Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Monsieur Hyest, j’entends bien que l’individualisation de la peine est un principe constitutionnel, mais celui-ci n’est pas inscrit de façon explicite dans le code pénal, même si c’est ce que sous-tend l’article 132-24 du code pénal. J’irai même plus loin : en défendant la motion tendant à opposer la question préalable, M. Bas nous expliquait que les peines planchers ne sont pas des peines automatiques puisque les juridictions peuvent y déroger. Certes, mais que dit la loi ? Elle dit qu’il peut être dérogé à l’incarcération si celles-ci peuvent apporter des garanties exceptionnelles.
Voilà pour le principe, qui est essentiel, car il éclaire, il guide, il fixe le cadre. Reste que nous ne pouvons nous en contenter, car il s’agit de traiter de situations individuelles. Prenons l’exemple d’un sans domicile fixe qui aurait commis plusieurs infractions sans grande gravité au regard du code pénal, sans nécessairement qu’il y ait une victime – la plupart du temps, d’ailleurs, il n’y en a pas –, et qui encourrait une peine plancher : quelles garanties exceptionnelles le magistrat peut-il présenter devant la juridiction pour déroger à la peine minimale ? Aucune ! Précisément parce que cette personne est en rupture sociale.
La contrainte pénale vise à faire en sorte que l’accompagnement et l’ajustement des mesures contribuent à la réinsertion. Nous, nous voulons que le principe de l’individualisation de la peine soit énoncé explicitement dans le code pénal, ce que vous refusez. Vous ne pouvez pas vous contenter de dire que les peines planchers, par exemple, n’étaient pas automatiques : elles étaient incontestablement une entrave à l’individualisation de la peine. Dans les situations où les personnes avaient le plus besoin d’être suivies pour réussir leur réinsertion, les magistrats ne pouvant présenter des garanties exceptionnelles, ils se trouvaient contraints de prononcer cette peine automatique. C’est bien ce qui explique que, pour ces petits délits, les cas dans lesquels des peines minimales ont été prononcées sont passés de 14 % à 44 %.