Intervention de Rémy Pointereau

Réunion du 3 juin 2014 à 9h30
Questions orales — Mise en cause du principe de continuité écologique créé dans la loi sur l'eau

Photo de Rémy PointereauRémy Pointereau :

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur l’application du principe de la continuité écologique pour les cours d’eau. Ce principe, issu de la loi du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques, dite loi « LEMA », implique la libre circulation dans les cours d’eau des espèces et des sédiments.

Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, depuis plusieurs mois, des associations et des voix de plus en plus nombreuses remettent fortement en cause ce principe, notamment au travers d’une pétition. C’est un sujet qui intéresse particulièrement mon département, le Cher.

L’Association pour la défense et le développement touristique de la vallée du Cher, le Syndicat de la vallée de l’Arnon et les élus locaux concernés m’ont alerté. J’ai souhaité plaider directement leur cause dans cet hémicycle.

Leurs arguments sont techniques et juridiques, mais leur combat est évidemment économique et s’inscrit dans le contexte actuel de crise que connaît notre pays.

Sur un plan technique, si la continuité écologique présente des avantages lorsque les cours d’eau sont en débit normal, elle est en revanche source de graves désagréments en cas d’étiage important. Le milieu aquatique confronté à un étiage sévère peut, en effet, devenir un piège mortel pour toutes les espèces qui y vivent. C’est la continuité écologique elle-même qui induit cette terrible pression en s’opposant aux retenues de soutien d’étiage. La situation serait d’autant plus alarmante que l’on observe, depuis plusieurs décennies, des étiages de plus en plus longs et sévères.

Par ailleurs, il semblerait que la continuité écologique ne présente aucun impact sur la qualité chimique des eaux de surface, qui constitue la principale menace pour la santé des êtres humains et des poissons.

Sur le plan juridique, le Conseil d’État lui-même affirme que cette exigence de continuité écologique créée par la loi de 2006 ne figure pas dans la directive-cadre européenne sur l’eau : sur ce sujet, comme sur d’autres, spécialement lorsqu’il s’agit de questions environnementales, la France va au-delà des exigences européennes.

J’attire votre attention, monsieur le secrétaire d'État, sur les conséquences socio-économiques particulièrement lourdes d’une application stricte de la loi LEMA, qui entraînerait la suppression de la plupart des usages existants sur les cours d’eau. Le principe de continuité écologique interdit la pratique des réserves d’eau pourtant encouragée auprès des particuliers et dans de nombreux secteurs d’activité comme le tourisme, l’agriculture, l’industrie et l’énergie. En période estivale, la suppression des seuils et des barrages des cours d’eau existants est une catastrophe pour le maintien des berges de nos rivières.

En conséquence, il serait utile et urgent de rendre prioritaire la lutte contre la pollution chimique de l’eau et d’assouplir le principe de continuité écologique en autorisant les barrages existants, même s’il faut les aménager pour les passes à poissons. Il convient également de préserver l’équilibre des usages, de mettre à profit les potentialités socio-économiques résultant de l’aménagement des cours d’eau et, enfin, d’assurer à la loi LEMA ainsi modifiée une application identique sur l’ensemble du territoire.

Le Cher est un département rural que la crise n’épargne pas et où les politiques agricole, touristique et d’aménagement du territoire sont très importantes. À l’heure où l’argent est rare, pourquoi gaspiller autant de millions d’euros pour casser les retenues et les barrages qui ont été réalisés voilà quarante ans afin de réguler le débit des cours d’eau et éviter de grandes inondations ?

Dans ce contexte, monsieur le secrétaire d'État, de quelle manière le Gouvernement envisage-t-il de répondre à ces préoccupations légitimes ?

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