Intervention de Vincent Capo-Canellas

Réunion du 28 avril 2014 à 16h00
Accessibilité pour les personnes handicapées — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Vincent Capo-CanellasVincent Capo-Canellas :

Tout cela est regrettable. Cependant, puisque nous y sommes, n’esquivons pas le débat.

Ce texte est issu d’une concertation approfondie et d’un travail de proposition qu’il faut saluer et mesurer à sa juste valeur. Une large part en revient à notre collègue Claire-Lise Campion.

Il donne un cadre législatif renouvelé, auquel s’ajoutera un cadre réglementaire rénové.

Il faut tenter d’apprécier le tout dans sa globalité. C’est à un équilibre d’ensemble que vous nous conviez. On y trouve une part législative par voie d’ordonnance et cela nous irrite, une part réglementaire future et ce futur nous laisse naturellement circonspects, une recherche de compromis que nous saluons, un sens de la simplification, enfin, qui nous laisse clairement sur notre faim.

Au départ, le constat est évident : le manque d’information et de prise de conscience sur la réalité de la loi de 2005 est patent. Les collectivités n’ont ainsi pas entendu qu’elles s’exposaient à des sanctions. Peu d’élus le mesurent aujourd’hui encore ; beaucoup l’ignorent. Le bruit de fond a été « l’objectif est inatteignable, chacun le sait ». Ce bruit de fond a rendu par avance l’échéance de 2015 presque théorique : « elle sera repoussée », entendait-on. C’est malheureux, mais c’est ainsi !

Bien sûr, les collectivités ont fait preuve de réalisme : la loi est une obligation. Toutefois, le terme a paru inatteignable. Chacun a fait autant qu’il le pouvait, en fonction de ses moyens, pas seulement financiers, surtout techniques.

Je prendrai quelques exemples : installer un ascenseur dans un hôtel de ville suppose que la mise aux normes électriques et incendie soit faite. Ainsi, l’accessibilité s’inscrit le plus souvent dans des stratégies patrimoniales d’ensemble. Rendre accessible une église classée, c’est plus de trois ans de procédure, et après seulement viennent les travaux.

J’ai entendu la critique légitime des associations de handicapés, qui nous disent : « Vous trouvez bien les moyens pour les énergies renouvelables ou les tableaux numériques ». À cela je répondrai que les élus partagent leurs exigences et leurs attentes ; nous mesurons clairement combien, lors d’une manifestation ou d’un mariage, être confronté à des locaux inaccessibles est choquant.

C’est bien, pour les élus, un constat qui oblige – nous l’avons tous en tête. D’où le besoin d’un nouveau souffle.

Ce qui vient naturellement compliquer le sujet, c’est le fait que le rappel salutaire de l’exigence d’accessibilité que contient ce projet de loi d’habilitation intervient à un moment où les collectivités voient leurs ressources baisser, où les rythmes scolaires compliquent encore la marche des projets et où la question du devenir des villes et des départements est posée – différemment, mais elle l’est.

Voilà donc le dilemme et l’extrême difficulté devant lesquels nous nous trouvons.

J’ajoute que l’on nous parle de simplification et qu’il n’est pas sûr que le présent texte y contribue. Je pense même, à bien des égards, le contraire. J’ai déposé quelques amendements que l’on pourrait qualifier de « poil à gratter » pour le souligner.

Dernier point, ce texte n’explore pas assez la piste intercommunale. Pourtant, par la voie simple des groupements de commandes, une piste pourrait être explorée pour les petites communes. Nous mesurons l’exigence que nous leur imposons et la faiblesse de leurs moyens.

Car l’important, l’essentiel est : comment faire les travaux lorsque, comme c’est le cas dans certaines communes, l’on ne compte ni ingénieur ni technicien supérieur dans sa collectivité et que ses travaux sont par définition complexes ?

De ce point de vue, j’ai lu avec intérêt que l’État devrait renforcer ses moyens, et je rappelle que les collectivités devront relever le défi sans en avoir les moyens.

J’arrête la critique d’un projet qui, malgré tout, redonne une perspective tant aux associations qu’aux collectivités et propriétaires d’ERP ou gestionnaires de transports, et qui a en outre le grand mérite de garder chacun dans une logique de travail collectif et partagé.

Je veux donc dire mon accord et celui de mon groupe sur ce sujet, accord assorti des réserves que je viens d’évoquer, accord par réalisme.

Mon mot d’ordre sera : simplifiez ! Donnez-nous vraiment les moyens de produire de l’accessibilité. Ne privilégiez pas la méthode sur l’objectif. Prenez garde à ce travers traditionnel de notre administration : ne donnons pas la priorité à la manière d’arriver à l’objectif, donnons-la à la réalisation de cet objectif. De grâce, ne privilégions pas la procédure !

Si je devais vous faire une critique, je vous dirais : entre la demande d’Ad’AP, la mise en concurrence pour un bureau d’études, la reprise des travaux de diagnostic antérieurs, la réalisation de l’Ad’AP, nous allons passer de douze à dix-huit mois à ne produire que de la procédure et à ne pas faire pendant ce temps les travaux attendus.

Bref, simplifiez, arrêtez de modifier les commissions que nous venons à peine de renouveler après les élections municipales, arrêtez d’ajouter des membres, de changer les dénominations, arrêtez les délais papier, la réunionite et la comitologie !

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