Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 3 juin 2014 à 14h30
Réseau d'infrastructures de recharge de véhicules électriques — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui une proposition de loi qui marque indéniablement une volonté de prendre en compte les enjeux industriels et environnementaux liés au développement de la filière des véhicules électriques.

Il s’agit en effet d’un enjeu majeur pour la transition écologique et énergétique. Il est clair que nous devons soutenir la filière française du véhicule électrique, qui constitue un gisement d’emplois, à l’instar de l’ensemble du domaine du développement durable. Aujourd’hui, les constructeurs automobiles français détiennent 80 % du marché national du véhicule électrique : c’est considérable.

L’enjeu écologique de réduction des émissions n’est pas moins important. En effet, la moyenne actuelle des émissions du parc automobile français est encore de 176 grammes de CO2 par kilomètre. Elle devrait être ramenée à 130 grammes par kilomètre en 2020. Dès lors, le véhicule électrique peut et doit jouer un rôle majeur dans le recul de nos émissions de gaz à effet de serre. Il y va d’ailleurs de la santé de nos concitoyens.

Pourtant, le parc de bornes de recharge – on en compte environ 8 000 – est aujourd’hui assez peu développé, malgré les incitations financières décidées dans le cadre du grand emprunt pour soutenir les collectivités territoriales, seules compétentes à l’heure actuelle en matière d’implantation de bornes sur leur territoire.

Cette faiblesse du parc de bornes de recharge est un frein objectif à l’essor de l’usage des véhicules électriques, même si, nous le savons tous, le prix de ceux-ci en constitue un autre tout aussi important, sans parler du problème de l’autonomie ni de la dimension culturelle évoquée il y a un instant par M. le rapporteur.

Au fond, nous considérons comme un progrès le fait que le Gouvernement reprenne la main sur ces questions d’avenir, même si nous regrettons que cela passe par une proposition de loi, ce qui prive les parlementaires d’une étude d’impact.

En effet, jusqu’à une période récente, le Gouvernement n’envisageait pas la création d’un opérateur national d’infrastructures de recharge pour installer un réseau de bornes qui viendrait compléter celui mis en place sur l’initiative des collectivités territoriales. Il arguait alors du fait que les collectivités devaient rester seules compétentes en la matière, au motif, qui ne semblait guère déterminant, qu’elles seules connaissent les flux des trajets entre domicile et lieu de travail sur leur territoire.

La volonté ici affirmée de permettre à l’État de jouer un rôle pour garantir l’égal accès de tous à ces équipements est un progrès, qui crédibilise l’effort annoncé dans le plan de soutien à la filière automobile de 2012.

Cependant, certains aspects de cette proposition de loi posent question. Ainsi, aux termes du texte, l’État pourra déployer ces infrastructures de recharge soit pour son propre compte, soit par l’intermédiaire d’un opérateur national dans lequel il détiendra directement ou indirectement une participation. La participation dans l’opérateur national pourra être détenue par le biais d’un établissement public comme l’ADEME, voire, plus indirectement, par celui de la Caisse des dépôts et consignations.

Soyons clairs : il est évident que ce n’est pas l’État qui va accomplir cette tâche ; c’est donc un opérateur national. Le seul outil actuellement prévu pour assurer un contrôle sur cet opérateur est la participation de l’État au capital, par voie directe ou indirecte. Nous savons également que le projet de l’opérateur devra être validé par les ministres chargés de l’énergie et de l’environnement.

Nous estimons que ces éléments, si positifs soient-ils, ne constituent pas une garantie de contrôle suffisante. C’est pourquoi nous aurions souhaité que la loi soit plus claire quant au cahier des charges imposé au futur opérateur.

Sur le fond, nous considérons en effet qu’il revient à la représentation nationale de vérifier que les conditions de mise en place de ce réseau de bornes de recharge de véhicules électriques sont conformes, par exemple, à un bon aménagement du territoire. Nous proposerons d’ailleurs, par voie d’amendement, que les ministres concernés viennent présenter les projets, une fois ceux-ci définis et prêts à être validés, devant les commissions parlementaires compétentes.

Associer les parlementaires à la démarche et vérifier que l’esprit de ce texte sera respecté : tel est notre objectif. Il importe en effet de permettre aux parlementaires d’apprécier concrètement les critères qui guideront le choix du prestataire, ainsi que les obligations qui pèseront sur celui-ci. Nous en avons parlé en commission, monsieur le rapporteur, et nous avons conclu qu’il fallait entendre le Gouvernement sur ce point.

Vous nous jugerez peut-être tatillons, monsieur le ministre, mais je dois dire que nous avons tous été échaudés par le scandale d’Ecomouv’. Nous sommes donc particulièrement vigilants sur ces formes de partenariat public-privé, car il peut arriver – cela a déjà été le cas – que les intérêts de l’État, et donc de nos concitoyens, soient mal garantis. Nous parlons là, certes, d’un marché limité, puisque vous estimez le besoin de financement de ces équipements à hauteur de 200 millions d’euros, mais c’est pour nous une question de principe.

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