Intervention de Frédéric Cuvillier

Réunion du 23 juin 2014 à 16h00
Ouvrages d'art de rétablissement des voies — Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Frédéric Cuvillier :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les infrastructures de transport sont essentielles pour répondre aux besoins de mobilité de nos concitoyens et renforcer la compétitivité de notre pays. Pourtant, leur gestion dans les territoires peut parfois être source de difficultés pour les collectivités locales.

Le texte qui est aujourd’hui examiné en deuxième lecture par la Haute Assemblée permettra de progresser dans ce domaine. Il s’agit de définir un cadre permettant de répondre aux difficultés nées des divergences de vues, sur l’entretien des franchissements d’infrastructures, entre l’État ou ses établissements publics, d’une part, et les collectivités territoriales, d’autre part.

Lorsqu’il y a franchissement d’une infrastructure par une autre, la jurisprudence est constante : elle impose au propriétaire de la voie rétablie d’entretenir à ses frais l’ouvrage d’art nécessaire au franchissement, sauf convention contraire.

Ce principe s’applique à toutes les infrastructures – routes, chemins de fer, canaux – quel que soit le schéma de superposition entre les deux voies et quels que soient les maîtres d’ouvrage de la nouvelle infrastructure qui justifie la réalisation de l’ouvrage d’art.

Cette situation est à l’origine de nombreuses difficultés sur les territoires. Le cas des petites communes rurales traversées par une autoroute ou par une ligne à grande vitesse et qui doivent supporter les charges liées à l’entretien du pont nécessaire pour maintenir une route communale est souvent cité en exemple. Il est évident que les montants en jeu et les capacités techniques nécessaires sont souvent hors de portée pour ces collectivités.

La représentation nationale a ainsi légitimement souhaité se saisir de ce sujet pour apporter des réponses concrètes à ces situations. Mme Évelyne Didier, qui avait évoqué ce sujet dès notre première rencontre, a ainsi déposé une proposition de loi en ce sens en juillet 2011, adoptée par le Sénat en janvier 2012. Le parcours parlementaire de cette proposition de loi s’étant poursuivi avec persévérance et opiniâtreté, celle-ci a ensuite été examinée par l’Assemblée nationale le 22 mai dernier.

Le Gouvernement sait l’attachement de l’ensemble des parlementaires à trouver une solution. Il souhaite lui aussi définir un cadre clair pour résoudre les situations problématiques pour les collectivités, notamment les plus fragiles. C’est le sens de l’action gouvernementale : apporter des réponses concrètes aux problèmes rencontrés par nos concitoyens et par leurs territoires. C’est la raison pour laquelle nous soutenons le principe de cette proposition de loi.

Lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, il y a un mois, le Gouvernement a proposé plusieurs amendements permettant de faire évoluer le dispositif initial et d’atteindre aujourd’hui un point d’équilibre qui permet de répondre à l’ensemble des préoccupations. Je tiens à rappeler brièvement les principaux équilibres du texte qui va être examiné par la Haute Assemblée.

En premier lieu, la proposition de loi pose le principe de l’existence d’une convention de gestion pour toute nouvelle infrastructure de transport – alinéa 6. Elle définit également son contenu – alinéas 7 à 10.

Les travaux parlementaires ont été l’occasion de préciser ce point. Ils ont confirmé le principe de référence selon lequel le gestionnaire de la voie nouvelle prend en charge l’ensemble des dépenses liées à la structure de l’ouvrage d’art. Mais, si ce principe doit en effet guider la répartition des charges, il est nécessaire de laisser aux partenaires une certaine souplesse dans la conduite des discussions.

Personne ne doute que ce principe devra être appliqué tel quel pour les petites collectivités auxquelles j’ai fait référence précédemment et qui ont par conséquent un statut particulier tenant compte de leur surface financière, de leurs difficultés d’ingénierie. Toutefois, il ne faut pas exclure la possibilité d’adapter ce principe en fonction des spécificités propres des collectivités. Je pense à leur capacité financière, à leur capacité technique ou encore à l’intérêt qu’elles retirent de la réalisation de la nouvelle infrastructure de transport. Une petite commune rurale ne peut pas être traitée de la même manière qu’un conseil général : ce ne serait ni compréhensible ni juste.

Au-delà de la question des ouvrages neufs se pose bien entendu la question du traitement des ouvrages existants. Je tiens à rappeler qu’on dénombre environ 12 000 franchissements pour le réseau ferroviaire, 2 000 pour le réseau routier non concédé et encore 2 500 pour les voies navigables.

La généralisation immédiate aux ouvrages existants des dispositions applicables aux ouvrages neufs serait insoutenable pour l’État et ses opérateurs.

Elle serait insoutenable d’un point de vue budgétaire, dans le contexte de redressement des comptes publics que nous avons engagé : ce serait plusieurs dizaines, voire centaines de millions d’euros par an supplémentaires à prélever sur les budgets consacrés aux infrastructures de transport. Nous peinons déjà à trouver les ressources financières. Vous mesurez bien la nécessité que les règles soient applicables mais aussi soutenables financièrement. Pour ce faire, elles doivent prendre en compte la réalité budgétaire et laisser suffisamment de temps pour se préparer à la prise en compte de ces dispositifs nouveaux.

Elle serait en outre insoutenable d’un point de vue technique étant donné le nombre d’ouvrages concernés : il faut donc identifier les situations les plus urgentes qui devront être traitées.

Le texte qui va être examiné prévoit ainsi un recensement des ouvrages d’art de rétablissement des voies pour lesquels il n’existe aucune convention en vigueur. Le secrétaire d’État chargé des transports identifiera ceux des ouvrages recensés dont les caractéristiques, notamment techniques et de sécurité, justifient l’établissement d’une telle convention.

Enfin, les situations faisant l’objet d’un contentieux doivent également trouver une issue rapide. Des dispositions permettant le règlement prioritaire de ces situations ont été introduites dans le texte législatif.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier tout particulièrement Mme Évelyne Didier et M. le rapporteur, Christian Favier, du travail constructif qu’ils ont mené et des échanges qu’ils ont eus avec le Gouvernement et ses services sur ce texte.

Je ne doute pas que l’examen qui va s’engager aboutira à l’adoption de ce texte de bon sens qui, en apportant une réponse rapide et efficace, permet de mettre fin à des situations difficiles sur le terrain, sources d’inquiétude pour les élus locaux, tout en s’inscrivant dans une démarche pragmatique et responsable. §

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