Hors la population étudiante, diverses catégories de personnes sont hébergées par des tiers avec lesquels elles n’ont pas de lien de parenté direct.
Pour l’INSEE, le « noyau dur » des bénéficiaires de cet hébergement contraint représente 79 000 personnes âgées de 17 à 49 ans n’ayant pas les moyens d’avoir un logement indépendant, bien que 43 % d’entre elles travaillent.
Toutefois, plus de 50 000 personnes de plus de 60 ans sont également hébergées chez des tiers : ce sont le plus souvent des femmes et 53 % d’entre elles vivent dans les zones rurales. Leur situation tient à des difficultés financières, mais aussi à des problèmes d’isolement ou de santé.
Enfin, de nombreux jeunes adultes – 282 000, toujours selon les chiffres de l’INSEE – sont hébergés par leur famille non pas par choix, mais faute de pouvoir accéder à un logement personnel ou d’avoir pu s’y maintenir.
Le mal-logement concernerait, quant à lui, 2, 9 millions de personnes occupant des habitations de fortune, sans confort ou surpeuplées.
À partir de ces données, l’INSEE estime à 3, 2 millions le nombre de ceux qui ne peuvent accéder à un logement satisfaisant.
Le rapport de 2011 de la Fondation Abbé Pierre sur l’état du mal-logement en France évalue même à 3, 6 millions le nombre des mal-logés, parmi lesquels sont inclus les gens du voyage ne pouvant accéder, faute de places en aires d’accueil, à des conditions de vie décentes. La différence avec les estimations de l’INSEE tient aussi à la difficulté de dénombrer les personnes sans logis ou recourant à des solutions de fortune : celles qui vivent dans des squats, des bidonvilles, en camping à l’année ou dans des locaux non destinés à l’habitation, ou celles qui dorment, comme un certain nombre de travailleurs pauvres, dans leur véhicule.
De plus, les investigations spécifiques de l’INSEE sur la population sans domicile et sur l’hébergement sont relativement anciennes : elles remontent à 1996 et à 2001 pour les personnes sans domicile et à 2002 pour l’enquête Logement sur l’hébergement.
La Fondation Abbé Pierre relève aussi que la demande de logement non satisfaite reste importante. Pour n’évoquer que les logements sociaux, qui n’accueillent encore qu’un ménage à bas revenus sur trois, le nombre des demandes s’élevait, en 2009, à 1 230 000. La même année, l’offre disponible était de 448 100 logements HLM, le niveau le plus bas au cours des années 2000 – 411 900 logements – ayant été atteint en 2005.
Cette inadéquation de l’offre s’aggrave, compte tenu de l’insuffisance des moyens de la politique du logement.
Cette insuffisance est d'abord celle des moyens administratifs et juridiques de l’État, relevée par deux rapports récents et importants.
Dans un rapport public de 2009 intitulé « Droit au logement, droit du logement », le Conseil d’État propose un certain nombre de pistes de réflexion pour repenser le droit du logement, par ailleurs défini comme « un arsenal impressionnant à l’efficacité limitée ». Il insiste en particulier sur la nécessité de permettre à l’État de disposer de nouveau « d’un appareil statistique de qualité et d’une expertise de haut niveau en matière d’urbanisme et de construction », outils sans lesquels il est impossible de fixer des objectifs pertinents à la politique du logement et d’élaborer une législation appropriée. Les auteurs de ce rapport soulignent également une autre nécessité : clarifier le rôle de l’État après « l’éclatement de la gouvernance du logement à laquelle on a assisté et qui pénalise d’abord les personnes défavorisées ».
De son côté, le Conseil économique, social et environnemental, dans son rapport de septembre 2010 intitulé « Évaluationde la mise en œuvre du droit au logement opposable », recommande l’élaboration d’une « stratégie de moyen-long terme » permettant de réorienter la politique du logement vers le développement de l’offre accessible.
Dans le domaine du logement et du développement de la cohésion sociale comme en d’autres matières, l’accumulation des textes n’est donc pas un gage d’efficacité de l’action publique, surtout – c’est le second point que je voudrais évoquer – quand l’effort budgétaire est insuffisant et les choix financiers contestables.
Mes chers collègues, il n’y a pas si longtemps que nous avons examiné la loi de finances pour 2011. Chacun se souvient donc des critiques qu’avait suscitées le budget du logement, y compris de la part des rapporteurs des commissions du Sénat, qui avaient relevé, notamment, l’érosion des moyens, la sous-évaluation persistante des dépenses d’hébergement d’urgence et la mise à contribution des organismes d’HLM et de la participation des employeurs à l’effort de construction pour compenser le désengagement de l’État.
Un objectif de construction de 120 000 logements en 2011 a été annoncé, mais ce chiffre élevé est-il réaliste ? Et quelles sont les perspectives de financement à moyen et à long terme de la politique du logement ?
Dans le même temps, malgré le rabotage affiché des niches fiscales, les finances publiques supportent toujours le poids des coûteuses mesures de défiscalisation, qui ont encouragé la réalisation d’investissements locatifs totalement déconnectés des besoins réels. Le seul dispositif Scellier devrait encore coûter cette année 320 millions d’euros, selon les estimations du ministère du budget, …