Intervention de Laurent Fabius

Commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire — Réunion du 6 mai 2014 : 1ère réunion
Conférence de paris 2015 sur le climat — Audition de M. Laurent Fabius ministre des affaires étrangères et du développement international

Laurent Fabius, ministre :

Je vais en parler à mon collègue Jean-Yves Le Drian, non pour me défausser, mais parce que vos propositions me paraissent très intéressantes et utiles et que son ministère, en particulier, peut certainement apporter sa contribution aux objectifs de la conférence.

Oui, Monsieur Nègre, nous devons fournir un effort de pédagogie. Nous ne nous y sommes pas encore attelés, mais nous allons nous y mettre. Nous pouvons en effet agir dans le secteur des transports, que vous connaissez bien, comme moi, car je fus président d'agglomération.

Vous avez raison, Madame Didier, la question sociale est importante et il faut impliquer toutes les forces, y compris syndicales, qui sont demanderesses.

Sur l'enthousiasme écologique de l'Australie et du Canada, il y a, en effet, des marges de progression. Le gouvernement australien a changé. Le nouveau Premier ministre avait fait campagne contre la taxe carbone. Le Canada, lui, n'a pas varié. L'Australie préside le G 20. Nous avons demandé l'inscription à l'ordre du jour, qui n'était pas spontanée, de la question climatique. Quant au Canada, si les États-Unis bougent, il est probable qu'il évolue à son tour. Ces deux pays font partie de ceux qui, sur notre planisphère, restent à convaincre.

Sur les médias, je rappellerai cette anecdote que j'ai lue dans les mémoires de Georges Pompidou et qui n'a pas pris une ride : aux temps de l'ORTF, dans les années soixante-dix, Mme Claude Pompidou inaugure un hôpital en Bretagne ; l'antenne locale demande au siège s'il faut filmer ; « seulement si incident » répond le télégramme. Tout est dit ! N'allons pas contre les médias, ne nourrissons pas, bien sûr, l'illusion de les contrôler, mais efforçons-nous de les sensibiliser et faisons en sorte que les aspects majoritaires soient au moins aussi intéressants que les à-côtés. Cela demande beaucoup de réflexion et de technique.

Madame Jouanno, vous étiez à Copenhague et votre expérience est utile. Sur l'Afrique, j'ai répondu. Mon homologue brésilien a négocié Rio et cela se sent : il en connaît beaucoup plus long que moi. Le Brésil tient une position très forte, qui est parfois un peu difficile à cerner. Nous ferons le maximum pour qu'il soit de notre côté, celui de l'action.

Toutes les collectivités sont concernées, communes, départements, régions, évidemment. En octobre se tiendra une grande réunion des régions, à laquelle participera M. Schwarzenegger, en sa qualité d'ancien gouverneur de Californie. Je compte beaucoup sur les régions.

Oui, Madame Garriaud-Maylam, les lycées français à l'étranger ont un rôle à jouer. J'ai demandé à Mme Farnaud-Defromont, directrice de l'agence pour l'enseignement français à l'étranger de mettre ces questions à leur ordre du jour, ce qu'ils font volontiers.

La commissaire européenne, Mme Hedegaard, connaît très bien le sujet, qu'elle continuera à suivre, mais son mandat arrive à son terme. Son successeur jouera un rôle très important. Elle connaît les difficultés, européennes et mondiales. Elle a eu raison de rappeler que le succès n'est pas assuré.

Vous aurez à débattre du traité transatlantique. A l'approche des élections européennes, plusieurs articles en traitent dans la presse, ce qui n'est pas illégitime. La plupart vont dans le même sens. J'ai vu ce matin à Paris le négociateur américain. Quel est l'objectif, pour l'Europe, pour la France ? Obtenir une part plus importante du marché américain, vendre plus de produits agricoles, d'appellations d'origine contrôlée (AOC), pénétrer davantage des marchés publics qui ne nous sont ouverts qu'à 20 % - quand les nôtres le sont à 85 %, dit-on. Les risques existent : que l'audiovisuel, pour l'instant exclu du champ de la négociation, soit réintroduit ; que nos préférences collectives (refus du poulet frelaté, des OGM, etc.) soient finalement ignorées ; que les États fédérés ne s'estiment pas liés par les engagements que nous négocions avec la seule fédération ; que l'instance d'appel manque d'objectivité, etc.

Je comprends que certains points de la négociation soient tenus secrets. Celle-ci ayant lieu tous les trois mois, le gouvernement viendra, à la même fréquence, rendre compte à l'Assemblée nationale et au Sénat de son avancement. Il vous appartiendra, lorsqu'elle aura abouti, de dire oui ou non. Au stade où nous en sommes, je n'ai pas d'idée préconçue. Si nos objectifs sont atteints et les risques évités, il faudra s'en féliciter. Sinon, il conviendra de rejeter l'accord. Il est trop tôt pour s'en faire une idée, d'autant que, selon le négociateur américain, il ne faut espérer aucune avancée significative avant l'an prochain, en raison des élections de mi-parcours ayant lieu aux États-Unis à la fin de cette année. Le commerce euro-américain représente 40 % du commerce mondial. Si nous pouvons saisir une chance d'aller chercher outre-Atlantique des points de croissance, ne la laissons pas passer ! Je ne puis, en cet instant, prédire si elle adviendra.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion