Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voilà aujourd’hui arrivés au terme de l’examen de ce projet de loi d’habilitation relatif à l’accessibilité, fruit d’un long et vaste travail de concertation nationale avec l’ensemble des parties prenantes à ce dossier.
Cette concertation visait à permettre, entre autres objectifs, la construction et la mise en place des agendas d’accessibilité programmée, les « Ad’AP », un outil proposé au Gouvernement dans le cadre de la mission parlementaire qui m’avait été confiée, laquelle a donné lieu au rapport « Réussir 2015 ».
Voilà désormais presque trois ans que l’accessibilité occupe une place prédominante dans mon travail quotidien. C’est une cause dans laquelle on ne peut que s’investir, tant elle est juste et indispensable pour le présent et l’avenir de notre société dans son ensemble. Et nous parlons là d’accessibilité « universelle », car c’est bien la totalité de nos concitoyens qui est concernée.
Je suis très heureuse de constater que la commission mixte paritaire, qui s’est réunie le 17 juin dernier, est parvenue à trouver un accord, lequel n’a d’ailleurs fait l’objet d’aucun vote d’opposition.
Je voudrais à cette occasion saluer l’implication de nos collègues députés, en particulier du rapporteur Christophe Sirugue, qui ont permis d’enrichir ce texte, préalablement consolidé par le Sénat, ce qui fait honneur au travail des parlementaires des deux chambres.
Vous le savez, ce projet de loi, qui s’inscrit dans la continuité de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, avait pour objectif principal d’élaborer un cadre national pour les Ad’AP, seul instrument de politique publique permettant de sortir de l’impasse dans laquelle nous nous trouvons, à quelques mois seulement de l’échéance du 1er janvier 2015, et de poursuivre la dynamique d’accessibilité au-delà de cette date.
Le principe de réalité obligeait à procéder par la voie des ordonnances, ce qui n’est bien sûr jamais satisfaisant pour les parlementaires que nous sommes. Toutefois, à mes collègues qui craignent que le Parlement ne soit privé de débat et réduit à un simple rôle de spectateur, je répondrai que le Sénat, comme l’Assemblée nationale, a imprimé sa marque sur ce texte. Ce dernier, je vous le rappelle, comporte quatre articles.
L’article 1er habilite le Gouvernement à mettre en place l’Ad’AP, ce nouvel outil de programmation pluriannuelle des travaux de mise en accessibilité pour les établissements recevant du public, les ERP.
L’article 2 habilite le Gouvernement à créer un nouveau dispositif pour les services de transport public de voyageurs, le schéma directeur d’accessibilité – agenda d’accessibilité programmée, ou SDA-Ad’AP, dont les modalités sont identiques à celles de l’agenda prévu pour les ERP.
L’article 3 habilite le Gouvernement à prendre diverses mesures préconisées par la concertation, parmi lesquelles figure l’assouplissement, pour les petites communes, de l’obligation d’élaborer un plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics, le PAVE ; l’autorisation plus large des chiens guides d’aveugle et des chiens d’assistance des personnes handicapées dans les transports et les lieux publics ; l’élargissement de la composition et des missions des commissions communales et intercommunales pour l’accessibilité aux personnes handicapées ; la création d’un fonds dédié à l’accompagnement de l’accessibilité universelle.
Enfin, l’article 4 fixe à cinq mois suivant la publication de la loi le délai d’adoption des ordonnances et le délai de dépôt des projets de loi de ratification correspondants.
Conscient de l’immense travail accompli par les membres de la concertation nationale, le Sénat, dans un esprit respectueux et constructif, a tenu à préserver l’équilibre – certes historique, mais fragile – auquel ceux-ci sont parvenus. Aussi les dispositions qu’il a introduites ont-elles eu pour objectif de préciser ou de compléter certains points actés lors de la concertation.
À l’article 1er, il a souhaité renforcer le suivi de l’état d’avancement des travaux de mise en accessibilité, qui, on le sait, a fortement fait défaut lors de l’application de la loi de 2005, en prévoyant une remontée d’informations à destination des six collèges de l’Observatoire interministériel de l’accessibilité et de la conception universelle, l’Obiaçu, ainsi que des représentants du Parlement.
À l’article 3 du projet de loi, le Sénat a tenu à préciser les différents seuils démographiques relatifs à l’obligation d’élaboration du PAVE. Ceux-ci visent à prendre en compte les spécificités des petites communes, pour lesquelles l’élaboration de ce plan peut réclamer des efforts excessifs au regard de leurs moyens.
À ce même article, la Haute Assemblée a mentionné l’une des missions des commissions communales pour l’accessibilité aux personnes handicapées, à savoir dresser et publier par voie électronique une liste des ERP accessibles ou en cours d’accessibilité. Cette disposition apporte une réponse concrète aux difficultés statistiques que nous avons maintes et maintes fois constatées.
Enfin, à l’article 4 du projet de loi, notre assemblée a prévu que le Gouvernement présenterait au Parlement un rapport d’évaluation de la mise en œuvre des ordonnances ; ce document permettra de dresser un bilan de l’application de la loi et de vérifier l’efficacité du dispositif adopté.
Pour sa part, l’Assemblée nationale a souhaité aller plus loin dans la sécurisation du dispositif des Ad’AP. C’est ainsi que, à l’article 1er, elle a rendu ces agendas obligatoires et fixé le délai de leur dépôt à douze mois suivant la publication de l’ordonnance.
L’échec de la loi du 11 février 2005 tenant pour partie à l’absence de rendez-vous d’étape, les députés ont également prévu des formalités de suivi à mi-période pour les Ad’AP dont la durée est au moins égale à trois ans – plus précisément, supérieure à trois ans, selon la rédaction adoptée en séance publique. Cette mesure ne vise que les ERP de grande taille, puisque la plupart des petits établissements recevant du public devraient se voir accorder des agendas d’un ou deux ans, correspondant à des travaux souvent légers.
À cet article, nos collègues députés ont également invité le Gouvernement à clarifier la responsabilité du propriétaire et de l’exploitant d’un ERP dans le dépôt de l’agenda d’accessibilité programmée.
À l’article 2, l’Assemblée nationale a prévu que les Ad’AP spécifiques aux transports seraient déposés au plus tard dans les douze mois suivant la publication des ordonnances.
À l’article 3, elle a souhaité que les établissements publics de coopération intercommunale puissent se substituer aux petites communes pour l’élaboration du PAVE ; en outre, elle a précisé que la nouvelle composition des commissions communales pour l’accessibilité aux personnes handicapées devrait tenir compte de tous les acteurs concernés par la mise en accessibilité.
À ce même article, l’Assemblée nationale, sur l’initiative du Gouvernement, a clarifié la rédaction de la disposition portant sur les chiens guides d’aveugles et les chiens d’assistance. Elle a aussi instauré une obligation de formation ou de sensibilisation à la question du handicap pour les personnels en contact avec le public. Enfin, elle a précisé la gouvernance du fonds destiné à recueillir le produit des sanctions financières liées aux Ad’AP, afin de garantir la représentation des acteurs publics et privés, ainsi que celle des associations.
La commission mixte paritaire a conservé tous les apports du Sénat et de l’Assemblée nationale ; elle a simplement procédé à des ajustements rédactionnels, afin d’améliorer la clarté et l’intelligibilité du projet de loi.
Pour conclure, je tiens, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à insister une nouvelle fois sur l’importance de ce projet de loi d’habilitation. Alors que la première étape, celle du débat parlementaire, est sur le point de s’achever, l’essentiel reste à faire : après la publication de l’ordonnance et des premiers décrets d’application viendra le temps de la communication et de la pédagogie, afin que, dès le mois de septembre prochain, le processus soit en ordre de marche.
Madame la secrétaire d’État, je connais votre engagement et votre volonté d’aller à la rencontre des acteurs pour expliquer, rassurer et informer. En vérité, ce travail est tout à fait essentiel. Chaque acteur, à son niveau, doit y collaborer, afin que notre société s’adapte toujours plus à la réalité et réduise les inégalités. L’accessibilité est l’affaire de tous et de chacun d’entre nous !
Mes chers collègues, je souhaite que nous adoptions, à la majorité la plus large possible, les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi d’habilitation.