Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, rappelons-nous que la formation professionnelle figure parmi les principes politiques, économiques et sociaux « particulièrement nécessaires à notre temps » énoncés par le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. Ce préalable, tout comme le contexte de crise et de mutation dans lequel nous nous trouvons, renforce l’importance et la pertinence de l’interrogation posée ici. Aussi, je tiens à remercier son auteur, notre collègue Jean Desessard, de son initiative.
Chacun le sait, depuis deux décennies, la mondialisation des échanges tout comme la contraction du temps et des distances ont métamorphosé notre économie. Ce bouleversement de paradigme a considérablement modifié l’environnement des entreprises et des salariés. Chaque partie, à la fois en lien et distinctement, doit faire face aux mutations économiques, technologiques, organisationnelles et sociétales. Ces changements, du fait de leur ampleur et de leur complexité, ont engendré des défis nouveaux à relever. Dans ce contexte, la formation professionnelle est mécaniquement devenue une dimension essentielle, dans laquelle entreprises comme salariés doivent s’inscrire. À défaut, l’obsolescence des connaissances, du savoir et des savoir-faire pénalisera durablement l’entreprise et ses salariés.
Si la formation professionnelle est devenue une dimension essentielle et stratégique pour toutes les entreprises, gageons qu’elle l’est tout autant, voire plus encore, pour les demandeurs d’emploi. Ainsi, l’article L. 6111–1 du code du travail en fait une « obligation nationale », qui vise à « permettre à chaque personne, indépendamment de son statut, d’acquérir et d’actualiser des connaissances et des compétences favorisant son évolution professionnelle, ainsi que de progresser d’au moins un niveau de qualification au cours de sa vie professionnelle ».
Nombreux sont les rapports qui, depuis des années, mettent en exergue le lien organique entre formation professionnelle et accès à l’emploi ou maintien dans l’emploi. Ainsi, celui de notre collègue Claude Jeannerot sur la loi du 5 mars 2014 mettait en exergue toute l’importance que revêt la formation professionnelle dans la stratégie de retour à l’emploi.
Certes, le développement de la recherche économique sur la formation démontre qu’elle « n’est pas le remède miracle à tous les problèmes du marché du travail ». Néanmoins, la DARES, la Direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques, observe, toutes choses égales par ailleurs, que les demandeurs d’emploi ayant suivi des formations dans des domaines professionnels précis ou pour se perfectionner dans leur métier retrouvent plus rapidement que les autres un emploi après leur formation. La formation professionnelle reste bien un outil incontournable de sécurisation des parcours professionnels.
Néanmoins, force est de constater que si la formation des demandeurs d’emploi est depuis longtemps affichée par l’ensemble des acteurs comme une priorité, la part qui leur est dédiée n’a pas été à la hauteur des besoins. Ainsi, en janvier 2013, la Cour des comptes notait dans un rapport consacré au marché du travail que « les financements destinés à la formation des demandeurs d’emploi représentaient, en 2010, 13 % du total de la dépense de formation professionnelle continue. […] sa part dans les dépenses totales de formation professionnelle a reculé depuis le début des années 2000, les sommes correspondantes étant restées quasiment stables en valeur absolue entre 2001 et 2009 ». Quant à l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, elle précisait au mois de septembre dernier que les chômeurs bénéficiaient peu de l’accès à la formation. Plus précisément, alors que, entre décembre 2005 et décembre 2011, le nombre de chômeurs a augmenté de 19, 7 %, les entrées en formation de ces derniers ont, quant à elles, diminué de 8, 67 %.
Une telle logique, en complet décalage avec les besoins de nos concitoyens et de nos entreprises, a été rompue par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, notamment avec le vote au mois de février dernier de la loi relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale.
Comme le disait l’auteur de la présente question orale avec débat lors de son explication de vote sur ce projet de loi, « ce texte comporte des avancées très positives, fruits d’un travail de plusieurs années : la création du compte personnel de formation – CPF –, l’affirmation du rôle de la région [...] ».
En effet, les avancées sont tout à fait remarquables. Il en va ainsi du CPF, désormais attaché à la personne et non plus au statut professionnel, de l’instauration d’un service public régional de formation, ainsi que d’un Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles et sa déclinaison au niveau régional, ce qui permet de remplacer un certain nombre de dispositifs pour le moins épars et d’être au plus près du terrain.