Intervention de Marie-Noëlle Lienemann

Réunion du 4 juin 2014 à 14h30
Économie sociale et solidaire — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Marie-Noëlle LienemannMarie-Noëlle Lienemann :

En tout cas, ces articles ne fragilisent pas la transmission des entreprises. Il faut aussi admettre que la compréhension des mécanismes n’est pas toujours aisée pour les repreneurs, lorsqu’ils ne sont pas spécialistes de ce sujet.

Madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, je ne peux m’empêcher de reconnaître que j’aurais préféré, à titre personnel, que nous allions plus loin sur ce point. J’avais d’ailleurs déposé une proposition de loi visant à instaurer un droit de priorité des salariés, conformément à un engagement du Président de la République. Quoi qu’il en soit, je suis une réformiste : une première avancée est acquise, tant mieux ! Je continuerai mon combat, mais engrangeons déjà ces premiers résultats, car ils sont importants.

Parmi les avancées, je recense également les dispositions inspirées de ce que l’on a appelé la « loi Florange ». Il est très important que l’engagement portant sur l’obligation de recherche d’un repreneur – qui n’est pas facile à mettre en œuvre, nous l’avons vu avec la censure du Conseil constitutionnel – trouve un commencement de réalisation. Les deux amendements que nos collègues avaient déposés à l’Assemblée nationale représentent une avancée intéressante, car ils lient la recherche du repreneur et le remboursement de certaines subventions à l’homologation du plan de sauvegarde de l’emploi. La méthode me paraît bonne et je pense qu’elle est conforme à la Constitution. Quoi qu’il en soit, notre groupe approuve ces dispositions.

L’Assemblée nationale a également adopté toute une série de mesures pour améliorer les dispositions en faveur des coopératives et des mutuelles, Mme la secrétaire d’État les a rappelées et le groupe socialiste du Sénat leur apporte son soutien. Il s’agit notamment de la création d’une Chambre française de l’économie sociale et solidaire et de la réintroduction du guide des bonnes pratiques. Nous avons cependant déposé un amendement à l’article 14, repris par la commission, visant à dispenser les coopératives de l’application du guide des bonnes pratiques lors d’une révision coopérative et nous souhaitons qu’il soit retenu dans le texte définitif.

Nous soutenons également les initiatives du rapporteur Marc Daunis tendant à clarifier et à renforcer les politiques territoriales, notamment avec les schémas régionaux. Nous approuvons aussi la volonté de bien inscrire dans le dispositif l’importance des chambres régionales de l’économie sociale et solidaire, les CRESS, et du Conseil national des chambres régionales de l’économie sociale et solidaire, le CNCRESS, même après la création de la Chambre française de l’économie sociale et solidaire. L’articulation entre l’intérêt national de l’économie sociale et solidaire et la vision territoriale doit être mieux connue, mieux défendue, c’est pourquoi nous soutenons ces mesures.

Nous demandons au Gouvernement d’être très vigilant sur un point précis : lors du débat sur les commandes publiques, nous avions voulu devancer l’adoption d’une directive européenne qui réserve une partie de la commande publique aux entreprises d’insertion. Le Gouvernement nous a demandé de retirer nos amendements, puisque la directive est maintenant publiée et qu’il veut engager sa transposition. Nous lui demandons donc de ne pas tarder à prendre les mesures nécessaires, car celles-ci sont extrêmement importantes en cette période de crise et peuvent constituer un levier puissant pour une politique de l’emploi soucieuse de justice sociale.

Nous approuvons aussi le fait que l’innovation sociale soit mieux définie, car elle mérite d’être soutenue et reconnue. Nous saluons en particulier l’introduction d’un article sur les monnaies locales et complémentaires. Ce phénomène émergent ne doit toutefois pas devenir une source d’instabilité ou de tromperie au détriment de nos concitoyens. Il est bon que son cadre soit clarifié et nous verrons, à l’usage, si le mouvement s’amplifie ou si ces monnaies restent du domaine de l’innovation ponctuelle.

Le point sur lequel l’Assemblée nationale a le plus avancé est la vie associative. Nous avions expliqué, en première lecture, qu’une partie de ces sujets méritaient d’être travaillés davantage. Je ne m’attarderai donc pas plus longtemps sur cette question, mais nous y reviendrons au cours du débat. Nous approuvons nombre de ces innovations, concernant les bénévoles, les modes de financement ou la création du Haut Conseil de la vie associative.

Enfin, l’enrichissement du titre concernant les éco-organismes nous paraît tout à fait utile, parce que l’économie sociale et solidaire constitue aussi un projet de société. Elle peut être le levier permettant à la France de défendre une vision contemporaine de son projet historique républicain. En effet, la fraternité consiste à mutualiser, à coopérer, à reconnaître qu’un intérêt commun prime sur le seul intérêt individuel. En cela, la compatibilité de l’économie sociale et solidaire avec notre modèle républicain historique est forte. Toutefois, avec l’émergence de l’exigence écologique, de la transition énergétique et d’une nouvelle vision du développement durable et du développement humain, elle peut trouver une nouvelle forme et s’avérer un outil incontesté du développement durable. Ce projet de loi y concourt et nous contribuerons à l’enrichir au cours de ce débat au Sénat, afin d’aboutir rapidement à l’adoption d’un texte efficace au service de tous les acteurs de l’économie sociale, que je salue !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion