Je suis l'un des directeurs de l'agence d'architecture Populous, spécialisée dans les équipements sportifs. Nous possédons des bureaux à Londres, Kansas City et Brisbane. Nous avons conçu et réalisé près de 50 % des stades de plus de 60 000 places construits dans le monde depuis 30 ans, ce qui représente notamment plus de 300 000 sièges de rugby. Nous étions notamment concepteurs de la tribune sud de Twickenham, du Millenium Stadium de Cardiff et de l'Aviva Stadium de Dublin. Nous nous sommes également occupés de la rénovation de plusieurs stades néo-zélandais pour la Coupe du Monde 2011. Notre agence est la seule à avoir réalisé trois stades olympiques - Sidney, Londres et Sotchi. Nous avons rénové le stade de Wimbledon. Ainsi, nous possédons l'expérience de ce que sont les stades - en ville comme en dehors, construits ou rénovés - et de la manière de les utiliser.
S'agissant de la place du stade dans la cité et de son modèle économique, j'apporterai un éclairage international à votre préambule. Vous évoquez Roland-Garros et le génie du lieu ; il est vrai que les stades sont souvent réalisés ainsi. La volonté politique était de construire l'Aviva Stadium au même emplacement que Lansdowne Road, comme cela a également été le cas pour Millenium Stadium ou Wembley. Certains stades sont toutefois rebâtis ailleurs. Avant le Stade de France, l'équipe de France évoluait au Parc des Princes et, avant cela, à Colombes. Ces décisions appellent des données très larges à prendre en compte, qui sont ou non valables selon les enceintes.
Je suis d'accord avec vos propos sur la nécessité d'une proximité pour la convivialité. Cette convivialité diffère au Stade de France car, comme tous les stades olympiques, il possède une piste d'athlétisme. À Munich, le Bayern a souhaité un nouveau stade pour cette raison. Le dimensionnement et la capacité d'un stade ne sont cependant pas déterminants dans la non-convivialité. La convivialité à Twickenham est incommensurable. Le match est seulement la mi-temps du temps passé par les gens dans le processus entier, pour aller et revenir. L'expérience est globale, bien au-delà du match.
Vous parliez des équipements publics qui constituent effectivement une spécificité française. La ligue fermée est un avantage incommensurable vis-à-vis des autres sports et fédérations. Sur la question de la consommation et des offres supplémentaires, pourquoi ne pas proposer autre chose qu'un hot-dog ? Enfin, la question de l'impact d'une reconstruction dans un tissu urbain existant se pose. Le stade doit être appréhendé comme générateur de tissu urbain. Il constitue une manne rare qu'il convient d'imaginer. Je ne parle pas des stades à l'américaine qui possèdent un immense parking et un centre commercial. Des opportunités existent pour développer un tissu urbain avec des équipements propres.
Vous avez visité des stades : cette démarche est primordiale.