Je souhaite intervenir malgré le retrait de cet amendement, parce qu’il s’agit d’un sujet extrêmement important.
Compte tenu des observations que vous avez formulées, monsieur Hyest, je me dois de vous apporter quelques éléments d’information, qui vous permettront peut-être d’évoluer dans votre appréciation.
Cet article s’appuie effectivement sur la directive européenne relative aux droits des victimes, mais nous n’avons pas attendu la publication de ce texte pour réfléchir à ce sujet. Nous saisissons l’occasion offerte par l’examen de ce texte pour inscrire dans la loi une pratique existant déjà dans notre pays et qui a fait l’objet d’une première expérience menée de façon extrêmement rigoureuse.
Le tiers indépendant que vous avez évoqué, monsieur le sénateur, intervient sous l’autorité de l’administration pénitentiaire ; il s’agit, en l’occurrence, de l’Institut national d’aide aux victimes et de médiation, ou INAVEM, c’est-à-dire du réseau des cent quarante-trois associations d’aide aux victimes que certains d’entre vous connaissent bien, mesdames, messieurs les sénateurs. Ce réseau est solide, professionnel, responsable, rigoureux, tout à fait fiable. Une deuxième expérience de rencontres a commencé au début de cette année.
Vous avez eu raison de préciser qu’il existait deux types de rencontres, monsieur Hyest. La rencontre indirecte est la modalité la plus fréquente : elle associe des victimes et des auteurs de faits semblables, mais pas du même acte. La rencontre directe, beaucoup plus exceptionnelle, réunit l’auteur de l’acte et la victime qui a subi le préjudice résultant de cet acte. Indirecte ou directe, la rencontre est organisée sur la base d’un volontariat strict. La victime et l’auteur sont informés de la manière la plus précise possible, et c’est librement qu’ils choisissent de participer à la rencontre, qui n’est pas une rencontre de fantaisie.
Vous avez fait une observation sémantique, à laquelle je veux réagir, monsieur le sénateur. En effet, plusieurs qualificatifs pouvaient être retenus pour cette forme de justice : réparatrice, restauratrice ou restaurative.
J’avoue que je me suis laissé convaincre, avant tout par défaut, que l’expression « justice restaurative » était la meilleure. Les associations d’aide aux victimes le pensent également, parce que la meilleure démarche consiste à faire en sorte que la victime – en plus de tout le reste – puisse se présenter face à un auteur qui admet le tort qu’il a pu causer et reconnaît la victime en tant que telle : il ne s’agit pas d’une abstraction, mais d’une personne qui a subi un préjudice, enduré une souffrance et dont la vie a été perturbée du fait de l’acte de l’auteur. Souvent, l’auteur lui-même entame à cette occasion un processus de responsabilisation.
Je le répète, tout se fait sur la base du volontariat, et j’ajouterai « à titre gracieux », parce qu’il n’y a pas de rétribution – ni réduction de peine, ni cadeau, ni valorisation –, si ce n’est un effet bénéfique pour les personnes qui participent à la rencontre.