Intervention de Louis Schweitzer

Commission des affaires économiques — Réunion du 1er juillet 2014 : 1ère réunion
Audition de M. Louis Schweitzer commissaire général à l'investissement

Louis Schweitzer, commissaire général à l'investissement :

Nous versons parfois de grosses sommes pour d'importants projets, mais nous remplissons également une fonction de guichet, en accordant des subventions à de petits projets, de quelques dizaines de milliers d'euros, dans le cadre du PIA.

Louis Gallois est favorable à l'expérimentation et à la recherche sur le gaz de schiste. À titre personnel, je partage son point de vue, mais cela n'entre pas dans les attributions du CGI. Avec le CEA, nous intervenons en revanche dans le nucléaire. Non pas directement pour le domaine militaire, mais nous participons au financement des investissements d'avenir, comme la construction du réacteur à neutrons rapides Jules Horowitz. Les grands projets de nouveaux réacteurs d'EDF, davantage de nature industrielle, ne nous concernent pas.

Dans le cadre du grand emprunt, le CGI avait une stratégie sectorielle. Je ne vois pas de raisons de remettre en cause les orientations du rapport Juppé / Rocard. Des domaines qui sont toujours prioritaires ont été définis, qui couvrent une large part des activités industrielles et de services de notre pays, davantage dans certains secteurs que dans d'autres. Je ne vois aucune raison valable de revenir sur la stratégie déterminée en 2010. Au reste, pour porter ses fruits, une stratégie industrielle ne devrait pas être redéfinie tous les trois ou quatre ans : c'est la meilleure façon de faire des bêtises. Les 34 plans industriels de M. Arnaud Montebourg ne sont pas comparables aux plans stratégiques de l'ère pompidolienne, qui dirigeaient les investissements de l'État, sans limite, vers un secteur donné. Le cadre juridique européen ne le permettrait pas. Sauf, peut-être, en matière de numérique, nous avons abandonné ce mode de fonctionnement.

Le numérique est un enjeu majeur des PIA. Nous n'intervenons pas dans les négociations internationales, mais considérons à bon droit la maîtrise de ce secteur comme nécessaire à notre indépendance nationale. La création d'un cloud souverain est fondamentale pour la conservation et la protection des données personnelles des utilisateurs.

Quelle est l'articulation des contrats de filières et du Conseil national de l'industrie avec le CGI ? Je suis en coopération constante avec Jean-François Dehecq et le conseil national de l'industrie. Nous discutons régulièrement des 34 plans et nous sommes souvent sur la même ligne : nos domaines de compétences sont différents, mais nos visions de l'avenir industriel de la France se ressemblent.

Le CGI a développé des projets labellisés « filières » : 580 millions d'euros y sont consacrés, dont 540 millions d'euros sont déjà engagés. Je suis convaincu depuis longtemps que l'Allemagne et l'Italie ont pour avantage, par rapport à nous, leur conception des filières et de la solidarité inter-entreprises. Nous sommes le seul pays au monde où les petites entreprises font crédit aux grandes, et non l'inverse ! J'avoue toutefois que lorsque je dirigeais une grande entreprise, remettre en cause cela n'allait pas de soi, mais c'est une aberration.

Nous faisons en sorte que les actions que nous mettons en oeuvre n'engagent pas seulement le donneur d'ordre principal, mais aussi l'ensemble de la filière. De même que nous cherchons à rassembler les universités vers l'excellence, nous nous efforçons de rassembler une filière autour d'une dynamique d'avenir. La visibilité sectorielle de la politique industrielle est assurée par les 34 plans. La création de la BPI a rendu plus visible la capacité d'intervention en matière de crédits en faveur des PME. Elle offre aussi à ces entreprises l'accès à une expertise financière et économique.

Un programme de 100 millions d'euros est consacré à l'économie sociale et solidaire : 65 millions d'euros sont déjà engagés, et 90 millions d'euros le seront d'ici la fin de l'année. Dans ce domaine, la difficulté n'est pas de faire le tri entre les projets mais d'en trouver qui aient à la fois une viabilité économique et un intérêt social. Nous nous y efforçons.

Dans certains domaines, les projets abondent. Ainsi, le concours mondial d'innovation, que j'appelle le « concours Lauvergeon », et qui invite des start-up, dans sept domaines, à soumettre des projets, a sélectionné, en deux premières vagues de candidatures, cent projets. Trois mois ne sont pas écoulés entre le dépôt des projets et le versement des subventions de cent mille euros aux lauréats. Ceux-ci pourront bénéficier dans un deuxième temps d'une aide publique de deux millions d'euros et, dans un troisième temps, de vingt millions d'euros - mais pas sous forme de subventions. Ainsi, nous accompagnons le développement de ces nouvelles entreprises, pour qu'il ne soit pas dit qu'elles ne peuvent trouver de financement qu'à l'étranger. Les lauréats avec qui j'ai discuté considéraient que la procédure avait été légère, efficace, et qu'elle n'avait pas d'équivalent ailleurs. Les candidats ont été beaucoup plus nombreux dans certains domaines - médecine individualisée, numérique - que dans d'autres, comme l'économie circulaire. La plupart des candidatures étaient françaises. C'est un bon exemple de méthode nouvelle, pour attirer des projets.

Marie-Noëlle Lienemann, vous avez relevé dans mon introduction un propos sibyllin. Lorsque l'État est pauvre, toute poche d'argent public crée des tentations. Ainsi, certaines dépenses qui sont dans le PIA pourraient figurer dans le budget de certains ministères. Les avances à Airbus, qui autrefois figuraient au budget du ministère des transports, font à présent partie du PIA. La part des programmes du PIA qui concernaient le CEA a été augmentée de 250 millions d'euros en loi de finances rectificative. Ces arbitrages ne sont pas liés à la présence de M. Arnaud Montebourg à Bercy...

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