin. Comme vous l’avez rappelé, la réglementation communautaire permet aux États membres, lorsque les conditions climatiques sont défavorables – ce qui est relativement rare dans nos départements respectifs et dans le sud de la France en général ; voilà pourquoi nous avons du bon vin –, d’autoriser l’enrichissement des vins par ajout de MC ou de MCR sur tout le territoire de l’Union européenne. En revanche, le recours à l’enrichissement par sucrage à sec des vins, ou chaptalisation, n’est permis que dans les pays du nord de l’Europe et dans le nord de la France.
Pour les vingt-sept départements du sud de la France, dont le vôtre, dans lesquels la chaptalisation est interdite, la réglementation communautaire en vigueur prévoit une dérogation lorsque des circonstances exceptionnelles le justifient. Par ailleurs, le règlement OCM de 2008 a décidé la suppression de l’aide à l’enrichissement par ajout de MC ou de MCR à compter des vendanges 2012. Les opérateurs concernés étaient donc informés depuis 2008 de cette suppression.
À la suite de la campagne 2013, les représentants nationaux des viticulteurs ont demandé aux ministres en charge de l’agriculture et de la consommation la réintroduction de l’aide communautaire à l’enrichissement des vins par ajout de MC ou de MCR et l’harmonisation des décisions d’autorisation d’enrichissement au niveau national. En réponse, il a été convenu avec les professionnels de la filière vitivinicole d’intégrer la problématique de l’enrichissement des vins à la réflexion stratégique menée par la filière à la demande de Stéphane Le Foll ; cette réflexion doit s’achever en juin 2014. La France disposera ainsi d’une stratégie d’ensemble cohérente et partagée par toute la filière, qui lui permettra, le cas échéant, de présenter des demandes d’évolution de la réglementation communautaire à l’automne 2014.
En parallèle, la rénovation du dispositif d’autorisation d’enrichissement des vins a été engagée afin, d’une part, de renforcer la coordination interrégionale – vous y avez fait allusion – et, d’autre part, de mettre à la disposition des préfets de région des lignes directrices permettant d’harmoniser le cadre de décision au niveau national.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse.
Vous avez fait référence au groupe de travail mis en place par FranceAgriMer à la demande du ministre de l’agriculture. Il est important que ce groupe de travail présente des propositions équilibrées, et il serait bon que celles-ci soient formulées avant la récolte 2014. En effet, il n’est pas cohérent que, lorsqu’un État autorise à titre dérogatoire l’enrichissement des vins au motif que les conditions climatiques ont été défavorables, certains producteurs d’une appellation puissent enrichir leur vin par addition de saccharose tandis que d’autres sont obligés d’utiliser du MC ou du MCR, dont le coût est près de trois fois plus élevé.
Je souhaite que le groupe de travail publie rapidement ses propositions – vous avez parlé du mois de juin –, afin que des mesures soient prises avant la récolte 2014.
La parole est à Mme Muguette Dini, auteur de la question n° 606, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.
Madame la secrétaire d'État, je vous souhaite moi aussi la bienvenue au Sénat. Je me réjouis de vous poser une question sur un sujet qui relève directement de vos compétences. Je souhaite en effet vous interpeller sur le respect des droits des étudiants handicapés à la compensation des conséquences de leur handicap lors des épreuves écrites et orales des examens et concours, ainsi que sur le recrutement des personnes handicapées dans la fonction publique.
Je tiens à évoquer le cas d’un jeune déficient visuel de vingt-cinq ans. Depuis mai 2011, son père m’alerte sur les difficultés rencontrées par son fils ; je crains qu’il ne soit malheureusement qu’un cas parmi tant d’autres. Ce jeune adulte est né avec une malformation des yeux qui provoque notamment une sévère malvoyance. Épaulé par sa famille, il a suivi une scolarité normale jusqu’à l’obtention d’une maîtrise de mathématiques fondamentales et d’un master « mathématiques et métiers de l’enseignement ».
En 2011, cet étudiant a suivi une préparation au concours du CAPES privé et une préparation aux écrits de l’agrégation externe. Il a toutefois rencontré d’énormes difficultés et souvent de vraies réticences lorsqu’il s’est agi d’obtenir les aménagements indispensables aux épreuves écrites et orales de ces concours.
Je suis intervenue auprès du ministre de l’enseignement supérieur de l’époque afin que les plans élaborés par cet étudiant lui-même conformément à l’esprit de la loi, en considération de ses besoins de compensation, soient mis en place par le président du jury. Cependant, lors des épreuves écrites, le fait que ces dispositifs aient été incorrectement appliqués a provoqué un effondrement inattendu, dû au stress, de sa vision, et il s’est trouvé dans l’impossibilité de terminer ses épreuves. Il a ainsi été privé d’une partie de ses droits à la compensation des conséquences de son handicap, qui est prévue par l’article L. 114-1-1 du code de l’action sociale et des familles.
En février dernier, il a posé sa candidature auprès des rectorats des académies de Créteil et de Versailles pour un recrutement en qualité de professeur de mathématiques bénéficiaire de l’obligation d’emploi. Aux termes des textes réglementaires relatifs au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique, sa demande est parfaitement recevable. Il se heurte cependant à une interprétation restrictive des textes par les rectorats. En dépit de toutes les lois que nous avons votées, cet étudiant handicapé n’a toujours pas trouvé de réponse à ses questions.
Madame la secrétaire d'État, je connais votre engagement sur ces sujets. Que prévoyez-vous de faire pour que tous ces freins disparaissent, pour que toutes ces discriminations cessent ?
Madame la sénatrice, je vous remercie très sincèrement de votre question, qui témoigne de votre investissement personnel sur les questions sociales. Je suis heureuse que mon baptême du feu se fasse au Sénat avec vous, puisque, comme vous l’avez souligné, il s’agit de la première question concernant mon domaine de compétences.
Vous le savez, le Gouvernement est déterminé à mener une politique volontariste en matière d’inclusion des personnes en situation de handicap. Le comité interministériel du handicap s’est réuni pour la première fois en septembre dernier et a fixé une feuille de route, dont deux des priorités sont l’accès à l’enseignement supérieur et l’accès à l’emploi.
Comme vous l’avez dit, des lois existent dans notre pays pour permettre l’accès des étudiants porteurs d’un handicap aux études et aux examens, puis à un emploi. Malheureusement, il y a encore des freins et, à cet égard, l’histoire que vous venez de raconter me confirme l’existence d’un plafond de verre pour certaines catégories de citoyens.
Permettez-moi de rappeler l’état du droit en la matière. Depuis 2005, les étudiants handicapés se sont vu reconnaître un droit à compensation, ainsi que vous l’avez précisé, pour être accueillis dans les établissements d’enseignement supérieur au même titre que l’ensemble des étudiants.
En 2011, une circulaire en date du 27 décembre a rendu possible l’aménagement des examens et concours de l’enseignement scolaire et de l’enseignement supérieur. Des documents ont été produits à cet effet, sur l’accueil en 2008, puis sur l’accompagnement de l’étudiant en 2012, afin de rappeler les aménagements qui peuvent être proposés, ainsi que la procédure à suivre. Chaque établissement définit ainsi les modalités de contrôle des connaissances des étudiants concernés en fonction de leurs besoins propres. Ceux-ci, ainsi que les aménagements en résultant, sont consignés dans un plan d’accompagnement de l’étudiant handicapé, lequel couvre à la fois la scolarité et la vie étudiante.
Le comité interministériel du handicap a programmé plusieurs mesures que je compte bien mettre en œuvre avec mes collègues du Gouvernement : d’abord, s’attacher à l’élaboration de ce qu’on appelle le GEVASUP, c’est-à-dire le guide d’évaluation des besoins de compensation des personnes handicapées adapté à l’environnement des étudiants ; ensuite, mettre en œuvre l’accompagnement des établissements de l’enseignement supérieur.
Madame la sénatrice, votre témoignage fait parfaitement ressortir la nécessité de cette démarche. Il importe d’accompagner ces établissements en faisant changer les mentalités pour qu’ils puissent définir leur stratégie d’accessibilité en prenant en compte l’ensemble du parcours des étudiants, de la procédure d’admission à l’orientation professionnelle, en passant par la scolarité, les examens, la vie universitaire et les stages.
Le comité a également posé le principe d’une « charte handicap » du ministère de l’enseignement supérieur et de la conférence des présidents d’université, laquelle sera déclinée dans d’autres secteurs. C’est ce qui a été fait le 11 février dernier entre le CSA et les écoles de journalisme et d’audiovisuel, avec le soutien des chaînes de télévision et de radio. C’est aussi ce que nous ferons avec le réseau des écoles de service public.
En outre, le portail admission post-bac, qui a été mis en place par Geneviève Fioraso pour l’orientation et l’inscription des étudiants, sera rendu accessible dès 2015. Dans ce cadre, un ensemble de questions-réponses sur l’aménagement des examens et des cursus sera élaboré et diffusé.
Enfin, le comité de pilotage interministériel pour faciliter l’accès des étudiants handicapés à l’enseignement supérieur a été rétabli. Il veillera notamment à la bonne diffusion des règles relatives à l’aménagement des examens.
Par ailleurs, dans la fonction publique, l’emploi de personnes en situation de handicap est un objectif visé par le Gouvernement. Le Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique a pour objet de favoriser le recrutement et le maintien dans l’emploi de travailleurs handicapés dans les trois fonctions publiques. Comme dans le secteur privé, vous le savez, les personnes en situation de handicap doivent représenter 6 % au minimum des effectifs. Force est de constater que des efforts sont encore à réaliser dans les trois fonctions publiques, puisque, malgré une légère hausse par rapport à 2011, le taux d’emploi de personnes handicapées en 2012 n’y était que de 4, 39 %.
Je tiens tout de même à souligner la réussite particulière de ces politiques d’inclusion dans les ministères sociaux, puisque le taux y est de 6, 71 %. Une convention vient d’ailleurs d’être signée avec un centre de rééducation professionnelle et sociale afin d’accueillir, en qualité de stagiaires, des personnels en situation de handicap.
Pour conclure, je souhaite aussi vous signaler que l’agenda social de la fonction publique prévoit l’engagement de négociations sur le handicap, lesquelles porteront notamment sur la gestion des reclassements et sur le maintien dans l’emploi. J’y serai bien sûr particulièrement attentive.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de toutes ces précisions qui permettent de se rendre compte que, malgré un peu de retard, l’inclusion physique des handicapés tend à s’améliorer.
Néanmoins, il y a quand même encore, en ce qui concerne l’aspect intellectuel, une réticence et une résistance quelque peu sournoise. Certes, la société s’est organisée pour que les facultés et les grandes écoles puissent accueillir des personnes handicapées, en fauteuil roulant, malvoyantes ou malentendantes. C’est faisable, même si ce n’est pas facile ; mais à quoi cela sert-il si, au moment de l’examen ou du concours, on ne prend pas en compte les besoins de ces étudiants ?
Le jeune étudiant dont je vous ai parlé avait un problème spécifique d’ordinateur et les choses lui ont été si peu facilitées qu’il n’a pas pu utiliser son matériel. C’est un scandale, car il avait probablement, même si je ne peux en être sûre, les capacités pour réussir ces concours. Or il n’a pas pu aller jusqu’au bout des épreuves.
Je trouve injuste que ces étudiants soient pénalisés à la fin de leurs études, alors qu’ils ont suivi tout un cursus sans avoir les mêmes moyens physiques que les autres, ce qui demande déjà de gros efforts.
Votre collègue en charge de l’enseignement supérieur et vous-même devez être extrêmement exigeantes en ce qui concerne tant les concours et examens que l’emploi, pour que tous ces jeunes puissent avoir la juste récompense du travail qu’ils ont fourni.
Je vous remercie, madame Dini, de ce témoignage très émouvant.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.