Avant d’en venir à mon propos, je voudrais à mon tour, madame la secrétaire d’État, vous féliciter de votre nomination et vous accueillir très chaleureusement dans cet hémicycle.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur et cher Marc Daunis, mes chers collègues, au nom de la commission des lois, je veux tout d’abord saluer ce projet de loi dans son ensemble. Marc Daunis l’a fait mieux que moi, et je ne reprendrai pas les termes qu’il a employés, mais ce très bon texte, consensuel, contient des mesures attendues par l’ensemble des entreprises de l’économie sociale et solidaire.
Si je voulais résumer l’économie sociale et solidaire en une phrase, je dirais qu’elle doit permettre de concilier à la fois le développement économique, social, humain et personnel. Dans le monde au sein duquel nous vivons, il s’agit, à nos yeux, d’un outil indispensable.
Il subsiste toutefois deux catégories de dispositions sur lesquelles nous devrons travailler au cours de cette séance.
Je commencerai en évoquant deux divergences d’ordre technique ou rédactionnel.
La première porte sur la commande publique. Le texte prévoit l’élaboration d’un schéma de promotion des achats publics socialement responsables. Il s’agit d’une excellente mesure, mais encore faut-il savoir à qui s’applique ce schéma ! Or deux hypothèses sont en présence. Le texte qui nous revient aujourd’hui de l’Assemblée nationale prévoit d’appliquer cette mesure à partir d’un seuil défini par décret. Nous pensons pour notre part qu’il est plus simple, et aussi plus lisible, de retenir directement un seuil démographique dans le texte de loi, qui pourrait par exemple être fixé à 70 000 habitants. Un autre seuil pourrait être retenu, mais, quoi qu’il en soit, il nous semble préférable que la loi soit claire et compréhensible par tout un chacun, plutôt que de renvoyer à un décret.
La seconde divergence porte sur la définition de la subvention publique.
Dans le texte que nous examinons aujourd’hui, il s’agit de « contributions facultatives de toute nature, notamment financières, matérielles ou en personnel ». La divergence porte sur l’emploi de l’adverbe « notamment ». Au Parlement, en particulier au Sénat, nous sommes traditionnellement réticents à l’emploi de cet adverbe – à la commission des lois, on pourrait même parler de phobie ! De fait, cet adverbe n’ajoute rien, si ce n’est de la confusion. C’est pourquoi nous en proposerons la suppression.
Je poursuivrai en évoquant une divergence, que l’on pourrait qualifier de philosophique ou de politique – à moins qu’il ne faille parler d’incompréhension réciproque –, portant sur les mineurs et le droit des associations. Cette question sera sans doute examinée tardivement dans la soirée, mais je voudrais dès à présent en dire un mot.
Le texte qui nous revient de l’Assemblée nationale comprend deux ajouts. Il prévoit tout d’abord que tout mineur peut librement adhérer à une association. Il précise ensuite que tout mineur de plus de seize ans peut exercer des responsabilités au sein de cette association – je simplifie volontairement.
Le premier point n’a pas été compris – cela signifie aussi qu’il peut l’être s’il est expliqué –, et je peux même dire qu’il a choqué au sein de la commission des lois.
En effet, si tout mineur peut adhérer librement à une association, cela signifie que l’adhésion est possible dès l’âge de trois, quatre ou cinq ans. On imagine aisément les dérives possibles d’une telle disposition. Or notre rôle est bien de nous prémunir contre ces dérives potentielles. Ainsi une association pourrait-elle être constituée de manière factice avec beaucoup de mineurs qui n’auraient pas le discernement nécessaire pour être pleinement conscients de ce qu’ils font. On peut aussi imaginer le cas d’un parti politique, qui revendiquerait de nombreux adhérents, mais qui serait en réalité constitué avec plusieurs centaines de mineurs. La commission des lois est donc a priori opposée à cette disposition : nous aurons toutefois l’occasion d’en débattre ultérieurement, et nous serons bien évidemment à l’écoute des arguments qui seront échangés.
La deuxième difficulté concerne les mineurs de plus de seize ans. Ils peuvent d’ores et déjà administrer une association, la nouveauté étant qu’ils pourraient dorénavant le faire si leurs parents ne s’y opposent pas. Pour nous, cette mesure est gênante. En effet, pour s’opposer, il faut être informé, et rien ne nous assure en l’occurrence de l’information des parents. Or un mineur de seize ans qui devient trésorier d’une association engage la responsabilité civile de ses parents. Je veux bien qu’un décret vienne ensuite préciser qu’il faudra telle ou telle autorisation, mais je propose de faire simple, et d’inscrire dans le texte de loi que le mineur pourra administrer l’association avec l’autorisation explicite de ses parents. Au moins ces derniers sauront-ils que leur responsabilité civile est engagée.
Je n’ai pas d’autres remarques à formuler à ce stade, si ce n’est pour réaffirmer que ce texte est globalement excellent.