Je vous le dis, mes chers collègues, les comptes publics et leur redressement demandent évidemment bien plus qu’un acte de foi.
D’autres sujets continuent de prêter à interrogation : quelles sont les marges de manœuvre réelles du Gouvernement pour rétablir les comptes publics à court terme ? Comme le souligne la Commission européenne, « les réformes structurelles définies dans le programme de stabilité ne prendront effet qu’à moyen terme », notamment en ce qui concerne les collectivités territoriales. Or le Président de la République et son gouvernement nous promettent un miracle de cette réforme territoriale. Il serait donc essentiel que ce gouvernement dévoile enfin une stratégie crédible et détaillée pour 2015, date à laquelle le retour sous le seuil des 3 % est espéré, et pour 2016-2017, période prévue pour atteindre l’objectif à moyen terme.
Plus généralement, faute de réformes ambitieuses et structurantes autrement qu’en paroles, la Commission européenne estime que « la viabilité à long terme des finances publiques est également préoccupante ». Que cela veut-il dire en termes concrets ? Tout simplement que nos financements sur les marchés ne seront pas toujours obtenus à des conditions aussi favorables qu’aujourd’hui. La dette continuera par exemple d’augmenter en dépit de la progression de l’objectif à moyen terme. Cela me conduit à une autre question, monsieur le secrétaire d’État : quels sont, en matière de viabilité à long terme des finances publiques, les projets du Gouvernement ? En effet, même en écoutant attentivement vos collègues, le secrétaire d’État au budget, Christian Eckert, et le ministre des finances, Michel Sapin, lors des auditions répétées et copieuses que la commission des finances a tenues, je n’ai pas le sentiment que nous ayons entendu des réponses crédibles.
Selon la Commission européenne, même les axes forts de la politique économique gouvernementale sont lacunaires. Par exemple, s’agissant de la réduction du coût du travail, la Commission indique que cette dernière, qui devrait s’élever à 30 milliards d’euros – 20 milliards d’euros pour le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, 10 milliards d’euros pour le pacte de responsabilité –, « ne comblerait qu’à moitié le fossé entre la France et la moyenne de la zone euro en termes de cotisations sociales patronales ».
Je rappelle que, dans le cadre du bilan approfondi des déséquilibres macroéconomiques, la Commission européenne a pointé du doigt la détérioration de notre balance commerciale et la compétitivité insuffisante de l’économie, en soulignant notre manque de compétitivité-coût et de compétitivité hors prix.
Alors que la Commission européenne nous avait habitués à une expression plutôt modérée, elle fait preuve, en 2014, selon ma lecture, d’une sévérité accrue à l’égard de la France, ce qui ne peut que susciter de sérieux doutes et des inquiétudes légitimes quant à la viabilité de la trajectoire budgétaire et économique que le Gouvernement propose.
Après ces différentes interrogations, je voudrais conclure mon propos par plusieurs questions : quelle est la position du Gouvernement dans le débat sur l’assouplissement des règles de stabilité budgétaire en Europe ? Monsieur le secrétaire d'État, s’agit-il de simples déclarations dominicales de sa part ou bien pense-t-il que la France peut vraiment desserrer la contrainte ? Si elle le fait, à quel prix ? Qui faut-il croire : ceux qui nous disent rechercher 50 milliards d'euros d’économie ou ceux qui laissent entendre que ces 50 milliards d’euros sont destinés à rassurer les comptables de Bruxelles, mais qu’il ne faut certainement pas réaliser un tel effort car cela pénaliserait excessivement la croissance ?
À dire une chose et à ne pas la faire, à dire une chose et son contraire, on prend des risques croissants, qui sont tout simplement, en la matière, des risques pour la crédibilité de notre pays, déjà, hélas, bien critiqué et affaibli, au point que beaucoup le considèrent aujourd'hui comme l’homme malade de l’Europe !