Madame la sénatrice, je vous remercie de ces questions, qui sont d’importance pour la formation des futurs praticiens de santé.
Vous avez attiré mon attention sur l’ouverture à Toulon, en novembre 2012, puis à Béziers, en septembre 2013, d’une antenne de l’université portugaise privée « Fernando Pessoa », consacrée principalement aux études de santé.
Dès cette annonce, j’ai immédiatement et systématiquement réagi en demandant aux rectrices des académies de Nice et de Montpellier de déposer, au nom du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, une plainte auprès du procureur de la République pour usage abusif du terme « université » et non-respect des règles du régime de déclaration préalable nécessaire pour l’ouverture de ce type d’établissement, notamment s’agissant du défaut de dépôt d’informations documentées auprès des rectorats permettant de présenter réellement l’offre de formation ainsi que les conditions d’accueil des étudiants. Je pense ici au paiement de droits d’inscription exorbitants, mais aussi à l’obligation pour les étudiants de poursuivre leurs études au Portugal, alors même que ces derniers, à qui on avait caché cet aspect des choses, pensaient effectuer la totalité de leur cursus en France.
Cependant, l’ouverture de l’établissement de formation privé intitulé initialement « centre universitaire Fernando Pessoa », puis, à la suite de mon intervention pour que le mot « universitaire » disparaisse, « centre libre d’enseignement supérieur international », à La Garde, près de Toulon, puis à Béziers, a mis en évidence la faiblesse de la procédure proposée pour l’accréditation de ce type d’établissements. Il convenait donc de modifier la législation.
C’est pourquoi la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche du 22 juillet 2013 a modifié les conditions d’ouverture et d’accréditation des établissements de ce type.
L’article L. 731-6-1 du code de l’éducation prévoit désormais que les établissements privés de ce type signent une convention avec un établissement de santé, ainsi qu’une convention avec une université comprenant une composante dispensant un enseignement de médecine, de pharmacie, d’odontologie ou de maïeutique.
Cet article prévoit aussi la communication d’un dossier démontrant que l’établissement de formation satisfait aux modalités pédagogiques exigées par arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la santé, avec des modalités d’agrément précisées non par décret mais par arrêté conjoint.
Cet arrêté a été approuvé par les instances consultatives des deux ministères ; il sera publié dans le courant de cette semaine. Voilà qui répond à une partie de vos questions.
Les établissements qui délivrent aujourd’hui les formations entrant dans le champ de l’arrêté auront six mois pour se mettre en conformité avec les exigences réglementaires. Si les établissements ne se sont pas mis en conformité à l’issue de cette période de six mois, il reviendra au rectorat de l’académie dans laquelle se situe l’établissement d’engager, au nom du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, les poursuites auprès du tribunal afin de fermer l’établissement – cette possibilité ne nous était pas ouverte auparavant.
Comme vous le savez, le centre libre d’enseignement supérieur international a, de surcroît, adressé en mai 2014 à ses étudiants un courrier dans lequel il annonce que la convention qui le liait à l’université portugaise venait d’être dénoncée par l’établissement portugais d’accréditation, pour des raisons administratives.
Les étudiants inscrits dans cet établissement pourront présenter une demande d’inscription au sein des universités françaises. Il relève cependant de la compétence des universités d’accueil de valider ou non, en tout ou partie, les crédits de formation délivrés par un établissement de formation privé.
Je suivrai l’évolution de ces demandes avec la plus grande attention, afin que les étudiants ne soient pas victimes d’une situation qu’ils n’ont pas pu contrôler.
Au-delà, ce dossier pose le problème, plus complexe, du contournement du numerus clausus et de la démographie médicale – je pense notamment à la pénurie de médecins généralistes, qui seront de plus en plus le pivot de notre politique de santé publique dans les années à venir.
Pour prévenir ces difficultés, j’ai mis en place des expérimentations dans sept universités pour diversifier l’accès aux professions de santé, hors PACES – première année commune aux études de santé – et nous travaillons, Marisol Touraine et moi-même, sur le projet d’une licence pluriprofessionnelle en santé. Par ailleurs, nous proposerons, dans le cadre du projet de loi sur la stratégie nationale de santé, de mettre en place des assises nationales sur ce thème avant la fin de l’année.
Encore une fois, l’allongement du temps de la vie et la médecine ambulatoire exigeront, pour les infirmiers et les médecins, des évolutions professionnelles que nous devons anticiper.