Intervention de Gilbert Barbier

Réunion du 30 avril 2014 à 14h30
Don de jours de repos à un parent d'enfant gravement malade — Adoption définitive d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Gilbert BarbierGilbert Barbier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une initiative généreuse a inspiré la proposition de loi dont nous discutons à présent ; depuis janvier 2012, date à laquelle elle a été adoptée par l’Assemblée nationale, plusieurs entreprises ont mis en place un mécanisme de dons de jours de repos entre salariés. Aujourd’hui, c’est, d’une part, l’occasion de saluer ces initiatives de solidarité et, d’autre part, de proposer un dispositif légal permettant de les étendre.

Ces expériences témoignent de l’insuffisance du dispositif dont bénéficient actuellement les parents d’un enfant gravement malade. Le sujet est d’importance, puisque 1 500 enfants environ seraient en permanence en phase terminale en France.

Pour avoir exercé durant dix ans en chirurgie infantile, je peux témoigner du drame que représente pour les parents le fait de ne pas pouvoir être présent continuellement aux côtés de leur enfant ; c’est un drame aussi pour l’enfant, qui, même s’il est entouré par le personnel médical et paramédical, ne retrouve pas forcément auprès d’eux le bien-être que ses parents peuvent lui procurer. C’est pourquoi des initiatives ont été prises pour permettre aux parents de rester le plus longtemps possible aux côtés de leur enfant malade. Je pense par exemple au CHU de Dijon, que vous connaissez bien, monsieur le ministre.

Si des salariés se sont mobilisés, c’est parce que le congé de présence parentale n’offre pas suffisamment de garanties. Ce congé n’est pas rémunéré, mais il peut être accompagné d’une allocation journalière de présence parentale, dont les modalités techniques viennent d’être précisées. C’est cette insuffisance qui a incité ces salariés à être solidaires.

Le texte propose de pallier les manques de la législation actuelle en se fondant sur ces initiatives. On compléterait ainsi la solidarité nationale par une solidarité au sein de l’entreprise ou des collectivités publiques. Il nous offre donc l’occasion d’améliorer la situation des parents d’un enfant gravement malade sans toucher aux finances publiques.

La proposition de loi semble répondre à un réel besoin.

S’il est démontré que les expériences de solidarité sont possibles sans l’intervention du législateur – c’est votre position, monsieur le ministre –, force est de constater que seules de grandes entreprises ont les moyens de les mettre en œuvre. En outre, comme Mme la rapporteur l’a souligné, les agents de la fonction publique ne disposent pas de moyens légaux pour mettre en place un tel mécanisme. Ces lacunes ont suscité une certaine émotion, qui s’est notamment manifestée par une pétition visant à soutenir l’adoption de cette proposition de loi.

L’Assemblée nationale a largement amélioré le texte initial, qui compte désormais deux articles. Elle a en particulier précisé le caractère anonyme et gratuit du don – c’est très important –, ce qui permet une protection du donateur et du donataire, conforme au statut que l’on trouve dans d’autres domaines. Nous en discutons souvent, madame la rapporteur, au sein du conseil de surveillance de l’Agence de la biomédecine. Le respect des périodes minimales de congé pour le donateur, le maintien de la rémunération et des droits liés à l’ancienneté pour le bénéficiaire constituent d’autres garanties importantes.

L’article 2 prévoit l’extension du dispositif aux agents de la fonction publique, ce qui me paraît capital.

La proposition de loi, qui a été inspirée par plusieurs initiatives spontanées, pose néanmoins un certain nombre de questions et ne permettra évidemment pas de régler la totalité du problème.

Se pose ainsi la question de l’intervention du législateur dans un domaine où la solidarité s’est construite sans la loi. Il ne faut toutefois pas négliger la puissance symbolique d’un tel texte, qui prévoit que, en ce domaine, la solidarité se joue au niveau de l’entreprise. La proposition de loi, et c’est la critique la plus forte qu’on puisse lui adresser, crée un risque d’inégalité en fonction de la taille de l’entreprise et, au sein d’une même structure, en fonction du capital de sympathie de la personne concernée – il y a là un véritable problème – ou de sa place dans la hiérarchie. Elle permet la solidarité, mais ne l’assure pas. Elle n’offre pas de solution certaine et prévisible pour les parents concernés.

Reste que la proposition de loi répond à un besoin immédiat, en particulier, je le répète, pour les agents de la fonction publique. Même si elle ne comble pas les lacunes du dispositif actuel, elle contribuera indéniablement, dans la limite que nous impose l’article 40 de la Constitution, à améliorer la situation de parents qui vivent un moment particulièrement difficile. C’est pourquoi nous serons très nombreux au sein du groupe du RDSE à lui apporter notre soutien.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion