Intervention de David Assouline

Commission pour le contrôle de l'application des lois — Réunion du 17 juin 2014 : 1ère réunion
Rapport annuel sur l'application des lois

Photo de David AssoulineDavid Assouline, président :

Notre secrétariat a recoupé ses chiffres avec ceux du secrétariat général du Gouvernement, précaution indispensable pour porter une appréciation sérieuse sur le rythme de publication des décrets d'application et éviter d'inutiles polémiques comme celle que nous avions connue la première année. Nos décomptes aboutissent, sur la mise en application des lois promulguées entre le 1er octobre 2012 et le 30 septembre 2013, à des résultats d'ensemble convergents.

Au cours de cette période, cinquante lois ont été promulguées, hors conventions internationales, ce qui représente, pour la première année pleine du quinquennat, un niveau d'activité législative élevé. Parmi elles, dix-neuf étaient d'initiative parlementaire et onze émanaient du Sénat, qui a donc été l'an dernier à l'origine de plus d'une loi sur cinq, même si ce ne sont peut-être pas les plus importantes. J'y vois une montée en puissance de l'initiative parlementaire consécutive à la révision constitutionnelle de juillet 2008. Les effets positifs de cette réforme sont assez rares pour qu'on les souligne !

La publication des règlements d'application s'est effectuée à un rythme satisfaisant, qui confirme la tendance relevée depuis deux ans : 90 % des lois promulguées sont entrées en application totale ou partielle. Mais ce chiffre n'a de signification que relative, car sur les cinquante lois de l'année, vingt étaient d'application directe. Si on regarde les choses avec optimisme, on considérera d'ailleurs peut-être que ces 20 lois d'application directe traduisaient une prise de conscience qu'il ne faut pas opérer trop de renvois à des textes d'application...

Le décompte par mesures est bien plus révélateur : il se situe, pour le Gouvernement comme pour nous, aux alentours de 65 %. C'est cet indicateur qui représente le taux effectif de mise en application des textes adoptés par le Parlement au cours de l'année parlementaire 2011-2012.

On constate certes entre les différentes commissions permanentes des écarts notables, que leurs bilans particuliers mettent en évidence. En outre, un pourcentage moyen de mise en application ne rend pas compte de l'effort réglementaire réel déployé par le Gouvernement, selon l'ampleur des lois considérées et la complexité des décrets à prendre.

Mais si l'on raisonne sur des bases comparables d'une année à l'autre, ce taux d'environ 65% représente tout de même une progression spectaculaire par rapport aux pourcentages calamiteux observés jusqu'à juin 2010 (entre 10 % au plus bas et 35 % dans les meilleures années). Ils ont plus que doublé depuis cette époque, grâce d'abord à un rattrapage significatif durant la dernière année du gouvernement Fillon, puis surtout au maintien d'un rythme soutenu après l'alternance de 2012.

Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a confirmé dès son entrée en fonction la règle, posée par son prédécesseur en 2008, de faire paraître les décrets d'application de toutes les nouvelles lois dans un délai maximum de six mois, effort d'autant plus méritoire qu'il concernait aussi un certain nombre de mesures issues de l'ancienne majorité.

Certes, nous n'en sommes pas encore au taux de 100 % que le Parlement serait en droit d'attendre, mais la situation actuelle n'a plus aucune commune mesure avec la situation antérieure.

J'ai noté avec satisfaction que le gouvernement de Manuel Valls maintiendrait le même cap : selon Jean-Marie Le Guen, que nous avons entendu la semaine dernière, le nouveau gouvernement est « extrêmement attaché à la bonne application des textes votés par le Parlement ». « Le premier message que je veux porter devant vous, a-t-il ajouté, est que le Gouvernement s'assigne les mêmes objectifs que ses prédécesseurs : sauf exception dûment justifiée, dont il sera rendu compte devant le Parlement, les lois doivent être applicables dans les six mois qui suivent leur publication ».

Ayons l'immodestie de penser que ce redressement nous est aussi imputable ! La création de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois a favorisé ce mouvement, en portant le débat de l'application des lois sur la scène politique, ce qui a mis le Gouvernement sous pression. Aujourd'hui, plus personne n'accepterait des taux aussi médiocres que ceux constatés ne serait-ce qu'il y a une dizaine d'années. C'est la preuve d'une nouvelle prise de conscience, toutes tendances politiques confondues.

Autre tendance notable : une pente pluriannuelle favorable sur l'ensemble de la XIVème législature, même s'il est beaucoup trop tôt pour en tirer des conclusions définitives. Pour l'ensemble des lois votées depuis le 20 juin 2012, le taux de mise en application totale ou partielle s'élève à 88 %.

Enfin, les délais moyens de publication des décrets se rapprochent en général des objectifs fixés en 2008, même s'il reste des marges de progrès : sur les 310 mesures réglementaires prises pour l'application de lois de l'année parlementaire, 174 ont été publiées dans un délai ne dépassant pas six mois. Je vous renvoie à mon rapport écrit pour le détail des chiffres.

Dans ce bilan d'ensemble, quelques points me paraissent beaucoup plus problématiques. Le premier est le sort objectivement moins favorable réservé aux textes d'initiative parlementaire : tandis que 67% des mesures introduites par la voie d'amendements du Gouvernement sont entrées en application, ce n'est le cas que de 48% de celles proposées par l'Assemblée et de 24% de celles émanant du Sénat. Le moins que l'on puisse dire est que l'administration met moins d'énergie à traduire en décrets les dispositions d'origine parlementaire, et particulièrement sénatoriale.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion