La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
La parole est à Mme Catherine Tasca, auteur de la question n° 790, adressée à Mme la ministre des outre-mer.
Madame la ministre, le 31 octobre 2013, le Parlement adoptait à l’unanimité la dixième réforme du statut de la Nouvelle-Calédonie existant depuis 1999 à la suite de la signature de l’accord de Nouméa. Le Parlement traduisait ainsi au sein de la loi organique les demandes exprimées en décembre 2012 par le comité des signataires de cet accord.
Mesure emblématique de cette réforme, la Nouvelle-Calédonie dispose désormais de la faculté de créer des autorités administratives indépendantes dans ses domaines de compétence.
Dès le 3 avril 2013, une autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie a été créée. Le congrès de la Nouvelle Calédonie a finalement adopté cette loi du pays à l’unanimité.
Conformément aux dispositions statutaires, cette future autorité indépendante bénéficiera des garanties suffisantes pour assurer l’indépendance de ses membres ; en juillet 2013, en tant que rapporteur des lois du 15 novembre 2013, j’avais proposé de renforcer ces gages d’indépendance, et le Sénat m’avait suivie.
Ainsi, les candidats pressentis à ces fonctions devront se soumettre à une audition publique et leur nomination devra être confirmée par une majorité positive des trois cinquièmes des membres du congrès. Enfin, les possibilités de révoquer les membres de cette autorité sont fortement encadrées.
La création de cette autorité vise à répondre à une attente forte de la population calédonienne : lutter contre le phénomène de la vie chère. Les événements sociaux se succèdent en Nouvelle-Calédonie depuis plusieurs années…
Les facteurs qui expliquent, sans les justifier, le niveau élevé des prix pratiqués localement et le moindre pouvoir d’achat qui en résulte sont nombreux. Je pense notamment à la faible profondeur du marché local, aux habitudes de consommation tournées vers les produits métropolitains, aux frais de transports maritime et aérien, mais aussi aux obstacles souvent anciens à une saine concurrence. À ce constat, il faut ajouter la persistance d’inégalités économiques et sociales supérieures à la moyenne nationale : toutes les composantes de la population ne bénéficient pas du boom économique fondé sur les ressources en nickel.
Dans ce contexte, l’autorité de la concurrence doit devenir le nouveau bras armé de la législation et de la réglementation locale, que ce soit en matière de maîtrise des prix – notamment des produits de première nécessité –, de lutte contre les ententes et les abus de position dominante, ou encore d’implantation des grandes surfaces commerciales sur le territoire.
Ces dispositifs ont été grandement renforcés par la loi du pays du 25 mai 2013, qui permet de faire face aux pratiques anticoncurrentielles. Il faut qu’une autorité indépendante soit dorénavant garante de l’effectivité de ces avancées.
Madame la ministre, depuis les élections provinciales du 11 mai dernier, le congrès a été renouvelé et le gouvernement, dirigé par Mme Cynthia Ligeard, a été constitué le 5 juin 2014. Nous savons tous que la Nouvelle-Calédonie entre dans la dernière phase du processus institutionnel décidé en 1998.
Cette échéance importante ne doit pas masquer les problèmes quotidiens des Calédoniens. J’en suis convaincue, les institutions calédoniennes doivent poursuivre dès maintenant l’effort engagé en matière de lutte contre la vie chère.
Aussi, pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, quelles mesures réglementaires restent à prendre par le gouvernement calédonien ? Dans quel délai la nomination du président et des trois membres aura-t-elle lieu ? En un mot, madame la ministre, à quelle échéance peut-on espérer que l’autorité de la concurrence sera, en Nouvelle-Calédonie, pleinement opérationnelle ?
J’ajouterai que la loi organique du 19 mars 1999 a été modifiée pour permettre aux autorités indépendantes calédoniennes de conclure des conventions avec leurs homologues nationales. Savez-vous si de tels partenariats sont en cours de réalisation ?
Madame la sénatrice, comme vous le savez, la création de l’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie découle d’une demande expresse des partenaires locaux de l’État, exprimée dès 2012.
Le transfert à la Nouvelle-Calédonie, le 1er juillet 2013, de la compétence que l’État détenait en matière commerciale a conduit la collectivité, en matière de concurrence, à souhaiter la création d’une autorité de la concurrence locale qui soit dotée des mêmes pouvoirs que celle de l’Hexagone.
Le processus qui aboutira bientôt à la mise en place de cette autorité est le résultat d’un travail mené parallèlement, d’une part, par le congrès de la Nouvelle-Calédonie et, d’autre part, par le Gouvernement et le parlement national, comme vous le soulignez dans votre question.
Jusqu’à la loi organique du 15 novembre 2013, la Nouvelle-Calédonie ne pouvait créer que des autorités consultatives, sans pouvoir de sanction.
Lors de l’examen de ce texte et du projet de loi simple qui accompagnait le projet de loi organique, vous aviez vous-même attiré l’attention du Gouvernement sur la nécessité pour l’État, parce que cela relève des compétences qu’il détient encore au titre des libertés publiques et de la procédure contentieuse, de fixer les principes procéduraux permettant de garantir le respect par l’Autorité des grandes libertés publiques.
Vous avez ainsi proposé – cela figure aujourd’hui à l’article 93-1 de la loi organique statutaire – que la nomination par arrêté du gouvernement calédonien des membres d’une autorité administrative indépendante telle que l’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie ne puisse intervenir que si, après une audition publique du candidat proposé par le gouvernement, le congrès approuve, par un avis adopté à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, la candidature ainsi proposée.
En outre, sur votre initiative, le Parlement a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnances, dans le délai court de six mois, les mesures permettant d’étendre à la Nouvelle-Calédonie les dispositions du code de commerce en matière de pouvoirs d’enquête, de voies de recours, de sanctions et d’infractions.
Le Gouvernement a mené à bien la mission que le Parlement lui avait confiée, et, le 7 mai dernier, le conseil des ministres a adopté ce projet d’ordonnance. Entre-temps, le congrès de la Nouvelle-Calédonie avait, par une loi de pays promulguée le 24 avril 2014, créé l’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie.
Ainsi, les nouvelles dispositions du code de commerce applicables en Nouvelle-Calédonie prévoient que les attributions confiées à l’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie sont exercées par un collège composé de quatre membres, dont un président nommé pour une durée de cinq ans, désignés en raison de leur expérience significative en matière juridique ou économique. Ces nominations interviendront, comme je l’ai indiqué, après audition et validation par le congrès de la Nouvelle-Calédonie.
Désormais, il appartient à la Nouvelle-Calédonie de mettre en place, formellement, l’autorité de la concurrence, ce qui nécessitera plusieurs types de dispositions : d’abord, l’approbation, par délibération des quatre membres du collège de l’autorité, du règlement intérieur de cette dernière, qui fixera les modalités de désignation du vice-président parmi les membres du collège et les conditions dans lesquelles les trois membres non permanents seront désignés pour siéger ; ensuite, la nomination par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie d’un rapporteur général dirigeant le service d’instruction pour cinq ans ; enfin, la détermination, par arrêté du gouvernement, des conditions dans lesquelles le président de l’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie la représente dans tous les actes de la vie civile et a qualité pour agir en justice en son nom.
Par ailleurs, les nouvelles dispositions du code de commerce applicables en Nouvelle-Calédonie prévoient que l’Autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie peut, pour la mise en œuvre de ses compétences, conclure des conventions organisant ses relations avec l’Autorité de la concurrence nationale.
Vous le voyez, il y a matière à amélioration du dispositif puisque la conclusion de conventions avec d’autres autorités indépendantes nationales, telles que la commission de régulation de l’énergie, n’est pas prévue pour l’instant.
J’aurai l’occasion d’attirer l’attention de nos partenaires calédoniens sur ce point, et je tiens à vous saluer, madame la sénatrice, pour la contribution que vous avez apportée, à titre personnel, à ce projet.
Madame la ministre, je vous remercie des réponses que vous venez de m’apporter. Lors des auditions que j’ai effectuées en 2013 en tant que rapporteur, j’ai mesuré à quel point l’action d’une autorité de la concurrence était attendue en Nouvelle-Calédonie, ce que vous venez de confirmer.
Tel que vous l’avez présenté, le processus de création de l’autorité de la concurrence a été, je crois, exemplaire et inédit. Cette naissance a d’abord nécessité l’intervention du législateur organique, puis du congrès de la Nouvelle-Calédonie en avril 2014, avant que le Gouvernement ne publie l’ordonnance du 7 mai 2014, qui adapte à la Nouvelle-Calédonie les dispositions du code de commerce, notamment en matière de pouvoir d’enquête et de voies de recours.
Cet exemple démontre que l’accroissement des compétences et de l’autonomie de la Nouvelle-Calédonie ne signifie pas l’effacement de l’État. Au contraire, l’État et la Nouvelle-Calédonie doivent collaborer, car leurs compétences sont intimement liées. Le succès de l’autorité de la concurrence a dépendu et dépendra, tout au long du processus, de cette collaboration.
Il reste désormais au Parlement à ratifier l’ordonnance du 7 mai 2014. Nous serons vigilants lorsque cette ratification nous sera présentée.
Dans sa décision du 1er octobre 2013, le Conseil constitutionnel a souligné les « particularités économiques de la Nouvelle-Calédonie et les insuffisances de la concurrence sur de nombreux marchés », ce qui l’a conduit à admettre, pour favoriser la concurrence, des contraintes plus strictes qu’en métropole. Il faudra donc veiller à ce que les sanctions, y compris pénales, qui ont été adoptées soient suffisamment dissuasives ; si tel n’était pas le cas, le Parlement aurait à y remédier.
Madame la ministre, le Sénat est attentif au respect de l’application des lois. Mes collègues de la commission des lois et moi-même suivons avec intérêt l’avenir de l’archipel calédonien et l’évolution de sa situation économique et sociale, situation dont la réussite du processus engagé dépendra largement. Nous commençons à mesurer les premiers effets des lois de novembre 2013 – je pense notamment aux tarifs bancaires –, mais une partie importante du chemin reste à parcourir.
Vous-même, madame la ministre, avez évoqué le fait que la politique de convention entre cette nouvelle autorité et les autorités nationales n’est pas encore totalement développée. Nous comptons sur le Gouvernement pour veiller à ce que la démarche soit confortée dans les meilleurs délais.
La parole est à M. Antoine Lefèvre, auteur de la question n° 807, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur les craintes exprimées par les élus du département de l’Aisne – mon collègue Yves Daudigny, ici présent, ne me contredira pas – quant à ce qui apparaît comme une désactivation de la base hélicoptère de la sécurité civile du Touquet. En effet, le Dragon 62, installé depuis 2010 sur la base du Touquet, semble avoir été déplacé à la mi-février vers la base de Nîmes, échelon central des moyens hélicoptères de la sécurité civile.
Ce déplacement s’inscrit-il dans le cadre plus large, au niveau national, de l’actuelle réflexion du ministère de l’intérieur sur la diminution de cette flotte aérienne ? Voire d’un possible démantèlement de la flotte du groupement d’hélicoptères de la sécurité civile, comme nous l’avons entendu ?
Est-il en fait question de réduire cette flotte au point d’arriver bien en dessous des capacités opérationnelles indispensables à la population française ? La question reste posée. Ces appareils permettent en effet de réaliser, en collaboration avec les services d'aide médicale d'urgence, ou SAMU, et les pompiers toutes les missions de sécurité civile qui concernent le secours à personne.
La base du Touquet fonctionne avec le soutien des services départementaux d'incendie et de secours, les SDIS, du Pas-de-Calais, de la Somme et de l’Aisne, en particulier pour la médicalisation et l’armement en sauveteurs spécialisés de l’appareil.
Les équipages de conduite ont donc des qualifications élevées ainsi que des compétences de réactivité très importantes.
Alors que le nombre de personnes secourues est passé de 167 en 2011 à 330 en 2013, et qu’un tel équipement permet un précieux gain de temps sur certains secteurs particulièrement sous-dotés médicalement, comme la Picardie et principalement le département de l’Aisne, le départ du Dragon 62 fragilise la couverture sanitaire de ces territoires et accentue une iniquité dans le traitement de la protection des populations.
Enfin, la suppression de cet équipement pose aussi le problème du maintien en condition opérationnelle des équipes spécialisées, qui ne pourront plus faire habiliter leur personnel à l’hélitreuillage.
Je rappelle à cet égard la convention passée en mai 2012 pour le maintien de ce vecteur à disposition gratuite pour les services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, de la zone de défense et de sécurité Nord entre le SDIS de l’Aisne et la direction générale de la sécurité civile. Elle stipule notamment que les médecins et infirmiers du SDIS de l’Aisne ont intégré le tour de garde à raison de vingt-quatre gardes annuelles, assorties des indemnisations afférentes à ces vacations.
Le départ de ce Dragon 62 rompt la couverture opérationnelle réalisée à ce jour au sein de la zone Nord, qui permettait de garantir la possibilité à tous les services concernés de travailler de manière performante et complémentaire.
C’est pourquoi, madame la ministre, je vous demande de bien vouloir nous expliquer les raisons « objectives » qui ont amené le Gouvernement à la « mise en sommeil » de la station du Touquet, mais aussi de bien vouloir entendre les réactions du terrain, des élus, des SDIS, qui souhaitent que les habitants de cette zone de défense puissent continuer à bénéficier de la même qualité de service de secours par le maintien de cet appareil.
Monsieur le sénateur, vous avez appelé l’attention du Gouvernement sur la flotte des hélicoptères du ministère de l’intérieur, qui assure, dans le cadre de la protection des populations, des missions de sauvetage, de secours et de transport des victimes, de jour comme de nuit, souvent dans des conditions délicates et des environnements hostiles.
C’est dans ce cadre que l’ensemble de la flotte a été fortement sollicitée au cours des intempéries de l’hiver dernier et tout au long de l’année 2013 pour faire face aux différentes catastrophes climatiques que notre pays a eu à affronter. Les moyens héliportés du ministère de l’intérieur ont été engagés sur de nombreux théâtres d’opération.
Des redéploiements sont en cours pour adapter la réponse aux besoins. En effet, la priorité donnée aux territoires dont les contraintes géographiques sont fortes – distances importantes, nombre réduit d’équipements médicaux de proximité, réseau routier peu dense – justifie que les hélicoptères soient avant tout employés en terrain difficile, outre-mer ou en zone de montagne. Les saisonnalités touristiques, et donc l’augmentation des sollicitations opérationnelles sur ces zones, requièrent bien souvent de disposer d’un vecteur aérien.
La conjonction de cette tension opérationnelle et des redéploiements actuellement mis en œuvre ont pour conséquence l’indisponibilité temporaire de l’hélicoptère de la sécurité civile affecté à la base du Touquet.
Dans le même temps, et avec le souci d’assurer la mission de protection des populations de manière optimale, le ministère de l’intérieur s’est assuré que le secours d’urgence s’exerçait dans des conditions préservant la sécurité des populations sur le territoire concerné.
Que ce soit par la voie des airs ou par la voie terrestre, les moyens déployés par les services départementaux d’incendie et de secours, les services d’aide médicale urgente, ou SAMU, la gendarmerie nationale, mais également par la marine nationale offrent à la zone de défense et de sécurité Nord, qui comprend les régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie, une couverture de qualité, effectuée par des professionnels remarquables, en temps de crise comme dans le secours quotidien. Leur engagement, sous la responsabilité des maires et des préfets pour le secours aux populations, permettra de faire face à l’indisponibilité temporaire de l’hélicoptère de la sécurité civile du Touquet.
De plus, l’engagement pris par le ministre de l’intérieur de ne pas dégrader la qualité du secours d’urgence impose une régulation et une optimisation des moyens aériens et terrestres disponibles, relevant tant des services départementaux d’incendie et de secours que des centres hospitaliers comme des ministères de l’intérieur et des armées. Il a donc été demandé à la zone de défense et de sécurité une concertation sur l’organisation du secours d’urgence associant l’ensemble des acteurs concernés.
Une solution qui garantit le bon fonctionnement du secours d’urgence et une couverture territoriale optimale tout au long de l’année, en prenant en compte les effets de saisonnalité et la présence de l’ensemble des moyens aériens comme terrestres, sera proposée très rapidement au directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises.
Vous n’avez pas complètement répondu à ma question, madame la ministre. Vous avez évoqué à deux reprises l’indisponibilité « temporaire » de l’hélicoptère de la sécurité civile affecté à la base du Touquet. Je souhaite que le provisoire ne dure pas trop longtemps, car je suis, dans ce domaine, favorable aux solutions durables.
J’ai noté l’engagement pris par le ministre de l’intérieur de mener une réflexion plus vaste. Nous serons très attentifs aux moyens qui seront mis à nouveau en place sur la zone de défense et de sécurité Nord.
La parole est à M. Luc Carvounas, auteur de la question n° 770, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur la situation du village de Kessab en Syrie, en proie depuis plusieurs mois à de violents affrontements entre les forces armées du régime de Bachar Al-Assad et les forces rebelles du Front Al-Nosra, affilié à Al-Qaïda.
Vous le savez, madame la secrétaire d’État, la ville de Kessab, qui est un poste frontière situé entre la Turquie et la Syrie, dans la province de Lattaquié, est tombée aux mains des forces djihadistes, suscitant inquiétudes et doutes parmi les populations civiles de Kessab. Or, depuis la chute de la ville, majoritairement peuplée de rescapés du génocide des Arméniens de 1915, peu d’informations fiables nous parviennent quant au sort de ses habitants.
Nombre de spécialistes du Moyen-Orient s’inquiètent de la volonté des combattants islamistes de s’emparer d’un poste frontière qui semble pourtant stratégiquement non essentiel pour eux. Beaucoup s’interrogent donc sur les motivations réelles des assaillants, allant jusqu’à craindre que la communauté arménienne ne soit directement visée.
Les craintes d’exactions sectaires contre les minorités syriennes sont amplifiées par le caractère radical des combattants du Front Al-Nosra, qui considèrent notamment la communauté arménienne comme des hérétiques soutenant le régime de Bachar Al-Assad. Selon différentes sources en Syrie, cette situation a provoqué la fuite de 500, voire 800 familles, réfugiées plus au sud dans l’attente d’un apaisement des tensions à la frontière.
Face au risque de graves dérapages à Kessab, ainsi qu’à la rareté et au manque de précision des informations qui nous parviennent, pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous faire part des éléments dont les autorités françaises ont connaissance quant au sort des habitants de cette région, ainsi que des éventuelles actions menées par le Gouvernement en faveur de l’apaisement de ces tensions pesant fortement sur l’ensemble de la population civile ?
Monsieur le sénateur, nous continuons bien sûr à suivre avec la plus grande attention la situation dans le Nord-Ouest de la Syrie, en particulier dans la région de Kessab où des combats ont éclaté à partir du 21 mars, poussant de nombreux habitants, notamment arméniens, à la fuite.
Même si les informations sont, comme vous le relevez, encore lacunaires en raison de difficultés d’accès sur le terrain, nous comprenons qu’il n’y aurait pas eu depuis d’attaque ciblée contre les populations arméniennes, qui ont d'ailleurs fui, pour la quasi-totalité d’entre elles, ni contre leurs biens ou contre leurs lieux de culte. Il convient naturellement de rester prudent et vigilant.
La France, sensible au sort de ces personnes contraintes de quitter leur ville sous le feu des attaques, condamne toutes les violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme en Syrie, et appelle toutes les parties au conflit, en premier lieu le régime, à veiller à la protection des civils.
Les droits des personnes appartenant à des minorités, quelle que soit leur origine ethnique ou leur religion, doivent être respectés. Nous le faisons valoir à la coalition nationale syrienne, qui a pris de longue date des engagements en ce sens et s’est mobilisée dès le début de l’offensive dans la région de Kessab pour que les lieux de culte arméniens, en particulier, soient protégés.
Il est important d’opérer une distinction claire entre l’opposition modérée, que nous soutenons, et les groupes terroristes dont nous condamnons les exactions et contre lesquels nous nous mobilisons. La France a ainsi été à l’initiative de l’inscription du Front Al-Nosra sur la liste de sanctions des Nations unies contre Al-Qaïda en mai 2013.
Alors que la situation humanitaire ne cesse de se dégrader, principalement du fait de la fuite en avant militaire du régime, la France est pleinement mobilisée pour venir en aide aux populations civiles affectées par le conflit syrien. C’est notamment sur son initiative que la résolution 2139 du Conseil de sécurité a été adoptée, à l’unanimité, le 22 février dernier. Cette résolution contient des demandes précises : l’arrêt des violences indiscriminées contre les civils, la levée immédiate des sièges des zones peuplées, le respect des missions médicales et des soins aux blessés ; elle exige également un accès à travers les lignes de conflits et les frontières des pays voisins.
Nous appelons le régime à se conformer à ces obligations et poussons les soutiens du régime à faire davantage pression sur lui, notamment dans le cadre du Groupe de haut niveau constitué sur le sujet à Genève.
Soyez donc assuré, monsieur le sénateur, que la France continue de se mobiliser en faveur de la population syrienne, du sort des minorités et de la situation des Arméniens en particulier. La France continuera de suivre l’évolution de la situation à Kessab avec la plus grande vigilance et restera attentive au sort des Arméniens de Syrie.
Je tiens à remercier Mme la secrétaire d'État de ses propos et, à travers elle, le Gouvernement de sa vigilance sur la scène internationale par rapport à la situation syrienne, à Kessab en particulier.
Chacun comprendra que nos concitoyens d’origine arménienne regardent de très près ce qui se passe dans cette région, d’autant que nous sommes à quelques mois d’une commémoration importante du génocide arménien, manifestation à laquelle le Président de la République a annoncé sa participation.
Nos concitoyens seront, si ce n’est rassurés, tout au moins informés par la représentation nationale de l’action de la France sur la scène internationale pour essayer d’apporter son appui et sa protection à ces populations.
La parole est à M. Robert Laufoaulu, auteur de la question n° 782, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur la représentation de la France au prochain forum du Pacifique qui se tiendra à partir du 29 juillet 2014 aux Îles Palau.
Le Forum, qui réunit seize États membres, ainsi que des membres associés, comme la Nouvelle-Calédonie ou la Polynésie française, et des membres observateurs, comme Wallis-et-Futuna, se tient chaque année et se termine par un dialogue post-forum avec une douzaine de pays partenaires, dont les États-Unis, le Japon, la Chine et, bien sûr, la France, puissance du Pacifique avec ses trois territoires ultramarins de la zone.
Notre pays avait depuis un certain temps compris l’importance stratégique de la zone Asie-Pacifique, importance qu’elle avait un peu perdue à la fin de la guerre froide, mais qu’elle retrouve pleinement dans le nouvel ordre géopolitique mondial. C’est ainsi qu’en 2011, Alain Juppé, alors ministre des affaires étrangères, conduisait la délégation française, à Auckland, lors du dialogue post-forum.
Toutefois, en 2012, à Avarua, aux Îles Cook, tandis que Hillary Clinton était présente, la France, malgré mes demandes renouvelées auprès du Gouvernement, a été représentée non pas au niveau ministériel mais seulement par notre ambassadeur. La situation s’est reproduite, en 2013, à Majuro, aux Îles Marshall.
Je suis tout sauf un homme partisan, madame la secrétaire d'État. Je n’hésite pas à voter les projets de loi du Gouvernement lorsqu’ils me paraissent aller dans le bon sens. Je me sens donc d’autant plus à l’aise pour dire les choses lorsqu’elles ne sont pas satisfaisantes.
Alors voilà : quelle que soit la qualité de nos diplomates, l’absence répétée de membres du gouvernement français au dialogue post-forum est vécue par les pays de la zone comme une marque de dédain. Quant à nous, Français du Pacifique, nous ressentons un profond malaise, pour ne pas dire plus.
Il est pourtant d’autant plus important que la France marque fortement son intérêt pour le forum que ce dernier, dont l’une des missions essentielles est la préservation de l’environnement, avec un volet sur la lutte contre le réchauffement climatique, offre un cadre idéal de discussions en vue de la préparation de la conférence sur le climat qui se tiendra à Paris à la fin de l’année 2015.
Si nous voulons vraiment que cette conférence sur les changements climatiques, dite « COP 21 », soit un succès, si en tant que pays hôte nous voulons aboutir à cette occasion à un nouvel accord international sur le climat applicable à tous les pays, dans l’objectif de maintenir le réchauffement mondial en deçà de deux degrés centigrades, nous devons, en amont, travailler aussi avec les États du Pacifique qui sont tellement concernés par la question.
En conséquence, je souhaiterais savoir si la France sera représentée, cette année, dans les discussions post-forum par un membre du Gouvernement de la République.
Monsieur le sénateur, le quarante-cinquième sommet du forum des îles du Pacifique et le dialogue post-forum de Koror, qui se dérouleront du 29 juillet au 1er août 2014, ainsi que la troisième conférence internationale sur les petits États insulaires en développement, qui se tiendra aux Îles Samoa en septembre prochain, sont des échéances extrêmement importantes dans le contexte de la préparation de la conférence Paris Climat 2015.
Nous le savons, monsieur le sénateur, les îles du Pacifique sont parmi les territoires les plus exposés aux impacts du dérèglement climatique. La déclaration de Majuro pour un leadership sur le climat, signée l’an dernier à l’occasion de la quarante-quatrième édition du forum des îles du Pacifique, avait montré l’extrême préoccupation et la forte mobilisation des îles du Pacifique sur ce sujet.
Le réchauffement climatique, la montée du niveau de la mer, l’acidification des océans, les variations de précipitations, les cyclones et les tempêtes tropicales auront des effets importants dans beaucoup de régions du monde. Mais ces évolutions auront des conséquences sans commune mesure avec ce que pourraient connaître les écosystèmes et les économies des territoires insulaires, menacés pour certains de disparaître.
Avec Laurent Fabius, nous sommes parfaitement conscients de l’extrême vulnérabilité de ces territoires, qui méritent toute notre attention.
Pour répondre précisément à votre question, monsieur le sénateur, et vous rassurer par la même occasion, je tiens à vous informer que la France sera représentée au dialogue post-forum par son secrétaire permanent pour le Pacifique. Ce dernier conduira la délégation française qui sera présente lors du forum des îles du Pacifique.
Madame la secrétaire d’État, je suis un peu déçu de votre réponse. Comme je l’indiquais dans ma question, voilà deux ans que la France n’est plus représentée au niveau ministériel lors des réunions du forum des îles du Pacifique. Les îles de la région y voient a minima une marque de dédain à leur égard. Je réitère donc ma demande : il me semble que le Gouvernement devrait être représenté au niveau ministériel lors de ce forum, réunion internationale de la région du Pacifique.
La parole est à M. Pierre Camani, auteur de la question n° 791, adressée à Mme la ministre du logement et de l'égalité des territoires.
Madame la ministre, un nouveau dispositif de taxation des opérations d’aménagement et de construction est entré en vigueur au 1er mars 2012.
La taxe d’aménagement est ainsi venue remplacer plusieurs taxes d’urbanisme antérieures, dont la taxe départementale des espaces naturels sensibles, ou TDENS, et la taxe départementale destinée au financement des conseils d’architecture, de l’urbanisme et de l’environnement, ou CAUE.
Sur la base des estimations communiquées à l’époque par les services compétents de l’État, les départements ont voté un taux pour cette nouvelle taxe assortie d’une nouvelle clé de répartition de son produit entre, d’une part, les actions en faveur des espaces naturels et, d’autre part, l’activité des CAUE.
Dans les faits, les produits escomptés ne se sont pas concrétisés. Dans mon département, la perception de la taxe d’aménagement destinée au CAUE est inférieure de 40 % au rapport de l’ancienne taxe. Des difficultés de gestion et de recouvrement semblent être à l’origine de cette situation.
En 2013, les départements n’ont perçu que les recouvrements liés aux seuls dépôts de permis de construire antérieurs à mars 2012. Les opérations postérieures à cette date n’ont fait l’objet de taxation que depuis quelques mois avec, à la clé, une incompréhension des personnes assujetties, de nombreuses demandes de dégrèvements, des risques d’impayés, de contentieux ou de disparition des redevables…
Dans les départements, les services compétents de l’État indiquent que ces retards sont liés à des contraintes techniques d’origine informatique ayant empêché le recouvrement.
Cela semble pour le moins incongru. Il en résulte une situation financière particulièrement préoccupante pour les CAUE, qui voient leurs ressources diminuer tandis que leurs charges, déjà minimes, sont difficilement compressibles.
Madame la ministre, quelle évolution des encaissements au titre de la taxe d’aménagement peut-on prévoir en 2014 et par la suite ? Au-delà, pouvez-vous éclairer notre assemblée sur la nature des difficultés rencontrées par l’administration dans ce dossier, difficultés qui s’apparentent à une forme de dysfonctionnement.
Monsieur le sénateur Pierre Camani, vous avez appelé mon attention sur la situation financière des conseils d’architecture, de l’urbanisme et de l’environnement, notamment celui du Lot-et-Garonne, à la suite des difficultés rencontrées par ces structures à l’occasion de la mise en œuvre de la réforme de la fiscalité de l’urbanisme.
Pour rappel, la mise en œuvre de cette réforme, entrée en vigueur le 1er mars 2012, s’est accompagnée du raccordement de l’application ADS2007 utilisée par mes services à l’interface CHORUS pour l’émission des titres à destination des redevables.
Malgré l’anticipation de l’administration, des difficultés techniques ont été rencontrées lors de ce chantier, difficultés inhérentes à tous les raccordements complexes d’outils informatiques dans un contexte interministériel. Elles sont à l’origine du report de deux mois de l’émission des titres de recettes, initialement prévue pour le mois de mai 2013.
Depuis la mi-juillet 2013, les difficultés ont été levées et les premiers titres ont été émis. À ce jour, environ 400 000 titres ont d’ores et déjà été pris en charge dans CHORUS.
S’agissant du département du Lot-et-Garonne, le montant prévisionnel estimé de la taxe d’aménagement pour 2014 est d’environ 1 642 000 euros.
Les services de la direction départementale du territoire du Lot-et-Garonne ont liquidé les dossiers jusqu’au 30 juin 2013. En outre, la reprise du stock de dossiers taxables se poursuit prioritairement.
Au 13 juin 2014, 571 302 euros ont été reversés au département du Lot-et-Garonne au titre de la taxe d’aménagement départementale – en 2013, il s’agissait de 19 227 euros et, en 2014, de 552 074 euros –, dont 163 229 euros au titre du CAUE.
À titre de précision, j’indique que la liquidation de la taxe départementale des conseils d’architecture, de l’urbanisme et de l’environnement, la TDCAUE, participera encore pour plus de 96 000 euros aux recettes du CAUE du Lot-et-Garonne pendant l’année 2014 et pour 91 000 euros au titre de l’année 2013.
Par ailleurs, j’attire votre attention sur le fait que le délai d’émission du titre de recettes afférant à la part départementale de la taxe d’aménagement est passé d’une échéance unique, avec paiement à douze mois, à deux émissions du titre de recettes à douze et vingt-quatre mois pour les sommes supérieures à 1 500 euros. Cela a entraîné, dans certains cas, une diminution des sommes à percevoir par les CAUE en 2013 au titre des permis délivrés après le 1er mars 2012.
Cette situation ne devrait plus exister dans les années à venir. Pour 2014, par exemple, le département percevra la seconde échéance relative aux permis de construire délivrés en 2012 et l’échéance unique, ou la première échéance, relative aux permis de construire délivrés en 2013.
Je vous précise en outre que le délai d’émission du titre de recettes ne doit pas être confondu avec le délai effectif de reversement aux départements. En effet, pour une estimation de la date des reversements, il convient de prendre en compte le délai entre la prise en charge du titre par le comptable public et la date d’exigibilité de l’impôt prévue par la réglementation fiscale, soit environ huit semaines, auquel il faut ajouter le délai de reversement à la collectivité.
Je tiens enfin, monsieur le sénateur Pierre Camani, à vous assurer que mes services sont prêts à examiner plus en détail avec vous le problème posé par ce nouveau dispositif de taxation des opérations d’aménagement et de construction, ainsi que la situation particulière de votre département.
Je vous remercie, madame la ministre, de vos explications complètes et précises.
Cette situation ne concerne d’ailleurs pas que le Lot-et-Garonne, département que vous connaissez bien, madame la ministre, et mes collègues présidents de conseil général ici présents auront, j’en suis sûr, entendu le caractère rassurant de vos propos.
La quasi-absence de recettes au cours de l’année 2013 a toutefois causé de sérieuses difficultés de trésorerie aux organismes concernés. Il y va aujourd’hui de la viabilité même des CAUE dans les départements.
Je note, à la suite des chiffres que vous venez de me communiquer, que l’année 2014 devrait permettre une forme de rattrapage, notamment au second semestre.
Il importe toutefois pour l’avenir que les conseils généraux et les CAUE puissent disposer d’une visibilité annuelle quant aux montants susceptibles d’être reversés au titre de la taxe d’aménagement, sous réserve bien entendu de la variabilité des bases taxables.
Enfin, s’agissant des ménages redevables, aujourd’hui appelés à recevoir des titres de recettes pour des opérations réalisées en 2012, je compte sur la qualité de notre administration fiscale pour éviter que de tels épisodes ne se reproduisent. Il y va, je crois, de la compréhension de notre système fiscal par les administrés et du consentement à l’impôt.
La parole est à M. Roland Ries, auteur de la question n° 803, adressée à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer ce matin l’attention du Gouvernement sur la pertinence d’une diffusion de Radio France internationale, ou RFI, à Strasbourg et dans quelques autres villes françaises.
Vous le savez, RFI est la seule radio publique française à traiter l’information largement à travers un prisme international.
Actuellement diffusée partout dans le monde et en Ile-de-France, cette radio accorde une place privilégiée à l’actualité européenne, à travers des reportages et des analyses, dans ses journaux et tranches d’information. L’Europe est aussi au cœur de trois magazines d’approfondissement : Accents d’Europe, Carrefour de l’Europe et Ici l’Europe.
À ce titre, madame la ministre, il serait à mon sens très opportun de diffuser cette radio à Strasbourg, ville où siègent le Conseil de l’Europe, la Cour européenne des droits de l’homme, le Parlement européen, l’état-major du Corps européen, le Médiateur de l’Union européenne, mais aussi divers organismes de coopération internationale. Par ailleurs, comme vous le savez, Strasbourg recevra bientôt – au 1er janvier 2015 – le titre d’« eurométropole ».
Strasbourg est donc une capitale européenne, dont les habitants sont particulièrement intéressés par les thématiques européennes et internationales. De plus, permettre à RFI d’émettre à Strasbourg constituerait, je pense, une reconnaissance concrète supplémentaire du caractère international de la ville que soutient le Gouvernement.
C’est pourquoi, madame la ministre, j’avais déjà adressé au Gouvernement une question écrite sur le sujet le 11 juillet 2013, relancée le 6 décembre dernier. Depuis, à savoir le 9 avril 2014, France Médias Monde, société holding à laquelle RFI appartient, a signé le 9 avril 2014 un contrat d’objectifs et de moyens avec l’État – le ministère de la culture et le ministère des affaires étrangères, entre autres, en sont signataires – dans lequel est inscrit le souhait d’émettre plus largement, et notamment à Strasbourg.
Je cite : « la richesse et l’originalité des offres de RFI [et] la nécessité de s’adresser aux diasporas [...] sont autant d’arguments pour l’élargissement de leur diffusion en FM en France métropolitaine. La recherche de fréquences pour RFI à Strasbourg, à Marseille, à Lyon et à Bordeaux par exemple [...] pourra être expertisée ».
Par ailleurs, le cahier des charges de France Médias Monde a récemment été modifié afin de permettre cette diffusion en France.
En conséquence, madame la ministre, je vous demande quel est l’état de vos réflexions sur cette question.
Monsieur le sénateur Roland Ries, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre de la culture et de la communication, qui m’a chargée de vous transmettre des éléments de réponse.
Mme Aurélie Filippetticonfirme tout d’abord que le Gouvernement accorde une grande attention à la promotion de l’idée européenne sur les antennes du service audiovisuel public.
Dans ce cadre, une diffusion de RFI à Strasbourg, métropole à l’identité fortement européenne, comme vous l’avez rappelé, pourrait trouver une certaine cohérence. C’est l’une des raisons pour lesquelles le décret du 27 janvier 2014 portant modification du cahier des charges de la société nationale de programme en charge de l’audiovisuel extérieur de la France permet désormais, en droit, à France Médias Monde de diffuser RFI à Strasbourg.
Par ailleurs, le contrat d’objectifs et de moyens 2013-2015 de France Médias Monde, sur lequel les commissions parlementaires compétentes ont donné un avis favorable, précise que « la recherche de fréquences pour RFI à Strasbourg [...] pourra être expertisée ».
Cependant, il n’existe pas aujourd’hui de fréquence disponible à Strasbourg pour une diffusion de RFI. La situation géographique de cette ville, limitrophe de l’Allemagne, constitue par ailleurs une difficulté supplémentaire à cet égard, compte tenu des possibles interférences avec les fréquences outre-Rhin.
De plus, dans un contexte budgétaire contraint, le contrat d’objectifs et de moyens accorde à France Médias Monde les moyens nécessaires non seulement à l’affirmation de l’identité de ses médias par l’enrichissement de leurs grilles de programme, mais aussi à la consolidation des antennes dans les zones d’influence prioritaires, lesquelles se trouvent au Maghreb, en Afrique et au Moyen-Orient.
Dans ce cadre, la diffusion de RFI à Strasbourg n’apparaît pas comme un objectif prioritaire, dont le coût devra être financé par redéploiement interne à France Médias Monde.
À plus long terme, la possibilité d’une diffusion de RFI à Strasbourg sur la radio numérique terrestre devra naturellement être examinée lorsque toutes les conditions pour la généralisation de cette technologie seront réunies.
Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse, même si votre conclusion n’est pas complètement satisfaisante. En effet, la ville de Strasbourg n’est manifestement pas considérée comme prioritaire dans les choix que vous avez évoqués. Vous nous renvoyez à des lendemains meilleurs avec la radio numérique terrestre, dont personne ne sait quand elle sera opérationnelle.
Je vous remercie néanmoins pour cette réponse, même si je déplore qu’il m’ait fallu poser une question orale pour l’obtenir : les deux questions écrites que j’avais précédemment posées à ce sujet n’avaient en effet obtenu aucun retour.
Je vous remercie donc par avance de bien vouloir transmettre aux membres du Gouvernement une demande – pour ne pas dire une récrimination –, d’ailleurs partagée par mes collègues : il doit être répondu aux questions écrites dans les temps en principe impartis à l’administration pour cela. Je n’aurais en effet pas eu besoin de poser cette question orale si ces délais avaient été respectés. Je compte donc sur vous pour transmettre ce message à qui de droit, madame la ministre.
La parole est à M. Joël Guerriau, auteur de la question n° 796, adressée à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai été saisi par les éditeurs, les bibliothécaires, les libraires mais aussi les auteurs et les illustrateurs mécontents du service appelé « sac de livres », fourni par La Poste, lequel a été convenu avec l’État au titre du soutien à la filière du livre.
Les professionnels de ce secteur effectuent régulièrement des envois de livres par voie postale pour honorer des commandes, mais aussi dans le cadre des collaborations utiles à leur profession.
Dans sa démarche de valorisation et de préservation de la lecture et de la culture au sens large, et tenant compte d’une économie du livre très vulnérable, l’État français a mené diverses actions de soutien à la filière du livre. Certaines sont bien connues, comme la loi Lang sur le prix unique du livre. D’autres, en revanche, sont souvent méconnues des professionnels du livre et de l’édition.
Parmi ces dernières mesures, La Poste SA a dû proposer un service spécifique pour les éditeurs et libraires, appelé « sac de livres ». Ce service consiste à expédier des colis de livres à des tarifs préférentiels, dans le but de soutenir l’activité des petites et moyennes structures, dont les coûts d’envois postaux, importants, alourdissent considérablement leurs charges. Cette procédure se révèle fastidieuse pour ce qui a trait à la préparation des colis. L’information sur cet accord, quant à elle, a été mal relayée auprès des bureaux de poste, lesquels, bien souvent, ne connaissent même pas l’existence de cette offre. L’information, en effet, est très difficile à trouver auprès des personnels de La Poste, eux-mêmes mal renseignés sur le sujet. C’est à croire que La Poste SA met tout en œuvre pour que ses clients n’utilisent pas ce service !
Les témoignages sont nombreux : les consignes et précautions supplémentaires ne sont pas respectées, et certains sacs de livres ne sont jamais arrivés à destination, ce qui représente une perte sèche pour les éditeurs et les libraires.
La valeur de ces colis de livres s’élevait à plusieurs centaines d’euros. Or, même avec un suivi de type « colissimo », service plus coûteux, l’indemnisation n’est ni garantie à hauteur du préjudice ni automatique.
Des réclamations ont été faites auprès des services postaux. Ceux-ci se disent profondément désolés de n’avoir pas retrouvé les sacs de livres, mais ne proposent aucune compensation. Reste alors aux réclamants la possibilité d’engager une procédure avec le médiateur du groupe La Poste. Néanmoins, cette médiation semble vouée à l’échec, car l’offre « sac de livres » n’inclut pas de suivi numéroté des colis, pas plus qu’aucune forme d’assurance.
En somme, La Poste se fait payer pour un service qu’elle n’effectue pas, ou bien qu’elle rendra peut-être, mais sans aucune garantie ! Le service n’est donc pas à la hauteur des attentes des professionnels, relayées par l’État.
Madame la ministre, les professionnels du livre doivent-ils renoncer à cette offre de prix mise en place par le gouvernement français dans l’intérêt de la culture ? Pour perfectionner ce service, pouvez-vous obtenir de La Poste une amélioration indispensable et efficace, en faveur d’une activité qui souffre ?
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre de la culture et de la communication, qui ne peut malheureusement être présente au Sénat ce matin. Je vais néanmoins vous transmettre les éléments de réponse qu’elle m’a communiqués sur ce sujet.
Au cours des dernières années, les professionnels du secteur du livre ont été pénalisés – vous l’avez rappelé – par l’évolution réglementaire ou tarifaire de certains services postaux, qui les ont contraints à recourir aux tarifs classiques de La Poste, alors qu’ils bénéficiaient jusqu’alors de tarifs spécifiques ou économiques.
L’offre commerciale dite du « sac de livres » a été créée pour permettre aux éditeurs d’effectuer, à un tarif préférentiel, des expéditions d’ouvrages en nombre et de favoriser ainsi la diffusion et la circulation du livre.
Cependant, les dysfonctionnements constatés laissent à penser que La Poste ne met pas actuellement en œuvre tous les moyens nécessaires pour faire connaître des professionnels susceptibles d’en bénéficier l’offre commerciale du « sac de livres » et pour garantir ce service sur l’ensemble du territoire.
Aussi, devant ce constat, Mme la ministre de la culture et de la communication s’engage à se rapprocher prochainement du président-directeur général de La Poste, afin de lui demander de prendre toutes les mesures nécessaires, d’une part, pour faciliter l’accès des professionnels du livre au service du « sac de livres », et, d’autre part, pour restaurer une qualité de service satisfaisant et uniforme sur l’ensemble du territoire.
Mais, au-delà de cette question, et dans le contexte d’un développement du marché de la vente de livres à distance – marché sur lequel les librairies indépendantes subissent la concurrence d’un opérateur qui dispose de capacités qu’elles n’ont pas pu négocier avec La Poste ou ses concurrents, c’est-à-dire des tarifs postaux extrêmement bas –, il nous semble qu’une réflexion plus globale devrait également être engagée, notamment sur les conditions d’amélioration des services proposés par La Poste aux éditeurs et aux librairies indépendantes, lesquels sont restés fidèles, en majorité, à l’opérateur historique de la distribution postale en France.
Le Gouvernement, vous le savez, a le souci de maintenir les conditions d’un équilibre entre les acteurs de la chaîne du livre, seule garantie du maintien de la diversité de la création éditoriale.
L’accès des librairies indépendantes au marché de la vente en ligne, d’une part, et le maintien de conditions permettant une diffusion optimale de la production éditoriale des éditeurs, d’autre part, constituent à ce titre des éléments déterminants.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Nous faisons le même constat. Le secteur du livre connaît en France une situation difficile ; chaque année, les éditeurs et libraires voient leurs ventes baisser : entre 3 % et 9 % sur les trois dernières années.
Il est donc extrêmement important que chaque mesure prise pour les aider, ainsi que les bonnes intentions manifestées par Gouvernement à leur endroit, puissent se traduire concrètement. C’est pourquoi j’insiste, d’abord, sur la nécessité de contraindre La Poste à bien vouloir informer les éditeurs et les libraires de l’existence de ce service, chose qui n’est pas faite aujourd’hui. Il est besoin, ensuite, de rendre possible la traçabilité des colis – c’est le cas avec colissimo –, en les numérotant. Enfin, il est important de garantir que le service, tel qu’il a été proposé aux clients, est bien rendu.
Les éditeurs et les libraires comptent beaucoup sur le Gouvernement pour faire respecter cette mesure. Si l’intention initiale était bonne, le dispositif n’est malheureusement pas suffisamment suivi par le Gouvernement. J’espère, dès lors, que Mme la ministre de la culture sera entendue par le président-directeur général de La Poste.
Mes chers collègues, avant d’aborder la question orale suivante, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix heures vingt, est reprise à dix heures vingt-cinq.
La parole est à M. Christian Bourquin, auteur de la question n° 775, adressée à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur un fait a priori anodin : les abeilles et leur mortalité.
La mortalité des colonies d’abeilles est en hausse constante depuis de nombreuses années. La responsabilité en incombe, à coup sûr, aux produits phytosanitaires et, dans une moindre mesure, à l’invasion du frelon asiatique.
Ce taux de mortalité n’est pas insignifiant. Dans le département des Pyrénées-Orientales, département qui, riche de ses 226 communes et 400 000 habitants, m’a élu sénateur, 1 300 ruches environ ont disparu au cours de l’hiver dernier. Et ce n’est, mes chers collègues, qu’un cas parmi d’autres !
Cette situation est dramatique, et la question que je pose aujourd’hui doit être entendue comme un cri d’alarme.
Les abeilles, sentinelles de l’environnement, jouent, chacun le sait, un rôle capital dans la préservation de la biodiversité. Si les solutions à apporter sur le plan environnemental reposent essentiellement sur les épaules de la ministre de l’écologie – je l’invite d’ailleurs à accorder à ce problème majeur toute son attention –, c’est sur vous, monsieur le ministre de l’agriculture, que nous comptons pour traiter la dimension économique de ce fléau.
Ce fléau, en effet, entraîne une forte diminution de la production de miel et remet en question le devenir des producteurs. Après une année 2013 déjà très difficile, les 3 400 apiculteurs de ma région – telle qu’elle existe aujourd’hui et continuera très certainement d’exister demain
Sourires.
Pourtant, il s’agit d’une filière d’une importance majeure pour le Languedoc-Roussillon, qui produit plus de 1 500 tonnes de miel chaque année, ce qui en fait la deuxième région française en la matière. Le chiffre d’affaires de la filière n’est pas anodin pour la région, puisqu’il représente une bonne dizaine de millions d’euros par an.
Bien entendu, monsieur le ministre, vous avez déjà entrepris certaines actions, à travers notamment le comité stratégique pour l’apiculture, qui devait investir environ 40 millions d’euros dans la filière.
Mais il y a un hic. J’ignore si ces fonds sont insuffisants ; je ne sais pas non plus s’ils ont été bien répartis ou non. Ce qui est certain, en revanche, c’est que ni les producteurs, ni les élus de ma région, ni moi-même n’avons constaté de changements de nature à nous rassurer sur ces investissements et sur la survie de la filière. Les apiculteurs sont plus que jamais inquiets pour leur avenir ; la fin des abeilles précipitera la chute des hommes.
Dès lors, monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer ce que vous comptez faire pour traiter ce problème d’apparence anodine, mais en réalité très complexe ?
Monsieur le sénateur – et président de conseil régional –, nous faisons les mêmes constats sur le rôle majeur des abeilles pour les écosystèmes et la biodiversité.
Au mois de février 2013, j’ai engagé un plan doté de 40 millions d’euros pour le développement d’une apiculture durable. Il s’agit de structurer la filière, d’engager des recherches sur les variétés d’abeilles, de mesurer les risques sanitaires que connaissent aujourd'hui ces insectes, de lutter contre les effets néfastes pour la préservation des espèces, de déclarer le frelon asiatique nuisible – avant mon arrivée au ministère, on ne pouvait pas lutter contre ce fléau – et d’organiser la production de miel en France, ce qui n’est pas le cas aujourd'hui.
Notre pays, qui consomme environ 40 000 tonnes de miel, en produit moins de 17 000 tonnes, et sa production est en baisse, ce que nous ne pouvons pas accepter, d’autant plus que nos importations proviennent non seulement de pays européens, mais également, et pour une part importante, d’autres régions du monde.
Nous devons donc redévelopper et restructurer la production de miel en France.
Pour en venir plus spécifiquement aux taux de mortalité des abeilles extrêmement importants, notamment dans le Sud, j’ai demandé que les épandages de phytosanitaires s’effectuent plutôt le soir, et non plus le matin. Certes, cela peut poser des problèmes aux agriculteurs, mais, et un avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail nous l’a confirmé, les abeilles, qui se repèrent par rapport au soleil le matin, sont directement touchées par les résidus déposés sur les différentes plantes ayant fait l’objet de traitements. Faire procéder aux épandages le soir est donc une avancée importante.
Ce matin, je vais présenter un grand projet sur l’agroécologie, avec un objectif de diminution des indices de fréquence de traitement phytosanitaire. Il s’agit, là encore, d’aller dans le sens de la préservation de la biodiversité.
Des mesures spécifiques restent à prendre pour faire face aux taux de mortalité récemment constatés, en particulier dans le sud de la France, par exemple en Ariège ou dans votre région. Certaines sont en cours, mais nous nous heurtons à certains obstacles. Des aides directes peuvent être versées. Nous essayons d’offrir un soutien à tous les apiculteurs qui en font la demande et de les aider à reconstituer les essaims qui ont été perdus.
Tout comme vous, je pense que le sujet n’a rien d’anodin. Un grand pays agricole comme la France doit aussi être un grand pays apicole. Les abeilles ont un rôle dans la pollinisation des arbres fruitiers et pour nombre d’autres productions agricoles comme les colzas. Il est nécessaire de les préserver et d’améliorer l’organisation. C’est l’objectif du plan.
Comme les 40 millions d’euros dont j’ai parlé partent dans la recherche ou dans l’organisation de la production, on ne les voit pas forcément, mais ils existent ! Nous devons, et c’est plus un projet à moyen terme, redresser la production de miel. La France ne peut pas continuer à perdre en tonnage et à importer, alors qu’elle a tout pour être une grande nation de production apicole et mellifère !
Monsieur le ministre, j’approuve l’ensemble de vos propos et je partage les ambitions qui sont les vôtres.
Toutefois, en tant qu’élu d’un département frontalier de l’Espagne, j’aimerais, sans le moins du monde sembler accuser nos voisins ibériques ou vouloir provoquer un incident dans cet hémicycle – appeler à une certaine vigilance. Des produits interdits en France, que nous utilisions par exemple voilà une dizaine d’années pour l’élevage des vaches, sont toujours commercialisés en Espagne, et il n’y a parfois qu’un kilomètre à faire pour se les procurer et s’en servir, ce qui crée d’énormes dégâts !
Tout cela mis bout à bout, cela commence à faire beaucoup… Continuons donc à agir ensemble, monsieur le ministre !
La parole est à M. Yves Daudigny, auteur de la question n° 792, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur l’impact des critères d’attribution retenus par la France pour les aides de la politique agricole commune à la filière des protéagineux, en particulier l’industrie agroalimentaire exploitant le pois. Le surcoût envisageable du fait de ces critères pour les matières premières fait peser une menace réelle sur les emplois du secteur.
En effet, dans le cadre de la définition des modalités de répartition des subventions provenant de la PAC, il a été décidé d’orienter l’enveloppe « protéagineux – luzerne déshydratée » vers le soutien à l’élevage, qui doit relever, nous en sommes pleinement conscients, de nombreux défis.
Néanmoins, une telle orientation a pour conséquence d’exclure de ce financement PAC les débouchés qui ne relèvent pas de la nutrition animale : nutrition humaine, cosmétologie, pharmacie, chimie du végétal...
Ainsi, lorsque le producteur vend à un acheteur autre qu’un éleveur, le prix se trouve bien souvent majoré de l’aide qu’il ne peut pas percevoir, entraînant donc un surcoût pour l’acquéreur, qui subit alors une charge nouvelle grevant sa compétitivité et pouvant nuire aux emplois du secteur.
De plus, l’acheteur a la possibilité de rechercher des approvisionnements hors de la zone d’application de la PAC, notamment au Canada, producteur majeur de pois. Cette hypothèse serait évidemment néfaste pour la filière pois, qui, d’une part, perdrait un segment de marché et, d’autre part, deviendrait monodébouché, donc plus vulnérable.
Tant pour la filière pois que pour l’industrie de transformation, l’accès à l’enveloppe « protéagineux – luzerne déshydratée », quel qu’en soit l’usage, nutrition animale ou humaine, serait un facteur important de maintien de l’emploi, agricole comme industriel.
Monsieur le ministre, j’ai évidemment en tête l’exemple du département de l’Aisne, terre agricole que vous connaissez bien, où la filière pois est développée, notamment autour de Vic-sur-Aisne, et constitue un secteur d’activité performant, un secteur d’avenir.
Aussi, je vous remercie de bien vouloir m’indiquer si le périmètre de l’aide dans le cadre de la PAC peut ou pourrait être élargi à l’ensemble de la production de pois, quel que soit son usage final, afin de préserver les emplois de la filière.
Monsieur le sénateur et président de ce beau département de l’Aisne, je voudrais d’abord répondre à une question stratégique.
Dans la négociation de la réforme de la politique agricole commune, j’ai obtenu un couplage des aides sur les protéagineux de manière générale, en l’occurrence 2 % du total des aides versées au titre du premier pilier, c'est-à-dire autour de 151 millions d’euros.
L’objectif, il faut en avoir conscience, est de limiter la dépendance de la France aux importations de protéines végétales en provenance du reste du monde. Vous connaissez notre niveau de dépendance, notamment vis-à-vis de l’Amérique latine. Je pense au soja ou aux OGM, importations auxquelles, j’en suis convaincu, vous ne devez pas être très favorable… Nous sommes donc bien obligés de construire une filière de production de protéines végétales destinées à l’élevage pour assurer notre autonomie fourragère. C’est notre axe stratégique.
Ce couplage de 2 % marque une volonté de renforcer l’autonomie de notre agriculture et de notre élevage, en réduisant leur dépendance aux importations. Au sein de l’enveloppe de 151 millions d’euros que je mentionnais, 98 millions d’euros sont destinés aux éleveurs ou aux producteurs en contrat direct avec un éleveur – nous sommes bien dans la stratégie –, 6 millions d’euros sont destinés aux producteurs de légumineuses fourragères pour le soutien à la production de soja, 8 millions d’euros pour la production de luzerne déshydratée, 4 millions d’euros pour la production de semences légumineuses fourragères et 35 millions d’euros pour la production de protéagineux : lupins, pois, féveroles.
Ainsi, avec cette enveloppe de 151 millions d’euros, nous avons bien fixé l’objectif de l’autonomie fourragère de la France, en ajoutant des aides couplées spécifiques pour un certain nombre de productions de protéagineux, en particulier le pois, sujet qui nous intéresse aujourd'hui, et ce pour l’alimentation animale comme pour l’alimentation humaine.
Simplement, s’agissant de cette enveloppe, il faut que nous puissions mesurer l’utilité d’une telle production pour l’autonomie fourragère. En même temps, vous voyez qu’il y a aujourd'hui 35 millions d’euros pour les pois et lupins. Nous avons donc bien le souci de préserver l’outil industriel qui existe, en particulier dans l’est de la France, pour ces productions transformées à des fins autres que la seule alimentation animale.
Cela dit, et chacun doit en avoir conscience, l’objectif d’autonomie fourragère de la France crée également des débouchés pour toutes les productions de protéines fourragères, dont je rappelle la grande importance.
La question de l’autonomie a systématiquement été posée dans les débats que nous avons eus au Sénat lors de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. On ne peut pas continuer à importer des milliers de tonnes de protéines fourragères sans se demander si ces productions n’iront pas ailleurs un jour ou si leurs prix n’augmenteront pas dans des proportions susceptibles de remettre en cause notre capacité de transformation !
Soyez dons rassuré : je vous ai donné les chiffres - 151 millions d’euros, dont 35 millions pour les pois et lupins - et je vous confirme que nous avons une véritable stratégie de moyen et de long terme pour l’autonomie fourragère de l’agriculture française.
Monsieur le ministre, je vous remercie de l’éclairage que vous avez bien voulu nous apporter. Nous ne pouvons que partager vos objectifs stratégiques, mais vous comprenez ma sensibilité quant au maintien d’emplois dans une filière tout à fait performante.
Je profite de l’occasion pour vous inviter à venir visiter le site du groupe Roquette Frères, dans le département de l’Aisne. Vous connaissez, je n’en doute pas, cette entreprise française particulièrement performante dans tout ce qui touche à l’utilisation du pois et fondée sur une recherche très approfondie.
Le site se trouve à Montigny-Lengrain, près de Vic-sur-Aisne. L’usine est moderne et complètement tournée vers l’innovation, vers la création d’emplois.
Les responsables du groupe pourraient vous y exposer leur savoir-faire, vous faire partager leurs grandes ambitions et, éventuellement, vous exprimer leurs craintes. Je puis vous assurer que vous seriez très cordialement accueilli.
La parole est à M. Robert Tropeano, auteur de la question n° 797, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Notre collègue Christian Bourquin ayant évoqué la mortalité des abeilles, j’aborderai pour ma part celle des platanes du sud de la France, particulièrement menacés depuis l’apparition du chancre coloré, en 2006.
Ces platanes sont plantés dans de nombreux villes et villages du sud de notre pays, notamment le long du canal du Midi, ouvrage construit par Pierre-Paul Riquet et qui relie Toulouse à Sète. Je le rappelle, l’ancien « canal royal du Languedoc », par ailleurs l’un des plus anciens canaux d’Europe, est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO et figure depuis 1997 sur la liste des grands sites de France. C’est un site unique, réputé pour ses voies navigables et l’ombrage de ses platanes, cette voûte arborée qui fait le bonheur des nombreux plaisanciers et touristes fréquentant notre région.
Or le chancre coloré, ce champignon microscopique, a déjà tué des milliers de platanes et en menace des milliers d’autres. Les abattages systématiques souvent préconisés sont un véritable crève-cœur, pour les habitants comme pour les élus, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’abattre des arbres qui n’ont pas l’air atteints par la maladie, pour éviter la contagion dans un rayon de cinquante mètres.
Depuis la découverte de cette épidémie, des solutions ont été proposées, mais elles ont suscité bien des déceptions : vaccin, traitement chimique, micro-injections de produits phytosanitaires ou plantation de « platanors », cette variété de platanes que nous pensions résistants au chancre ; malheureusement, une centaine de plants sont déjà morts.
Récemment, des protocoles d’essais thérapeutiques ont été soumis à l’approbation de votre ministère, seul susceptible d’accorder des dérogations au régime d’abattage réglementaire.
Monsieur le ministre, pourriez-vous faire le point de la situation et nous informer, alors que nos platanes bénéficient encore d’une trêve printanière à l’abattage obtenue par la Ligue de protection des oiseaux, de l’état de la recherche, des premiers résultats du protocole d’expérimentations en cours sur les arbres contaminés et des dernières décisions relatives au plan d’abattage des platanes centenaires ?
Monsieur le sénateur, cher Robert Tropeano, vous avez évoqué le crève-cœur que constitue l’abattage des platanes, en particulier dans le site classé du canal du Midi.
Jeune habitant d’un village du canton de Loué, j’ai moi-même assisté à la disparition des ormes il y a trente ans. Ces arbres extrêmement beaux étaient l’un des piliers du bocage sarthois tel que je l’ai connu. Des tentatives ont été faites pour implanter des ormes d’ornement résistants mais, globalement, dans le bocage, cette espèce, même si des rejets de temps en temps apparaissent, a aujourd’hui pratiquement disparu.
L’attaque du platane par le chancre coloré représente, comme vous l’avez souligné, un vrai drame.
Vous m’avez interrogé sur les mesures de prévention en cours, en rappelant le traumatisme – je partage tout à fait ce constat – que constitue l’abattage. Il faut effectivement trouver des alternatives.
La seule chose que je peux vous dire, c’est qu’il y a eu plusieurs projets d’expérimentation et, d’après mes services, l’un d’eux, les micro-injections de fongicides, que vous avez vous-même évoquées, semble prometteur.
Un protocole est en cours d’examen par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES. Je dois attendre les conclusions de l’Agence afin d’autoriser la mise en œuvre de ce protocole. Il s’agit de trouver une alternative à ce qui est aujourd’hui la solution radicale, l’abattage systématique des platanes malades, lequel s’accompagne aussi de l’abattage des arbres environnants afin d’éviter la diffusion de la maladie. Cette méthode de prophylaxie, j’en ai parfaitement conscience, est elle-même extrêmement traumatisante.
Nous devons donc trouver d’autres solutions. Ces micro-injections de fongicides, je le répète, sont aujourd’hui en cours d’examen par l’ANSES. Dès que nous aurons obtenu l’autorisation pour le protocole, je le signerai et nous mettrons en œuvre, le plus rapidement possible, des méthodes alternatives à l’abattage pour préserver le paysage, l’image du Midi et surtout cet arbre magnifique qu’est le platane.
La recherche avance. L’ANSES, d’après les informations qui m’ont été transmises, semble avoir un protocole assez promoteur. Faisons vite – et c’est ce que je ferai – afin que tout soit mis en œuvre pour sauver les platanes !
Monsieur le ministre, vous avez évoqué les ormes. Dans ma commune, il y en avait énormément, ils sont tous morts et ont été remplacés, il y a une centaine d’années, par des platanes… Aujourd’hui, c’est au tour des platanes d’être malades !
Je voudrais insister sur un point qui me semble primordial : la nécessité absolue d’une concertation permanente avec tous les élus concernés par l’abattage de ces platanes.
Si l’abattage – comme vous l’avez souligné – est un traumatisme pour les riverains, ses conséquences sur l’activité des acteurs économiques liés au tourisme ne sont certainement pas évaluées à leur juste valeur. La défiguration des paysages, dépossédés de ces arbres séculaires, impacte des lieux touristiques majeurs, comme je l’ai dit pour le canal du Midi, mais également des centres-villes très fréquentés par les touristes.
Aussi, monsieur le ministre, j’espère, après votre réponse, que nous arriverons à terme à sauver nos platanes, non seulement pour notre environnement mais aussi pour l’ensemble des touristes et des habitants de cette région.
La parole est à M. Ambroise Dupont, auteur de la question n° 798, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur l’avenir des étalons nationaux de courses et de sport.
La politique de l’État en matière de cheval a été réformée au début de l’année 2010. Les Haras nationaux et l’École nationale d’équitation ont fusionné pour créer un établissement public administratif, l’Institut français du cheval et de l’équitation, l’IFCE, recentré sur des missions de service public.
En outre, un groupement d’intérêt public, France-Haras, a été chargé des missions techniques relevant du domaine concurrentiel et nécessitant une implication de l’ensemble des professionnels de la filière.
La création de France-Haras, dans lequel l’État restait majoritaire, avait pour but d’accompagner le transfert de l’étalonnage public vers le secteur privé. Après seulement quelques années d’un fonctionnement difficile, comme tout le monde le sait, il a été décidé de mettre un terme aux activités du GIP France-Haras et de céder ses actifs.
Ainsi, il a été proposé de vendre aux enchères publiques le parc des étalons nationaux, dont la qualité de reproducteurs avait pourtant été mise en évidence, tant par le testage que par la confiance des éleveurs.
Avec ces ventes au plus offrant, ce serait pour les meilleurs géniteurs de course et de sport, le patrimoine génétique français, longuement sélectionné, qui serait disséminé au-delà de nos frontières.
Pourtant, des alternatives aux enchères existent. Elles sont portées par la plupart des représentants de la filière, notamment le Cheval français, France-Galop, le Selle français, l’Association nationale anglo-arabe et d’autres encore.
Elles consistent en la réaffectation des étalons propriété de l’État à l’IFCE, puis en la soumission d’un plan de reprise par les associations nationales de races des étalons qui présentent un intérêt génétique pour l’élevage français. Seuls les étalons sans intérêt majeur seraient proposés à la vente.
Ce projet viable aurait, en outre, l’avantage de ne créer aucune charge pour l’État, sous forme financière ou en termes de ressources humaines. Tous les frais seraient assumés par les repreneurs moyennant le reversement à l’IFCE d’un pourcentage sur le chiffre d’affaires de la génétique encaissé.
Il faut, enfin, rappeler que, pour les étalons de trait, le transfert aux associations nationales de races est déjà engagé.
Je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, de bien vouloir nous indiquer quelles sont vos intentions sur le sujet. Il me semble important de mettre en place, en concertation avec les services du ministère de l’économie et des finances, un groupe de travail chargé de l’avenir des étalons sur la base des propositions des socioprofessionnels et des associations nationales de races.
Le temps presse, car les premières ventes sont inscrites dès la fin des jeux mondiaux.
Monsieur Ambroise Dupont, je connais votre attachement à la filière du cheval de manière globale, la qualité du travail que vous avez conduit depuis de nombreuses années et le souci qui est le vôtre de préserver le modèle français, notamment sa capacité à continuer d’offrir les meilleurs chevaux du monde.
Sur la question posée, je précise que les modalités de cession des étalons de sang ont été définies par le conseil d’administration du groupement d’intérêt public France-Haras le 20 mars 2014 : il a été décidé de procéder à la vente de ces étalons selon la procédure d’enchères publiques.
En effet, le devenir des étalons doit résulter d’une procédure conforme aux règles de la concurrence. Une mise à disposition des étalons, sans mise en concurrence, à un opérateur qui aurait ensuite une activité économique d’étalonnage n’entre pas dans ce cadre et serait considérée comme une aide d’État illégale. On est là dans le droit de la concurrence européen. C’est vrai que cette question nous est posée.
Je rappelle que cette décision du retrait des Haras nationaux de l’activité d’étalonnage public a été prise en 2009. Le GIP France-Haras a été créé pour accompagner le retrait progressif de l’État de cette activité concurrentielle, en associant dans ses organes de gouvernance des représentants de l’État et des professionnels, notamment les associations nationales de races de chevaux de courses – France-Galop et la Société d’encouragement à l’élevage du cheval français – et de certaines races de chevaux de sport.
Bien qu’envisagée initialement, la reprise collective par les professionnels de l’activité génétique et des services qui y sont associés n’a pu aboutir – je me souviens effectivement que, lors des débats que nous avons eus sur l’avenir des Haras nationaux, aucune solution n’avait vraiment été trouvée de ce côté-là –, ceux-ci n’ayant pas jugé la solution pertinente lors du conseil d’administration du GIP France-Haras du 20 juin 2013. C’est vrai que l’on a là une difficulté. Dans l’idéal, ce serait tout à fait possible ou souhaitable, mais, dans la réalité, cela ne se passe pas ainsi.
Le rôle essentiel qu’auraient eu les éleveurs dans la valorisation de ces étalons, en décidant de faire saillir leurs juments par ces étalons sans que ces derniers aient démontré la qualité de leur descendance, n’est pas un argument recevable, aujourd'hui, en l’état.
L’offre d’étalonnage public ne s’est jamais limitée à de jeunes animaux ou à des animaux dont la qualité aurait été totalement inconnue. L’ascendance et les résultats en compétition étaient régulièrement publiés.
Dans un environnement concurrentiel, le prix d’une saillie prend toujours en compte les caractéristiques du produit, notamment la notoriété de l’individu ou la qualité de sa production.
Le fait d’utiliser un bien ou un service auprès d’une entreprise ne donne aucun droit sur son capital, et ce quel que soit le secteur d’activité considéré.
Enfin, le parallèle établi entre les chevaux de sang et les chevaux de trait n’est pas, en l’état actuel, pertinent. D’une part, la procédure retenue pour la vente des étalons de trait est bien une vente, et n’est en aucun cas une location. D’autre part – et surtout –, le marché des étalons de trait n’est pas marqué, comme celui des étalons de sang, par une volatilité et une individualisation très forte des prix, ce qui permet de connaître de manière fiable la valeur du stock d’étalons sans passer par une étape de mise sur le marché. Cela permet donc de proposer aux associations des races concernées de les acheter à cette valeur.
Cela étant dit, monsieur le sénateur vous m’avez proposé une réunion spécifique sur ce sujet. Au vu du dossier, je suis d’accord pour que nous nous rencontrions et que nous discutions ensemble de ces questions afin de voir où nous en sommes, comment nous pouvons améliorer les choses en tenant compte de cette dimension génétique, qui fait toute la valeur du cheptel français, en particulier en ce qui concerne les étalons de sport.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui me satisfait totalement. Je me félicite notamment de votre proposition d’organiser une réunion.
Je sais que les visions sur le sort de France-Haras ont divergé au fil du temps. Je vous rappelle toutefois que, si les socioprofessionnels ont bien été associés à certaines décisions et ont rejeté la mise en place d’une structure nationale proposée par l’administration, ils ont également refusé de participer au vote concernant le sort des étalons. Leur demande d’audition auprès du ministère de l’agriculture – mais vous venez d’y répondre favorablement – pour évoquer des propositions alternatives semblait être restée lettre morte. Ils ont été reçus, cependant, par les sénateurs de la section « cheval » du groupe d’études de l’élevage, section que je préside.
Le risque que vous évoquez d’un contentieux sur la base du non-respect des règles de la concurrence, en cas de mise à disposition des étalons nationaux de courses et de sport aux associations nationales de races, apparaît limité puisque, s’agissant des étalons de trait, le transfert aux associations nationales de races a déjà été engagé, sans difficulté, avec l’accord de l’État. De plus, il ne s’agira pas d’une « mise à disposition gratuite », puisqu’elle sera assortie d’une rétrocession financière au bénéfice de l’État.
Je crois nécessaire, pour l’avenir de l’élevage français, d’agir en commun – je vous remercie de l’accepter –, socioprofessionnels et administration, afin d’éviter que ne soient dispersés en ventes publiques nos étalons nationaux de courses et de sport.
À l’heure où la France se mobilise pour sauvegarder ses productions, vous le savez mieux que quiconque, monsieur le ministre, il ne paraît pas souhaitable que nos meilleurs reproducteurs soient achetés par des stud-books étrangers.
La solution de reprise in fine par les associations nationales de races représente, à ce jour, une solution raisonnable et conforme à l’intérêt de tous les acteurs. Elle préserverait le patrimoine génétique en épargnant les finances publiques. Le groupe de travail que vous proposez sera bienvenu pour évoquer des solutions alternatives à cette vente qui serait, naturellement, définitive.
La parole est à M. Jacques Berthou, auteur de la question n° 804, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur la mise en place de prestations viniques lors de chaque vendange et, en particulier, sur l’obligation de distiller les sous-produits de la vinification.
Tous les viticulteurs qui produisent plus de 25 hectolitres sont en effet soumis à cette obligation, qui concerne les marcs, les bourbes, les déchets, les levures mortes, les dépôts et les lies.
Dans l’Ain, vingt communes peuvent détruire les marcs, mais il reste les bourbes et les lies. La distillation de ces sous-produits pose problème car, dans ce département, il n’existe plus qu’un seul distillateur ambulant et il n’y a plus aucune distillerie.
Pour être en conformité avec la loi, les viticulteurs doivent se rendre dans d’autres départements viticoles, tels que le Rhône, la Saône-et-Loire ou la Côte-d’Or, pour procéder à la distillation de leurs produits. Ces transports ont des coûts, qui ne sont pas compensés par la valorisation de la distillation.
Si les viticulteurs ne peuvent pas démontrer qu’ils ont effectué les prestations viniques imposées par la loi, ils risquent d’être lourdement pénalisés.
Les viticulteurs du département de la Haute-Savoie bénéficient d’une dérogation à l’obligation de destruction des sous-produits. Les motifs de l’autorisation qui leur a été accordée pourraient également être retenus pour le département de l’Ain : éloignement des lieux de distillerie, absence de distillateur ambulant, éparpillement des vignobles.
Aussi, je vous demande, monsieur le ministre, dans quelle mesure les viticulteurs de l’Ain pourraient bénéficier, dès les vendanges de 2014, de la dérogation à l’obligation de traiter les sous-produits de la vinification, au même titre que les viticulteurs de Haute-Savoie.
Monsieur le sénateur, cher Jacques Berthou, vous posez une question extrêmement technique et précise sur le traitement des sous-produits de la vinification, notamment les marcs de raisin.
En la matière, la réglementation est communautaire. Elle interdit le surpressurage des raisins. Les États membres peuvent imposer à tous leurs producteurs, ou à une partie d’entre eux de livrer, aux fins de distillation, une partie ou la totalité des sous-produits de la vinification sur la base de critères objectifs et non discriminatoires. C’était le cas en France, où une obligation de livrer les sous-produits à la distillation s’imposait aux viticulteurs avec quelques dérogations pour tenir compte de l’absence de distilleries dans certaines régions.
Une expérimentation sur la valorisation des sous-produits a été menée de 2010 à 2012. Cette expérimentation a confirmé le rôle et l’intérêt du recours aux distilleries viticoles, et a également permis d’évaluer d’autres voies d’élimination des sous-produits, qui peuvent constituer, dans certains cas, une opportunité économique pour les producteurs.
Après une analyse juridique et technique du dispositif en vigueur et au terme de l’expérimentation, il est apparu nécessaire d’adapter la réglementation nationale. L’objectif est de fournir un cadre sécurisé et pérenne qui permette à chaque exploitation viticole de trouver une voie d’élimination des sous-produits adaptée à sa situation.
Ce nouveau cadre prévoit plusieurs possibilités pour éliminer les sous-produits de la vinification : la livraison à la distillation ou à un centre de méthanisation – j’y tiens, car la matière organique, donc le méthane, constitue un potentiel énergétique que l’on ne peut plus perdre –, la méthanisation ou le compostage sur l’exploitation, l’épandage sur l’exploitation ou sur celle de tiers.
Les viticulteurs qui choisiraient une autre voie que la distillation auront des obligations en matière de pesée ou d’analyse afin de permettre le contrôle des dispositions de la réglementation européenne.
La nouvelle réglementation ne prévoit pas de traitement différencié entre producteurs sur la base d’un zonage géographique. Les viticulteurs du département de l’Ain pourront ainsi choisir, comme les autres viticulteurs des autres départements, la voie d’élimination des sous-produits qui répond le mieux à leur situation. Je le redis, la distillation n’est pas la seule voie envisageable ; d’autres solutions peuvent être expérimentées, dont certaines sont, à mes yeux, très importantes.
Le Gouvernement confirme son objectif d’une publication rapide des textes relatifs à l’élimination des sous-produits, afin que le cadre national rénové soit d’application dès la récolte 2014.
Monsieur le sénateur, votre question est très utile : elle m’invite à me pencher, ce que je ferai avec diligence, sur ce sujet précis, alors que, en matière viticole, mes préoccupations du moment portent plutôt sur les questions liées au moût concentré et au moût concentré rectifié. Je vérifierai que la nouvelle réglementation sera bien appliquée rapidement, afin que les producteurs de l’Ain puissent faire le choix le mieux adapté à leur situation entre la méthanisation, l’épandage ou la distillation.
Monsieur le ministre, je vous remercie tout particulièrement de votre réponse et des précisions que vous venez d’apporter.
Effectivement, les viticulteurs de l’Ain sont dans l’attente de cette réglementation que vous allez très rapidement mettre en œuvre. Nous devons adapter certaines dispositions en fonction des critères économiques et surtout techniques propres à nos territoires. En matière viticole, on ne peut, par exemple, comparer l’Ain à la Saône-et-Loire, département que je connais bien, mais sans doute beaucoup moins bien que notre président de séance… §
M. le président. C'est un département que je connais en effet très bien : nous pourrions en discuter tous les trois !
Nouveaux sourires.
Cela étant, mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à onze heures cinq, est reprise à onze heures vingt.
La parole est à Mme Catherine Génisson, auteur de la question n° 801, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre présence, en cette période difficile.
Je souhaite attirer votre attention sur l’annonce, par la direction de la SNCF, de la réduction du cadencement des lignes TGV entre Arras et Paris, via la suppression des trains de dix-sept heures vingt-deux et de dix-huit heures vingt-deux.
Je veux témoigner ici de la mobilisation des collectifs d'usagers et de très nombreux élus, au-delà de leur engagement partisan, contre cette nouvelle menace de suppression de trains, qui porte atteinte à la qualité de la mobilité.
Face à ces inquiétudes légitimes, des rencontres avec la direction de la SNCF ont été demandées par les différents élus, mais elles n'ont abouti à ce jour qu'à la réaffirmation de la décision.
La SNCF entend désengorger la Picardie et améliorer la fluidité des trains à partir de la gare du Nord. Toutefois, en amont, aucune concertation n'a été menée avec les différents acteurs, qu’il s’agisse des élus, des représentants du monde économique ou des usagers de la région Nord - Pas-de-Calais.
Au-delà des convictions partisanes, les élus territoriaux, avec les parlementaires, sont extrêmement déterminés à défendre la qualité de la mobilité, source, en particulier, de développement économique de notre territoire. Le Nord - Pas-de-Calais, fort de ses 4, 5 millions d'habitants et situé au cœur de l'Europe, est une véritable « région ferroviaire », avec les industries ferroviaires, le Centre d'essais ferroviaire ou encore le lancement du pôle d'excellence ferroviaire régional.
De plus, s’il se réalisait, le projet de suppression des deux TGV Paris-Arras télescoperait les choix stratégiques et innovants de notre région en matière de transition socio-économique : je pense, en particulier, au Master plan de la troisième révolution industrielle, mais aussi au Louvre-Lens, ainsi qu’à l’accueil prochain des réserves du Louvre. Cette « restructuration négative » serait particulièrement néfaste pour l’attractivité socio-économique de l’Arrageois et, au-delà, de toute notre région, les TGV menacés permettant à l’heure actuelle la « migration pendulaire », en fin d’après-midi, de nombreux travailleurs.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez entendu ma détermination, mais aussi ma volonté d’engager un dialogue constructif avec l'ensemble des acteurs pour élaborer des solutions pérennes.
Aussi, ma question est simple : quelles sont vos solutions concernant cette situation ô combien délicate ?
Madame la sénatrice, chère Catherine Génisson, vous savez que je suis ce dossier avec la plus grande attention. J’en avais été saisi avant que vous ne posiez votre question, ce qui montre combien la mobilisation est forte autour de ce projet.
Actuellement, douze TGV permettent chaque jour d’aller de Paris à Arras, trains qui sont ensuite prolongés vers Dunkerque, Valenciennes ou Lille, et autant de trajets retours. Cependant, la SNCF constate que la gare du Nord est saturée et que le trafic vers la Picardie explose – au reste, c’est vrai de l’ensemble du trafic au sein de la grande région parisienne –, avec une augmentation de 35 % en dix ans, ce qui pose un problème général d’accès à cette gare.
Dans ces conditions, la SNCF a annoncé qu’elle projetait de supprimer, dans le service annuel 2015, deux des douze TGV quotidiens pour Arras, afin de dégager des capacités au profit de la Picardie, dont le trafic est saturé. Cette évolution se traduirait par une diminution des dessertes pour Arras, même si, par l’utilisation de rames jumelées, la capacité de transport serait maintenue et le niveau de desserte pour Valenciennes et Dunkerque ne serait pas modifié.
Madame la sénatrice, je connais la grande mobilisation de l’ensemble des élus de ce territoire, et j’ai pleinement conscience que la suppression annoncée n’est pas envisageable au regard de la qualité de service, notamment pour les usagers arrageois. Dès lors, il faut que la SNCF, tout en prenant en compte la situation de la gare du Nord, que l’on ne saurait méconnaître, fasse évoluer son projet, en pleine concertation avec l’ensemble des élus du Nord - Pas-de-Calais et de Picardie.
Cette concertation est une nécessité, et je l’ai demandée au président de la SNCF lui-même. Pour m’entretenir avec lui régulièrement, et même plusieurs fois par jour en ce moment, …
… l’occasion m’a été donnée de lui rappeler et de lui dire combien je souhaitais que la SNCF revoie le dispositif annoncé : si le problème est connu, la réponse qui lui est donnée n’est, pour l’heure, pas satisfaisante. La situation doit faire l’objet d’une approche réaliste et des solutions de substitution, sur la base des taux de fréquentation, doivent être trouvées. Nous devons y travailler ensemble, avec les instances de la SNCF. Dans ce cadre, les élus doivent être réunis cet après-midi même.
Madame la sénatrice, soyez assurée que je veillerai avec une extrême attention à ce que des solutions alternatives tenant compte des enjeux, au profit du territoire, puissent être suivies d’effets.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie beaucoup de votre réponse. Elle prouve votre détermination à permettre qu’une solution satisfaisante soit trouvée.
Pour ce qui concerne la proposition de la SNCF, à savoir le doublement de certains trains, il me semble qu’il ne suffit pas de raisonner en termes de capacité : nous devons aussi veiller à la qualité des transports et du service public que l’on apporte aux voyageurs.
Des pourparlers avec la SNCF sont envisagés. D’ailleurs, la réunion doit avoir lieu jeudi, et non cet après-midi – cela dit, on peut comprendre que votre planning soit actuellement surchargé !
Sourires.
Nous restons vigilants et j’espère que nous parviendrons à trouver une solution satisfaisante pour l’ensemble des partenaires concernés : la région Nord - Pas-de-Calais, la région Picardie et les représentants de la gare du Nord, qui doit être désengorgée.
La parole est à Mme Sophie Primas, auteur de la question n° 787, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Monsieur le secrétaire d’État, j’ai souhaité attirer l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la suppression, dans le cadre de la loi de finances pour 2012, du dispositif visant au prélèvement, sur les recettes de l’État, d’un tiers du produit de la taxe générale sur les activités polluantes dite « granulats » au profit, principalement, des communes directement impactées par les activités liées à l'extraction des matériaux issus de carrières.
Malgré la volonté politique initiale exprimée par le Parlement – de mémoire, il s’agissait d’un amendement de M. Carrez –, il a été considéré – je vous laisse deviner qui se cache derrière ce « il »… – que ce mécanisme ne pouvait être mis en œuvre en l'état, compte tenu de la difficulté à quantifier les risques et inconvénients induits par la proximité d'un site d'extraction.
Force est de constater que, même si les carriers réalisent d’importants efforts pour redonner, au terme de l’exploitation, leurs droits à la nature, voire à l’agriculture, les collectivités territoriales concernées subissent incontestablement de multiples nuisances.
Celles-ci sont notamment liées au traumatisme sur le paysage naturel, aux poussières générées, aux passages de nombreux camions et, in fine, à la dévalorisation des biens. Dans la vallée de la Seine, en particulier dans le département des Yvelines, où la nature du sous-sol est favorable à l’installation de carrières, nous connaissons parfaitement cela. Or, si l’unité de traitement des granulats n’est pas située sur le territoire de la commune d’extraction, cette dernière ne perçoit pas de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et ne dispose donc d’aucune contrepartie, ce qui semble pour le moins injuste.
Aussi, l’argument d’une quelconque complexité fiscale ne peut être la seule réponse à la détresse des communes, alors que l’exploitation de carrières est nécessaire afin d’alimenter le BTP.
Par conséquent, monsieur le secrétaire d’État, même si cela n’entre pas tout à fait dans le champ des responsabilités qui vous ont été confiées, je vous demande de bien vouloir m’indiquer dans quelle mesure le Gouvernement peut répondre à ces attentes et proposer, pour les communes concernées, un partage plus juste de la fiscalité.
Madame la sénatrice, vous interrogez Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Ne pouvant être présente, elle m’a chargé de vous répondre.
L’article 139 de la loi de finances pour 2011 a prévu un prélèvement sur recettes spécifique concernant la taxe générale sur les activités polluantes des matériaux d’extraction, dite « TGAP granulats », qui devait entrer en vigueur en 2012.
Cet article prévoyait le prélèvement sur les recettes de l’État d’un tiers de la taxe au profit des collectivités territoriales. Cette initiative avait notamment pour objectif de compenser les diverses nuisances générées par l’implantation de carrières dans les communes et, ainsi, en faciliter l’acceptation par la population.
Il a été constaté que les mécanismes de répartition du prélèvement sur recettes prévu par la loi ne paraissaient pas à même de produire l’effet de levier escompté.
La disposition prévoyait qu’au moins la moitié du prélèvement soit répartie au profit des communes accueillant des sites d’extraction, le solde revenant aux communes concernées par les risques et inconvénients causés par l’extraction des matériaux. Or la disposition concentrait fortement le dispositif sur les communes d’accueil, qui bénéficient déjà des effets positifs que ces implantations engendrent en termes d’activité économique et d’emploi. S’agissant des communes qui n’accueillent pas de site, leur éligibilité était subordonnée à la démonstration de l’existence de « risques et inconvénients causés par l’extraction desdits matériaux ».
Cependant, il est apparu particulièrement difficile de définir de manière objective des critères permettant de quantifier ces risques et inconvénients. L’article 35 de la loi de finances pour 2012 a donc abrogé les dispositions prévues par l’article 139 susmentionné et son article 43 a traduit cette suppression par l’annulation de la dotation qui devait être destinée à la protection de l’environnement ou à l’entretien des voiries municipales. Aucune évolution à court terme n’est envisagée concernant la TGAP sur les matériaux d’extraction.
Néanmoins, madame la sénatrice, dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie nationale pour la gestion durable des granulats terrestres et marins et des matériaux et substances de carrière, une réflexion sera menée sur la fiscalité de cette production. Votre interpellation pourra alors trouver un prolongement, puisqu’un certain nombre d’interrogations demeurent sur la répartition permettant de compenser les effets directs et indirects de l’exploitation de carrières.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Je me félicite qu’une réflexion soit menée par le Gouvernement.
Certes, il est très complexe de mesurer les risques ou les inconvénients qu’entraîne la présence d’une carrière dans une commune. Néanmoins, pour les habitants comme pour les élus de ces collectivités territoriales, la nuisance est réelle, que l’on pense seulement à la destruction du paysage. Je ne vois pas d’équation fiscale ou mathématique permettant de calculer le préjudice résultant d’une modification substantielle du paysage. En revanche, c’est une évidence : il y a bien préjudice sur le paysage.
Je suis très intéressée par la réflexion qui va être engagée et serais volontaire pour participer à ce groupe de travail. En tant qu’élue du département des Yvelines, riche de carrières potentielles, je me sens en effet particulièrement concernée.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à onze heures cinquante.
La parole est à Mme Laurence Cohen, auteur de la question n° 802, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de nous avoir rejoints.
En novembre 2012, l’université portugaise privée « Fernando Pessoa » ouvrait une antenne consacrée à la santé – pharmacie, odontologie et orthophonie – près de Toulon. En septembre dernier, une nouvelle antenne ouvrait, cette fois à Béziers, et une autre était prévue en région parisienne.
Rebaptisées entre-temps CLESI - pour centre libre d’enseignement supérieur international-, ces structures ne sont pas sans poser problème quant à leurs objectifs et leur fonctionnement, sur deux points essentiels.
J’évoquerai en premier lieu le mode de sélection.
Alors que l’accès aux universités publiques de santé se fait sur concours, garant d’un niveau universitaire de qualité, l’entrée au CLESI se fait au contraire sans concours, et uniquement moyennant paiement de frais d’inscription exorbitants, qui oscillent autour de 9 500 euros l’année.
Il s’agit d’une véritable sélection par l’argent, qui met à mal le principe fondamental d’égal accès de toutes et tous à l’enseignement supérieur. Les étudiants les plus aisés n’ayant pas réussi le concours donnant accès aux études médicales et paramédicales sont les principales cibles du CLESI.
Outre la question de la marchandisation de l’enseignement supérieur, cela nous inquiète fortement sur la qualité des formations suivies par de futurs professionnels de santé.
En second lieu, le CLESI contourne le principe même du nume rus clausus, qui régit les professions de santé en France, puisque le CLESI ne délivre pas de diplôme en France, bien qu’installé sur notre territoire.
Ces deux points sont déterminants quant à l’avenir de notre système universitaire.
La loi que vous avez fait adopter le 22 juillet 2013, relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, encadre désormais de manière stricte les centres privés d’enseignement supérieur : elle leur impose l’obtention d’une double accréditation des ministères de la santé et de l’enseignement supérieur, ainsi que la signature d’une convention avec une université et un centre de soins pour la réalisation des stages cliniques.
Or le CLESI ne respecte pas ce cadre légal en invoquant le principe de non-rétroactivité de la loi et, malgré quelques aménagements pour tenter de se conformer à ces exigences, il continue à délivrer ses formations hors de l’accord des tutelles ministérielles.
Avant le dernier remaniement ministériel, un décret était en cours de publication pour mettre en place une procédure d’agrément des formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie, de maïeutique et des formations paramédicales dispensées au sein d’un établissement d’enseignement supérieur privé.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous m’indiquer quand sera publié ce décret et quelles décisions vous comptez prendre pour fermer le CLESI et empêcher le développement de ce genre de structures, dans l’intérêt de notre système universitaire et de notre système de santé ? Enfin, quelles solutions proposez-vous pour les étudiants qui en sont aujourd’hui les victimes ?
Madame la sénatrice, je vous remercie de ces questions, qui sont d’importance pour la formation des futurs praticiens de santé.
Vous avez attiré mon attention sur l’ouverture à Toulon, en novembre 2012, puis à Béziers, en septembre 2013, d’une antenne de l’université portugaise privée « Fernando Pessoa », consacrée principalement aux études de santé.
Dès cette annonce, j’ai immédiatement et systématiquement réagi en demandant aux rectrices des académies de Nice et de Montpellier de déposer, au nom du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, une plainte auprès du procureur de la République pour usage abusif du terme « université » et non-respect des règles du régime de déclaration préalable nécessaire pour l’ouverture de ce type d’établissement, notamment s’agissant du défaut de dépôt d’informations documentées auprès des rectorats permettant de présenter réellement l’offre de formation ainsi que les conditions d’accueil des étudiants. Je pense ici au paiement de droits d’inscription exorbitants, mais aussi à l’obligation pour les étudiants de poursuivre leurs études au Portugal, alors même que ces derniers, à qui on avait caché cet aspect des choses, pensaient effectuer la totalité de leur cursus en France.
Cependant, l’ouverture de l’établissement de formation privé intitulé initialement « centre universitaire Fernando Pessoa », puis, à la suite de mon intervention pour que le mot « universitaire » disparaisse, « centre libre d’enseignement supérieur international », à La Garde, près de Toulon, puis à Béziers, a mis en évidence la faiblesse de la procédure proposée pour l’accréditation de ce type d’établissements. Il convenait donc de modifier la législation.
C’est pourquoi la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche du 22 juillet 2013 a modifié les conditions d’ouverture et d’accréditation des établissements de ce type.
L’article L. 731-6-1 du code de l’éducation prévoit désormais que les établissements privés de ce type signent une convention avec un établissement de santé, ainsi qu’une convention avec une université comprenant une composante dispensant un enseignement de médecine, de pharmacie, d’odontologie ou de maïeutique.
Cet article prévoit aussi la communication d’un dossier démontrant que l’établissement de formation satisfait aux modalités pédagogiques exigées par arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la santé, avec des modalités d’agrément précisées non par décret mais par arrêté conjoint.
Cet arrêté a été approuvé par les instances consultatives des deux ministères ; il sera publié dans le courant de cette semaine. Voilà qui répond à une partie de vos questions.
Les établissements qui délivrent aujourd’hui les formations entrant dans le champ de l’arrêté auront six mois pour se mettre en conformité avec les exigences réglementaires. Si les établissements ne se sont pas mis en conformité à l’issue de cette période de six mois, il reviendra au rectorat de l’académie dans laquelle se situe l’établissement d’engager, au nom du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, les poursuites auprès du tribunal afin de fermer l’établissement – cette possibilité ne nous était pas ouverte auparavant.
Comme vous le savez, le centre libre d’enseignement supérieur international a, de surcroît, adressé en mai 2014 à ses étudiants un courrier dans lequel il annonce que la convention qui le liait à l’université portugaise venait d’être dénoncée par l’établissement portugais d’accréditation, pour des raisons administratives.
Les étudiants inscrits dans cet établissement pourront présenter une demande d’inscription au sein des universités françaises. Il relève cependant de la compétence des universités d’accueil de valider ou non, en tout ou partie, les crédits de formation délivrés par un établissement de formation privé.
Je suivrai l’évolution de ces demandes avec la plus grande attention, afin que les étudiants ne soient pas victimes d’une situation qu’ils n’ont pas pu contrôler.
Au-delà, ce dossier pose le problème, plus complexe, du contournement du numerus clausus et de la démographie médicale – je pense notamment à la pénurie de médecins généralistes, qui seront de plus en plus le pivot de notre politique de santé publique dans les années à venir.
Pour prévenir ces difficultés, j’ai mis en place des expérimentations dans sept universités pour diversifier l’accès aux professions de santé, hors PACES – première année commune aux études de santé – et nous travaillons, Marisol Touraine et moi-même, sur le projet d’une licence pluriprofessionnelle en santé. Par ailleurs, nous proposerons, dans le cadre du projet de loi sur la stratégie nationale de santé, de mettre en place des assises nationales sur ce thème avant la fin de l’année.
Encore une fois, l’allongement du temps de la vie et la médecine ambulatoire exigeront, pour les infirmiers et les médecins, des évolutions professionnelles que nous devons anticiper.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, car les réponses que vous avez apportées sont tout à fait importantes et méritent d’être connues. J’ai perçu une nouvelle fois votre engagement dans ce dossier.
J’ai reçu, au nom de la commission des affaires sociales, des organisations syndicales représentant aussi bien les étudiants que les professions concernées. Tous étaient extrêmement inquiets des failles du système européen de formation qui pouvaient permettre l’ouverture de ce genre d’institutions.
La publication d’un arrêté que vous annoncez dès cette semaine peut selon moi permettre d’endiguer ces initiatives. Dans votre réponse, vous prenez en compte les étudiants, ce qui est effectivement important. Ils se sont laissé piéger, en quelque sorte, par ce genre d’institutions, car ils sont captifs de ces formations une fois qu’ils y sont entrés et ils ne savent pas quel sort leur sera réservé.
J’ai bien entendu dans votre réponse que vous aviez pris en compte ce genre de difficultés et pris un certain nombre de dispositions pour les résoudre, ce qui est selon moi très intéressant.
Malheureusement, dans le jeu des questions et des réponses, on ne peut pas prendre la mesure de toute la richesse de ce dossier. Vous m’avez donc en quelque sorte mise en appétit, et j’attends le détail des propositions concernant notamment la licence pluridisciplinaire de santé. Nous examinerons ces propositions dans un autre cadre, en présence de Mme la ministre de la santé.
Je vous remercie de nouveau des informations que vous nous avez données, madame la secrétaire d’État.
La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 809, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la situation des réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED, en particulier en Seine-et-Marne.
De 2008 à 2012, la politique de démantèlement du service public d’éducation conduite par le gouvernement Fillon a fortement mis à mal les RASED sur l’ensemble du territoire. Plus de 5 000 postes d’enseignant spécialisé en option G et E ont été supprimés en quatre ans, dont 134 en Seine-et-Marne.
L’affaiblissement de ce dispositif est d’autant plus grave que les RASED ont pour mission de fournir des aides spécialisées et individualisées à des élèves en difficulté dans des classes ordinaires.
Ainsi, en quatre ans, la Seine-et-Marne a perdu 75 % des postes de maître G, en charge des difficultés d’adaptation à l’école, et 40 % des maîtres E, en charge des difficultés d’apprentissage. Les secteurs ruraux, nombreux en Seine-et Marne, ne sont ainsi plus du tout couverts.
Certes, à la rentrée 2013, une dotation de 135 postes de professeur d’école est venue inverser, pour la seconde année, la tendance à la suppression des postes. Toutefois, cette dotation était déjà bien insuffisante pour amorcer un rattrapage nécessaire à un département classé dernier pour son taux d’encadrement à l’école primaire.
Je rappelle que la démographie de la Seine-et-Marne, comme celle de l’Île-de-France en général ; est très dynamique : 1 743 élèves supplémentaires ont été accueillis à cette rentrée. Malheureusement, avec une dotation de 128 postes de professeur des écoles pour la rentrée 2014, l’effort se ralentit déjà, si l’on tient compte du fait que 2 324 élèves supplémentaires sont attendus.
Est-ce pour cette raison que, cette année, en Seine-et-Marne, il n’est prévu ni départ en formation spécialisée options E et G, ni création de postes en option G notamment, ce qui aura pour conséquence une nouvelle dégradation de la situation des RASED ? À titre de comparaison, dans la même académie, en Seine-Saint-Denis, on dénombre treize départs en formation pour la certification en enseignement spécialisé option E et dix en option G.
En outre, vingt-deux postes de maître option E ne sont toujours pas pourvus dans notre département.
Cette situation est en complète opposition avec les orientations données par le ministre de l’éducation nationale le 29 janvier 2014 dans un courrier adressé au collectif national RASED. Le ministre y préconise en effet le renforcement de l’action des enseignants des RASED, l’élaboration d’une cartographie des besoins et la relance de la formation, afin de répondre aux vacances de postes.
En conformité avec ces engagements, je souhaiterais donc connaître les moyens que le Gouvernement entend mobiliser, particulièrement en Seine-et-Marne, pour redonner aux RASED les moyens nécessaires à la réussite de leurs missions, notamment en termes de création de postes et de départ en formation spécialisée.
Monsieur le sénateur, le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche vous prie de bien vouloir excuser son absence.
Pour lutter contre les inégalités scolaires, ce gouvernement a créé, depuis la rentrée 2012, environ 22 000 postes d’enseignant, permettant de renforcer les RASED dans les secteurs qui en ont le plus besoin et qui avaient été particulièrement touchés par les suppressions décidées par la précédente majorité.
Cet effort sera poursuivi lors des prochaines rentrées, notamment dans les secteurs scolarisant les élèves les plus fragiles. Le Gouvernement, dans le cadre des discussions sur les métiers de l’éducation nationale, a redéfini, pour les conforter, les missions des membres des RASED, c’est-à-dire celles des maîtres E, des maîtres G et des psychologues scolaires. De même, pour définir les modalités de fonctionnement des RASED, une circulaire est en cours de rédaction.
Plus globalement, dans le cadre de la refondation de l’école, la scolarité a été recentrée sur les apprentissages fondamentaux et nous avons réaffirmé notre volonté de mieux préparer les enseignants en leur donnant de nouveau une formation digne de ce nom, à travers les écoles supérieures du professorat et de l’éducation – nous avons fait un bilan de cette formation tout récemment dans cet hémicycle.
Par ailleurs, un travail visant à mieux coordonner les activités pédagogiques complémentaires et le dispositif « plus de maîtres que de classes » est engagé par le ministère afin de permettre aux enseignants de traiter eux-mêmes un certain nombre de difficultés d’apprentissage.
Comme vous l’avez souligné, ces dispositifs ne sont cependant pas suffisants et doivent être complétés par l’intervention des enseignants spécialisés quand les difficultés scolaires ou comportementales l’exigent.
S’agissant de vos interrogations sur la situation en Seine-et-Marne, je souhaite vous apporter les informations suivantes.
Depuis la rentrée 2012, chacune des vingt-quatre circonscriptions du département comporte un réseau d’aides spécialisées composé de quatre à cinq psychologues scolaires, trois à quatre enseignants spécialisés option E, deux enseignants spécialisés option G afin de répondre aux besoins nouvellement identifiés.
La répartition des emplois réalisée en 2012 a été reconduite, dans l’intégralité des postes, à la rentrée 2013.
Par ailleurs, les missions d’une partie des enseignants spécialisés option G ont été réorientées vers l’accompagnement des élèves manifestant des troubles du comportement. En préparation de la rentrée 2014, bien que le département compte 165 enseignants titulaires d’une option E ou G, vingt-six postes d’enseignants affectés en RASED – vingt-deux en option E et quatre en option G – restent à nouveau vacants à l’issue du mouvement.
De plus, à la rentrée 2014, sur la base des moyens implantés, une nouvelle circonscription a été créée et elle sera dotée d’un poste E et d’un poste de psychologue, afin d’améliorer encore la prise en charge des élèves qui connaissent les plus grandes difficultés.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, mais je vous avouerai que je reste un peu sur ma faim. C’est, du reste, habituel lorsque j’aborde la question de l’éducation en Seine-et-Marne, tant le retard pris dans ce département est considérable. Je pense notamment aux taux d’encadrement à l’école primaire, mais on pourrait également évoquer les problèmes qui sont de votre ressort : l’enseignement supérieur en Seine-et-Marne connaît également de grandes difficultés.
Aujourd'hui, on se contente de tenir compte de ces retards accumulés, mais je ne vois pas, dans vos propos, cette détermination qui serait nécessaire pour que l’on s’attaque réellement à la situation. Il n’y a pas de véritable amélioration du taux d’encadrement dans ce département. Comme je l’ai dit, la tendance s’est inversée depuis trois ans, puisque, auparavant, malgré la situation que je viens de décrire, on fermait des postes. Je prends acte du fait que des postes ont été créés depuis trois ans, toutefois leur nombre reste tout à fait insuffisant.
Je le constate, la directrice académique de ce département considère que l’urgence consiste à mettre des enseignants dans les classes ; or les RASED n’apparaissent pas comme une grande priorité de ce point de vue-là. Par conséquent, les enseignants doutent et hésitent à se positionner dans les RASED, ce qui a pour effet que certains postes créés ne sont pas pourvus.
J’ai déjà interpellé le ministre le 29 octobre dernier sur la nécessité de gestes forts au sein de l’académie de Créteil en direction du département de Seine-et-Marne pour redonner confiance aux enseignants. Malheureusement, la dotation qui a été accordée ne va pas, selon moi, dans ce sens, et je fais le même constat en ce qui concerne l’action du Gouvernement pour les RASED.
Or, si l’on ne redonne pas confiance aux enseignants dans ce dispositif d’aides spécialisées, nous continuerons, d’année en année, à constater des carences, mais ce sont les enfants qui en sont les premières victimes !
Soilihi, auteur de la question n° 808, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
Je souhaite en effet attirer l’attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la problématique de la lutte contre le sida et de la prise en charge des personnes vivant avec le virus de l’immunodéficience humaine à Mayotte.
Il n’existe pas, dans ce département, d’actions médiatiques d’envergure sur la prévention du VIH-sida et, plus généralement, des infections sexuellement transmissibles. L’ignorance, le tabou et le poids de la stigmatisation n’incitent pas la population à se protéger ni les personnes infectées à se faire dépister ou soigner.
Si les données épidémiologiques sont très partielles, il semblerait néanmoins que la prévalence du VIH soit sous-évaluée. Les pressions migratoire et démographique auxquelles Mayotte fait face sont autant de facteurs susceptibles d’augmenter les chiffres avancés aujourd’hui pour ce département.
Par ailleurs, les personnes vivant avec le VIH ne bénéficient pas de la même qualité de soins qu’en France métropolitaine, ni même à La Réunion, qui partage pourtant l’agence régionale de santé avec Mayotte. Il n’existe pas à Mayotte de médecins spécialistes, pas d’hôpitaux de jour, pas d’éducation thérapeutique, pas de prise en charge pluridisciplinaire.
La seule association mahoraise recensée ne peut répondre à toutes les demandes d’accompagnement formulées par le service infectieux.
Je souhaite, madame la secrétaire d’État, connaître l’état d’avancement des actions préconisées pour Mayotte par le plan national de lutte contre le VIH et les IST pour 2010-2014 en direction des populations d’outre-mer.
Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser Marisol Touraine, qui ne peut être présente ce matin et qui m’a chargée de la suppléer.
Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour lutter contre le sida et prendre en charge les personnes qui sont atteintes par ce virus. Cette mobilisation doit être identique sur l’ensemble du territoire national.
À Mayotte, la file active de personnes vivant avec le VIH est évaluée à 160 patients. La prise en charge de ces patients est essentiellement hospitalière.
L’incidence du VIH paraît stable depuis 2009. Le taux de découverte de la séropositivité est de l’ordre de 11 à 12 pour 100 000 habitants. Une mobilisation en éducation pour la santé et en prévention a été entamée depuis de nombreuses années à Mayotte, notamment grâce à des opérateurs de terrain qui pratiquent une prévention globale, comme, par exemple, les espaces de solidarité de la Croix Rouge française qui apportent une aide alimentaire, délivrent des conseils nutritionnels et diffusent des kits d’hygiène avec préservatifs.
Vous avez raison, monsieur le sénateur, de souligner que l’information épidémiologique est partielle. C’est pourquoi l’agence régionale de santé de l’océan Indien a fait de l’observation de l’état de santé des habitants de Mayotte et des facteurs qui déterminent celui-ci l’une de ses priorités.
Pour aller plus loin, elle va installer prochainement une équipe « études et statistiques » à Mayotte qui travaillera avec l’ensemble des acteurs.
Par ailleurs l’agence régionale de santé de l’océan Indien a œuvré pour créer un comité de coordination régionale de la lutte contre le VIH, le COREVIH-océan Indien. Cette création permettra une gestion informatisée des statistiques de suivi des personnes vivant avec le virus.
Concernant la prise en charge médicale, je tiens à vous indiquer que les patients bénéficient, à Mayotte comme à La Réunion, des mêmes protocoles que ceux qui sont appliqués en métropole. Par ailleurs la convention signée entre le CHU et le centre hospitalier de Mayotte en 2013 vise à renforcer l’échange entre les professionnels. Le COREVIH – Réunion-Mayotte favorisera formations et échanges de pratiques entre les îles ; la création d’un personnel commun travaillant sur les dossiers des patients des deux départements doit permettre de rapprocher les pratiques médicales.
Concernant la prévention, enfin, plusieurs actions sont en cours de déploiement, telles que la diffusion des nouvelles méthodes de dépistages ciblés, notamment les tests rapides d'orientation diagnostique, ou TROD, l’éducation pour la santé, avec la mise en place d’une politique concertée communautaire, et la lutte contre les violences sexuelles.
L’ARS et le vice-rectorat ont signé une convention le 25 avril 2014 qui assurera, dès la rentrée scolaire de septembre, une coordination des actions de prévention en établissement scolaire.
Un projet de convention avec les autorités du droit coutumier sur leur participation active à des messages de prévention chaque semaine est en cours d’écriture. Ces messages seront relayés dans des lieux aussi divers que possible ; les mosquées se sont engagées à les diffuser.
Enfin, deux associations ont demandé une habilitation pour la mise en œuvre d’un dépistage ciblé auprès des adolescents « à risque » ainsi que des prostituées.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, à Mayotte comme en métropole, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour lutter efficacement contre le sida, pour accentuer les actions de prévention auprès des publics considérés comme les plus à risque et permettre un accompagnement de qualité des personnes qui vivent avec le virus du sida.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de vos réponses.
Comme vous l’avez rappelé, la prise en charge des patients atteints du VIH doit se faire à Mayotte comme partout ailleurs dans notre pays. Vous avez annoncé qu’un certain nombre de mesures seraient prises : la réalisation d’études statistiques – il faut commencer pour là –, la création d’un comité de coordination ou encore la préparation d’un projet de convention entre différents partenaires.
En espérant que les mesures verront rapidement le jour, je préfère m’arrêter sur ces annonces, qui suffisent à démontrer que, pour l’instant, la prise en charge des patients atteints du VIH n’est pas la même à Mayotte que dans les autres départements de France et de Navarre.
J’ai bien pris note de ce que vous venez d’annoncer. Je serai vigilant quant aux suites qui y seront données.
La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 751, transmise à M. le ministre de l'intérieur.
Madame la secrétaire d'État, ma question porte en effet sur la date des élections départementales dans les trois départements de la petite couronne.
Lorsque j’ai déposé cette question orale, il y a deux mois, le Président de la République venait d’annoncer la fusion et donc la disparition des départements du Val-de-Marne, de la Seine-Saint-Denis et des Hauts-de-Seine. Cette annonce intervenait elle-même quelques semaines seulement après le vote, dans la douleur, de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, qui prévoit la création de la métropole du Grand Paris, et quelques mois seulement après le vote d’une autre loi qui prévoit, elle, que chaque canton élira désormais un binôme de conseillers départementaux.
Cette annonce du Président de la République a été une surprise de taille pour nous tous, et je prends à témoin en cet instant les trois sénatrices de la région parisienne présentes.
Le Président de la République annonçait en même temps un nouveau projet de loi de décentralisation comportant des dispositions pour les départements qui entrent dans le giron des métropoles.
Depuis, l’actualité a été rythmée par une succession d’annonces. Il en ressort que les départements de la petite couronne ne sont plus les seuls concernés, le Président de la République ayant décidé la suppression de tous les départements en 2020.
Les conseillers généraux des trois départements de la petite couronne demeurent dans un flou aussi important qu’il y a deux mois, et ce à un an – ou à dix-huit mois, car on ignore même la date du scrutin – des élections départementales, dont les modalités de scrutin et les circonscriptions ont déjà été modifiées.
À cela s’ajoute la mise en place de la métropole du Grand Paris, prévue pour le 1er janvier 2016.
Les élus des départements de la petite couronne, en particulier ceux du Val-de-Marne, dont je suis la porte-parole, voudraient sortir de l’expectative.
Madame la secrétaire d'État, le Gouvernement a-t-il décidé de mettre fin au mandat des conseillers généraux actuels en mars 2015, ou ce mandat sera-t-il prorogé jusqu’au 1er janvier 2016, c'est-à-dire jusqu’à la création de la métropole du Grand Paris, ou bien encore les mandats des conseillers généraux des départements de la petite couronne seront-il renouvelés avec ceux des autres départements jusqu’en 2020, la création de la métropole du Grand Paris étant censée faire disparaître ces départements ?
Enfin, la réforme territoriale qui nous sera bientôt présentée comportera-t-elle des dispositions spécifiques pour ces trois départements ?
Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord d’excuser le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, qui est retenu par des engagements impérieux. Il se prépare notamment à donner des informations plus précises concernant la réforme territoriale. Nous en prendrons tous connaissance demain ; votre question est donc tout à fait pertinente, mais un peu prématurée.
Vous interrogez le Gouvernement sur le devenir des départements, singulièrement de ceux de la petite couronne parisienne.
Vous le savez, lors du conseil des ministres du mercredi 18 juin – demain, donc –, le ministre de l’intérieur et la ministre de la décentralisation et de la fonction publique présenteront respectivement un projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, et un projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.
Sans dévoiler le contenu de ces deux projets de loi, dont vous pourrez prendre connaissance dès demain, je peux d’ores et déjà vous indiquer que ces deux textes s’inscrivent dans le cadre modernisateur annoncé par le Président de la République et confirmé par le Premier ministre. Ces réformes ont en effet pour ambition de transformer pour plusieurs décennies l’organisation de la République, afin de la faire mieux vivre au service des citoyens.
Ainsi la création de régions agrandies et plus efficaces, dont le nombre est ramené à quatorze, s’inscrit-elle dans un objectif de modernisation de notre organisation et de rationalisation du territoire. L’intérêt général et les volontés de coopération entre territoires ont été pris en compte dans le dessin de la nouvelle géographie régionale.
J’ajoute, en tant que secrétaire d’État chargée de l’enseignement supérieur et de la recherche, que trois regroupements universitaires ont déjà anticipé les futurs regroupements interrégionaux ; un quatrième a quant à lui anticipé un regroupement qui aura peut-être lieu un jour – qui sait ? – dans l’ouest du pays…
Afin d’assurer la sincérité du scrutin et de conserver la tradition qui veut que l’on ne modifie pas les contours des circonscriptions trop peu de temps avant la tenue du scrutin, les élections départementales et régionales seront reportées. Pour tenir compte de la nouvelle délimitation des régions, effective en janvier 2016, la date des élections sera fixée à la fin de l’année 2015.
Notre réforme territoriale est ambitieuse et réfléchie. Nous ne voulons pas de bricolage institutionnel. Nous préparons une réforme d’envergure, une réforme « radicale », comme l’a rappelé le chef de l’État, qui nécessite un dialogue. La concertation, l’accompagnement, la préparation doivent en effet permettre de modifier en profondeur, mais de manière progressive, le contexte territorial.
Vous le voyez, madame la sénatrice, la réforme que le Gouvernement prépare est marquée du sceau de l’efficacité, de la solidarité et de l’équilibre. Je suis persuadée qu’elle saura trouver, au-delà des travées de la majorité, des défenseurs honnêtes qui sauront prendre le train de la modernité et de la réussite, au service de nos concitoyens et, surtout, de l’intérêt général des territoires. Je ne doute pas que vous en serez, madame la sénatrice.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de m’avoir communiqué la réponse du ministre de l’intérieur. Vous me dites que nous aurons la réponse demain. Il y a deux mois, on ne l’avait pas ! Le 18 juin est un jour important pour nous, gaullistes, mais je doute que l’annonce de demain soit de l’importance de l’Appel. En tout cas, j’espère que nous aurons enfin une réponse pour les trois départements de la petite couronne, qui sont aujourd’hui dans une situation particulière.
Nous nous posons des questions très pragmatiques, par exemple au sujet des engagements de dépenses. Vous savez bien que tous les élus doivent comptabiliser un an à l’avance leurs dépenses de communication et de publicité, et s’interdire un certain nombre de choses. Ils ont besoin de savoir s’ils peuvent continuer à prendre certaines initiatives. On ne connaît toujours pas les circonscriptions, des recours ayant été déposés. Bref, on ne sait absolument pas où l’on en est et la situation est donc très compliquée.
Il y a des problèmes pour les départements ruraux, compte tenu des distances, mais je pense que la plupart en sont conscients. On ne peut en dire autant s'agissant de la région parisienne et plus particulièrement des départements de la petite couronne, dans lesquels on va créer des intercommunalités de 300 000 habitants et la métropole du Grand Paris, et dont on a annoncé, quinze jours ou trois semaines après le vote de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, qu’ils allaient bientôt disparaître. Vont-ils disparaître en 2016 ou en 2020 ? Va-t-on élire des conseillers départementaux qui seront des intermittents de la politique pendant six, ou même trois mois si les élections ont lieu en octobre ? Pourquoi élire des conseillers départementaux qui vont disparaître au bout de trois mois ?
Nous attendons des réponses. C’est important pour les élus. C’est important aussi pour les citoyens. C’est important enfin pour les villes, qui doivent organiser les élections.
Nous en avons terminé avec les questions orales.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Charles Guené.