Notre pays devra faire preuve d’une fermeté exemplaire sur ce dossier. Si les éléments en sa faveur sont réels, connus et confirmés par des données bathymétriques, géophysiques et géologiques, ils devront toutefois être portés et défendus avec conviction et efficacité, ce dont je ne doute pas, au plus haut niveau.
Ce dossier prendra du temps... Et de temps, pour éviter de faire de Saint-Pierre-et-Miquelon un archipel moribond, vivant plus que de raison des subsides de l’État, nous en manquons cruellement.
Alors, sans attendre le verdict de la Commission puis, éventuellement, du tribunal arbitral, si aucune entente d’ici là ne devait être possible avec nos voisins canadiens, il nous faut, avec l’accord et l’aide de l’État, explorer toutes les potentialités que peut nous procurer la position géostratégique de mon archipel, en partant de la ZEE qui est sienne aujourd’hui.
S’agissant des hydrocarbures tout d’abord, il faut apporter des réponses aux compagnies qui demandent soit une autorisation préalable de prospection, ou AAP, soit un permis exclusif. Un projet de forage mené à bien dans nos eaux, ce sont environ 50 millions d’euros investis sur cinq ans. Cela mérite, me semble-t-il, que nous soyons certes vigilants sur les conditions, mais aussi, à tout le moins, réactifs.
Pour ce qui est des ports, et plus particulièrement du port de Saint-Pierre, abrité et libre de glace toute l’année, un véritable projet structurant est à mettre en œuvre rapidement et indépendamment du projet dit de « grand port ».
En effet, si les ports de l’archipel sont des ports d’État, les infrastructures sont vieillissantes, pas aux normes et très modestes. Or Saint-Pierre-et-Miquelon est non seulement sur le chemin de plusieurs routes maritimes et dans l’embouchure du Saint-Laurent, mais aussi particulièrement bien placé par rapport à l’ouverture – peut-être regrettable du point de vue environnemental, mais inévitable – de ce que l’on nomme le « passage du Nord-Ouest ».
Il faut, dès maintenant, que l’archipel puisse se positionner comme une escale technique de choix, voire un port d’attache, pour la navigation de commerce, la plaisance, la pêche, mais aussi la marine nationale. Pour cela, il dispose d’atouts non négligeables, comme la proximité du port et de l’aéroport, l’existence d’un centre hospitalier neuf et rapidement accessible et la présence d’une administration de proximité capable de réagir promptement. Nous pourrions ainsi caréner et remiser des navires à la mauvaise saison, offrir de nombreux services aux navires français, européens et étrangers. Tout cela drainerait une activité importante, créatrice d’emplois et de richesse pour le territoire.
Pour ce faire, il faut aussi que l’État, madame la ministre, accepte de moderniser et sécuriser toutes les infrastructures portuaires, qui sont, je le rappelle, de son ressort et qui pourraient être rapidement utilisées par les différentes flottes que je viens de citer.
Il faut que nous puissions, ensemble, travailler à un projet ambitieux à la hauteur de la place que la France se doit de tenir dans cette portion du globe, étant donné son rang de deuxième puissance maritime mondiale. Il nous faut y travailler dès maintenant avec votre ministère, mais aussi le ministère de l’écologie et du développement durable, le ministère de la défense et le secrétariat d’État aux transports, à la mer et à la pêche.
Saint-Pierre-et-Miquelon peut et doit être un poste avancé pour la France et l’Europe en Amérique du Nord, mais aussi pour tous les ports qui auront mis en œuvre une stratégie commerciale arctique. C’est une véritable opportunité qui se présente à nous et que nous devons saisir dans le respect, bien entendu, des enjeux environnementaux extrêmement importants auxquels il faudra prêter une attention toute particulière.
La ZEE autour de Saint-Pierre-et-Miquelon, c’est aussi une opportunité pour étudier un certain nombre de phénomènes climatiques, géologiques, courantologiques. C’est également une opportunité en matière de recherche et d’enseignement supérieur pour de nombreux sujets d’études.
La ZEE, c’est encore une opportunité pour développer des pôles d’excellence et de compétitivité. Pour ce faire, nous devons nous montrer plus performants au niveau fiscal et plus rationnels au niveau de notre organisation sur l’archipel.
La zone économique exclusive de Saint-Pierre-et-Miquelon, avec ce potentiel d’évolution, représente, madame la ministre, mes chers collègues, vous l’aurez compris, des intérêts scientifiques, géostratégiques, économiques, environnementaux et sociaux de tout premier ordre.
Il s’agit d’un véritable atout pour notre archipel et ses habitants, mais aussi, je le répète, pour la France. Ne laissons pas passer cette occasion unique pour elle de tenir la place qui est la sienne sur l’échiquier mondial.