Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le droit au logement, érigé en « objectif à valeur constitutionnelle » voilà plus de quinze ans par le Conseil constitutionnel, est encore bien loin d’être effectif.
Ces dernières années, nous avons adopté des lois aux intitulés ambitieux – faisant référence à un « engagement national pour le logement », à un « droit au logement opposable », à une « mobilisation pour le logement », etc. –, mais, dans les faits, nous constatons une indéniable détérioration de la situation du logement, dont la crise économique, qui fait figure de « coupable idéal », est bien loin d’être seule responsable.
La présente proposition de loi vise à y remédier en prévoyant des mesures très concrètes de prévention des expulsions de locataires en difficulté, lesquelles menacent un nombre croissant de ménages et constituent un risque majeur d’exclusion, ainsi qu’en renforçant la portée du droit au logement opposable, le DALO, en vue de garantir un droit effectif au logement.
Avant de présenter le dispositif de ce texte, je voudrais insister sur la persistance de la crise du logement, que reflète l’importance des phénomènes de non-logement et de mal-logement et qui révèle les insuffisances de la politique du logement.
En effet, nous constatons chaque jour « l’extension de l’exclusion par le logement » dénoncée à juste titre dans le seizième rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre. C’est une réalité à laquelle nous sommes tous confrontés, comme l’ont bien montré les discussions très riches et ouvertes qui ont été les nôtres en commission. J’espère que nous aurons le même débat aujourd’hui en séance publique et, surtout, que celui-ci débouchera sur des mesures concrètes.
À partir, notamment, des résultats de la dernière enquête Logement, qui a été réalisée en 2006 – la situation n’a pas dû s’arranger depuis lors ! –, l’INSEE a publié récemment des estimations sur les situations de « grande difficulté » – absence de logement ou mal-logement – dans la deuxième moitié des années 2000. Mes chers collègues, vous en trouverez un compte rendu plus détaillé dans mon rapport écrit, mais je voudrais citer quelques chiffres significatifs.
Ainsi, 133 000 personnes seraient sans domicile, dont 33 000 vivraient dans la rue ou résideraient occasionnellement dans des structures d’hébergement d’urgence et 100 000 seraient accueillies temporairement dans divers dispositifs d’hébergement.
D’autres personnes, également dépourvues de logement personnel, recourent à des solutions individuelles : elles logent à l’hôtel à leurs frais ou sont hébergées chez des particuliers. En 2006, quelque 38 000 personnes vivaient à l’hôtel, y compris un nombre indéterminé de gens pris en charge au titre de l’hébergement social. De nombreux enfants vivaient dans ces conditions : 17 % de ces 38 000 personnes avaient moins de 18 ans.