Intervention de Philippe Marini

Réunion du 23 juin 2014 à 21h30
Débat préalable à la réunion du conseil européen des 26 et 27 juin 2014

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, comme l’orateur précédent, je voudrais rappeler que le tout prochain Conseil européen marquera la conclusion du semestre européen et verra l’adoption par les États de recommandations par pays, sur la base des propositions de la Commission européenne publiées le 2 juin dernier. Que faut-il retenir de cette « recommandation de recommandation », pour reprendre le jargon bruxellois, concernant le programme national de réforme et le programme de stabilité de la France pour 2014 ?

Il est important de savoir comment le Gouvernement réagit aux observations de la Commission européenne. Il est également important de savoir s’il envisage d’en contester certains aspects et si les vingt-sept autres États suivront la Commission ou préféreront un assouplissement de la discipline commune, comme nous le laissent entendre les sociaux-démocrates. Nous allons bien voir s’il ne s’agit là que de paroles…

Tout d’abord, je note que la Commission européenne retient une prévision de déficit de la France de 3, 4 % du produit intérieur brut en 2015, alors que l’objectif retenu dans le programme de stabilité est de 3 % du PIB.

Ensuite, je relève que la Commission pointe du doigt le niveau de détail insuffisant des mesures d’ajustement, ce qui ne permet pas de « garantir de façon crédible la correction du déficit excessif pour 2015 ». Ainsi, l’horrible austérité dont parlent quelques-uns ne ferait pas l’objet de mesures suffisamment étayées et documentées !

Pour ma part, je crains qu’une fois de plus nous n’ayons affaire au phénomène d’opacité – que nous connaissons bien – de la politique budgétaire de ce gouvernement. Par exemple, pour la Commission européenne, comme pour l’ensemble des observateurs de notre vie politique nationale, les mesures d’économie annoncées par le Gouvernement, qui font tant réagir ici ou là, notamment dans une certaine partie de nos hémicycles, ne sont pas suffisamment précisées et détaillées pour être crédibles. Cette opacité, mes chers collègues, me semble aggravée par l’utilisation de la notion de « solde structurel ». Permettez-moi de m’arrêter quelques instants sur cette notion, qui n’est, à mon sens, qu’un nouveau et moderne rideau de fumée.

Bien entendu, il n’est pas illégitime de raisonner en termes de solde structurel. Nous sommes d’ailleurs tenus de le faire puisque nous avons transposé en droit interne le TSCG. Toutefois, s’il fallait désormais résumer le débat sur le redressement de nos finances publiques à l’énoncé de variables macroéconomiques abstraites et au développement de raisonnements complexes en termes de croissance potentielle et d’économies par rapport à une tendance – laquelle n’est d’ailleurs même pas explicitée par le Gouvernement –, il est tout à fait clair que nous ne serions compris de personne et que nous nous rendrions complices d’un vrai recul démocratique. Or, aujourd’hui – je l’observe avec peine –, le Gouvernement se dispense de plus en plus de nous dire sur quelles hypothèses, sur quelles mesures il se fonde pour justifier la trajectoire qu’il nous propose. Il se contente de nous demander de lui faire confiance, appliquant le principe qui eut au demeurant souvent cours en matière européenne : « Circulez, il n’y a rien à voir ! »

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