Intervention de Bernard Bigot

Commission des affaires économiques — Réunion du 17 juin 2014 : 1ère réunion
Transition énergétique — Audition de M. Bernard Bigot administrateur général du commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives cea

Bernard Bigot, Administrateur général du CEA :

Le CEA travaille sur les micro-algues : nous avons trouvé une nouvelle souche deux fois plus productive que les autres. Les algues ont de multiples usages et peuvent absorber du CO2, mais ce n'est pas la solution unique car elles nécessitent un espace considérable.

S'agissant du nom du CEA, je rappelle que la mission Rocard-Juppé, qui avait préparé les investissements d'avenir, avait proposé de créer un Commissariat aux énergies renouvelables ; j'ai suggéré de confier cette mission au CEA afin d'éviter les délais nécessaires à la création d'un nouvel organisme à partir de rien. Selon moi, il vaut mieux parler tout simplement du CEA, sans utiliser le nom complet.

Le projet ITER est fort de promesses. Il réunit sept partenaires internationaux. Les 140 tonnes d'uranium utilisées dans un réacteur actuel pourront être remplacées par quelques grammes d'hydrogène, avec de l'hélium comme déchet ; la ressource est illimitée, sans risque d'emballement. Le défi technologique est considérable, puisqu'il faudra faire voisiner un plasma à 150 millions de degrés avec une paroi au zéro absolu. Les perspectives justifient l'effort, mais la démonstration de production nette d'énergie par fusion ne devrait pas survenir avant 2025 ou 2030.

La transmutation permet de casser les atomes sans libérer l'énergie contenue. On peut consommer le plutonium, donc la transmutation concernerait l'americium, qui ne représente que 0,1 % du combustible usé mais avec une durée de vie de l'ordre d'un million d'années. Toutefois il faut avoir d'abord mis en place le recyclage multiple du plutonium. Donc on pourra envisager de passer à la transmutation après avoir mis en place Astrid.

L'hydrogène devrait d'abord être utilisé là où le risque est minimal : production de biocarburants, mélange avec du gaz... Il existe déjà des réseaux de distribution d'hydrogène industriel dans le nord et l'est de la France, sans problème particulier.

Les performances des batteries nickel-zinc ne sont pas suffisantes pour les véhicules électriques, mais elles conviennent à des flottes captives, par exemple dans des hangars. C'est un vrai problème dans notre pays : comment financer non pas la startup, mais le passage de celle-ci à l'étape industrielle. Le CEA dépose des brevets et crée des entreprises, mais on rencontre des difficultés pour trouver en France des investisseurs afin de développer l'activité jusqu'au stade de l'entreprise de taille intermédiaire (ETI) : ce sont des grands fonds américains qui viennent.

Personne ne peut dire quelles sont les énergies renouvelables les plus prometteuses : il faut donc garder des systèmes ouverts en réalisant des démonstrateurs technologiques à la bonne échelle. En mettant l'accent sur la recherche fondamentale, on travaille aussi pour les autres si on ne sait pas passer soi-même au stade de l'industrialisation ! Il faut diriger une part de l'épargne française, qui est abondante, vers le développement industriel.

Il ne faut pas confondre les véhicules électrifiés, dans lesquels un moteur électrique a été inséré dans un chassis classique, avec les véhicules électriques qui sont conçus spécifiquement pour cela : un modèle couramment utilisé, par exemple, utilise une carrosserie en aluminium plus légère et économise même 40 kilogrammes sur le poids de la peinture. Car le poids est l'ennemi numéro un : alors qu'un véhicule thermique parcourt 500 kilomètres avec 60 kilogrammes de pétrole, un véhicule électrique ne fait que 200 à 250 kilomètres avec une batterie de 250 kilogrammes. L'optimisation permet de réduire ce poids.

Au stockage du CO2, je préfère son recyclage : il peut être utilisé pour produire du carburant ou des matières premières.

En conclusion, il faut redonner confiance à notre pays : la science peut apporter des solutions. Les risques existent, mais les dispositifs de contrôle, d'anticipation et de formation nous permettent de les minimiser, plutôt que de les craindre.

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