Nous arrivons à une étape importante de la discussion. Je n’ai jamais autant regretté la procédure accélérée, même si cela ne m’avait pas trop choqué dans un premier temps, car la même procédure avait été utilisée pour la loi pénitentiaire et nous étions finalement parvenus à débattre de manière approfondie. Toutefois, la contrainte pénale apporte un élément beaucoup plus novateur.
À cet égard, je comprends que M. le rapporteur et nombre de nos collègues soient convaincus que, si l’on n’arrive pas à autonomiser cette contrainte pénale, elle risque de ne pas jouer du tout le rôle que nous sommes un certain nombre à souhaiter lui assigner. Nous nous trouvons donc, en quelque sorte, entre le marteau et l’enclume.
J’ajouterai que, étant rapporteur pour avis du budget de l’administration pénitentiaire, je visite assez souvent les établissements pénitentiaires et je crois que l’idée que l’on se fait aujourd’hui de la prison comme peine ultime est fausse.
Aujourd’hui, deux catégories de personnes « fréquentent », si je puis dire, les établissements pénitentiaires. Pour celles qui appartiennent à la première, et que je qualifierai de « classiques », c’est effectivement la pire des peines : ce sont des individus que la prison peut totalement briser. Pour celles qui relèvent de la seconde, qui sont des délinquants souvent plus jeunes, davantage issus de banlieues, parfois en rupture scolaire ou éprouvant des difficultés à se considérer comme intégrés dans notre République, la prison est un épisode d’une sorte de cursus honorum de la délinquance, presque un maréchalat, dont ils pourront ensuite se vanter.
Pour ces individus-là, qui créent dans la société un sentiment d’insécurité, et même une véritable insécurité, la contrainte pénale, les obligations, les interdictions, le suivi personnalisé – dans la mesure où il pourra réellement être assuré, car se pose effectivement le problème des moyens, ainsi que cela a été souligné à maintes reprises –, représenteraient une incommodité finalement beaucoup plus lourde que l’emprisonnement traditionnel.
C’est la raison pour laquelle, en la matière, mon opinion diverge quelque peu de celle des collègues de mon groupe.