Monsieur le secrétaire d’État, ma question concerne les établissements publics territoriaux de bassin, les EPTB, reconnus depuis la loi de juillet 2003 comme les acteurs de référence en matière de politique de l’eau à l’échelle d’un bassin versant ou d’un sous-bassin.
Depuis dix ans, ces établissements ont acquis une expérience et un savoir-faire irremplaçables. Au-delà de leur rôle essentiel dans la prévention des inondations, la préservation des zones humides et la gestion équilibrée de la ressource eau, qui constituent leur cœur de compétence, les EPTB ont apporté une contribution décisive à notre connaissance de ces espaces et à leur valorisation auprès du public.
À titre d’exemple, l’EPTB de la Bresle mène des actions aux échelles adaptées, à la demande des collectivités ou même des agriculteurs : engagement des travaux de restauration de la continuité écologique, avec des résultats concluants en termes de remontée des poissons migrateurs ; lancement d’une étude pour lutter contre les érosions et les ruissellements sur un sous-bassin ; animation, avant sa validation, du schéma d’aménagement et de gestion des eaux…
Monsieur le ministre, en intégrant les EPTB aux dispositifs de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, la MAPAM, au titre de la gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations, la Gémapi, compétence désormais dévolue aux établissements publics de coopération intercommunale – les EPCI – à fiscalité propre, avec possibilité de délégation vers un EPTB, vous avez reconnu cette expérience ainsi que la pertinence de la gestion par bassin versant, seule à même d’apporter la cohérence indispensable pour des espaces qui ne connaissent pas nos frontières administratives.
Toutefois, le transfert ou la délégation de cette compétence restent volontaires, ce qui fragilise les EPTB actuels. De plus, ceux-ci n’ont été que partiellement intégrés puisque la version actuelle de la loi ne fait référence qu’aux syndicats mixtes, qui ne sont qu’une forme d’organisation administrative de ces établissements. En effet, parmi les trente-six EPTB, dix sont des institutions interdépartementales.
Cette décision d’écarter un quart des établissements est étonnante et préjudiciable. Tout d’abord, elle crée des ambiguïtés localement : certains EPCI vont devoir prendre en charge la Gémapi, sans expérience et avec peu de moyens, alors même qu’un EPTB interdépartemental assurait jusqu’alors cette compétence avec succès. Or il est impossible pour les EPCI de donner délégation à un tel EPTB pour assurer cette compétence ! Faudra-t-il que l’EPTB disparaisse et que les EPCI reprennent le travail à zéro ? Faudra-t-il que l’EPTB change de forme et devienne un syndicat mixte ?
Cette seconde solution n’est pas intrinsèquement mauvaise, mais elle comporte des risques. Détruire une institution pour recréer un syndicat mixte serait long, juridiquement complexe et politiquement périlleux. En particulier, le désengagement de certains départements, au regard notamment des contraintes budgétaires qu’ils connaissent, est à craindre. Vous le voyez, cette solution, si souhaitable soit-elle, recèle des fragilités à tous les étages !
Monsieur le ministre, quel avenir le ministère du développement durable réserve-t-il aux EPTB interdépartementaux ? L’État est-il prêt à les accompagner activement dans la transition que vous semblez appeler de vos vœux ? Enfin, comment envisagez-vous de renforcer sur tout le territoire national la logique globale de gestion par bassin versant, seule à même d’assurer les solidarités entre collectivités ?