La question des expulsions locatives pose évidemment un sérieux problème dès lors que notre législation a fait du droit au logement opposable l’un des fondements des rapports locatifs, et ce depuis plusieurs années.
Quatre années après la discussion et l’adoption de la loi DALO, où en est-on ?
C’est après des luttes particulièrement vives, ayant fortement touché l’opinion publique, que le Gouvernement a fini par faire entrer dans la loi ce qui n’était jusqu’alors qu’une revendication des acteurs du droit au logement et une recommandation de plusieurs structures s’intéressant aux questions du logement et de la lutte contre les exclusions.
Bien sûr, un certain nombre de précautions avaient été prises afin de restreindre le nombre de demandeurs de logement éligibles au dispositif, en arguant en particulier de leur situation administrative ; le projet de loi ne s’était pas contenté de poser la question du droit au logement opposable, il était agrémenté de dispositions qui avaient notamment tendance à valider l’indice de référence des loyers, qui a été l’instrument idéal du relèvement des loyers dans les zones les plus tendues ces dernières années.
À la vérité, le droit au logement opposable, sur le principe, est un moyen de lutte contre l’exclusion sociale fondamental, mais il ne résout pas tout. Ne plus avoir de toit est l’un des facteurs déclenchant de l’exclusion sociale, et c’est pourquoi nous devons nous mobiliser.
Comme on pouvait s’y attendre, ce que les demandes d’application du principe défini dans la loi du 5 mars 2007 ont prouvé, c’est qu’il existe dans notre pays quelques régions bien précises dans lesquelles les problèmes de logement ont toujours eu une acuité particulière, laquelle s’est accrue avec la persistance de la fièvre spéculative qui continue d’animer le marché.
Ce que prouve en effet le bilan de l’application du droit au logement opposable, c’est que les tensions les plus fortes en matière de logement sont enregistrées en Île-de-France et en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, singulièrement sur la Côte d’Azur.
La même observation vaut pour la région capitale, où les tensions sont d’autant plus fortes que l’on se situe au plus près du centre de Paris, la spéculation immobilière ayant un caractère centrifuge assez nettement affirmé et devenant de moins en moins forte dès lors que l’on s’éloigne de Paris .
Le marché immobilier, précisons-le, a connu une certaine tension dans quelques villes de province, comme Strasbourg, Lyon et Lille. En outre, il est évident que certains choix de politique locale en matière d’immobilier – je pense à Marseille – ont également pu contribuer à tendre une situation qui n’a cependant pas conduit aux exclusions massives constatées en Île-de-France.
Dans ce contexte, il nous semble nécessaire de limiter nettement plus qu’aujourd'hui le recours à la force publique, ultime moyen utilisé en matière de contentieux locatif. Un demandeur de logement éligible au droit au logement opposable, correspondant aux critères retenus, dont nous avons dit qu’ils n’étaient d’ailleurs pas aussi ouverts que cela, ne peut et ne doit décemment pas être expulsé de son logement sans solution adaptée à sa situation.
On nous objectera que certaines expulsions ont plus à voir avec les nécessités de l’urbanisme qu’avec le non-respect des normes locatives ou des droits des locataires, mais il n’en demeure pas moins que l’inscription au fichier DALO devrait suffire pour justifier la non-exécution d’une décision de justice, conformément aux préconisations du Comité de suivi de la mise en œuvre du droit au logement opposable, reprises dans un rapport du Conseil économique, social et environnemental.
Tel est l’objet de l’article 3, que nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter.