Intervention de Jean Desessard

Réunion du 12 juin 2014 à 15h00
Adéquation de la formation professionnelle aux besoins des demandeurs d'emploi — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Jean DesessardJean Desessard :

Effectivement, je vais évoquer les difficultés d’orientation des chômeurs : les formations dépendant des branches, les dispositifs sont très nombreux et complexes. Lors de mes auditions, j’ai essayé de connaître précisément leur nombre, et les réponses que j’ai obtenues vont de « plusieurs dizaines » à « plus d’une centaine ». Même l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, dans son rapport du mois d’août 2013, ne parvient pas à chiffrer précisément ces dispositifs et vise seulement un système complexe, basé sur une addition de « logiques différentes selon les acteurs institutionnels ».

Cette complexité touche, en premier lieu, les conseillers de Pôle emploi, dont les missions principales consistent à indemniser les chômeurs et à les placer sur le marché du travail. Si l’intégration à leurs effectifs des conseillers-psychologues de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA, a permis de faire progresser les thématiques de l’orientation et de la formation dans l’institution, les conseillers de Pôle emploi ne maîtrisent pas tous les outils et circuits de financement de la formation professionnelle. Ils s’y retrouvent difficilement, et cette illisibilité se répercute sur l’information donnée aux chômeurs, notamment via le site internet de Pôle emploi. La simplification de tous ces dispositifs semble nécessaire.

Mes chers collègues, j’ai essayé d’identifier les causes des emplois non pourvus. Cependant, je l’avoue, je suis incapable de connaître le poids de chacune d’entre elles dans les 400 000 postes non pourvus. Aujourd’hui, personne n’est en mesure de le dire précisément. Mais peut-être allez-vous me démentir tout à l'heure, monsieur le ministre…

Chacun a, sur le sujet, sa petite idée, des intuitions, parfois confortées par une expérience locale. Mais personne ne dispose de chiffres, de statistiques permettant d’orienter les politiques publiques. Autrement dit, nous n’avons aucune idée du bien-fondé et de la légitimité des moyens déployés pour la formation professionnelle vers ces postes.

La formation professionnelle est un outil puissant de reconversion, d’acquisition et d’approfondissement de compétences, tout en étant un vecteur de développement personnel. Elle permet aux chômeurs d’enrichir leurs savoir-faire et de proposer à leurs futurs employeurs des compétences en accord avec les besoins de ceux-ci. Elle est également une occasion de s’orienter vers des métiers d’avenir, comme ceux que favorise la transition énergétique, ou simplement un moyen de se réorienter vers des métiers plus adaptés à ses désirs propres.

Toutefois, la navigation à vue en la matière nous empêche d’avoir une vision à long terme des causes et des conséquences.

Au mois de juillet 2013, le Gouvernement a lancé le plan formations prioritaires pour l’emploi, en mettant 200 millions d’euros sur la table. L’objectif de délivrer 30 000 formations à la fin de l’année 2013 a été dépassé, puisque plus de 35 000 stagiaires étaient inscrits à une formation au mois de décembre dernier. L’État a alors décidé de se fixer un nouvel objectif : atteindre 100 000 formations. §C’est louable !

Mais en l’état, que sait-on de l’efficacité réelle de ces formations ? Les chômeurs vont-ils réellement intégrer les postes auxquels ils prétendent ? Monsieur le ministre, je suis curieux de savoir comment vous jugerez de l’efficacité de votre plan, en termes de résultats pour l’emploi et pas simplement en termes de moyens, c'est-à-dire de formations délivrées ! Au fond, la question que je vous pose aujourd'hui est celle de l’adéquation des dispositifs que l’on met en place aux postes à pourvoir.

Ce qui manque réellement à nos politiques de formation en direction des chômeurs, c’est un tableau de bord, un outil de gestion précis, mobilisé par les pouvoirs publics, nous permettant d’identifier précisément la cause de ces emplois non pourvus, avec des objectifs chiffrés et des moyens suffisants. Il nous faut une vision d’ensemble, pour déterminer les secteurs en tension, les leviers institutionnels devant être mobilisés, mais aussi les filières devant être soutenues.

J’en viens plus précisément à ma question : quelles mesures comptez-vous prendre pour que ce tableau de bord voie le jour, afin que nous puissions savoir pourquoi un poste n’est pas pourvu ? Est-ce en raison de l’activité économique qui a conduit à sa disparition ? Est-ce parce que l’image d’un métier est mauvaise et qu’il manque des candidats pour l’exercer ? Il faudra alors engager des campagnes de revalorisation des métiers concernés ! Est-ce en raison d’une inadéquation entre les attentes et les compétences des salariés et les conditions de travail et le montant du salaire ? En ce cas, une autre réponse devra être donnée ! Ou est-ce parce que, la formation professionnelle n’étant pas au rendez-vous, l’employeur ne trouve pas la personne qualifiée qu’il recherche ?

Monsieur le ministre, je le répète, nous avons besoin d’un tableau de bord ! Partagez-vous mon analyse et, si oui, comptez-vous mettre en place cet outil très prochainement ? §

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion