Intervention de Nicolas Bourriaud

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 30 avril 2014 : 1ère réunion
Suite à donner au référé de la cour des comptes concernant le contrôle des comptes et la gestion de l'école nationale supérieure des beaux-arts ensba portant sur les exercices 2001 à 2011 — Audition de Mm. Nicolas Bourriaud directeur de l'ensba patrick lefas président de la troisième chambre de la cour des comptes et michel orier directeur général de la création artistique

Nicolas Bourriaud, directeur de l'École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA) :

Les remarques de la Cour des comptes au sujet de la place de l'ENSBA dans le paysage de l'enseignement supérieur ne posent pas de problème particulier : elles soulignent que l'excellence de ses enseignements correspond parfaitement aux critères d'éligibilité du master. La place de l'ENSBA au sein de la filière des écoles supérieures d'art est en revanche plus problématique. À cet égard, je tiens à rappeler que les spécificités de l'ENSBA ne sont pas absurdes : l'école vise essentiellement à former des artistes et des créateurs, et une fusion avec d'autres établissements d'enseignement davantage portés sur le design ou l'architecture, par exemple, poserait certains problèmes. Il ne faut pas confondre les genres.

En revanche, les mutualisations de fonctions support sont tout à fait à l'étude aujourd'hui. Nous allons notamment proposer à l'école d'architecture de Paris-Malaquais de mutualiser certaines fonctions, notamment le laboratoire photographique et certains ateliers techniques qui partagent des enjeux communs, au-delà des apprentissages propres à chacune de ces écoles. Les problèmes de gestion commune des bâtiments du site pourraient aussi être abordés avec davantage de convivialité par les deux écoles.

Concernant l'internationalisation du corps enseignant et des étudiants, il me semble que l'école est toujours aussi attractive. Les deux professeurs chefs d'atelier recrutés depuis mon arrivée sont des professeurs étrangers : Pascale-Marthine Tayou, d'origine camerounaise et qui vit en Europe, et Ann Veronica Janssens, belge, sont tous deux des artistes internationalement reconnus. C'est une préoccupation constante de notre établissement, mais nous ne pouvons pas non plus proposer une discrimination à l'embauche, ce qui serait tout à fait impensable.

Le nombre d'étudiants étrangers est effectivement en chute : ils étaient entre 23 % et 30 % dans les années 1990, contre 13 % en 2011. Ce chiffre augmente très lentement depuis : la proportion est d'environ 15 % aujourd'hui. J'y vois plutôt un bon symptôme et un encouragement, car cette proportion correspond à celle de l'ensemble du système éducatif français. L'attractivité internationale de l'école dépend aussi de la communication, or le budget communication a baissé de moitié en 2014 en raison des restrictions budgétaires. Cette année, le site Internet sera traduit entièrement en langue anglaise pour la première fois : c'est bien entendu un levier extrêmement important. Il faudra également imaginer des enseignements en langue anglaise, qui sont pour l'instant uniquement le fait de certains chefs d'atelier mais ne sont pas étendus aux cours théoriques.

Concernant le budget des éditions, il faut bien comprendre que son déficit s'explique par la coexistence d'objets réalisés totalement à fonds perdus - notamment les plaquettes, le livret de l'étudiant et les cartons d'invitation - et des activités « commerciales » que sont les publications scientifiques et artistiques de l'ENSBA. Prises séparément, ces dernières sont tout à fait à l'équilibre, ce qu'une comptabilité analytique permettrait de constater, comme vous le soulignez. Les éditions de l'ENSBA ont par ailleurs vocation à faire partie du réseau plus étendu des écoles d'art françaises, voire à en devenir la tête de pont. Nous y travaillons avec la direction générale de la création artistique.

Concernant la gestion administrative, j'ai évoqué la nécessité d'une comptabilité analytique. Cela nécessitera le recrutement d'un agent supplémentaire : c'est la seule difficulté que nous éprouvons pour le moment. En général, la politique de recrutement de l'école est une politique de requalification de l'emploi. Par exemple, le départ à la retraite du photographe attitré de l'école nous permettra de créer un deuxième poste au service informatique qui, pour l'instant, n'en comporte qu'un seul. Cet ingénieur système pourra s'atteler aux problèmes récurrents d'un système informatique vétuste, constitué entre 1998 et 2000 et jamais remplacé, aboutissant le 19 septembre 2013 à une panne généralisée. Cela nous a amenés à investir et puiser encore sur le fonds de roulement de l'école pour stabiliser le système. Je pointerai, enfin, un changement spectaculaire : tous les agents concernés par la loi Sauvadet de mars 2012 ont été titularisés en 2013.

Je voudrais enfin insister sur le fait que le coût de 19 000 euros par étudiant est calculé par rapport au budget global de l'ENSBA, lequel couvre la totalité de ses missions statutaires et non pas uniquement l'enseignement. La diversité de ces missions statutaires constitue l'identité de l'école, dont le modèle unique au monde ne doit pas être banalisé ni standardisé. Son attractivité internationale repose sur ce modèle tout à fait original qui est appelé à faire florès.

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