Intervention de Maryvonne Blondin

Réunion du 6 mai 2014 à 9h30
Questions orales — Situation des mineurs étrangers accédant à la majorité

Photo de Maryvonne BlondinMaryvonne Blondin :

Madame la présidente, c'est avec beaucoup de plaisir que je salue votre désignation à la fonction de vice-présidente.

Monsieur le ministre, ma question porte sur la situation des mineurs étrangers isolés accédant à la majorité et sur les difficultés rencontrées à cette période où ces jeunes basculent, pour nombre d’entre eux, dans une « zone grise ».

Le cadre juridique actuel distingue deux situations lors de l’accession à la majorité, selon que le mineur ait été confié à l’aide sociale à l’enfance, l’ASE, du département où il se trouve avant ou après son seizième anniversaire. C'est dans cette dernière situation qu’on retrouve le plus de difficultés.

Si le jeune avait moins de seize ans lorsqu’il a été confié à l’aide sociale à l’enfance, sa situation est simple : elle est régie par l’article L. 313-11, alinéa 2 bis, du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA. Le titre est alors automatiquement remis, sous réserve du respect de certaines conditions.

À l’inverse, lorsque le mineur a été confié à l’ASE après son seizième anniversaire, l’article L. 313-15 du CESEDA s’applique et prévoit la délivrance à titre exceptionnel, et non de façon automatique, dans l’année qui suit son dix-huitième anniversaire, de la carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire » au jeune majeur étranger, qui doit justifier « suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle ».

Cette disposition est également mise en œuvre « sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation » suivie par le jeune, « de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d’origine et de l’avis de la structure d’accueil sur l’insertion de cet étranger dans la société française ». La régularisation est laissée à l’appréciation souveraine du préfet.

Il convient dès lors de pointer, dans ce cas, le manque de continuité juridique entre les deux logiques différentes – ASE puis ministère de l’intérieur –, qui a pu être relevé par notre ancienne collègue Hélène Lipietz, lors de l’examen de la mission « Immigration, intégration et nationalité » du projet de loi de finances pour 2014.

Outre la nature des liens avec la famille dans le pays d’origine, l’article L. 313-15 du CESEDA dispose que le jeune doit justifier suivre une formation dont le caractère est réel et sérieux. Il est ajouté que le jeune doit suivre cette formation depuis au moins six mois.

Combien de jeunes étrangers, monsieur le ministre, pris en charge à seize ans ou dix-sept ans, pourront, à dix-huit ans, se prévaloir d’au moins « six mois [de] formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle », sachant qu’ils sont, pour la plupart, soit non francophones, soit peu ou non scolarisés avant leur arrivée en France ?

Enfin, l’entrée en formation professionnelle nécessite une autorisation de travail qu’ils n’ont pas, et qui est obligatoire pour signer un contrat d’apprentissage ou une formation en alternance.

Je souhaiterais savoir si une réflexion approfondie est engagée sur le sujet de l’accession à la majorité des mineurs isolés étrangers confiés à l’aide sociale à l’enfance alors qu’ils étaient âgés de plus de seize ans : une transition et une sécurité juridique sont en effet nécessaires.

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