La question des juridictions prud'homales est sensible pour les entreprises comme pour les salariés. La portée de ce projet de loi est limitée, puisqu'il ne porte pas sur leur existence même, leur rôle ou leur fonctionnement, mais concerne uniquement la désignation des conseillers prud'homaux, qui sont pour ainsi dire des juges représentant les salariés et les employeurs. C'est un texte d'habilitation qui ne comporte qu'un seul article.
Il arrive après la réforme de la représentativité des organisations syndicales et patronales. Pour les premières, une position commune entre employeurs et salariés a conduit à la loi de 2008. La question de la représentativité patronale a été abordée plus récemment, à l'occasion du projet de loi relatif à la formation professionnelle et à la démocratie sociale, qui découle d'un protocole entre les organisations nationales représentatives interprofessionnelles que sont la CGPME, le Medef et l'UPA. Ces évolutions ont soulevé la question de la désignation des conseillers prud'homaux. Pour les salariés, il a semblé évident que ceux-ci pouvaient désormais être désignés sur la base de la représentativité des organisations syndicales. Faut-il instaurer un dispositif symétrique pour les employeurs ? L'adoption de la loi du 5 mars dernier fixe un cadre légal pour la représentativité patronale, qui n'entrera en vigueur qu'en 2017. Que faire pour le prochain renouvellement des conseillers prud'homaux ? Faut-il un cadre intermédiaire jusqu'en 2017 ?
Le ministère du travail a proposé un système de désignation. Nous sommes d'accord : les critères de représentativité seront clairs en 2017. La participation aux élections prud'homales diminuant régulièrement, la légitimité de cette élection pose problème. Son coût, compris entre 80 et 90 millions d'euros, n'est pas négligeable - et il est plus important pour les salariés que pour les employeurs, dont le corps électoral est moins nombreux. Nous approuvons donc ce projet de loi. Il reviendra aux organisations représentatives de convenir des modalités de désignation. Déjà, pour les élections, les grandes organisations patronales convenaient de listes communes. Un cadre de désignation commun devrait donc pouvoir être élaboré.
Que faire entre 2015 et 2017 ? Le mandat des conseillers prud'homaux actuels a déjà été prolongé jusqu'en 2015. Une telle extension a imposé, dans plusieurs cas, le recours aux suppléants. Une nouvelle prolongation des mandats posera donc des problèmes délicats. Cela dit, une élection pour une si courte période ajouterait de la complexité à la réforme de la représentativité patronale. Une désignation commune sur la base du résultat des élections de 2008 a été évoquée. Cette période intérimaire doit faire l'objet de discussions avec le ministère du travail et entre organisations représentatives, car aucune de ces modalités n'est pleinement satisfaisante.
Nous approuvons donc ce projet de loi, sous réserve de précision sur les modalités de la désignation, et à condition que des discussions soient organisées avec le ministère du travail sur la période 2015-2017 : il s'agit d'un problème national, puisque les quelque 200 conseils prud'homaux rassemblent un nombre important de conseillers !