Intervention de François Marc

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 29 avril 2014 : 1ère réunion
Programme de stabilité — Communication

Photo de François MarcFrançois Marc, rapporteur général :

En tout état de cause, la révision à la hausse des prévisions de croissance pour 2016 et 2017 n'a qu'un effet limité sur la trajectoire des finances publiques. Avec une croissance de 2 %, le solde structurel resterait inchangé, le solde public serait de - 1,6 % du PIB et la dette publique de 92,8 % en 2017 : les effets concrets de la réévaluation des anticipations de croissance pour les années 2016 et 2017 doivent donc être relativisés.

La trajectoire pluriannuelle des finances publiques vise à ramener le solde public à - 3 % du PIB en 2015, et à - 1,3 % en 2017, et le solde structurel à - 0,25 % en 2017. La dette publique serait stabilisée dès 2015 et décroîtrait en 2016 pour atteindre 91,9 % du PIB en 2017. La trajectoire de solde structurel a dû être décalée depuis le dernier programme de stabilité. En effet, le solde structurel pour 2011 a été réévalué à la fin du premier semestre 2013, ce qui a conduit à réviser à la baisse le solde structurel de 0,2 point en 2012. La faiblesse de la conjoncture économique en 2013 a creusé l'écart par rapport à la trajectoire. Le rendement des mesures nouvelles en recettes a été moindre qu'anticipé et des dépenses imprévues ou non maîtrisables ont dû être réalisées. En revanche, les dépenses de l'État et celles relevant de l'Objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM), maîtrisables, ont été inférieures à la prévision - nous y reviendrons lors de l'examen du projet de loi de règlement.

Dans ces conditions, le solde structurel s'établirait à - 2,9 % du PIB en 2013, soit 1,3 point de moins que la cible retenue par la loi de programmation, ce qui devrait conduire au déclenchement du mécanisme de correction par le HCFP à l'occasion du projet de loi de règlement. Ce mécanisme joue en cas d'écart supérieur à 0,5 point de PIB sur une année entre le solde structurel et la trajectoire fixée par la loi de programmation des finances publiques.

Le solde public serait de - 4,3 %, selon les données publiées par l'Insee le 31 mars dernier, alors que la prévision associée au projet de loi de finances pour 2014 était de - 4,1 %. Cela s'explique par le ralentissement des recettes publiques et par le creusement du déficit des administrations publiques locales (APUL), multiplié par 2,5 entre 2012 et 2013. Afin de réduire l'écart par rapport à la trajectoire, le Gouvernement a d'ores et déjà programmé une réduction des dépenses de 4 milliards d'euros pour 2014. L'effort à consentir pour atteindre les 3 % du PIB serait ainsi réparti entre 2014 et 2015.

La répartition des efforts en dépenses et en recettes s'inverse à partir de 2014, comme s'y est engagé le Gouvernement. Dans un premier temps, l'ajustement des finances publiques a reposé sur les recettes, qui ont un effet moins pro-cyclique, à court terme, que les baisses de dépenses. Une fois la reprise de l'activité engagée, on passe aux économies.

La trajectoire de redressement des comptes publics de 2015 à 2017 repose sur un effort inédit de 50 milliards d'euros d'économies, qui implique une maîtrise sans précédent de l'évolution de la dépense publique. Cette dernière augmenterait en volume de 0,1 % en moyenne entre 2015 et 2017, mais baisserait de 0,3 % en 2015. Une partie substantielle de l'effort serait alors réalisée dès 2015 - année au titre de laquelle 21 milliards d'euros d'économies sont prévus. Le total des économies sera ensuite porté à 37 milliards d'euros environ en 2016, et atteindra les 50 milliards d'euros en 2017.

Les efforts seront partagés entre les différentes catégories d'administrations en fonction de leur poids dans la dépense publique : 18 milliards d'euros pour l'État et les organismes divers d'administration centrale, 11 milliards d'euros pour les administrations publiques locales et 21 milliards d'euros pour les administrations de sécurité sociale.

Il s'agit pour l'État de poursuivre la stabilisation du point d'indice de la fonction publique, de recentrer ses interventions, de réduire les moyens humains et financiers des opérateurs et de maîtriser les dépenses de fonctionnement des ministères. La baisse de 11 milliards d'euros entre 2015 et 2017 des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales devrait entraîner une rationalisation de la dépense publique locale, qui serait favorisée par le projet de réforme territoriale annoncé par le Premier ministre. Enfin, 10 milliards d'euros d'économies seraient réalisées sur les dépenses d'assurance maladie grâce à une réduction du taux d'évolution de l'ONDAM.

Le Gouvernement attend 11 milliards d'euros d'économies de la réforme des retraites et de celle de la politique familiale, qui ont d'ores et déjà été votées, ainsi que d'autres sources d'économies : un report de la revalorisation des prestations sociales, la poursuite du rétablissement de l'équilibre des régimes de retraite complémentaires, une diminution des dépenses d'assurance-chômage, la poursuite de la réforme de la politique familiale et des économies de fonctionnement dans les organismes de protection sociale.

L'effort sur les dépenses prévu par le projet de programme de stabilité devra impérativement être respecté. Calculé afin de ne pas hypothéquer la reprise, le montant des économies annoncées laisse peu de marge de manoeuvre. Faire moins compromettrait la capacité de la France à respecter ses engagements européens.

Des projections ont été réalisées à partir de deux scénarios : celui d'une croissance des dépenses en volume de 1,25 % entre 2014 et 2017, soit la moyenne constatée en 2012 et 2013 ; celui d'une croissance des dépenses de 0,75 %, soit une progression intermédiaire entre cette moyenne et l'objectif du Gouvernement. La trajectoire de l'effort en recettes est supposée inchangée. Ces projections montrent que le non-respect des objectifs d'évolution de la dépense publique dégraderait fortement la trajectoire : dans le premier scénario, le solde effectif s'établirait à - 3,8 % du PIB et la dette publique à 98 % du PIB, contre respectivement - 2,7 % du PIB et 95,3 % dans le deuxième scénario. Le solde structurel serait de - 2,6 % du PIB dans le premier scénario, contre - 1,5 % du PIB dans le deuxième. Lâcher sur les économies déséquilibrerait donc toute la trajectoire.

Le taux de prélèvements obligatoires va diminuer à compter de 2015 pour revenir à 45,3 % du PIB en 2017, soit 0,6 point en deçà de l'objectif initialement retenu dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques. Le président de la République a demandé au Gouvernement que cet engagement fort soit concrétisé. La baisse du taux des prélèvements obligatoires entre 2015 et 2017 traduirait les effets du Pacte de responsabilité et de solidarité, poursuivant la réduction du coût du travail engagée avec le CICE. Ce Pacte s'appuie sur plusieurs piliers : la poursuite de l'allègement du coût du travail, pour 10 milliards d'euros ; la modernisation de la fiscalité des entreprises, avec une suppression progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) et une baisse de l'imposition des bénéfices des sociétés, pour 11 milliards d'euros ; des mesures de solidarité pour les ménages modestes, à hauteur de 5 milliards d'euros.

Selon Eurostat, le déficit effectif de la zone euro serait revenu à 3 % du PIB en 2013. Cela engage la France à persévérer dans ses efforts. Elle figure en effet parmi les dix États de la zone euro ayant un déficit effectif supérieur à 3 %, et son niveau de dette publique est légèrement supérieur à la moyenne. Pour autant, la France a réalisé un effort substantiel d'ajustement de ses finances publiques. Entre 2010 et 2013, le déficit effectif a été réduit de 2,7 points du PIB ; c'est moins, certes, que l'Allemagne, qui a bénéficié d'une conjoncture économique plus favorable, mais plus que l'Italie, l'Espagne et les Pays-Bas. Son déficit structurel a diminué de 2,9 points de PIB, ce qui est proche de l'ajustement structurel réalisé par l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, et sensiblement supérieur à celui réalisé par les Pays-Bas. Enfin, si la dette publique a progressé de 10,8 points de PIB entre 2010 et 2013, seule l'Allemagne a fait reculer son ratio d'endettement au cours de la période. Malgré ce petit retard, notre situation est loin d'être calamiteuse. Le programme d'efforts que le Gouvernement nous propose vise à retrouver une trajectoire vertueuse.

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