M. Jean-Claude Carle a déposé une proposition de loi tendant à permettre aux candidats de se présenter aux élections municipales avec la nuance « sans étiquette » dans les communes de moins de 3 500 habitants.
Les élections municipales des 23 et 30 mars se sont déroulées sans dysfonctionnements majeurs malgré les innovations de la loi du 17 mai 2013. Les deux importantes transformations de ce scrutin municipal sont l'abaissement à 1 000 habitants du seuil démographique à partir duquel l'élection a lieu au scrutin de liste à la représentation proportionnelle et non au scrutin majoritaire plurinominal ; et l'obligation, pour l'ensemble des candidats dans toutes les communes, de déposer une déclaration de candidature.
Cette dernière modification a eu des répercussions sur la collecte des données personnelles révélant l'appartenance politique des candidats et des élus. Cette question a suscité une vive émotion que les associations d'élus - AMRF et AMF en tête - ont relayée. La proposition de loi répond aux réactions des candidats et des élus qui, dans les communes comprises entre 1 000 et 3 500 habitants ont mal vécu l'obligation d'indiquer une nuance politique lors du dépôt des candidatures en préfecture.
Il convient tout d'abord de distinguer l'étiquette politique de la nuance politique. Le candidat choisit librement d'adopter ou non une étiquette politique et son choix s'impose à l'administration. Un élu a du reste la faculté de modifier son étiquette au cours de son mandat. Parallèlement, l'administration attribue une nuance politique aux candidats puis aux élus en fonction d'une nomenclature fixée par le ministère de l'intérieur et présentée au candidat lors du dépôt de candidature. Elle se fonde sur plusieurs éléments : soit le candidat en déclare une et l'administration la reprend à son compte, soit elle estime que cette nuance ne correspond pas à la réalité et elle choisit celle qui lui semble la plus adéquate. En tout état de cause, il n'existe pas de nuance « sans étiquette » mais seulement une rubrique « autres » dans laquelle figure, par exemple, les partis anti-fiscalistes, les partis religieux, les partis socio-professionnels, les partis régionalistes, le parti Pirate et même... le parti d'en rire !
Jean-Claude Carle estime qu'il y a une différence fondamentale entre la plupart des listes des petites communes qui se définissent comme « sans étiquette » et des listes « divers ». Les premières n'ont pas de sensibilité politique revendiquée, les secondes en ont une, « même si elle est marginale, voire originale pour certaines d'entre elles ».
Dans les communes de moins de 1 000 habitants, les candidats ne font pas l'objet d'un « nuançage » et, parmi les élus, seul le maire se voit attribuer une nuance politique. Pour les autres communes, un mandataire dépose la déclaration de candidature avec, éventuellement, une étiquette politique. L'administration opère ensuite son nuançage politique à partir des déclarations et des indices qu'elle peut recueillir.
Les candidats découvrent alors, parfois dans la presse, la nuance politique qui leur a été attribuée et qui reste conservée au sein du fichier géré par le ministère de l'intérieur. Cette situation crée des incompréhensions, voire des divisions internes à une même liste quand des candidats découvrent qu'ils ont été affublés d'une nuance politique dans laquelle ils ne se reconnaissent pas. C'est le cas évidemment des nombreuses listes d'union communale rassemblant des candidats de toutes tendances politiques, qui parfois ne connaissent pas les préférences politiques de leurs colistiers. Voyez dans combien de communes on ne trouve qu'une seule liste de candidats, généralement transpartisane. Aux dernières élections municipales, c'était le cas dans 41 % des communes de 1 000 à 3 500 habitants et dans 46 % des communes de 1 000 à 2 000 habitants.
Le texte prévoit de limiter le travail de nuançage aux communes de plus de 3 500 habitants. D'abord, la nuance politique ne doit pas être imposée à des candidats dans les communes de moins de 3 500 habitants où la constitution de listes ne correspond pas forcément au jeu politique national. Si un candidat veut choisir une étiquette politique, une nuance pourra lui être attribuée. S'il n'en choisit pas, il sera « sans étiquette », donc sans nuance politique. Ensuite, il existe une marge d'erreur trop importante et ces informations qui sont utilisées le soir du scrutin pour donner des tendances nationales risquent de fausser l'exercice - des listes seront abusivement classées « divers gauche » ou « divers droite ».
Avant 2013, le travail de nuançage ne portait pas sur les communes de moins de 3 500 habitants ; le ministère de l'intérieur n'en était pas moins capable de dégager des tendances nationales.
Les deux amendements que je vous propose réécrivent formellement la proposition de loi, notamment en supprimant la codification proposée, en raison d'une mauvaise imputation dans le code électoral. Le premier amendement pose deux règles simples et claires : pour toute élection, un candidat ou un élu peut choisir son étiquette politique, ce qui est le droit actuel. S'agissant de la nuance politique, il faut distinguer deux situations : pour l'élection municipale dans les communes de moins de 3 500 habitants, aucune nuance politique ne serait attribuée si le candidat ou l'élu n'a pas lui-même fait connaître son étiquette politique. Pour les autres communes et les autres élections, le droit actuel demeurerait. Le second amendement assure l'application de ce texte dans les collectivités ultramarines régies par le principe de spécialité législative. Aucune disposition particulière n'est prévue pour les élections à l'étranger, notamment l'élection des conseillers consulaires, car je n'en ai pas perçu l'utilité. Nos collègues représentant les Français établis hors de France pourront susciter le débat par des amendements s'ils le souhaitent...
Je vous invite à adopter mes amendements et la proposition de loi ainsi modifiée.