Commission des affaires économiques

Réunion du 11 juin 2014 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission procède à l'audition de M. Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER), sur la transition énergétique.

La réunion est ouverte à 09h40.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Nous entendons aujourd'hui M. Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER). Créé en 1993, le SER est la principale organisation professionnelle regroupant les entreprises du secteur des énergies renouvelables. Il promeut les intérêts des industriels et des professionnels des énergies renouvelables. Il regroupe 400 adhérents, représentant un chiffre d'affaires de 10 milliards d'euros et plus de 75 000 emplois.

La ministre de l'écologie doit présenter prochainement les grandes lignes du projet de loi de programmation sur la transition énergétique. Quels sont les outils sur lesquels il faudrait le plus mettre l'accent : simplification réglementaire, commandes publiques pour faire démarrer les filières, aides à la recherche ? Partagez-vous notamment la vision de la Commission de régulation de l'énergie qui met l'accent sur les appels d'offres par rapport à la fixation de tarifs d'achat garantis ?

Par ailleurs, où en sont aujourd'hui les différentes filières d'énergies marines : hydroliennes, éolien flottant, houle, énergie marémotrice, énergie thermique des mers, voire énergie osmotique ? Quel est leur potentiel à terme, notamment pour les territoires insulaires ?

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Pouvez-vous nous éclairer sur ce que pourrait être, selon vous, le bon mix énergétique, ainsi que sur la place où nous nous situons par rapport à nos partenaires et voisins européens en matière d'énergies renouvelables ?

Enfin, comment les collectivités territoriales pourraient-elles accompagner le développement des énergies renouvelables ? Celles-ci constituent un espoir de ressources nouvelles pour les territoires, notamment ruraux.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables

Je vous remercie pour votre invitation. Le Syndicat des énergies renouvelables compte parmi ses membres les grands industriels du secteur de l'énergie que sont Areva, Alstom, Schneider, Total, ainsi que les grands énergéticiens : EDF, GDF, Enel, E-ON... Mais il comprend aussi et surtout 75 % de petites et moyennes entreprises qui assurent une grande partie des emplois.

Le Grenelle de l'environnement a fixé un objectif de 23 % d'énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale, à comparer avec un niveau de 9 % en 2005, des objectifs étant précisés pour chaque filière. En 2012, l'objectif intermédiaire de 14 % a pratiquement été atteint, mais notre analyse, largement partagée, est que ce résultat est dû pour une grande partie aux progrès des biocarburants, dont le rythme de progression ne peut être extrapolé. Nous estimons que, en l'état actuel des politiques menées, le niveau des énergies renouvelables sera seulement de 17 % en 2020.

Les modes de soutien doivent en premier lieu abandonner de cette tendance au stop and go qui a tout particulièrement affecté la filière solaire photovoltaïque.

Il est vrai que les coûts de production ont considérablement baissé pour le solaire photovoltaïque et ont été optimisés pour l'éolien, mais dans le même temps la fiscalité comme les coûts de raccordement au réseau électrique ont augmenté, ainsi que le coût et la longueur des procédures administratives et environnementales. Ainsi la réalisation d'un projet éolien prend-elle sept à huit ans en France, contre deux à trois ans en Allemagne. L'accumulation des contraintes, qui a commencé en 2001 lors de l'instauration du premier tarif d'achat éolien, a atteint son sommet avec le Grenelle II qui a soumis les éoliennes à la procédure des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), à celle des zones de développement de l'éolien et à la règle d'une taille de parc minimale de cinq mâts.

Au total, la puissance installée annuellement, après un maximum en 2011, est tombée aujourd'hui à 600 MW. Ce rythme n'est pas suffisant pour atteindre l'objectif de 19 000 MW fixé par le Grenelle de l'environnement pour l'éolien terrestre.

La seule filière en avance sur ses objectifs est le solaire photovoltaïque, parce que l'objectif lui-même était modeste : fixé à 5 400 MW, il devrait être atteint dans les deux ans. Nous considérons que cet objectif devrait être largement réévalué car le photovoltaïque est quatre à cinq fois moins cher aujourd'hui qu'il y a cinq ans. De plus la filière française a besoin d'un marché pour se développer.

S'agissant de la biomasse solide pour la production de chaleur, elle a bénéficié du fonds Chaleur qui a eu un effet très positif. Il a financé de nombreux projets depuis 2009, permettant la substitution de 1,1 tonne équivalent pétrole (tep) pour 1 milliard d'euros d'investissements de l'État. Il en résulte un coût de la tonne de CO2 évitée très bas, de l'ordre de 15 à 16 €.

Nous incluons l'éolien offshore dans les énergies marines. Celui-ci a fait l'objet de deux appels d'offres. La durée de réalisation des projets permet de prévoir que 1 000 MW, au mieux, seront installés vers 2020, mais une dynamique industrielle est lancée et il faut la mettre au crédit de l'action publique.

L'énergie hydrolienne est la plus avancée des autres énergies marines. Une expérimentation est en cours à Bréhat et l'Ademe a lancé un appel à manifestation d'intérêts (AMI) pour des fermes pilotes. C'est l'amorce d'une filière industrielle, dont il ne faut toutefois pas attendre de vraies retombées industrielles et commerciales avant la fin de la décennie.

L'énergie de la houle, l'énergie thermique des mers, l'éolien flottant sont encore au stade de la recherche et développement. La technologie SWAC (sea water air conditioning), présente un intérêt particulier en outre-mer, où elle est utilisée pour des projets de réseaux de froid et de climatisation.

Nous attendons plusieurs orientations du projet de loi sur la transition énergétique.

Il devra fixer de nouveaux objectifs à l'horizon 2030. La ministre a ainsi évoqué une cible de 32 % d'énergies renouvelables, soit 40 % pour la production d'électricité, 38 % pour la production de chaleur et 15 % dans le secteur des transports. Pour atteindre ces objectifs, le projet de loi devra fixer une trajectoire et un mode de pilotage efficace, y compris au niveau régional, en associant les professionnels.

Le projet de loi devra aussi donner de la visibilité au système de soutien aux énergies renouvelables. Nous sommes convaincus qu'il faut évoluer vers une plus grande place laissée au marché et on peut ainsi envisager d'instaurer une prime par rapport au prix de marché, mais il faudra rassurer les industriels avec une garantie sur le niveau de rémunération. L'évolution devra être programmée.

Nous préconisons aussi une profonde simplification des procédures. Une autorisation unique devrait valoir pour les projets d'énergies renouvelables, filière par filière, alors que se superposent aujourd'hui le permis de construire, l'autorisation ICPE, les autorisations au titre du défrichement, au titre de la loi sur l'eau... Le délai de caducité des autorisations devrait aussi être prolongé, dans la limite de dix années, car on rencontre des cas où une autorisation expire alors que les autres n'ont pas encore été obtenues. Les délais des recours devraient être identiques pour toutes les autorisations et la durée de leur instruction devrait être encadrée. Un certificat de projet devrait également geler la réglementation à la date du dépôt de dossier.

Toujours dans le cadre de la simplification, l'accès des énergies renouvelables au réseau électrique devrait être facilité. Concernant les énergies marines, nous proposons de confier la compétence de premier recours aux cours administratives d'appel afin de supprimer un niveau de recours. Nous souhaitons aussi que, dans le cadre du projet de loi de finances, le fonds Chaleur soit pérennisé à la hausse et que la fiscalité soit stabilisée, voire réduite.

Enfin, la recherche et développement doit rester une priorité. Les filières ont en effet besoin d'un marché domestique, mais doivent aussi demeurer compétitives pour rester innovante sur les marchés mondiaux, que l'on évalue à 250 milliards de dollars annuels.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Je rebondis tout de suite sur votre remarque concernant les coûts de raccordement. Ceux-ci sont plus élevés pour un mât isolé : j'aurais souhaité qu'on impose un minimum de trois mâts, mais la règle des cinq mâts a été complètement supprimée.

Nous avons par ailleurs abordé le problème des recours abusifs dans le cadre de la loi du 1er juillet 2013 tendant à accélérer les projets de construction. Vous demandez enfin un rescrit pour limiter l'impact de l'évolution des normes, ce qui paraît légitime dans le domaine de l'énergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Nous semblons aujourd'hui loin des objectifs prévus pour 2020, notamment en ce qui concerne l'éolien. Bien que nous ayons assoupli le cadre réglementaire permettant d'accéder au tarif d'achat, les demandes de raccordement sont en baisse, passant de 1 200 MW raccordés en 2010 à seulement 630 en 2013.

Je note que les délais d'obtention des autorisations nécessaires en matière d'installations énergétiques sont beaucoup plus longs en France que dans d'autres pays d'Europe. En particulier, il me semble que les services déconcentrés de l'État ne reçoivent pas d'instructions suffisamment précises lors des changements réglementaires, ce qui allonge les délais de mise en oeuvre. Pensez-vous que le décret du 2 mai 2014 relatif à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement permettra d'accélérer l'émergence des projets ?

Par ailleurs, le bois énergie est une filière d'excellence énergétique et environnementale, mais cette ressource est largement sous-exploitée. Quelles pistes peut-on envisager pour la développer ? Je m'interroge notamment sur l'opportunité d'augmenter les investissements du fonds Chaleur : la Cour des comptes y voit un excellent dispositif, quelle est votre opinion à ce sujet ?

Quelles orientations préconisez-vous pour les usages de la biomasse ? Quels verrous financiers, législatifs et réglementaires faut-il débloquer pour soutenir le développement des filières de biocarburants de 2ème et 3ème génération ?

Enfin, le nouveau système d'aide d'État pour l'énergie, tel qu'il est prôné par la Commission européenne - fin des tarifs d'achat, appels d'offre obligatoires, vente directe sur les marchés... -, ne va-t-il pas restreindre la capacité des États à déterminer leur propre politique énergétique ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Je m'interroge sur les critères de sélection des projets retenus dans le cadre des appels à projets pour les installations photovoltaïques : seuls des projets situés du sud de la France sont retenus, au détriment de ceux du nord... C'est pourtant le rayonnement, et non pas la chaleur, qui détermine le rendement des panneaux, qui fonctionnent même mieux lorsqu'ils sont froids ! Le SER a-t-il les moyens d'appuyer l'idée d'un rééquilibrage de la répartition territoriale des projets retenus ?

Par ailleurs, la question du raccordement me semble cruciale, que ce soit pour l'éolien, le photovoltaïque, ou la biomasse : s'agissant de l'éolien, la possibilité de retenir un seul mât est une ineptie qu'il faut absolument corriger !

Concernant l'industrie des énergies renouvelables, il est indispensable que notre commission des affaires économiques s'intéresse à l'avenir d'Alstom, car celui-ci est étroitement lié au devenir de toute la filière. General Electric (GE) et Siemens, les deux repreneurs envisagés, ont leurs propres fabricants : que deviendront les petites et moyennes entreprises françaises, sous-traitants de la filière ?

Pour finir, il est indéniable que la complexité des procédures nécessaires au développement des installations d'énergie renouvelable ralentit considérablement l'aboutissement des projets. Et ceux qui font à Paris la promotion des énergies renouvelables ne devraient pas ensuite multiplier les contentieux au niveau local.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Nègre

Je constate tout d'abord que la durée d'émergence des projets, bien trop longue, entrave notre développement alors que nous avons des entreprises de premier plan au niveau mondial. Quelle part l'industrie française occupe-t-elle aujourd'hui sur le marché mondial ? Quelle part peut-elle viser ?

Au vu des difficultés rencontrées pour atteindre les objectifs à horizon 2020, pensez-vous que l'objectif de 32 % d'énergies renouvelables d'ici 2030 soit réaliste ? Quelle est l'opinion de l'industrie française sur ce chiffre ambitieux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Nous avons prévu, dans le projet de loi d'avenir pour l'alimentation, l'agriculture et la forêt, une augmentation de la production d'énergie par méthanisation. Les filières se préparent-elles au développement de ces nouveaux systèmes, selon un modèle français qui pourrait être plus équilibré que l'exemple allemand ?

Par ailleurs, je trouve le coût des équipements fonctionnant aux énergies renouvelables prohibitif, tant pour les collectivités locales que pour les particuliers. J'ai l'impression que les prix sont artificiellement gonflés, car ils tiennent compte des aides d'État qui seront accordées : ce n'est pas normal !

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Monsieur le Président, vous avez publié un livre blanc sur les énergies marines, et je suis étonnée de constater que vous êtes réservé sur les hydroliennes : nous avons pourtant un potentiel conséquent au large du raz Blanchard ! L'appel à manifestation d'intérêt (AMI) a pris du retard : comment faire pour débloquer ce dossier ?

L'énergie thermique des mers (ETM) a un potentiel important, au moins à l'export : pensez-vous que la mise en place d'un tarif de rachat spécifique, dont auraient besoin les industriels, permettrait de soutenir le développement de l'ETM ?

Que pensez-vous des appels d'offre de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) ?

Comment peut-on améliorer la formation et le problème de la responsabilité à l'égard des installations ? Il faut absolument préciser qui porte la responsabilité de ces nouvelles installations, car c'est aujourd'hui au coeur du sujet, notamment pour les particuliers.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lasserre

La préférence des particuliers et des collectivités territoriales semble se porter sur la biomasse plus que sur l'éolien. De quels moyens de recherche disposons-nous ? La recherche publique s'est-elle emparée du sujet ou les constructeurs sont-ils seuls dans ce domaine ? Je suis convaincu qu'il s'agit là de notre meilleur gisement d'initiative.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

Je m'interroge sur les raisons du retard que nous avons accumulé dans le domaine de l'énergie hydrolienne, qui présente beaucoup d'avantages.

Le stockage de l'énergie reste un enjeu majeur pour le développement des énergies renouvelables : où en est la recherche sur ce sujet ? Quelles perspectives se dessinent-elles ?

Enfin, il faut essayer de faire en sorte qu'Alstom reste un groupe français. Sinon, dans l'éventualité d'un rachat, il faut penser que l'éolien offshore est déjà développé chez Siemens, qui n'aurait donc pas besoin d'un parc français, alors que General Electric pourrait venir s'appuyer sur les moyens de production français. Le regroupement européen, qui apparaissait jusqu'ici comme une évidence, pourrait donc être néfaste pour l'avenir de la filière.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Je complèterai cette salve de questions en soulignant qu'il me paraît souhaitable de développer le solaire thermique : il faudrait peut-être aller jusqu'à l'imposer dans les permis de construire, au moins au sud de la Loire. Par ailleurs, pour prolonger les propos de Chantal Jouanno sur la formation professionnelle des opérateurs, je suggérerai un agrément des entreprises afin de contrecarrer certaines « arnaques », disons le mot. Enfin, s'agissant d'Alstom, je rappelle que dans la phase de négociation en cours, les 18 et 23 juin seront, à ma connaissance, les deux dates décisives puisque Siemens devra avoir formulé son offre et Alstom devrait se positionner sur l'offre de GE. Dans ce contexte, il me semble difficile d'auditionner les acteurs contre leur volonté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Je le redis, la vente du département énergie d'Alstom n'est pas la seule solution envisageable.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables

Je répondrai aux questions dans l'ordre où elles ont été posées.

Tout d'abord, la baisse des raccordements dans l'éolien est effectivement une réalité malgré les récents assouplissements de la réglementation. Toutefois, les effets bénéfiques de ces simplifications seront perceptibles d'ici une à deux années et nous enregistrons dès à présent des signaux positifs qui nous confirment cette tendance. L'accompagnement administratif des changements normatifs est parfois insuffisant, et c'est pourquoi nous suggérons de procéder par voie d'expérimentations avec une évaluation à la clef.

L'utilisation du bois énergie est, comme vous le soulignez, insuffisante. Il faut cependant rappeler, d'une part, qu'on a naturellement tendance à exploiter aujourd'hui les ressources forestières les plus aisément accessibles et, d'autre part, que le bois énergie est plutôt une co-production de la filière des matériaux de construction. Des aides financières sont nécessaires pour mettre en place des infrastructures : à cet égard, le Grenelle de l'environnement avait prévu la création d'un fonds biomasse, mais celui-ci n'a pas encore vu le jour.

En ce qui concerne les biocarburants de nouvelle génération, des arbitrages seront nécessaires pour décider de leur utilisation pour le chauffage ou comme carburant. Personne, à l'heure actuelle, n'est capable de donner des chiffres suffisamment précis pour décider de la solution optimale du point de vue du rendement énergétique.

L'encadrement européen des aides publiques qui restreint les possibilités pour chaque État de mettre en place des politiques énergétiques autonomes entrera en vigueur au 1er juillet 2014, mais l'État français pourra cependant utiliser des marges de souplesse et nous souhaitons que celles-ci soient pleinement utilisées.

En ce qui concerne la sélection géographique des projets photovoltaïques, il me paraît logique de les implanter là où le rayonnement est le plus puissant. Or le photovoltaïque, en dépit du réchauffement des températures qui affecte un peu le rendement des panneaux, reste plus performant dans le sud de la France que dans le nord. Ceci dit, des opportunités subsistent dans le nord de notre pays où l'ensoleillement reste aussi puissant que dans le sud de l'Allemagne.

En matière d'éoliennes, nous avons demandé la suppression de la règle des cinq mâts afin de tenir compte de la réalité selon laquelle, dans certaines régions, l'habitat est dispersé. Soyez cependant rassuré qu'aucun industriel n'installera une seule éolienne car cela est économiquement absurde.

Je souligne simplement, s'agissant d'Alstom et d'Areva, que ces deux industriels développent chacun, selon des orientations technologiques différentes, des éoliennes offshore et j'espère que la solution retenue ne laissera pas disparaître la voie originale et prometteuse suivie par Alstom. Mais il ne m'appartient pas de donner un avis sur le choix du scénario industriel.

La France n'est effectivement pas leader dans les énergies renouvelables mais je rappelle cependant que nous avons certains champions nationaux. Par ailleurs, sur la base des indications que j'ai pu vous fournir, l'objectif de 32 % d'énergie renouvelable en 2030 peut apparaître comme une vue de l'esprit, mais si nous rectifions la trajectoire, et à condition de réduire les freins qui subsistent aujourd'hui, atteindre ce but est techniquement et économiquement réalisable et les industriels en sont persuadés.

Je ne dispose pas aujourd'hui de chiffres sur les parts de marché des industriels français dans les énergies renouvelables mais un certain nombre d'entreprises sont d'ores et déjà performantes sur les marchés émergents. Viser 5 à 10 % du marché mondial est un objectif réaliste et notre organisation apporte son soutien à cette offensive. Encore faut-il préciser que cela nécessite de développer un marché national et d'activer les outils de promotion de notre commerce extérieur en insistant sur le rôle fondamental du loyer de l'argent dans ce domaine. Il faut donc mobiliser des outils de financement à l'exportation compétitifs.

Comme vous l'avez indiqué, la filière de la méthanisation reste aujourd'hui balbutiante en France, avec quelques centaines d'installations contre plusieurs milliers en Allemagne, et il convient de la structurer en identifiant tous les intervenants.

Je confirme également que les appels à manifestations d'intérêt (AMI) en matière d'hydrolien comportent des délais trop longs. Outre la lourdeur du mécanisme mis en place, lorsque chacun des projets aura été sélectionné, six mois seront encore nécessaires pour les notifier individuellement à la Commission européenne qui les examinera. Il faut cependant reconnaitre que les autres pays européens n'ont pas, dans ce domaine, une avance considérable sur la France.

Par ailleurs, aucun industriel n'est aujourd'hui capable de chiffrer l'énergie thermique des mers, même s'il s'agit de technologies prometteuses.

Notre avis est partagé sur la question des appels d'offres, qui ont la préférence de la Commission de régulation de l'énergie par rapport à la fixation de tarifs d'achat garantis. On constate que l'efficacité des appels d'offre se renforce et, dans la mesure où ils font l'objet d'une concertation entre professionnels, ces appels d'offres peuvent être une bonne solution à condition de les dimensionner très largement, afin de tenir compte de la non-réalisation d'une partie des projets sélectionnés.

En ce qui concerne la formation et la responsabilité des entreprises à l'égard des maitres d'ouvrage, le « garant de l'environnement » est une procédure à laquelle nous sommes favorables sur le principe, même si sa mise en oeuvre est loin d'avoir atteint son optimum.

Vous vous êtes demandé si les initiatives des collectivités locales ne se développaient pas de façon prioritaire dans la biomasse plutôt que dans l'éolien. Les retours de terrain indiquent que les deux segments progressent. Toutefois, les retombées économiques locales de la biomasse sont très rapidement visibles.

La recherche, en France, est performante et assortie d'outils de financement qui paraissent à la hauteur de nos ambitions. Toute la difficulté est ici de transposer les résultats de la recherche dans l'industrie, en particulier dans le secteur du photovoltaïque.

Des programmes de recherche pour améliorer le stockage hydraulique se développent dans plusieurs directions dans le cadre des investissements d'avenir : batteries électrochimiques, air comprimé, conversion... Je rappelle qu'il existe à l'heure actuelle un très bon procédé qui, grâce à son bon rendement, doit permettre de satisfaire les besoins d'ici 2030 : le stockage d'énergie par pompage turbinage dit STEP.

Enfin, monsieur le Président, nous sommes évidemment très favorables à l'inclusion d'une obligation relative au solaire thermique dans les permis de construire : alors que les coûts d'installation du solaire thermique dans l'habitat existant sont très élevés, ce procédé pourrait être extrêmement compétitif dans les constructions neuves. Je rappelle cependant que la réglementation actuelle fixe d'ores et déjà des exigences minimales en matière d'utilisation des énergies renouvelables.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Je vous remercie de cette intéressante audition. Nous ferons certainement appel à vous à l'occasion des délibérations sur le projet de loi relatif à la transition énergétique.

La réunion est levée à 10h55.