Monsieur le président, je tiens, comme M. le président de la commission, à vous remercier pour la manière dont vous avez présidé ces travaux. L’accélération de la vitesse de croisière, laquelle se calcule en nombre d’amendements à l’heure – on fait du vingt-cinq, du trente, du trente-cinq, voire du quarante amendements à l’heure, vitesse qui, je crois, n’a été atteinte que ce soir, sous votre présidence ! – nous permet de terminer nos travaux cette nuit.
Je voudrais adresser à mon tour des remerciements aux fonctionnaires du Sénat, aux membres de mon cabinet, au président de la commission des affaires économiques, au rapporteur Philippe Leroy, aux présidents des commissions de la culture et du développement durable, aux rapporteurs pour avis Mme Gonthier-Maurin et M. Camani, et bien sûr, à plusieurs titres, à Didier Guillaume, avec qui je partage depuis quelques années un certain nombre d’engagements.
Contrairement à ce qu’a dit M. le président de la commission des affaires économiques, on ne se méfie pas de ses amis. En politique, on passe suffisamment de temps à se méfier de beaucoup de choses pour que, quelques instants, on sache aussi s'appuyer sur ses amis. Pour ma part, j’ai cette philosophie-là.
Au cours d’une semaine un peu chaotique, il est vrai, nos débats ont été intéressants, permettant d’aller au bout d’un certain nombre de questions, sur tous les sujets évoqués, entre autres l’enseignement agricole, l’environnement – et Joël Labbé a toujours été là pour déclencher la « sonnette verte »…
J’ai noté également votre capacité de mobilisation afin de trouver un accord sur l’agro-sylvo-cynégétique – appelez-le comme vous voulez –, ce qui n’était pas si facile. Je suis arrivé au Sénat avec une crainte : les forestiers et les chasseurs allaient-ils se mettre d’accord ? Parviendrions-nous à trouver un compromis à cet égard ? Nous l’avons trouvé, et je remercie Jean-Jacques Mirassou et tous ceux qui y ont travaillé.
Nos discussions ont été jugées sévèrement par M. César, même s’il a été constructif tout au long du débat. Je retiendrai donc pour ma part le déroulement du débat, et non la conclusion.
Cette loi n’est pas là pour tout régler. Les questions de compétitivité, de baisse de charges, en particulier, relèvent du pacte de responsabilité. Nous n’allions pas endosser le rôle du Président de la République et du Premier ministre. Mais des choses sont faites dans ce domaine.
En revanche, nous essayons de trouver un cadre pour l’agriculture, au sein du cadre général de la réforme de la politique agricole commune. Comment tout s’organise-t-il ? Depuis le début, nous sommes partis de la PAC à l’échelle européenne, pour en tirer des conclusions au niveau national. On a souvent fait l’inverse en France, et nous nous sommes retrouvés avec des lois d’orientation agricole qui n’étaient pas forcément en cohérence avec l’échelon européen. Je me félicite donc que nous ayons procédé dans cet ordre. C’est bien.
Ce cadre, on l’a rappelé, concerne les modèles de production, la question de l’agroécologie, la triple performance économique, sociale et environnementale, mais aussi la dimension collective, qui est plus importante qu’on ne le croit. Pour les groupements d’intérêt économique et environnemental, on peut en discuter, mais pour les groupements d’intérêt économique et environnemental forestier, je crois qu’on a besoin, pour les agriculteurs, de revisiter cette dimension collective.
Dans l’histoire de l’agriculture française depuis l’après-guerre, en particulier dans l’engagement syndicaliste, il y avait une grande dimension collective – le mutualisme, les coopératives, les CUMA… – qui s’est quelque peu effilochée. On l’a même un peu abandonnée. On a ramené l’agriculteur à sa seule dimension d’entrepreneur, à qui l’on a demandé beaucoup : produire, gérer, respecter les normes environnementales, supporter des contraintes, le plus souvent seul, sans bénéficier suffisamment, sauf au travers du syndicalisme, de la dimension collective. Nous devons retrouver cette dimension ! L’intérêt des GIEE, c’est aussi d’essayer de redonner une dynamique collective de terrain.
On nous a souvent reproché – M. César en particulier, et il a en partie raison – le caractère inabouti du projet de loi. Nous avons laissé beaucoup d’espace. Après tout, le cadre législatif ne doit-il pas chercher avant tout à offrir les capacités de créer des dynamiques ? Peut-être s’agit-il d’une loi qui donne l’impression de ne pas avoir tout réglé mais qui va permettre à ceux qui vont en bénéficier de se mettre en mouvement et de régler eux-mêmes les problèmes ? Je crois pour ma part que cette démarche a aussi son intérêt.
Je pense à la belle formule de René Char citée par M. André Chassaigne, à propos des GIEE : « L’inaccompli bourdonne d’essentiel ».
Maintenant, que va-t-il se passer ? Si cela fonctionne, nous aurons participé à l’élaboration d’un cadre, mais nous aurons surtout donné à ceux qui vont l’utiliser la capacité de réaliser des projets, d’engager des processus, et c’est cela qui importe !
Je passe sur tous les autres sujets abordés par le projet de loi : les questions sanitaires, l’enseignement agricole, les outre-mer, la question forestière, bien sûr, que nous venons de traiter ce soir, à propos de laquelle j’ai souhaité évoquer le beau pavillon en bois réalisé par la France pour l’Exposition universelle de Milan.
Tel est aussi le message que nous voulons transmettre : cette loi d’avenir doit servir à redonner à notre grand pays sa grande vocation agricole, et surtout cette capacité à se projeter, comme l’a dit Didier Guillaume, vers l’avenir ! Merci à tous !