Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi de citer les mots exacts prononcés par le Président de la République voilà moins de cinq mois, lors de ses vœux aux Corréziens : « Les départements gardent [...] leur utilité pour assurer la cohésion sociale et la solidarité territoriale. Et je ne suis donc pas favorable à leur suppression pure et simple comme certains le réclament. Car des territoires ruraux perdraient en qualité de vie, sans d’ailleurs générer d’économies supplémentaires, si l’on y supprimait le département ». Voilà un diagnostic qui me paraît largement partagé…
Dans ce contexte, comment comprendre le projet de réforme territoriale, dont les dispositions n’ont cessé d’être contredites par les membres de votre gouvernement et décriées par bon nombre des membres de votre majorité ?
Dans nos territoires, pour une grande majorité d’élus et pour nos concitoyens, toutes sensibilités confondues, cette réforme semble relever de l’opportunisme politique plutôt que de la satisfaction de l’intérêt général.
Il est question de reporter les élections départementales et régionales, après avoir modifié le mode de scrutin départemental pour influer a priori sur son résultat. Comment voulez-vous que nos concitoyens n’analysent pas cette volonté comme la traduction de la peur manifeste d’un énième revers annoncé pour votre majorité ?
Vous affirmez que ce projet de réforme territoriale vise à réduire le millefeuille administratif ; mais il n’en sera rien dans les faits, puisque les mesures prévues se limitent, à notre connaissance, à supprimer la clause générale de compétence, fraîchement rétablie, alors que vous l’aviez massivement combattue en 2010.
Pour illustrer la transformation du département en coquille vide, je prendrai le seul exemple des routes anciennement nationales qui ont été départementalisées. Que vont-elles devenir ? Vont-elles être régionalisées ? Que vont surtout devenir les agents territoriaux chargés de la gestion de ces infrastructures ?
Enfin, après nous être interrogés sur la cohérence de votre proposition, la suppression du département nous conduit nécessairement à vous questionner sur l’avenir des représentants des collectivités territoriales que nous sommes et, par là même, sur celui de notre institution. §