Intervention de Jean-Louis Bal

Commission des affaires économiques — Réunion du 11 juin 2014 : 1ère réunion
Transition énergétique — Audition de M. Jean-Louis Bal président du syndicat des énergies renouvelables ser

Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables :

Je répondrai aux questions dans l'ordre où elles ont été posées.

Tout d'abord, la baisse des raccordements dans l'éolien est effectivement une réalité malgré les récents assouplissements de la réglementation. Toutefois, les effets bénéfiques de ces simplifications seront perceptibles d'ici une à deux années et nous enregistrons dès à présent des signaux positifs qui nous confirment cette tendance. L'accompagnement administratif des changements normatifs est parfois insuffisant, et c'est pourquoi nous suggérons de procéder par voie d'expérimentations avec une évaluation à la clef.

L'utilisation du bois énergie est, comme vous le soulignez, insuffisante. Il faut cependant rappeler, d'une part, qu'on a naturellement tendance à exploiter aujourd'hui les ressources forestières les plus aisément accessibles et, d'autre part, que le bois énergie est plutôt une co-production de la filière des matériaux de construction. Des aides financières sont nécessaires pour mettre en place des infrastructures : à cet égard, le Grenelle de l'environnement avait prévu la création d'un fonds biomasse, mais celui-ci n'a pas encore vu le jour.

En ce qui concerne les biocarburants de nouvelle génération, des arbitrages seront nécessaires pour décider de leur utilisation pour le chauffage ou comme carburant. Personne, à l'heure actuelle, n'est capable de donner des chiffres suffisamment précis pour décider de la solution optimale du point de vue du rendement énergétique.

L'encadrement européen des aides publiques qui restreint les possibilités pour chaque État de mettre en place des politiques énergétiques autonomes entrera en vigueur au 1er juillet 2014, mais l'État français pourra cependant utiliser des marges de souplesse et nous souhaitons que celles-ci soient pleinement utilisées.

En ce qui concerne la sélection géographique des projets photovoltaïques, il me paraît logique de les implanter là où le rayonnement est le plus puissant. Or le photovoltaïque, en dépit du réchauffement des températures qui affecte un peu le rendement des panneaux, reste plus performant dans le sud de la France que dans le nord. Ceci dit, des opportunités subsistent dans le nord de notre pays où l'ensoleillement reste aussi puissant que dans le sud de l'Allemagne.

En matière d'éoliennes, nous avons demandé la suppression de la règle des cinq mâts afin de tenir compte de la réalité selon laquelle, dans certaines régions, l'habitat est dispersé. Soyez cependant rassuré qu'aucun industriel n'installera une seule éolienne car cela est économiquement absurde.

Je souligne simplement, s'agissant d'Alstom et d'Areva, que ces deux industriels développent chacun, selon des orientations technologiques différentes, des éoliennes offshore et j'espère que la solution retenue ne laissera pas disparaître la voie originale et prometteuse suivie par Alstom. Mais il ne m'appartient pas de donner un avis sur le choix du scénario industriel.

La France n'est effectivement pas leader dans les énergies renouvelables mais je rappelle cependant que nous avons certains champions nationaux. Par ailleurs, sur la base des indications que j'ai pu vous fournir, l'objectif de 32 % d'énergie renouvelable en 2030 peut apparaître comme une vue de l'esprit, mais si nous rectifions la trajectoire, et à condition de réduire les freins qui subsistent aujourd'hui, atteindre ce but est techniquement et économiquement réalisable et les industriels en sont persuadés.

Je ne dispose pas aujourd'hui de chiffres sur les parts de marché des industriels français dans les énergies renouvelables mais un certain nombre d'entreprises sont d'ores et déjà performantes sur les marchés émergents. Viser 5 à 10 % du marché mondial est un objectif réaliste et notre organisation apporte son soutien à cette offensive. Encore faut-il préciser que cela nécessite de développer un marché national et d'activer les outils de promotion de notre commerce extérieur en insistant sur le rôle fondamental du loyer de l'argent dans ce domaine. Il faut donc mobiliser des outils de financement à l'exportation compétitifs.

Comme vous l'avez indiqué, la filière de la méthanisation reste aujourd'hui balbutiante en France, avec quelques centaines d'installations contre plusieurs milliers en Allemagne, et il convient de la structurer en identifiant tous les intervenants.

Je confirme également que les appels à manifestations d'intérêt (AMI) en matière d'hydrolien comportent des délais trop longs. Outre la lourdeur du mécanisme mis en place, lorsque chacun des projets aura été sélectionné, six mois seront encore nécessaires pour les notifier individuellement à la Commission européenne qui les examinera. Il faut cependant reconnaitre que les autres pays européens n'ont pas, dans ce domaine, une avance considérable sur la France.

Par ailleurs, aucun industriel n'est aujourd'hui capable de chiffrer l'énergie thermique des mers, même s'il s'agit de technologies prometteuses.

Notre avis est partagé sur la question des appels d'offres, qui ont la préférence de la Commission de régulation de l'énergie par rapport à la fixation de tarifs d'achat garantis. On constate que l'efficacité des appels d'offre se renforce et, dans la mesure où ils font l'objet d'une concertation entre professionnels, ces appels d'offres peuvent être une bonne solution à condition de les dimensionner très largement, afin de tenir compte de la non-réalisation d'une partie des projets sélectionnés.

En ce qui concerne la formation et la responsabilité des entreprises à l'égard des maitres d'ouvrage, le « garant de l'environnement » est une procédure à laquelle nous sommes favorables sur le principe, même si sa mise en oeuvre est loin d'avoir atteint son optimum.

Vous vous êtes demandé si les initiatives des collectivités locales ne se développaient pas de façon prioritaire dans la biomasse plutôt que dans l'éolien. Les retours de terrain indiquent que les deux segments progressent. Toutefois, les retombées économiques locales de la biomasse sont très rapidement visibles.

La recherche, en France, est performante et assortie d'outils de financement qui paraissent à la hauteur de nos ambitions. Toute la difficulté est ici de transposer les résultats de la recherche dans l'industrie, en particulier dans le secteur du photovoltaïque.

Des programmes de recherche pour améliorer le stockage hydraulique se développent dans plusieurs directions dans le cadre des investissements d'avenir : batteries électrochimiques, air comprimé, conversion... Je rappelle qu'il existe à l'heure actuelle un très bon procédé qui, grâce à son bon rendement, doit permettre de satisfaire les besoins d'ici 2030 : le stockage d'énergie par pompage turbinage dit STEP.

Enfin, monsieur le Président, nous sommes évidemment très favorables à l'inclusion d'une obligation relative au solaire thermique dans les permis de construire : alors que les coûts d'installation du solaire thermique dans l'habitat existant sont très élevés, ce procédé pourrait être extrêmement compétitif dans les constructions neuves. Je rappelle cependant que la réglementation actuelle fixe d'ores et déjà des exigences minimales en matière d'utilisation des énergies renouvelables.

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