L'état actuel de l'assurance maladie aurait dû justifier que sa gouvernance, son financement et ses déficits soient au coeur du débat. Malgré les lois de 2003 et 2004, malgré vos annonces incessantes, malgré l'alarmisme de la Cour des comptes et du comité d'alerte, votre PLFSS n'apporte pas de solution permettant de régler le problème récurrent des déficits des différentes branches.
Ce projet de loi insipide ne contient aucune proposition tendant à retrouver les équilibres de 2000. Vous ne proposez aucune mesure structurelle susceptible de régler les problèmes du FSV et du FFIPSA.
Mais alors, que cache ce projet ? On est loin des promesses de la réforme Douste-Blazy de 2004, qui prévoyait un retour à l'équilibre de l'assurance maladie en 2007 !
Le système de réduction des dépenses retenu jusqu'à présent, les déremboursements et les franchises, a montré ses limites et pourtant vous poursuivez sur la même voie.
Comme il est précisé dans le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, la tendance n'est pas à l'amélioration. Ce rapport prévoit une nouvelle aggravation du déficit de l'ordre de 1 milliard d'euros en 2008, avant prise en compte des mesures nouvelles contenues dans le PLFSS.
Dès lors, ce projet de loi de financement vise à réduire le déficit tendanciel de la sécurité sociale de près de 4 milliards d'euros et à le ramener à 8, 9 milliards d'euros d'ici à la fin de 2008.
S'il est vrai que le financement est assuré par les prélèvements sociaux, les multiples dispositifs que vous proposez amoindrissent le produit de ces prélèvements.
La Cour des comptes, dans son rapport de septembre 2007, a démontré que l'élargissement de l'assiette des prélèvements sociaux participerait au retour à l'équilibre du régime général.
Les propositions faites par la Cour des comptes comprennent les exonérations relatives aux mesures pour l'emploi, les dispositifs d'association aux résultats de l'entreprise, les exonérations bénéficiant aux opérations de retraite et de prévoyance, les salaires affectés, les indemnités de départ involontaire, les avantages octroyés à certaines professions, les revenus du patrimoine, les cotisations des employeurs publics.
L'ensemble des pertes de recettes représente un montant évalué par la Cour des comptes à plus de 30 milliards d'euros.
De ce rapport vous avez retenu essentiellement les mesures relatives à la fin des exonérations AT-MP pour les petites entreprises, et notamment celles situées en zone de redynamisation urbaine et en zone de revitalisation rurale, pour les bénéficiaires de l'aide aux chômeurs créateurs et repreneurs d'entreprise ou pour les groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification, les GEIC.
Ces mesures pèsent sur le secteur de l'économie sociale ou sur l'embauche d'un public éloigné de l'emploi.
Vous êtes-vous demandé quelles seront les conséquences de la disparition de ces dispositifs sur les territoires où l'offre d'emploi a besoin d'être stimulée ?
En revanche, pour les grandes entreprises, vous renforcez les exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires sans contrepartie, entraînant ainsi une paupérisation des salariés maintenus au SMIC, auquel vous n'avez pas voulu donner de coup de pouce en juillet dernier.
Les autres recettes que vous avez retenues -prélèvements sur les indemnités de mise à la retraite, maintien de la taxe de 1 % sur le chiffre d'affaires des laboratoires pharmaceutiques, prélèvement à la source des contributions sociales sur les dividendes et enfin augmentation exceptionnelle de la taxe sur les grossistes répartiteurs - ne sont pas à la hauteur des enjeux actuels.
Par ailleurs, l'ensemble des dispositifs de participation, d'intéressement et de stock-options représente, comme le souligne la Cour des comptes, une perte substantielle pour le régime général, de l'ordre de 6 milliards à 8, 3 milliards d'euros, alors que leur distribution aux salariés est inégalitaire et engendre des distorsions souvent liées à la taille des entreprises. La Cour des comptes propose donc « de réexaminer ou de plafonner les exonérations de cotisations sociales appliquées à la plus-value d'acquisition des stock-options ».
L'Assemblée nationale s'est contentée d'une taxation symbolique ; nous sommes loin des propositions de la Cour des comptes !
Il est difficile, dans ces conditions, de percevoir la logique de vos choix.
À défaut de vous engager dans le plan d'équilibre prôné par la Cour des comptes, vous préférez instaurer injustement une franchise sur les médicaments, les transports sanitaires et les actes paramédicaux.
Ces franchises médicales marquent une rupture importante par rapport à un principe fort qui fonde l'assurance maladie : la solidarité entre malades et bien portants.
Vous nous proposez ici de pénaliser les malades au mépris du principe même de la socialisation de la santé.
Le plus grave, c'est qu'en limitant l'accès aux soins primaires, notamment chez les généralistes, vous allez augmenter une nouvelle fois les inégalités d'accès aux soins. Aujourd'hui les dépenses de médecine de ville des cadres sont supérieures de 16 % à celles des ouvriers. Ce moindre accès à la médecine ambulatoire entraîne de fait un recours plus important à la médecine hospitalière. Les dépenses des ouvriers dans ce domaine sont déjà supérieures de 13 % à celles des cadres.
Aussi, cette politique de franchise va-t-elle entraîner le développement de pathologies plus graves, prises en charge plus tardivement et occasionnant, de fait, des dépenses plus lourdes.
De plus, la complexité de l'instauration de ce nouveau reste à charge, qui vient s'ajouter aux autres forfaits et tickets modérateurs, pose question. Pourquoi créer une nouvelle mesure au rendement limité, alors même qu'une réflexion d'ensemble est prévue à la suite du rapport rédigé par MM. Raoul Briet et Bertrand Fragonard ? D'autant que cette solution purement financière et artificielle va peser sur les assurés et ne modifiera pas les causes profondes des déficits.
Enfin, parmi les nombreux sujets concernés par le PLFSS pour 2008, il en est un qui demeure plus épineux que tous les autres : le système des retraites.
Faute de mesures nouvelles, le déficit de la branche vieillesse de la sécurité sociale devrait atteindre 8 milliards à 10 milliards d'euros en 2010. Or le contenu du projet de loi de financement pour 2008 ne permet pas une lisibilité des mesures prévisionnelles que vous comptez adopter pour limiter ce déficit.