Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 15 mai 2014 à 9h30
Droit à l'information dans le cadre des procédures pénales — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Christiane Taubira :

Sans prolonger inconsidérément ces débats, je voudrais apporter quelques éléments d’information en réponse à M. le rapporteur, à M. Hyest ou à M. Détraigne, non sans avoir au préalable remercié les intervenants pour leurs observations, qui ont enrichi la réflexion et ont attiré notre attention.

Nous savons que nous aurons un prochain rendez-vous. J’envisage que nous puissions procéder avant la date limite à la transposition de la directive Accès à l’avocat. Nous reviendrons donc devant vous, mais les délais impartis seront plus confortables.

Concernant l’aide juridictionnelle, effectivement, un problème se pose. Parmi la demi-douzaine de rapports élaborés sur ce thème ces dix dernières années, le Sénat en a produit un excellent, qui rappelait la nécessité de « réformer un système à bout de souffle ». Aucune mesure n’a encore été véritablement prise, nous n’avons pas diversifié les ressources, nous n’avons même pas fixé de doctrine sur le sujet.

Vous le savez, j’ai l’ambition d’une grande politique de solidarité nationale. Je n’en ai pas encore les moyens ; je les ai cherchés en explorant plusieurs pistes, qui présentent, dans la conjoncture actuelle, quelques inconvénients. Certaines constitueraient ainsi des prélèvements obligatoires, qui sont très difficiles à accepter aujourd’hui.

Je reste cependant persuadée qu’il faut diversifier les sources et conférer à l’aide juridictionnelle un fondement solide et durable, qu’il faut remonter le plafond de ressources, bien inférieur au seuil de pauvreté, qu’il faut revaloriser l’unité de valeur, qui n’a pas été modifiée depuis sept ans, ce qui n’est pas facile à accepter.

Il faut également élargir le champ des contentieux : un certain nombre de justiciables à petits revenus sont confrontés à des affaires qui les pénalisent vraiment, mais qui n’entrent pas dans le champ prévu.

En outre, il conviendra d’adopter certaines dispositions pratiques, en vue d’assurer un meilleur fonctionnement de l’aide juridictionnelle et de fluidifier les procédures. Il y a donc à faire sur le sujet.

Cette transposition aura incontestablement un impact sur l’aide juridictionnelle, puisqu’elle va créer des besoins. En effet, nous permettons, dans le cadre de l’audition libre, l’accès à l’avocat. L’étude d’impact a estimé que les dépenses supplémentaires, y compris administratives, liées à l’aide juridictionnelle s’élèveront à 50 millions d’euros.

Pour vous rassurer au moins partiellement à ce stade, monsieur Hyest – vous seriez sans doute totalement rassuré si je vous disais que les crédits sont d’ores et déjà disponibles ! –, je puis vous dire que nous avons intégré ces 50 millions d’euros dans nos discussions budgétaires, en vue d’appliquer les dispositions que nous introduisons dans notre droit interne.

Concernant maintenant l’accès au casier judiciaire, monsieur le rapporteur, lorsque le bulletin figure au dossier, il doit être accessible, comme toutes les autres pièces.

Vous l’avez rappelé, une discussion avec le rapporteur de l'Assemblée nationale, notamment, a été engagée à propos de la mise à disposition des pièces du dossier et de l’usage abusif qui pourrait en être fait.

À cet égard, on peut, me semble-t-il, séparer les problèmes.

Pour ma part, j’estime qu’il est nécessaire que les pièces soient mises à la disposition des défenseurs et, comme le prévoit ce texte, du justiciable s’il n’a pas d’avocat. Il y a sans doute lieu d’harmoniser les pratiques sur l’ensemble du territoire, en veillant à ce que cela se passe de la même façon dans toutes nos juridictions et pour toutes les enquêtes.

La circulaire, qui est actuellement en phase de finalisation – elle sera même prête avant la promulgation de la loi –, le précisera, afin de régler véritablement les problèmes de disparité des pratiques sur le territoire.

En tout cas, lorsque des éléments sont rassemblés sur un citoyen quel qu’il soit, il est souhaitable, dans une démocratie en tout cas, que ce dernier puisse en avoir connaissance. Il ne saurait en être autrement dans un État de droit. D’ailleurs, nos fichiers sont mis à la disposition des citoyens concernés : ces derniers ont le droit d’y accéder et même de procéder à des rectifications. On ne comprendrait donc pas qu’il soit possible de rassembler toute une série d’éléments sur un citoyen, qui, en outre, peuvent lui être préjudiciables, sans autoriser ce dernier à y accéder.

Si j’ai bien compris, le rapporteur de l'Assemblée nationale craint que les employeurs ne profitent de l’accès des citoyens à ces pièces pour les leur réclamer.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion