Quelles que soient nos sensibilités politiques, nous souscrivons à l'essentiel de ce que vous avez déclaré l'un et l'autre. Je suis ce dossier depuis 1996 au Sénat, et nous avons connu des étapes plus ou moins inquiétantes. Vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, l'autorisation délivrée au quatrième opérateur a fait baisser la plus grande part de la capacité d'investissement de l'opérateur historique et des nouveaux entrants.
Heureusement, l'évolution technologique nous a éloignés d'une conception idéologique, à tel point que le bon sens et la raison sont en train de l'emporter sur l'absurde « tout ou rien ». J'en veux pour preuve un paragraphe de la réponse que nous a adressée Fleur Pellerin sur les infrastructures, qui mentionne, non seulement la fibre optique, mais aussi les autres technologies, dans une logique de complémentarité, pour assurer la couverture du territoire. Oui, nous nous en rapprochons, depuis les promesses des deux candidats présents au second tour de la présidentielle, de notre capacité d'investissement et de la réalité. Avec son service universel, toujours en vigueur, maintenu par l'opérateur historique, la France a couvert la totalité de son territoire par un réseau de cuivre, au moyen d'un échange donnant-donnant avec le détenteur du monopole. Si France Telecom y est parvenu sans aide publique, à l'exception de l'enfouissement des réseaux financé en grande partie par les collectivités locales, c'est grâce à l'argent du consommateur. Le moment est venu de faire preuve de réalisme, en donnant aux opérateurs les moyens de couvrir le territoire là où ils le peuvent, en complémentarité avec les collectivités locales là où ce n'est pas possible pour des raisons d'équilibre économique. Placer sur le même plan les réseaux d'initiative publique (RIP) et les obligations des opérateurs me paraît trop rapide, alors que les collectivités sont là pour accélérer les décisions.
Avec notre collègue Bruno Retailleau, également spécialiste de ce dossier, nous nous sommes interrogés sur le plan France très haut débit : sera-t-il corrigé, réorienté, avec la fusion de deux opérateurs ? La France connaîtra-t-elle une situation « à l'allemande » ? Les Allemands n'ont pas fait le choix de la fibre, mais utilisent le coaxial pour le parcours terminal, ce qui permet de couvrir avec un débit moyen de 50 Mbit/s, l'ensemble du territoire. Je rappelle toutefois que si en France 80 % de la population est répartie sur 20 % du territoire, en Allemagne, cette proportion est de 40/60, ce qui facilite l'équilibre économique... Où en est le projet de création d'une agence du numérique, que nous sommes plusieurs à défendre ici ?
Je tiens enfin, madame la ministre, à vous remercier de vous être exprimée, juste avant cette audition, devant la mission commune d'information sur la gouvernance mondiale de l'internet.