En effet.
Vous voulez consacrer 12 millions d'euros à la modernisation de l'Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France.
J'aurais aimé que cette mesure soit positive, mais c'est la chasse aux étrangers que vous organisez.
L'actualité de cet été l'a mis en évidence : vous ne demandez pas un examen sérieux et humain de chaque dossier de régularisation des « sans-papiers », quand bien même ce sont des enfants, des familles.
Vous fixez des chiffres, des quotas à atteindre avant même que les services aient instruit les dossiers, parce que vous voulez donner des gages à l'électorat d'extrême droite, sur le refrain trop bien connu de la stigmatisation et de la peur de l'autre.
Et lorsque la mobilisation des parents d'élèves, des démocrates, des enseignants vous impose de concéder une circulaire pour permettre aux enfants scolarisés de parents sans papiers d'obtenir un titre de séjour, les dispositifs d'accueil de ces demandeurs se révèlent pour le moins bien inadaptés.
Quel effarant spectacle, cet été, que ces files d'attente interminables devant un certain nombre de préfectures, notamment en Île-de-France !
Quel contraste entre la dignité des personnes venant faire régulariser leur situation et les conditions qui leur étaient réservées !
Parmi ces personnes, combien ont dû passer des heures entières dehors sous un soleil de plomb ? Combien se sont résolues à prendre leur place au milieu de la nuit pour s'assurer d'accéder aux guichets ?
Une autre approche est absolument vitale pour ce pays qui fut une terre d'accueil, et qui peut toujours l'être.
Vous consacrez une bonne part de ce projet de budget, soit 40 % des crédits prévus pour le programme « Administration territoriale », à la mise en place des passeports électroniques, de la carte nationale d'identité électronique sécurisée et de l'immatriculation à vie des véhicules.
Ces dispositions prises au nom de la sécurité ne se révéleront efficaces - je le crains - que pour augmenter le coût pour l'usager.
La sécurité est illusoire si elle ne se comprend qu'à travers la multiplication des barrières administratives et policières, sans jamais tarir les sources du danger.
La codification, le fichage de données de plus en plus précises fait, en revanche, courir un risque grandissant de pertes de libertés individuelles.
La fraude en est-elle pour autant combattue ? Chacun connaît bien la course poursuite entre l'attaque et la défense : dès qu'un nouveau système de sécurité est mis en place, son contournement est recherché. Avec l'introduction d'éléments biométriques dans les documents individuels, vous franchissez un palier supplémentaire dans cette escalade nécessitant toujours plus de moyens.
Vous avez pris du retard dans l'introduction du passeport électronique en raison du conflit que vous avez déclenché avec l'Imprimerie nationale en tentant de contourner ses prérogatives. Bel exemple de conjonction entre sécuritarisme et ultralibéralisme !
Au-delà, le renchérissement des procédures est au rendez-vous du citoyen.
Alors que, aujourd'hui, dans les 36 000 communes de notre pays, on peut aisément effectuer sa demande de carte d'identité, vous prévoyez, au mieux, que seulement 2 000 communes seront à même de délivrer ce nouveau sésame !
De nouvelles inégalités sont ainsi appelées à se développer.
Monsieur le ministre, pour l'ensemble de ces raisons, les membres du groupe CRC voteront contre les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».